lundi 3 octobre 2011

La démocratie respectueuse.

Ce dimanche, à une semaine du premier tour des primaires citoyennes, Martine Aubry et Ségolène Royal s'en sont prises à François Hollande : l'une pour lui reprocher son manque d'expérience, l'autre de cumuler les mandats. Cette péripétie montre les limites et les risques de ces primaires, en même temps qu'elle pose une question plus générale : comment débattre entre camarades sans se diviser, sans donner du grain à moudre à la droite ?

La réponse est plus compliquée qu'il n'y paraît, puisque un débat comporte toujours une part d'affrontement : il est difficile de se distinguer d'un concurrent sans l'évoquer, sans le critiquer. Cette question m'intéresse d'autant plus que j'y suis personnellement confronté : opposé à la ligne politique de ma section, refusant les alliances avec l'extrême gauche que défendent à Saint-Quentin Anne Ferreira et Jean-Pierre Lançon, comment exprimer mon désaccord de citoyen et de socialiste tout en veillant à ce que mon parti n'en pâtisse pas ? En ce jour de rentrée du conseil municipal, je crois qu'il est important d'y revenir et de m'expliquer.

D'abord, en bon républicain, je soutiens que l'expression publique d'un désaccord qui n'est pas mineur mais fondamental est tout à fait légitime. Mieux vaut ça que cacher, refouler ou ignorer nos conflits, d'autant que ces précautions sont illusoires. Mais cette expression doit se faire sous trois conditions, qui sont celles, selon moi, d'une démocratie respectueuse :

1- Le refus absolu de toute critique des personnes. Je m'interdis absolument de faire des remarques sur le caractère ou les capacités de mes camarades, j'en reste à leurs idées et aux miennes. Si j'ai arrêté de publier les commentaires qui venaient sur ce blog, c'est que la grande majorité ne portait pas sur mes convictions mais sur ma personne, mon tempérament, etc.

2- Le devoir de proposer, ne pas faire que s'opposer. Si je critique les alliances à l'extrême gauche et la ligne radicale qui en découle, ce n'est pas pour en rester là ni me focaliser dessus : je propose une alternative, l'alliance avec nos partenaires traditionnels, l'ouverture au centre et à la société civile, une ligne politique de gauche modérée, qui me semble électoralement plus payante et politiquement plus conforme à nos traditions.

3- Défendre une ligne politique, ne pas rechercher une place. La politique doit être pratiquée avec désintérêt, en n'espérant pas un profit individuel quelconque. Les idées doivent être portées parce qu'on y croit, et pas dans un but tactique ou d'instrumentalisation. La sincérité et l'honnêteté ne préjugent pas bien sûr de la vérité des positions soutenues, mais elles sont indispensables à la clarté du débat.

Sous ces trois conditions, que je m'efforce d'appliquer scrupuleusement, le débat public est rendu possible entre socialistes, comme en ce moment dans le cadre des primaires citoyennes, nonobstant les quelques petits dérapages de ce week-end. A Saint-Quentin aussi, ce débat peut avoir lieu, entre les socialistes, tenants d'une ligne plus à gauche, et ceux, dont je suis, qui souhaitent une ligne plus modérée, plus ouverte au centre.

Je ne suis pas naïf : les intérêts individuels ne sont pas absents du combat politique, la lutte pour le pouvoir, même à un petit niveau, s'autorise bien des coups bas, les conflits de personnes prévalent hélas trop souvent sur la confrontation des idées. Mais à défaut d'une démocratie vertueuse, il est permis de souhaiter une démocratie respectueuse.

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