samedi 30 novembre 2013

Qui fait le jeu de qui ?



A la lecture de L'Aisne Nouvelle d'aujourd'hui, je suis consterné. La gauche locale a-t-elle vraiment envie de gagner les prochaines élections municipales ? On ne dirait vraiment pas ... Les socialistes accusent le PCF de faire "le jeu de la droite", en réaction à un tract sur la réforme des rythmes scolaires, dans lequel les communistes accusent le PS de faire le "jeu de la droite" ! Au petit jeu du "c'est pas moi c'est l'autre", tous les deux seront les perdants. Avec un FN en embuscade et une UMP très bien implantée, c'est affolant d'inconscience. On a le sentiment que la défaite est déjà programmée et que les uns et les autres s'en renvoient par anticipation la responsabilité, prenant dès maintenant date. C'est évidemment du plus mauvais effet auprès de l'opinion.

Jacques Héry, n°3 sur la liste socialiste, va très loin, sort du débat strictement politique pour énoncer de sombres accusations de "collusion" et d'"accords tacites" entre le PCF local et la droite, qui remonteraient aux années 80 (sic), étayant son propos par de soi-disant preuves matérielles. Autant vous dire que je me désolidarise complètement de ces allusions qui nous conduisent au casse-pipe : après ça, comment rassembler au second tour, comment réunir socialistes et communistes ? Ca me semble bien difficile ... Mais qui croit qu'il y aura un deuxième tour ? Dans mon billet d'avant-hier, je dénonçais les "débordements préjudiciables" qui pourraient naître de la concurrence locale entre PS et PCF. Je ne croyais pas si bien dire, hélas : après les déclarations de Jacques Héry, ce n'est plus un débordement, c'est l'inondation et la noyade.

Peut-on échapper à la défaite programmée ? Je pense que oui. En politique, rien n'est perdu d'avance, pourvu que la raison l'emporte et que la volonté fasse le reste. J'aimerais rappeler quelques principes, une sorte de halte au feu pour ramener le calme :

1- Il est regrettable que le PS et le PCF partent séparément à cette élection. Je l'ai déploré dès le début, j'aurais aimé que mon parti fasse montre d'une ambition plus unitaire. Quand on est au gouvernement, on a un devoir de rassemblement, même face à des partenaires pas faciles (mais ils ne l'ont jamais été, et c'est peut-être tout à leur honneur). Toujours est-il que la division est là et qu'il faut faire avec. Mais la responsabilité, comme je l'ai écrit dans mon billet de jeudi, est collective. On ne saurait l'imputer aux uns ou aux autres.

2- Par rapport aux communistes, nous devons être dans un débat fraternel, une confrontation d'idées, comme j'ai essayé de le faire en répondant point par point à leur critique de la réforme des rythmes scolaires. Mais les accusations personnelles, les insinuations gratuites, l'injuste procès fait aux communistes saint-quentinois, non, JAMAIS ! Sur ce blog, à plusieurs reprises et depuis longtemps, j'ai dit le respect et l'estime que j'avais pour eux, qui sont de ma famille, tout social-démocrate que je suis. Avec eux, je partage d'identiques valeurs, même si nos lignes politiques sont très différentes, et sur certains points radicalement opposées.

3- Entre socialistes et communistes, dans les prochains mois de campagne, il faut une sorte de gentlemen agreement, une concurrence loyale, un respect mutuel. Sinon, ce sera la catastrophe électorale. Il faut se rencontrer, établir les points de convergence, et pour le reste, laisser les électeurs se prononcer lors du scrutin. Et puis, par dessus tout, il faut très vite en venir aux idées, aux propositions, aux projets, tourner la page des polémiques et des divisions. Quant à mes camarades socialistes, il faut qu'il maîtrise leur politique de communication (un des points que j'avais fortement souligné lors de la campagne de désignation de la tête de liste) : parce que là, ça part dans tous les sens.

vendredi 29 novembre 2013

Triple zéro



Où en est la campagne des municipales à Saint-Quentin ? La semaine dernière, les premiers socialistes sur la liste se sont faits connaître. La semaine prochaine, le 8 précisément, la liste communiste sera dévoilée. Côté FN, les militants continuent à labourer le terrain. La rumeur dit que leur liste ne serait pas complète, eux disent qu'elle est bouclée : comme je ne crois aucun des deux, je préfère attendre.

L'événement de cette semaine, c'est la nouvelle vague de tracts signés Michel Garand, tête de liste socialiste, distribués dans nos boîtes à lettres (en vignette, le verso). Je devrais plutôt dire : la nouvelle salve ou la nouvelle frappe, tant la charge est rude, sans nuance, dans la continuité du premier message, qui s'en prenait à la domiciliation parisienne de Xavier Bertrand. Là, c'est son bilan qui lui vaut les foudres du candidat socialiste : à la façon d'une agence de notation ou d'un enseignant, c'est un triple zéro que reçoit le maire de Saint-Quentin, en matière d'investissements économiques, de création d'emplois et de formation avec la Région.

Ce choix tactique de Michel, que seul le résultat des élections validera ou pas, est à la fois hard et pro. Paradoxalement, il va plus loin que l'extrême gauche, dans la virulence contre la droite locale ! Mais ce n'est qu'une question de forme, puisque le profil de Michel Garand est celui d'un socialiste modéré, d'un social-démocrate bon teint (je pense qu'on le verra quand son projet sera présenté). Je ne discute pas de ce choix tactique, qui incontestablement imprime le début de sa campagne. Le mien aurait été différent (c'est pourquoi nous étions deux candidats à l'investiture !) : je crois que moins on parle Xavier Bertrand, mieux cela vaut pour la gauche. Ce qu'il faut, c'est partir du candidat, lui donner l'étoffe d'un futur maire, et surtout se battre sur la ligne de crête de nos projets. Mais je n'ai pas convaincu, pour le moment, mes camarades de la justesse de cette analyse, que je défends de longue date. Ce n'est ni eux ni moi qui en jugeront, mais les électeurs en mars. Ceci dit, cette différence entre Michel et moi n'est pas de fond (contrairement à ce qui s'était passé en 2008), mais de ton.

Hard, mais aussi pro : c'est la première fois depuis quinze ans que je vois un tract distribué professionnellement, et non par voie militante, dans les boîtes aux lettres. C'est une bonne idée. De même, la composition du document est très bien fichue : ça nous change des tracts de guingois, faits maison, donc mal faits, travail d'amateurs. Même Odette Grzegrzulka n'était pas allée jusque là durant sa campagne de 2001, préférant investir dans d'immenses affiches (sans résultats flagrants). Une attente cependant : la présence sur l'internet (voir l'article de L'Aisne Nouvelle de début de semaine), la section socialiste de Saint-Quentin et Anne Ferreira ayant sabordé leurs blogs respectifs. La page Facebook, c'est sympa mais ça ne suffit pas.

Du côté de la droite, c'est le calme plat, l'eau qui dort : aucune réaction aux tirs d'artillerie de Michel Garand. Ce n'est pas dans les habitudes de Xavier Bertrand, qui généralement est très réactif, ne laisse rien passer, étouffe le feu avant qu'il ne couve. C'est peut-être le silence qui précède les gros orages ? Pour le moment, le maire de Saint-Quentin se contente de taper sur son putching-ball préféré (voir billet de mardi, Lançon bashing).

Nous allons entrer dans quelques jours dans une période électoralement délicate, que j'ai bien connue en son temps : décembre, c'est la préparation des fêtes, les gens n'ont pas la tête à la politique ; janvier, c'est la longue suite des cérémonies des voeux, au climat consensuel. Il ne restera plus que février et mars de campagne, active et officielle. Tout va donc très vite passer, être plié, rangé dans l'armoire des souvenirs. Pourtant, pas un jour, pas une heure de campagne ne doivent être perdus. Il faut que la gauche, jusqu'au bout, y croit.

jeudi 28 novembre 2013

Réponses au PCF



La section de Saint-Quentin du parti communiste français vient d'éditer un tract, recto-verso (en vignettes 1 et 2), pour dénoncer la réforme des rythmes scolaires, critiquer le gouvernement de gauche, le parti socialiste et le ministre de l'Education nationale. C'est son droit, la démocratie est ainsi faite. Mais c'est mon devoir de socialiste de répondre à ces accusations virulentes, qui reposent sur quatre arguments principaux :

1- La fatigue (vignette 1, au début). La réforme en cours fatiguerait les enfants et les enseignants. L'argument est subjectif (on mesure comment le degré de fatigue ?). Il est fallacieux : tout travail fatigue, des élèves et des enseignants qui reviendraient de leur école frais comme des gardons et gais comme des pinsons, c'est qu'ils n'auraient pas travaillé, c'est que l'école ne serait plus l'école ! Enfin, l'argument est faux : ce qui fatigue tout le monde, c'est de concentrer le travail sur quatre jours, au lieu de l'étaler sur la semaine.

2- Les activités périscolaires (vignette 1, en bas). Préparées dans la "précipitation" ? Non, une année a été donnée pour les organiser. Beaucoup de communes y sont parvenues sans même attendre ce délai. Des activités "inégales" ? Non, des activités qui sont forcément différentes d'une école à l'autre, d'une ville à l'autre ; et c'est très bien comme ça. Des "attentes" insatisfaites ? Ca prouve au moins qu'il y a des attentes, donc un besoin des enfants, des parents et des enseignants. Et elles sont "satisfaites" là où il y a une volonté politique et pédagogique de les satisfaire. Un "manque de moyens" ? Prétexte trop facile. Des moyens financiers ont été accordés dès la première année. Et c'est aussi un choix politique et budgétaire des municipalités : investir ou non dans l'avenir de nos enfants ? Une "confusion dangereuse" (sic) entre l'enseignement et les activités périscolaires ? Je ne vois pas où est le danger, où se trouve la confusion : ces activités ont leur créneau horaire, elles sont parfaitement distinctes par leur contenu des heures d'enseignement stricto sensu.

3- La candidature de Vincent Peillon aux élections européennes (vignette 2, en haut). Ce serait la preuve que le ministre va finalement lâcher la réforme devant le mouvement de protestation. Non, c'est simplement la preuve que nous sommes en République, qu'un ministre a le droit de se présenter devant les électeurs, que c'est même courageux de sa part étant donnée la situation politique actuelle (son intérêt personnel lui dictant au contraire de rester au chaud dans son ministère). Surtout, Peillon ou un autre, ce n'est pas une histoire d'hommes : avec ou sans lui, la réforme des rythmes scolaires se poursuivra. L'argument est donc infondé : c'est un mauvais désir qui se prend pour une réalité.

4- Le gouvernement fait "la politique de la droite", et donc "le jeu de la droite" (vignette 2, au milieu). Oh je le connais bien, cet argument-là, qui est plutôt une chansonnette pour discréditer, accuser de trahison, soupçonner d'infidélité. La chanson vient historiquement de loin, et nos camarades communistes de Saint-Quentin la reprennent en coeur. Moi, je ne chante pas, j'argumente et j'attends qu'on me réponde. Et c'est très simple : qui a fait passer la semaine scolaire à quatre jours ? La droite. Qui n'a cessé de critiquer, avec les meilleurs spécialistes, cette décision ? La gauche. Alors, qu'on ne raconte pas d'histoires : on a le droit d'être contre cette réforme, on n'a pas le droit de dire que c'est une réforme de droite, parce que c'est un pur mensonge. Et si j'étais moi aussi un petit chanteur à la faucille et au marteau, je pourrais poser à mon tour la question : qui fait le jeu de Xavier Bertrand dans cette affaire ?

Dans ces élections municipales, à Saint-Quentin, la gauche part divisée, je le déplore, je trouve même ça dramatique, le contexte local étant ce qu'il est. Mais les choses sont ainsi, et la responsabilité de la division est collective. Chaque parti exposera ses vues, parfaitement légitimes, et les électeurs trancheront. Mais je n'aimerais pas que la concurrence électorale débouche sur des débordements préjudiciables, et que le Garand devienne une nouvelle espèce de mouton qui se fait tondre la laine sur le dos.

mercredi 27 novembre 2013

Les femmes ont des idées



Le Centre d'information sur les droits des femmes et des familles, l'association Rencontre Citoy'Aisne et le Centre social Saint-Martin se sont retrouvés lundi soir, dans le cadre de la Journée internationale contre les violences conjugales, et plus généralement contre toutes les violences faites aux femmes. En présence de Sylvie Racle, avocate au barreau de Saint-Quentin, vice-présidente du CIDFF, et de Frédérique Delalande, directrice du Centre social, nous avons fait le tour des différents problèmes que rencontrent les femmes dans notre société.

En cette période de pré-campagne municipale, où l'on se demande parfois quels sont les projets des candidats, nous avons voulu nous montrer résolument positifs, en faisant des propositions. Par exemple, augmenter le nombre de places d'hébergement au CCAS, prévoir dans chaque Centre social une personne formée dans l'accueil des femmes en détresse, mettre en place des activités, ateliers, événements spécifiquement dédiés aux femmes (à l'image de ce qu'a fait le CIDFF à travers l'opération "Du temps pour moi, du temps pour quoi ?"). Car l'un des problèmes majeurs que rencontrent les femmes, c'est celui de leur disponibilité. Et enfin, parmi les idées soulevées, pourquoi pas un poste de maire-adjoint(e) chargé(e) des droits des femmes, comme il en existe dans certaines municipalités ? Il y a bien des élus chargés de la petite enfance ou des personnes âgées ...

Nous avons salué le progrès apporté par la loi de 2010 qui sanctionne les violences psychologiques, encore plus pernicieuses que les violences physiques. Cependant, si la répression est inéluctable, s'il faut passer par la loi pour faire évoluer les mentalités, l'éducation est également indispensable. Les questions économiques et sociales ont évidemment été abordées, dont le problème de l'emploi, de la formation et de la garde d'enfant. Toutes les violences sont terribles, et identiquement condamnables, mais celle que je trouve la plus terrible, et peut-être moins signalée que d'autres, c'est la violence, au sein de la famille, des enfants sur les parents, le plus souvent quand le parent est seul. Que celui qu'on a mis au monde se retourne contre son géniteur et lui fasse subir violence, il y a là un renversement particulièrement odieux.

La rencontre s'est terminée par quelques échanges passionnés sur la parité électorale, que je défends complètement. Mais l'inquiétude est que les femmes soient parfois sollicitées seulement pour l'image qu'elles donnent sur une liste, au détriment de leur volonté et de leur compétence. Cette réserve mise à part, la loi sur la parité a été reconnue comme étant un grand pas en avant, et pour moi une vraie révolution. Mais il reste encore beaucoup à faire ...

mardi 26 novembre 2013

Lançon bashing



Je suis arrivé hier en séance de Conseil municipal avec trois quarts d'heure de retard, à cause d'une rencontre-débat que j'animais au Centre social Saint-Martin sur les violences conjugales (voir billet de demain). Je n'ai donc pas pu suivre la présentation des orientations budgétaires, qui était le point principal et important à l'ordre du jour, ni les réponses de l'opposition. Quand je me suis installé, c'est Xavier Bertrand qui avait la parole, offensif comme à son habitude, tapant sur sa tête de Turc, le chef de file de l'opposition, avec des arguments mille fois entendus, mais qui me surprennent toujours par leur violence (lui, dirait sûrement : leur vérité). Jean-Pierre Lançon est qualifié de "pas honnête intellectuellement", accusé de dépenses indues lorsqu'il était élu au District (les "frais de bouche" sont visés). Le maire fait allusion à sa place sur la liste socialiste, en affirmant qu'"on ne veut plus de cette gauche-là" ; il lui reproche même de "ne pas aimer le vélo" (allusion à son absence lors de l'inauguration de la piste cyclable, quai Gayant, dimanche dernier). Enfin, le pompon, par cette formule cinglante : "Ce n'est pas parce qu'on a été enseignant qu'on a des leçons à donner sur l'école".

Je sais que la politique est une activité difficile, violente et parfois cruelle. C'est le jeu : quiconque y entre ne peut s'en plaindre. Malgré tout, je me pose la question : comment un individu normal peut-il accepter de subir de telles attaques publiques, qui visent sa personne, qui sont porteuses de jugement moral, et pas seulement de divergence politique ? Si on m'offensait de la sorte, je sauterais à la gorge du vindicatif. L'opposition a-t-elle jamais dit que le maire n'était "pas honnête intellectuellement" ? Jean-Pierre Lançon encaisse, sachant que le maître du jeu est celui qui détient le micro et le dernier mot, c'est-à-dire le pouvoir. Il lui reste quelques mois à résister dans cet enfer ; j'ai l'impression que jusqu'à l'ultime minute de son départ, Xavier Bertrand cognera. La politique ne connaît ni la pitié, ni l'indulgence.

J'aurais aimé que les premiers de la liste socialiste, Garand, Héry, Valentin, Andurand, soient hier présents au balcon. Car il faut le voir de visu, l'entendre réellement, sentir l'atmosphère de tension, de violence (de haine, de mépris ?) ; sur un écran, ce n'est pas la même sensation, on ne se rend pas vraiment compte. Que mes camarades sachent (le savent-ils ?) ce qui les attend. Car ce n'est même pas la mort au champ d'honneur, qui a sa part de gloire, mais la mort au champ de déshonneur, quand les attaques sont ce que j'entends. Michel, Jacques, Marie-Anne, Stéphane, sont-ils des violents ? Il le faudra, pourtant. L'opposition qui va partir avait ses défauts, puisque rien n'est parfait : Lançon trop sanguin, Aurigny trop froid, Tournay bon en début d'intervention et piégé à la fin, les autres trop silencieux. Mais ils auront essayé, dans un contexte très difficiles pour eux, qui les exonère de leurs maladresses. Il faudra que la nouvelle opposition (si elle ne devient pas majorité) fasse aussi bien et même mieux : ce n'est pas donné.

Je reviens sur Olivier Tournay. Hier soir, il a habilement repris la parole, insistant pour revenir sur un rapport précédent, que Xavier Bertrand a fini par lui concéder. Le jeune élu communiste s'est alors lancé dans une énumération assez efficace de délits contre lesquels la vidéo-surveillance n'a rien pu. C'était plutôt bien vu, bien amené, et les murmures de réprobation de la majorité prouvaient que Tournay faisait mouche. Sauf que Xavier Bertrand a retourné la situation en sa faveur, par une simple question portant sur un cas cette fois favorable aux caméras. Olivier Tournay lui a accordé le point, et c'en était fini : une seule fois suffisait à justifier la vidéo-surveillance ! Je le dis aux prochains élus de gauche, s'ils se retrouvent dans l'opposition : il ne faut céder aucun pouce de terrain. En politique, il n'y a de mansuétude que dans un geste de grand seigneur, quand on détient le pouvoir et qu'on peut se le permettre. Sous le feu des critiques, acculé à la défensive, il ne faut rien lâcher, c'est une guerre de positions, qu'il faut absolument tenir.

De quoi Xavier Bertrand tire-t-il sa force en Conseil municipal ? Pas seulement de lui-même, de son habileté, de ses compétences, mais du groupe qui le soutient, de la majorité qui fait bloc autour de lui. En politique, la force individuelle ne vaut pas grand chose (voyez mon cas : ma volonté, mon expérience, ma notoriété ne servent à rien), c'est la force collective qui prime. Cela se sent en Conseil municipal : Bertrand est entouré, porté. C'est Abraracourcix sur son bouclier, constamment levé par la tribu de Gaulois. Isolé, il perdrait de sa magie, de son aura. Par comparaison, les difficultés de la gauche locale ne viennent pas des hommes (les personnalités jouent un rôle secondaire), ni des idées (on en trouve toujours), mais du parti, de l'organisation, de la structure collective. Le nombre d'adhérents, la liste de sympathisants, la participation aux votes, les activités publiques, l'implantation locale, c'est là où le bât blesse, et de longue date, n'incriminant personne en particulier. C'est pourquoi je voulais me présenter au secrétariat de la section, c'est pourquoi je souhaitais l'organisation de primaires.

La prochaine séance du Conseil municipal, consacrée à l'adoption du budget, aura lieu dans quinze jours.

lundi 25 novembre 2013

Une question oubliée



Les questions de société interviennent régulièrement dans le débat politique, récemment le mariage homosexuel, prochainement (et déjà) le droit à l'euthanasie. Ce sont forcément des sujets très délicats, très lourds, propices à la controverse. Il y a pourtant une question ancienne qui n'est guère évoquée, dont l'intérêt est pourtant crucial : le don d'organes. Plus notre population vieillit, plus le besoin de transplantations augmente. Malgré tout, il y a aujourd'hui 17 500 personnes en attente, chiffre évidemment considérable. Le délai pour une transplantation est de 15 mois.

On se demande pourquoi notre société n'a pas réglée ce problème, qui semble éthiquement moins polémique que le mariage pour tous ou le droit à mourir dans la dignité. Mais c'est à voir, même si on en parle moins. Le corps garde une dimension sacrée, qui supporte mal qu'on l'ampute, en dépit des précautions qui y sont mises. Les réticences religieuses (le corps promis à la résurrection pour les chrétiens) n'ont pas disparu. Cependant, donner un organe, c'est transmettre la vie, c'est permettre à quelqu'un de revivre : il y a dans cette démarche quelque chose de très beau et de quasi mystique que les religions pourraient assumer.

En même temps, il ne sera jamais évident de sacrifier une partie de soi-même pour autrui. D'autant qu'un prélèvement n'est jamais complètement dénué de risques. Quant au receveur, il n'est pas non plus en situation facile : il se sent redevable de ce qu'il a de plus cher au monde, la vie. Paradoxe cruel, la baisse importante des accidents de la route a entraîné un recul des dons d'organes, comme si la vie l'emportait d'un côté et la mort prenait sa revanche de l'autre. Autre paradoxe : depuis trente ans, les incinérations ont fortement augmenté. On pourrait penser que celui qui livre son corps aux flammes va au préalable donner ses organes, puisque ceux-ci sont destinés de toute façon à devenir cendres. Eh bien non, il n'y a pas rapport de cause à conséquence, comme si celui qui part ne voulait rien laisser de lui sur cette terre, pas même un organe dans le corps d'un autre. On constate donc que la question éthique n'est pas absente.

Au plan législatif, toute personne décédée est un donneur potentiel, sauf opposition signifiée. C'est la notion de "consentement présumé". Mais la décision de prélever des organes est trop grave pour que la médecine en décide seule, sans l'autorisation de la famille. L'idéal serait de valider la carte de donneur, qui actuellement n'a aucune existence légale. C'est la demande des associations, qui mériterait d'être reprise par les partis et les candidats.

Ces réflexions sur le don d'organes, je vous les propose à la suite de notre ciné-débat de jeudi dernier, qui a reçu comme invité Henri Barbier, président régional de la FNAIR (Fédération nationale d'aide aux insuffisants rénaux), qui nous vient de Chauny, et Nathalie Joffrin, infirmière à l'hôpital de Saint-Quentin, coordinatrice pour les prélèvements d'organes et de tissus. Leur expérience et leur clarté nous ont singulièrement profité. Qu'ils en soient l'un et l'autre remerciés.

Vignette 1 : début de la soirée, Henri Barbier introduit.

Vignette 2 : fin de soirée, avec la directrice du cinéma, Michèle Zann.

dimanche 24 novembre 2013

U-na-ni-mi-té



Jeudi soir, parmi le petit peuple socialiste de Saint-Quentin dont je suis, aux résultats du vote pour la liste municipale, un mot revenait dans toutes les bouches, surgi du coeur et de la raison, un cri de victoire et de soulagement : u-na-ni-mi-té ! On se souvient de notre camarade Ségolène Royal s'écriant : fra-ter-ni-té ! J'y ai un peu pensé ... Peu importe le flacon, c'est-à-dire le nombre de votants, pourvu qu'on ait l'ivresse du vote : u-na-ni-mi-té !

Un étranger au parti pourrait s'étonner : après tout, entre socialistes, pour adopter une liste unique, quoi de plus normal que l'unanimité, quoi d'exceptionnel à ce que des socialistes votent pour des socialistes, c'est-à-dire pour eux-mêmes ? Eh bien non : l'histoire récente, et même ancienne, des socialistes saint-quentinois a été celle des divisions et des votes ric-rac, le pire dans le genre ayant eu lieu aux dernières élections municipales, où la liste rejetée par la majorité a quand même été ... adoptée ! Il est donc loisible de se délecter de cette u-na-ni-mi-té aussi gouleyante qu'un verre de beaujolais nouveau glissant dans un gosier socialiste en ce jeudi soir historique. U-na-ni-mi-té !

A qui devons-nous ce miracle laïque ? A Michel Garand, bien sûr : c'est notre Henri IV, qui rassemble autour de son panache blanc. Pourvu que Xavier Bertrand ne soit pas son Ravaillac ! La tête de liste socialiste a annoncé, dans L'Aisne Nouvelle d'hier, que la liste complète était "bouclée", mais qu'il attendait janvier, la déclaration (ou non) de l'actuel maire, pour la dévoiler. En attendant, les colistiers socialistes sont connus, ils sont 24 (avec Michel), ce qui laisse 19 places pour les partenaires et la société civile (c'est-à-dire les personnalités locales). Quant on sait que nos alliées, EELV, PRG, MRC et IDG, n'ont pas une très forte représentativité, ni de puissants leaders sur la ville, il est probable que la part belle va être accordée à la dite société civile. Beaucoup plus que l'unanimité du vote, c'est cette donnée qui me semble la plus importante et la plus novatrice : moi-même, durant la campagne interne pour la désignation de la tête de liste, j'avais proposé que la moitié des places soient réservées à des personnalités connues, engagées, influentes. Nous n'en sommes pas très loin, c'est le bon choix.

Evidemment, avec l'introduction de nos partenaires et des représentants de la société civile, l'ordre et la composition de la liste vont être modifiés. Les Verts vont forcément demander une place éligible (c'est ce qui s'est passé en 2001 et 2008), donc parmi les premières. Le PRG et le MRC feront probablement de même, en vertu des accords nationaux entre ces petites formations et le parti socialiste. IDG, qui n'a qu'une existence locale, et une inexistence militante sur Saint-Quentin, sera sans doute moins exigeante (mais c'est à voir : plus on est petit, plus on est gourmand, et on vient sur une liste pour avoir des élus, pas pour les beaux yeux des socialos). Quant à la société civile, je verrais d'un bon oeil une forte personnalité locale en n°2, pour seconder Michel Garand et suppléer à Anne Ferreira, qui avait ma préférence. Il en ressort que Stéphane Andurand, par exemple, n°2 de la Fédération et n°5 sur la liste, qui aurait bien voulu être n°3, selon ses confidences au Courrier picard d'hier, pourrait fort bien se retrouver en n°7 ou n°9, la parité accélérant la dégringolade.

Comme une bonne nouvelle n'arrive jamais seule, nous avons appris, toujours dans le Courrier picard d'hier, que José Ribeiro, l'acolyte de Stéphane Monnoyer, après avoir "mûrement réfléchi", renonçait à rejoindre la liste socialiste. Il en va ainsi avec les mûrissements prolongés : quand la poire est blette, elle tombe toute seule. Souhaitons que Monnoyer suive le même mouvement.

Au stade où nous en sommes, je n'exige qu'une seule chose des colistiers pour lesquels j'ai jeudi soir voté : qu'une fois élus, et les premiers le seront automatiquement, ils s'engagent à siéger et qu'ils assurent leur mission de représentation dans les divers événements locaux, contrairement à ce qui a pu se passer durant les trois précédents mandats. Pour le reste, je suis persuadé qu'ils feront de leur mieux.

J'aimerais aussi rappeler, à ces 24 heureux élus (qui ne le seront peut-être pas tous au final), qu'il y a une différence notoire entre avoir une place et faire sa place. Dans l'actuelle équipe d'opposition, trois élus sur huit (ou neuf, selon qu'on y range ou non Antonio Ribeiro) ont vraiment émergé, se sont fait remarquer, ont "imprimé", comme on dit aujourd'hui : dans des styles très différents, Jean-Pierre Lançon tonitruant et capitalisant un historique, Michel Aurigny, méticuleux et maître de lui, Olivier Tournay, éloquent et convaincant. Mais qui se souvient des autres ? Ce n'est d'ailleurs pas une critique : être élu d'opposition, je l'ai souvent dit sur ce blog, c'est un métier de chien, et pour pas un rond. Il n'y a que des ambitieux ou des fanatiques qui peuvent s'y coller. Quelqu'un de normal dit non.

Les candidats sont donc des courageux, peut-être même des inconscients, mais il faut une petite part de folie pour cette mission impossible qu'est la politique. Qu'ils sachent qu'ils auront au dessus d'eux, à chaque séance du Conseil municipal, un observateur attentif et un ardent supporter, qui surplombe la salle depuis une éternité, très exactement quinze ans : ce n'est pas Dieu le Père, dont le mandat est beaucoup plus long ... c'est seulement votre serviteur, invariablement à la même place, sur son banc de bois, à droite face au maire, et presque devant la table de la presse.

Aux 24 qu'on connaît, aux 19 qu'on attend, il n'y a qu'une chose à souhaiter, qui réglerait tout parce que c'est l'alpha et l'oméga de la vie politique : la réussite, la victoire, mais la vraie, pas le lot de fausse consolation d'être élu d'opposition (voyez comme Lançon en a soupé, même lui qui n'est pas un enfant de choeur n'en veut plus), l'installation d'une équipe socialiste en mairie de Saint-Quentin. Alors, ce n'est plus u-na-ni-mi-té que le petit peuple socialiste de Saint-Quentin pourra scander, c'est ma-jo-ri-té ! un cri autrement plus réjouissant.

Honneur à nos maires



Sur ce blog, je fustige régulièrement l'opportunisme politique, la fringale des places, la vaine gloriole, dont les élections municipales vont encore favoriser la débauche. Mais il y a aussi, heureusement, un grand mérite de nos élus, un esprit de sacrifice chez eux, un dévouement de tous les instants, un admirable engagement au service des autres qu'il convient d'honorer. Quelques arbres pourris ne doivent pas cacher la verte forêt. Cette pensée me vient à l'esprit au moment où nous a quittés, ce vendredi, une personne que j'aimais beaucoup, Jean-Marie Serain, maire d'Origny-Sainte-Benoîte.

J'ai fait sa connaissance en 2 000. Il était sympathisant ou adhérent PS, je ne sais plus, mais homme de gauche en tout cas, et il m'avait demandé, puisque j'étais secrétaire de la section socialiste de Saint-Quentin, l'autorisation d'organiser une réunion dans nos locaux de campagne, avenue Faidherbe. A l'époque, autant que je m'en souvienne, il y avait une sorte d'embrouille entre les sections d'Origny et de Ribemont, comme on en voit souvent en politique, et qui disparaissent aussi vite qu'elles apparaissent ...

Mais c'est surtout par la suite que je me suis lié à Jean-Marie, que je rencontrais pratiquement chaque mois, à Guise ou à Bernot, dans le cadre de mes ateliers-philo. Il venait en tant que correspondant du journal L'Union, et nos rencontres, pourtant brèves, étaient toujours de grands moments ! Je l'appelais "le diable sorti de sa boîte", parce qu'il était souvent vêtu de sombre et surgissait inopinément dans notre salle de réunion. Grand, marrant, amusant toute l'assistance, il faisait ce qu'on appelle un shooting, plus photographe que journaliste, et il repartait aussi vite qu'il était venu, pris par tout un tas d'activités et de rendez-vous.

Ce qui était appréciable chez lui, c'est qu'il ne se prenait pas au sérieux, tout sérieux qu'il était. On n'avait pas l'impression d'avoir Monsieur le Maire devant soi, il ne jouait pas de son titre ni de sa fonction, il n'avait pas pris, comme on dit, la grosse tête (généralement, c'est le travers dans lequel tombent les petits têtes). Et pourtant, élu maire d'Origny-Sainte-Benoîte en 2 008, il aura en quelques années seulement beaucoup apporté à sa ville. Les obsèques de Jean-Marie Serain auront lieu demain, à 14h30, en l'église d'Origny.

Puisque je veux aujourd'hui rendre hommage à nos maires, j'en profite pour saluer la mémoire de Lucien Olejniczak, décédé il y a quelques semaines, ancien maire de Fonsomme. Lui aussi, je le voyais régulièrement, dans les événements saint-quentinois auxquels il tenait, en voisin, à participer. Notre première rencontre a eu lieu lors des élections cantonales de 2004, où j'étais candidat dans son canton, Saint-Quentin nord. Je ne sais pas s'il était de droite, mais je ne le sentais pas de gauche (ce qui me suffit pour ranger quelqu'un à droite ...). Quoi qu'il en soit, il m'a reçu en mairie sans rien préjuger de moi, sans être gêné par mon étiquette socialiste (tous les élus n'ont pas réagi comme ça). Il était gentil, amusant, lui aussi très dévoué à sa tâche de maire. Je ne l'oublierai pas.

Serain et Olejniczak, très différents l'un de l'autre, avaient en commun d'être issus de milieux populaires, d'accéder malgré tout à des responsabilités politiques qui n'étaient pas minces. C'est aussi ça, la République ! Un régime dans lequel le pouvoir n'est pas le privilège de l'aristocratie ou de la bourgeoisie. Autant je déteste les apparatchiks affairés à leurs combinaisons d'appareil, autant j'aime ces élus de communes rurales ou de petites villes qui ne doivent ce qu'ils ont qu'à leurs talents, leur travail et par dessus tout la consécration de la population.

Alors que viennent de se réunir le congrès départemental des maires de l'Aisne à Chauny et le congrès national à Paris, que se profilent très nettement les élections municipales, il faut rappeler combien le métier de maire est devenu un véritable sacerdoce, entre les réglementations de plus en plus complexes, les responsabilités accrues, les financements au contraire réduits et des citoyens épouvantablement exigeants. Certains en viennent à jeter l'éponge, mais il n'empêche que la République procédera dans quatre mois au renouvellement ou au maintien de dizaines de milliers d'élus locaux. Nous penserons alors à Jean-Marie Serain et à Lucien Olejniczak. Honneur à nos maires.

Contre les violences conjugales



A propos de la condition féminine, il est souvent question, à juste titre, des discriminations à l'emploi, de la disparité des salaires avec les hommes, des représentations machistes au sein de la société. Mais il est un sujet qui reste tabou, parce qu'il est difficile à évaluer, surtout parce qu'il touche à la famille et au couple, qu'on a tendance à idéaliser : il s'agit des violences conjugales, de toutes sortes, verbales, physiques, morales ... Demain, ce sera la Journée internationale contre les violences conjugales, et l'occasion d'en reparler.

A Saint-Quentin, depuis de nombreuses années, avec l'association Rencontre Citoy'Aisne et ses partenaires, nous organisons toujours une manifestation : théâtre, film, café philo ... quelque chose de libre et de convivial, où chacun puisse s'exprimer (cet tout le problème est là : en parler). Cette année, nous avons convenu d'une intervention dans le Centre social Saint-Martin, 13 bis rue Jean Falloux. C'est une rencontre-débat, à partir de 17h00, ouverte à toutes et à tous. Je serai en compagnie de Frédérique Delalande, la directrice du Centre, qui fait beaucoup pour les femmes du quartier, et Sylvie Racle, avocate au barreau de Saint-Quentin et vice-présidente du CIDFF, Centre d'information sur les droits des femmes et des familles.

Avant-hier, le gouvernement, par la voix de la ministre des droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem, a présenté un plan triennal contre les violences (pas seulement conjugales) faites aux femmes. Le budget a été doublé (66 millions d'euros), 1 650 places supplémentaires ont été créées dans l'hébergement d'urgence, les effectifs des travailleurs sociaux dans les commissariats et gendarmeries ont été multipliés par deux. Il y a un chiffre qu'on omet souvent de citer, qui est pourtant vertigineux, qui mesure l'ampleur du dramatique phénomène : le coût économique des violences faites aux femmes (santé, logement, aides sociales, interventions de la police, travail de la justice ...) s'élève à 2,5 milliards d'euros. La statistique a quelque chose d'effroyable, mais elle permet d'évaluer, à travers ses conséquences, un mal invisible ou caché, qu'il est urgent de dénoncer.

samedi 23 novembre 2013

Les bénévoles en force



Pour la Journée mondiale du bénévolat, le palais de Fervaques a été investi par une foule de bénévoles, pour une impressionnante démonstration de force. Oui, dans une société marchande, le travail gratuit a encore un sens !

La présentation des associations a commencé avec le TTSQ, Tennis de table de Saint-Quentin, qui s'est livré devant nous à quelques échanges de balles (vignette 1). Son vice-président, Jean-Louis Polard, a fait un audacieux commentaire mêlant tennis et politique, rappelant au passage que François Mitterrand avait été un champion de ce sport (le tennis, mais aussi la politique, et là c'est moi qui rajoute) et Xavier Bertrand un jeune licencié du club. Le maire de Saint-Quentin a d'ailleurs tombé la veste (qu'il portait aujourd'hui sans cravate, à l'inverse de Monsieur Micro, Jean-Paul Lesot, pour une fois cravaté) et affronté à coups de raquette le président de TTSQ, Eric Henneman. Je ne vous dirais pas qui a gagné ... Polard a relancé l'idée d'un tournoi entre personnalités locales, dont la tradition s'est arrêtée il y a vingt ans (ça ne fait pas un programme municipal, mais ça donne des idées ...). Bravo en tout cas à ce magnifique club, qui s'est hissé au niveau national.

Grand moment d'émotion avec le spectacle de l'association Handidanse et son professeur Sandrine Didier, premier à l'applaudimètre et standing ovation finale (vignette 2). Il est incroyable de voir comment cet art, la danse, peut libérer un corps blessé par la vie, quand on a perdu la vue ou l'usage de ses jambes. La personne handicapée redevient alors une simple personne, évoluant comme tout le monde, et même mieux que tout le monde, puisque s'ajoutent la grâce et la beauté des mouvements. C'est prodigieux, au sens propre du terme, et l'émotion est méritée.

Mais que font donc des Bretons en Picardie ? Ils dansent, parce que la danse est une pratique universelle, que la Bretagne est une civilisation qui rayonne bien au-delà de son territoire (vignette 3). Même Picards, nous sommes tous un peu Bretons, parce que c'est notre histoire nationale, qu'il y a une solidarité entre toutes les provinces de France (je pense bien sûr à la bourrée berrichonne et aux airs de vielle de mon pays natal). La danse, ce sont les corps qui se rapprochent, qui s'accrochent, qui se repoussent, qui s'apprivoisent, et c'est comme ça depuis la nuit des temps : l'homme a la danse dans le sang.

L'association Folklores et variétés de Picardie nous a gratifiés de mouvements très enjoués, très enlevées, très aériens (vignette 4) : j'ai presque failli décoller de mon siège, me laisser emporter ... Mais je ne voulais pas prendre le risque de me retrouver importunément dans les bras de Xavier Bertrand ! Cette association a été créée en 1965, bel exemple de constance et de persévérance. Pourquoi la politique ne s'inspire-t-elle pas du sport et de la danse, au lieu de s'égarer dans de mauvais vaudevilles ou des tragi-comédies auxquelles personne ne croit ?

Merci au comité départemental des médaillés Jeunesse et Sport pour l'organisation de cette belle manifestation, et longue vie au bénévolat !

vendredi 22 novembre 2013

Des corsaires ou des rois



J'ai adopté hier soir sans problème ni hésitation la liste socialiste pour les élections municipales, mon unique réticence ayant été levée (voir billet de lundi dernier). Il y a certes toujours des reproches et des regrets, mais la politique n'est pas un exercice de perfection, et il faut bien choisir. La plus grande qualité que je perçois dans cette liste, c'est sa cohérence, et ce n'est pas pour moi peu dire, comme vous le savez. Les candidatures sont le produit et le reflet de ce qui s'est passé ces six derniers mois : la confiance que les cadres du parti, au niveau local et fédéral, ont mis en Michel Garand, en le choisissant très tôt comme tête de liste.

En conséquence, le maître d'oeuvre de cette opération, Jacques Héry, se retrouve en troisième position : le billet que je lui avais consacré il y a quelques mois se voit maintenant confirmé. En quittant avec armes et bagages la section de Saint-Quentin pour fonder sa propre boutique, en protestation contre la dérive gauchiste de la section saint-quentinoise, Jacques est aujourd'hui le grand et véritable vainqueur de la nouvelle séquence politique qui s'ouvre devant nous. A sa suite, toujours dans une implacable logique, le n°2 de la fédération, Stéphane Andurand, se retrouve n°5 sur la liste.

En revanche, l'aile gauche, hégémonique la dernière fois, perd de son influence, victime des rapports de forces internes : Jean-Pierre Lançon n'est plus qu'en 13e position, et surtout Anne Ferreira, en queue de peloton, s'excluant de tout rôle politique local, y compris en cas de victoire (alors même que sa 4e position sur la liste européenne la rend quasiment inéligible). Jacques Héry la rêvait conseillère municipale déléguée : même pas ! C'est mon seul vrai regret concernant cette liste : que l'influence, la notoriété et le score législatif d'Anne ne l'aient pas propulsés à la deuxième place, en un ticket Garand-Ferreira.

Cette deuxième place sera occupée par Carole Berlemont, qui n'est pas un foudre de guerre, dont les interventions en séance municipale sont douces et discrètes. Mais l'avantage est d'assurer la continuité avec le travail précédent d'opposition, ce qui me semble une vertu aussi indispensable que la cohérence. Donc, l'un dans l'autre ... En n°4, nous retrouvons Marie-Anne Valentin, sans surprise là aussi : elle était la suppléante de Stéphane Andurand aux dernières élections cantonales.

Garand, Berlemont, Héry, Valentin, Andurand, voilà donc l'équipe de choc, la garde rapprochée, le fer de lance qui va partir à l'assaut de la mairie, l'entourage qui va désormais donner corps à la tête de liste. Ces cinq-là sont les noms qu'on retient, ceux qui vont jouer politiquement un rôle déterminant, quelle que soit l'issue de l'élection. Le combat sera dur, il va falloir lâcher les chiens ... et qu'ils ne se transforment pas en caniches. S'ils l'emportent, ces cinq et leurs camarades seront les rois du monde ; s'ils échouent, ils seront des corsaires chargés d'aller quotidiennement à l'abordage d'une redoutable Municipalité UMP qui aura pour elle d'avoir gagné une quatrième fois consécutive.

Je ne suis pas de cette aventure dont j'aurais tellement voulu être, mais le choix de mes camarades en a décidé autrement. Je n'éprouve aucune amertume ni rancoeur, seulement un peu de tristesse. A eux tous, je souhaite courage et succès.

jeudi 21 novembre 2013

Qu'est-ce qu'on rigole !



Avez-vous remarqué que les Français rient de plus en plus ? Les spectacles d'humoristes font salle comble (demain, Bigard sera à Saint-Quentin), à la télé c'est souvent le règne de la déconne sur les plateaux. Même dans les conversations privées, on blague plus volontiers qu'il y a une trentaine d'années : comme si tout était devenu plus léger, plus marrant, plus dérisoire ... A moins que le rire soit une fuite, un signe de dépression pour société en crise.

Quelques exemples m'ont frappé ces derniers jours. Il y a d'abord eu cette conseillère municipale UMP qui s'est amusée sur sa page Facebook à détourner l'ancienne publicité Banania en un "Y'a bon Taubira". La plaisanterie est évidemment détestable, mais notez bien que beaucoup de rires ont, en leur fond, quelque chose de méchant, de vicieux. Ce qui a retenu mon attention, ce n'est pas tant l'allusion raciste que la façon dont la dame l'a justifiée : pour elle, c'était uniquement pour rire. A la limite, l'élue se déclare innocente, ingénue, presque victime des rabat-joie : que peut-on reprocher à quelqu'un qui veut simplement rire ? On voit bien là toute la perversité du rire. Quand j'étais ado, je voyais des collégiens en tabasser d'autres, mais impossible de s'indigner, de condamner, puisque la réponse était imperturbablement la même : c'est pas méchant, c'est juste pour rire ! A vous dégoûter à tout jamais de la rigolade ...

A Saint-Quentin, il y a quelques jours, une dame ivre met le couvre-chef à la mode du jour, le bonnet rouge, et bloque pendant quelques minutes la rue d'Isle. Un habitant, de sa fenêtre, filme et poste la vidéo sur Youtube, provoquant ainsi plusieurs milliers de connexions, ce qu'on appelle un buzz. Qu'est-ce qu'on rigole ! Une pauvre femme qui perturbe un court temps la circulation, et des milliers d'internautes se marrent et se renvoient l'info. Lamentable. A tous ceux qui rient ainsi, j'ai envie de leur demander : franchement, qu'est-ce qu'il y a de drôle ?

Ce week-end, autre action rigolote, volontaire celle-là, mais également portée par le net (qui est devenu aujourd'hui le principal vecteur de la connerie) : une banderole sur l'échafaudage de la basilique, avec l'inscription "Allelujah bordel" (on mesure très vite la finesse de la plaisanterie). C'est en fait un défi, en vue de l'émission de Laurent Ruquier "On n'demande qu'à en rire" (en l'occurrence, une demande pas très exigeante, mais n'est-il pas vrai que, généralement, on rit d'un rien ?). Je ne suis pas bigot, je pratique volontiers l'ironie, parfois cruelle, mais je crois qu'il y a des endroits pour ça, en ce qui me concerne l'espace d'expression personnelle qu'est ce blog. Pour le reste, je crois qu'il faut respecter les lois, les lieux et les convictions d'autrui.

Plus j'avance dans la vie, plus je me méfie du rire, des rigolos et des rigoleurs. En politique, pour retourner l'objection la plus argumentée et la plus sérieuse, il suffit d'un rire. Le rire, c'est la facilité des faibles, du moins dans l'espace public. A vrai dire, le rire me fait plus peur que rire. Je ne vois qu'un rire à préserver : dans le domaine strictement privé, entre copains, quand on se tape des délires, des fous rires, comme ce soir devant un verre de beaujolais et un plateau de charcuterie. C'est le seul rire sain, jouissif et gratuit.

mercredi 20 novembre 2013

Lemasle, c'est lui ?



"Je suis arrivé à Saint-Quentin il y a 13 ans, 1 mois et 19 jours" : l'homme qui parle ainsi est-il comme le prisonnier qui compte ses jours ou bien comme le performeur tout heureux de son exploit, de sa persévérance, de sa longévité ? C'est en tous cas par ces premiers mots, très préparés, qu'Hervé Cabezas, conservateur du musée Antoine-Lécuyer, nous a accueillis hier soir, nous gratifiant d'une érudite et admirable conférence consacrée à Louis Nicolas Lemasle. Les mots suivants auront été pour dire qu'il avait trouvé, en ce début de siècle qui l'a vu s'installer dans notre ville, un musée "défraîchi" et des expositions "incohérentes", ce qui a provoqué un petit mouvement d'humeur dans certaines parties du public.

Hervé Cabezas a des audaces de Parisien qui peuvent coûter cher ici, où la prudence est de mise. De plus, Monsieur le conservateur affiche des ambitions, ce qui n'est pas fait pour arranger son cas, là où la modestie est mieux portée : il confesse sa volonté de donner au musée une envergure nationale, même s'il connaît l'intérêt de Saint-Quentin pour les "sujets locaux" (un léger voile d'ironie retenue passe alors sur son visage). Mais un conservateur est aussi un diplomate : une rapide rétrospective de ses activités prouve que le "territoire" n'a pas été oublié, mais qu'il a été subsumé (comme disent les philosophes à la Sorbonne) à un niveau supérieur.

La preuve concrète, c'est l'intérêt qu'Hervé Cabezas a porté à l'homme de la soirée, Louis Nicolas Lemasle, qui n'a même pas donné son nom à une rue de Saint-Quentin ! C'est un parfait inconnu, et pourtant c'est une personnalité locale éminente, puisqu'il est le fondateur du premier musée de la ville. Et puis, c'est un personnage d'envergure, élève du peintre David, fréquentant ou approchant les grands de ce monde (la duchesse de Berry, Charles X, le duc d'Orléans, la famille Murat ...), qu'il va peindre ou dessiner. Qu'est-il donc venu faire à Saint-Quentin, lui qui n'est pas natif d'ici ? C'est la nécessité ("faire bouillir la marmite", seule et unique trivialité de toute la conférence, que s'autorisera en s'excusant Monsieur le conservateur) qui le fait postuler à la direction de l'école de dessin, la place étant vacante. Lemasle a vécu dans les douceurs et les éclats de la cour royale de Naples ; cet Italien de coeur et de langue se retrouve sous la pluie et le gris de Saint-Quentin.

Depuis 2006, Hervé Cabezas a beaucoup donné de sa personne pour dissiper les énigmes et les incertitudes qui entourent Lemasle. De la Royal academy of art de Londres (à prononcer avec l'accent) jusqu'à un marchand d'estampes à Paris en passant par les puces de Saint-Ouen (mais oui !), l'oeuvre du maître a été reconstituée. Il a fallu y sacrifier du temps (1 200 km parcourus pour ramener de Bretagne un petit portrait) et de l'argent (une bonne partie du budget a servi a transporter de Nantes à Saint-Quentin le magnifique tableau de Raphaël présentant au pape Jules II une statue du dieu des païens Apollon, ce qui est assez cocasse). Lemasle est ce qu'on appelle et ce que nous apprend Cabezas : un peintre archéologue.

Monsieur le conservateur agrémente sa conférence de nombreux "Vous savez que ...", qui sont de sa part une aimable supposition d'érudition adressée au public, que je ne confirmerais cependant pas à tous les coups. "Vous savez que la duchesse de Berry a épousé par procuration Charles Ferdinand ..." : non, je ne savais pas, mais comme tout le monde, je fais comme si je savais. Il parle savamment, sans notes, cliquant seulement de temps en temps sur son ordinateur Apple pour faire défiler les tableaux sur l'écran. Vers la fin, Hervé Cabezas souffle un "je ne sais plus où j'en suis dans mes papiers", en poussant négligemment de la main les quelques feuilles qui sont devant lui. Mais c'est pure coquetterie ! Il a tout dans la tête. Comment en serait-il autrement quand on a "mangé" (c'est son expression) du Lemasle matin, midi et soir, semaine et week-end, pendant des années. Il n'y a que ses nuits qui aient été préservées. Je soupçonne même le conservateur d'avoir rencontré le fantôme de son lointain prédécesseur, premier conservateur du musée, dans ces lieux propices à ce genre d'apparition spectrale.

Cabezas n'est pas seulement homme d'art, il se fait aussi psychologue, lorsqu'il décrit l'état d'esprit de Lemasle, obséquieux, flatteur, recherchant médailles et reconnaissance (il aura la Légion d'honneur), aimant à frayer avec les dignitaires, les influents, changeant de fréquentations quand le pouvoir change de titulaires : il n'y a pas que la politique qui soit atteinte par le démon de l'opportunisme ! D'origine sociale modeste (son père est restaurateur), il a une revanche à prendre sur la vie, d'autant qu'il n'a pas fait ses humanités, ne sait ni le grec ni le latin. Son métier de conservateur, il va à Saint-Quentin quasiment l'inventer, sur le tas. Son bâton de maréchal, c'est quand il deviendra en 1836 premier inspecteur des Monuments historiques de l'Aisne. Désormais, il rend ses comptes au ministre et prend parfois avec dédain le maire. Pour aggraver son cas, Lemasle entre en conflit sévère avec une gloire locale, le peintre Pingret : entre le greffon parisien et la souche saint-quentinoise, l'opinion publique a fait son choix !

Pourtant, Louis Nicolas Lemasle a laissé de bons souvenirs dans notre ville. C'est un excellent pédagogue, le premier professeur de dessin de Saint-Quentin, qui va former plusieurs générations d'élèves, auxquels il est très attentif. C'est aussi un passionné, un scrupuleux, qui se considère finalement comme le seul homme d'art de la ville. Nous lui devons tout de même le musée, créé en 1833, même si ce n'est pas sous sa forme actuelle. Il a su préserver et inventorier le patrimoine local. Sous la Monarchie de Juillet, on creuse beaucoup, à Saint-Quentin comme partout. A la moindre pierre ancienne découverte, Lemasle apparaît. Dans un courrier, il traite un ouvrier peu précautionneux de "vandale" ! Aux yeux des Saint-Quentinois, il apparaît probablement pour un original.

En écoutant, en observant hier soir Hervé Cabezas, je me suis demandé, à la façon dont Flaubert le disait de Madame Bovary : et si Lemasle, c'était lui, Cabezas ? Notre conservateur n'a-t-il pas fait remarquer qu'il était arrivé à Saint-Quentin au même âge que Lemasle, à 40 ans ? Un Lemasle d'aujourd'hui, aussi attaché aux choses de l'art, défendant bec et ongles son musée, parisien dans l'âme, passant donc un peu pour original (c'est-à-dire qu'il est simplement lui-même, sans fard). Comme Lemasle, il voudrait sans doute que l'implication locale soit plus grande, que l'Office du tourisme, que le public scolaire, que les Saint-Quentinois s'emparent de son travail sur le fondateur du premier musée de la ville, que la Municipalité mette en vente son catalogue raisonné, un document scientifique qui fera date dans l'histoire de l'art, ce dont peu de musées de l'Aisne peuvent se targuer.

Mais s'il y a du Lemasle en Cabezas, notre conservateur actuel n'est pas tout entier dans l'ancien conservateur. Nulle trace chez lui de complaisance envers les pouvoirs en place, aucun souci de plaire, pour ce que j'en connais. La soixantaine de personnes présentes ont été enchantées par cette conférence très dense et foisonnante. Dans un siècle ou deux, un conservateur du futur exhumera lui aussi l'existence, la présence et le travail d'Hervé Cabezas dans la ville de Saint-Quentin, en faveur de l'art et du patrimoine, et en fera à son tour l'objet d'une conférence, j'en suis certain. Ce jour-là, nous aurons sûrement une rue Louis Nicolas Lemasle, et allez savoir, peut-être une rue Hervé Cabezas ...


En vignette : Hervé Cabezas en compagnie de la duchesse de Berry, peinte par Louis Nicolas Lemasle.

mardi 19 novembre 2013

Avec ou sans



Il y a des jours avec et des jours sans. Samedi, c'était avec ; hier, c'était sans. Je parle des activités publiques, qui par définition n'ont de sens que si elles intéressent et attirent le public. Samedi après-midi, à la bibliothèque, c'était très réussi. Thème de la conférence-débat : l'arbre, accompagnée par une exposition d'aquarelles. Hier soir, c'était raté. Du coup, j'ai changé mes premiers mots de bienvenue : au lieu du traditionnel "merci d'être venus nombreux", je me suis replié sur "ce soir, il n'y a pas la quantité mais la qualité" ...

Pourtant, en choisissant le documentaire Room 237, portant sur le film de Kubrick Shining, je pensais mobiliser à la fois les cinéphiles, notre public habituel, les lycéens qui font option cinéma, les étudiants de BTS audio-visuel, les fans de Stanley Kubrick et les lecteurs de Stephen King (d'où est tiré le film), ce qui normalement représente pas mal de monde. D'autant que Shining repasse cette semaine au cinéma. Mais allez savoir pourquoi une bonne idée se transforme en mauvaise idée ... Ca ne nous a pas empêché de débattre fructueusement entre nous.

Prochain rendez-vous, jeudi soir, avec un nouveau documentaire, Donner et recevoir, sur le don d'organes. Nous aurons pour invitée Nathalie Joffrin, infirmière, qui travaille à l'hôpital de Saint-Quentin, établissement pratiquant le prélèvement de cornées depuis 2007 et d'autres organes depuis 2011. Autre invité : Henri Barbier, président de la FNAIR, Fédération nationale d'aide aux insuffisants rénaux, lui même greffé d'un rein depuis 18 ans. Tout ça nous éloigne de l'arbre et de Jack Nicholson ! mais qui peut prétendre que le sujet n'est pas important, et même vital ? C'est le public qui décidera si jeudi sera un jour avec ou un jour sans ...


Vignette 1 :Valérie d'Amico, directrice de la bibliothèque, annonce les prochains activités, dont une nouvelle formule, Paroles de lecteurs, vendredi 29 novembre à 18h00, qui ressemble au café-livres que j'avais lancé il y a quelques années.

Vignette 2 : le public s'exprime, ici Francis Crépin, dont ma conférence lui a inspiré à son tour une conférence, sur l'arbre de Jessé, un motif religieux et artistique qu'on peut admirer dans notre basilique (dans le coin droit, par la grande entrée).

Vignette 3 : Annie Lalonde présente et commente ses aquarelles sur l'arbre. L'exposition est visible jusqu'en début décembre. Ensuite, Annie exposera au 115.

Vignette 4 : pour les lecteurs, une sélection d'ouvrages sur les arbres, dans le hall de la bibliothèque. Et pour ceux qui préfèrent le cinéma, vous avez à l'affiche à Saint-Quentin Il était une forêt, réalisé par Luc Jacquet.

lundi 18 novembre 2013

1 + 42



Cette semaine, la campagne des élections municipales va prendre une nouvelle tournure, entrer dans une phase importante pour les socialistes : jeudi soir, les sections locales vont adopter les listes ordonnées de candidats (ainsi que les listes européennes). A Saint-Quentin, la tête de liste ne sera plus un homme seul (c'est ainsi que la presse locale a pu parfois le percevoir), mais suivie, entourée et accompagnée par 42 colistiers. Ce qui va forcément changer l'image et la nature de la campagne.

Cette liste sera évidemment observée à la loupe. En tant que socialiste, j'ai quelques souhaits. D'abord, que le n°2 soit Anne Ferreira. Ca me semble quasi obligatoire. Depuis le conseil national du parti samedi à Paris, nous savons qu'Anne ne figurera pas en position éligible sur la liste des européennes. Plus rien ne l'empêche donc de s'investir dans ces élections municipales, de soutenir Michel Garand, de booster sa candidature en étant placée en deuxième position. Le déficit de notoriété de Michel (lui aussi pointé par la presse locale) peut être comblé par la réputation que s'est faite Anne, depuis plus de dix ans, d'abord en tant que conseillère générale, ensuite en tant que députée européenne, et aujourd'hui comme vice-présidente du Conseil régional de Picardie.

Pour la suite de la liste, il va de soi que les secrétaires des deux sections locales seront présents, puisque Michel Garand a su les rassembler autour de lui, après plusieurs années de division. Mais le rassemblement doit aller plus loin, inclure ceux que j'appellerais les socialistes historiques, qui se sont éloignés du parti mais qui gardent encore une image locale assez forte : je pense essentiellement à Maurice Vatin, ancien conseiller régional et tête de liste socialiste en 1995, et à Denis Lefèvre, ancien président du district (la communauté d'agglomération aujourd'hui).

Enfin, je souhaite que cette liste ne soit pas constituée uniquement d'adhérents socialistes, mais qu'elle soit très largement ouverte à la société civile, des personnalités locales connues pour leur engagement dans le monde associatif, syndical et économique. Je crois que l'annonce de la liste, si elle est attractive, si elle répond aux quelques souhaits que je viens d'exposer, peut déclencher une dynamique qui pour l'instant n'est pas visible.

Cette liste, je vais bien sûr voter pour, quelle que soit finalement sa composition. Je n'ai qu'une seule réserve : si Stéphane Monnoyer en fait partie, je m'abstiendrais. Faut pas charrier : un type qui vient de l'extrême droite, qui est resté un homme de droite, qui ne représente strictement rien sur la ville, qui décrédibilise les socialistes par son parcours sinueux, il ne faut vraiment avoir plus rien en magasin pour aller le chercher ! Michel Garand, qui ne se cache pas d'être franc-maçon, a tout de même, dans cette pépinière de la République qu'est à sa façon le Grand Orient de France, mieux à nous proposer en termes de recrues de qualité !

dimanche 17 novembre 2013

Ciné rendez-vous



Je vous invite à trois prochains rendez-vous au cinéma de Saint-Quentin. Demain, le ciné philo présentera le documentaire Room 237, réalisé par Rodney Ascher, une étude du célèbre film de Stanley Kubrick, Shining, et de sa symbolique complexe, adapté du roman de Stephen King.

Jeudi prochain, j'aurai le plaisir de recevoir Henri Barbier et Nathalie Joffrin, à l'occasion de la projection du film Donner et recevoir, de Michèle et Bernard Dal Molin, suivie d'un débat sur une délicate question de société, sujet parfois tabou, le don d'organes.

Enfin, le ciné philo du mois suivant, le 9 décembre, proposera le film de Stan Neumann, L'oeil de l'astronome, qui traite des déboires du grand savant Kepler avec les autorités religieuses de son temps. L'invité sera Laurent Portois, professeur de physique et président de l'association Saint-Quentin Astronomie.

Comme un poisson dans l'air



Quel rapport y a-t-il entre un arbuste bonzaï, du boudin noir, un jardin ouvrier et les Guides Soleil ? Aucun rapport, évidemment, sauf à Saint-Quentin, où tous les quatre se retrouvent dans les mêmes locaux, rue de Normandie. A l'origine, c'était une pouponnière, réservée aux salariés de l'entreprise David-et-Maigret, qui a ensuite donné son nom à une école primaire, devenue aujourd'hui maison des associations : cinq s'y sont installées, la visite a eu lieu ce samedi, à travers des pièces et des couloirs bondés.

La présidente et fondatrice des Guides Soleil, Claudette Lemire, a rappelé que ce mouvement de jeunesse et d'éducation populaire s'évertuait à pratiquer le vivre ensemble, par de multiples activités citoyennes (vignette 1). C'est ensuite Christian Vilport, président des Jardins Ouvriers, qui a montré l'utilité sociale de sa puissante association, en soulignant deux évolutions, une heureuse, la présence féminine dans un loisir longtemps masculin, une malheureuse, la montée très coûteuse du vandalisme. De son côté, François Devilliers, président du Bonzaï Club, nous a conté l'histoire de son introduction en Occident et le grand art qu'exige cette pratique orientale (vignette 2). Enfin, Daniel Caudron, président de l'association d'animation du quartier Saint-Jean et Grand Maître de la Confrérie du Boudin, a remercié, à ce double titre, la Municipalité pour ce nouvel aménagement (vignette 3).

Les élus étaient nombreux, les candidats aux élections municipales étaient présents, ce qui m'a bien sûr, dans chaque local d'association, inspiré des pensées politiques diverses. Chez les Guides Soleil, je me suis demandé quel serait notre prochain guide, le futur soleil qui va éclairer la campagne électorale (comme Napoléon voyait se lever celui d'Austerlitz au dessus du champ de bataille). En écoutant Christian Vilport, j'ai songé à Voltaire, à la fin du Candide : "Il est sage de cultiver son jardin". Peut-être que beaucoup de politiques devraient en prendre de la graine ! Au Bonzaï Club, c'est l'esprit zen qui m'a tenté, avant d'être rattrapé par ce cri tellement ressemblant des kamikazes : Banzaï ! Mais aucun candidat ne s'est jeté sur le sortant, Xavier Bertrand ... La salle dédiée au Boudin de Saint-Jean a de gros poissons au plafond (vignette 3) : je me suis interrogé sur la possible pêche aux voix, étant donnée la période.

Le maire arrive en bande serrée, alors que ses adversaires n'ont pas l'esprit de meute. Il tutoie, touche, taquine mais ignore royalement les autres postulants, comme s'ils étaient fondus dans les murs. Signe des temps : des administratifs sont de l'équipe, claquent parfois la bise à des élus. L'opposition a droit à des mains froides ou à des silences de plomb. Xavier Bertrand n'est pas un homme, c'est un oeil : il voit tout, repère qu'au dessus de nos têtes (vignette 3) il manque un poisson, la carpe, ce qui lui donne l'occasion d'un jeu de mots qui amuse l'assistance. Justement : Bertrand est à l'aise dans cette foule, comme un poisson dans l'eau, mais ici dans l'air ! C'est l'oeil qui voit tout, et moi je suis l'oeil qui voit l'oeil ...

Revenons à nos poissons : que font-ils à cet endroit ? En fait, ce sont les anciens décors de l'école primaire qui sont restés. Derrière les poissons, avez-vous remarqué (vignette 3) qu'il y a tout un bestiaire, zèbre, guépard, bouc, antilope, singe, oiseau ... ? C'est la fresque de Gabriel Girodon, datant du début du XXe siècle. Bref, ce samedi matin, il y avait du monde et des bêtes à David-et-Maigret.

samedi 16 novembre 2013

Au nom des femmes



Moment d'émotion ce matin en salle de Verdun, à Saint-Quentin : l'association Aster International fêtait ses vingt ans d'existence, en l'absence de sa fondatrice, Marie-Lise Semblat, décédée le 21 avril dernier, lors d'une mission à Haïti. Un bel hommage lui a été rendu, par Jean-Jacques Boyer, sous-préfet, au nom de l'Etat, et par Juliette Compaoré, présidente d'Aster : le souvenir de Marie-Lise n'a pas cessé de nous accompagner tout au long de la journée.

L'ouverture de ce colloque international par le représentant de l'Etat a permis de mesurer les progrès effectués en matière de condition féminine. Par exemple, l'armée et la magistrature, longtemps réservées aux hommes, s'ouvrent petit à petit aux femmes. Elles sont 11% parmi les effectifs militaires, ce qui nous met au deuxième rang mondial, après les Etats-Unis. Le feuilleton de télévision "Le juge est une femme" est significatif des évolutions dans ce corps de métier.

En politique aussi, la situation bouge. Une loi récente, mais trop peu connue, a instauré pour les élections municipales la parité de candidatures dans les villes de 1 000 à 3 500 habitants, qui en étaient exclues jusqu'à maintenant. C'est un pas énorme. Et puis, il y aura le prochain scrutin cantonal, qui lui aussi établi la parité, dans une assemblée où les femmes étaient quasiment bannies. Au passage, Jean-Jacques Boyer a déploré la lamentable remarque du conseiller général Bernard Ronsin sur les femmes et leur pot de confiture (voir le billet du 16 octobre, "Charcuterie et confiture").

A la tribune (vignette 1), de gauche à droite : Graziella Basile, administratrice d'Aster, bien connue à Saint-Quentin pour avoir longtemps travaillé au journal L'Union ; Thierno Ba, président de l'ONG Union Solidarité Entraide ; Nouzha Skalli, députée marocaine, ancienne ministre ; Jocelyne Gendrin-Guinebault, consultante à Aster ; Nathalie Lobjoie, déléguée départementale aux droits des femmes, en mission auprès du préfet (elle a mené récemment une opération à l'intérieur d'un supermarché saint-quentinois, dans le cadre de la lutte contre les violences faites aux femmes) ; Yveline Nicolas, animatrice du groupe d'ONG Genre et développement durable.

Fidèle à sa vocation, Aster International a rassemblé des amis venus de loin, Maroc, Sénégal, Grèce, Roumanie, Canada, Burkina Faso, République Démocratique du Congo, ... (vignette 2, une partie de la délégation, autour de Jean-Pierre Semblat et de son fils Jean-François). A signaler aussi, la présence de Charlotte, fille de Marie-Lise, venue de Québec. C'est sûr, Marie-Lise aurait aimé ce vingtième anniversaire ... au nom des femmes, bien sûr.

vendredi 15 novembre 2013

HQE à l'UPJV



L'UPJV (université de Picardie Jules-Verne) a présenté hier soir, dans ses locaux de Saint-Quentin, son projet de campus, regroupant l'IUT et l'INSSET. A la tribune étaient présents Philippe Gaudu et Michel Brazier, de l'UPJV, le maire Xavier Bertrand et la vice-présidente du Conseil régional Anne Ferreira (en vignette). Une centaine de personnes assistaient à cette réunion publique. A terme, 1 000 étudiants seront concernés par cette nouvelle structure, qui va nécessiter des aménagements. L'objectif est de constituer un pôle attractif d'enseignants-chercheurs qui rayonne jusqu'à Amiens, Compiègne et Reims, et de permettre des formations jusqu'à bac+8. Les travaux débuteront en mai 2014, pour une ouverture à la rentrée universitaire de 2015.

La rencontre aurait pu être conventionnelle, informative et technique (et elle l'était en grande partie). Mais à quatre mois du scrutin des élections municipales, l'ombre de la politique était évidemment présente. D'abord par un probable candidat à la tribune, Xavier Bertrand, et à ses côtés une possible candidate qui a finalement renoncée, Anne Ferreira. Et puis par la constitution de la salle : de nombreux adjoints et conseillers de la majorité ainsi que la tête de liste de l'opposition. C'est Vincent Savelli qui a pris la parole le premier, pour s'en prendre à la presse (c'est classique chez les politiques) qui a repris en titre une déclaration manifestement maladroite de la part du vice-président de l'Agglomération : "Saint-Quentin ne sera jamais une ville universitaire". Il voulait dire "généraliste", mais le mot, selon lui, a été coupé.

Xavier Bertrand s'est assez rapidement, mais habilement, imposé en maître de séance, n'hésitant pas à se mettre du côté du public, quand il s'inquiète de savoir si les places de parking seront désormais suffisantes (le maire suggère une étude) ou si le logement des étudiants sera assuré (le maire se tourne alors vers la conseillère régionale pour l'interroger sur sa participation financière). Anne Ferreira n'est pas non plus en reste, lorsqu'elle déroule malicieusement la contribution des collectivités : la Région 5 millions d'euros, l'Etat 2 millions, l'Europe 600 000, le Conseil général 625 000, l'Agglomération et la Ville 310 000 chacune. A quoi Xavier Bertrand rétorque que ce n'était pas dans les compétences de Saint-Quentin et l'Agglo (ah la politique, quel métier !) Le maire en a profité pour faire deux annonces, une future résidence universitaire et une maison des étudiants (dans l'ancien Casino), et taclé au détour d'une phrase le gouvernement ("il n'y a plus d'argent dans les contrats de plan Etat-Régions").

Ce qui est également intéressant dans ce genre de réunion, ce sont les questions et préoccupations du public. Les prévisibles nuisances du futur chantier ont manifestement préoccupé : la circulation, le stationnement, le bruit, la hauteur des bâtiments ... Heureusement, Philippe Gaudu a prononcé un mot magique qui a rassuré tout le monde (du moins en apparence) : HQE, haute qualité environnementale, qui fait sérieux, technique et positif. Vous connaissez l'expression "quel chantier !", pour désigner un endroit désordonné et sale. Eh bien, le mot va devoir disparaître du dictionnaire, grâce au chantier HQE, un chantier propre et ordonné (de même qu'on parle maintenant de "guerre propre"). Le bruit des machines sera autorisé dans des créneaux horaires précis, les roues des véhicules seront lavées pour ne pas laisser de la boue sur la chaussée.

L'évocation de ce chantier HQE m'a plongé dans une sorte de rêverie, où les bulldozers étaient équipés de roues en mousse, où des casques distribués aux riverains neutralisaient les agressions sonores des marteaux-piqueurs ... Quelle formidable société que la nôtre, qui a inventé des chantiers qui ne sont plus des chantiers ! La HQE concerne aussi les bâtiments. Par exemple, les fenêtres du CDI (la bibliothèque) ont été conçues pour faire entrer des flots de lumière. Quand j'étais étudiant, le charme des bibliothèques universitaires (La Sorbonne, Sainte Geneviève) venait de leur légère pénombre, qui faisait tout leur mystère. Il fallait se presser autour de loupiotes pour lire et écrire, ce qui aidait à la concentration, en faisant abstraction de l'environnement. Les étudiants d'aujourd'hui, dans leur aquarium lumineux, doivent être bien malheureux.

Autre problème soulevé par le patron du restaurant voisin, le Vasco de Gama : la restauration des étudiants. Réponse de Michel Brazier : manger est devenu une affaire "compliquée", car le "profil alimentaire" (sic) des étudiants a évolué. Le resto U du CROUS n'a plus leur faveur. La mode est à la sandwicherie et à la restauration rapide. L'UPJV conseille aux commerces de bouche d'adapter leurs formules. Quel dommage qu'il n'y ait pas d'alimentation HQE !

Le président de l'INSSET estime que le stationnement n'est pas un problème, puisque les étudiants pratiquent les transports en commun. En revanche, un garage à vélos serait le bienvenu. Une dame, dont les ateliers sont situés juste devant la future entrée du campus, craint les allers et retours. Elle aimerait que l'entrée soit placée n'importe où ailleurs, mais pas devant chez elle (rires de la salle). Un monsieur regrette que les étages de l'IUT lui bouchent la vue sur la basilique. Dans ces deux derniers cas, la HQE n'est hélas d'aucun secours ...

jeudi 14 novembre 2013

Des projets pour notre ville



A quatre mois du scrutin municipal, il est temps d'entrer dans les projets. Les citoyens n'attendent pas des politiques qu'ils se critiquent les uns les autres, mais qu'ils fassent des propositions. Beaucoup plus que sur la tête de liste et ses colistiers, c'est sur les programmes que les électeurs se prononcent, lors d'un scrutin local. C'est pourquoi, à Saint-Quentin, même si le contexte national est défavorable, la gauche peut l'emporter, à condition d'avoir un projet fort à exposer.

Je dis bien : un projet fort, innovant et audacieux, pas une liste de mesurettes qui serait le copié-collé des catalogues électoraux précédents. Il faut créer la surprise, oser et imaginer. Ce projet, j'y ai forcément réfléchi, depuis longtemps, puisque j'aspirais à devenir tête de liste socialiste. Mon échec n'empêche pas de poursuivre le débat, de lancer des idées. Je vois trois décisions fortes, trois chantiers très ambitieux pour Saint-Quentin :

1- L'installation du tramway. Plusieurs villes comparables à la nôtre, je pense à Valenciennes par exemple, l'ont fait. Depuis quelques années, c'est un projet qui se répand, qui séduit. D'abord parce qu'il est non polluant, économe en énergie, mais surtout parce que le tramway redynamise une ville, la redessine, favorise les flux entre les quartiers et le centre, renforce une unité de la cité souvent perdue ou malmenée. Le tramway est plus pratique pour les habitants : des passages plus fréquents, un service qui couvre mieux les heures de la journée et de la nuit. A la différence du bus, un tramway est un mode de locomotion beaucoup plus structurant pour une ville, qu'il irrigue, qu'il innerve vraiment. Ce choix permet aussi de traiter d'autres sujets épineux, comme la circulation automobile encombrante et le problème du stationnement. L'installation est certes coûteuse, mais il faut savoir ce qu'on veut (et ce qu'on ne veut pas). L'actuelle municipalité n'a jamais manqué d'argent pour des projets très ambitieux : pourquoi une équipe de gauche n'en serait-elle pas capable ?

2- La transformation du coeur de ville (que je préfère à l'expression hyper-centre). Sa redynamisation est nécessaire, mais il faut considérer comme un fait acquis qu'on ne retrouvera pas le centre-ville d'autrefois. On ne va pas y faire venir les activités et les populations d'Auchan et Cora ! Les zones commerciales ont leur existence propre, contre laquelle il n'y a pas à lutter. A Saint-Quentin, nous avons la chance de posséder un coeur de ville historique, culturel et artistique, qui n'est pas donné à toutes les municipalités. C'est ce créneau qu'il faut occuper et exploiter.

L'Hôtel de Ville, le théâtre Jean-Vilar et la basilique forment un magnifique écrin, au milieu d'une cité qui contient plusieurs centaines d'oeuvres d'art déco (quelques-unes seulement, en France, peuvent se targuer d'un tel patrimoine). C'est là dessus qu'il faut jouer, en révolutionnant la place de l'Hôtel de Ville, qu'il vaudrait mieux appeler la place de l'Hôtel de Vide ! Cet espace immense, nu, froid, venteux ne peut plus être laissé en l'état. Une place, au centre d'une ville, n'est pas faite pour rester un désert de béton. Je ne crois pas aux activités temporaires qui s'y installent, précisément parce qu'elles sont éphémères et que la plupart du temps, la grand place est abandonnée à sa vacuité.

C'est donc une structure lourde et fixe qu'il faut y installer : en faire un lieu de rencontre, et non plus un lieu de passage, un point de fixation et non plus un chemin de traverse. Il faut redonner au coeur de ville tout son cachet et son prestige, en un mot son identité, en construisant sur la place de l'Hôtel de Ville un Centre culturel international dédié principalement à l'art déco, puisque aucune structure spécifique n'existe sur ce qui fait pourtant l'originalité de notre ville. Ce Centre permettra des conférences, des expositions, des projections, des réunions, avec une architecture en conformité avec son riche environnement. Ce Centre aurait une portée mondiale, puisque plusieurs villes à travers le monde sont en quelque sorte les soeurs de Saint-Quentin, art déco comme elle. La fréquentation du coeur de ville doit être par ce biais repensée : elle ne peut viser que des publics de type classes moyennes, tourisme culturel ou monde économique. Encore une fois, on ne reviendra pas au centre-ville très populaire d'autrefois (ou alors par démagogie).

3- La place de l'Hôtel de Ville, c'est la plage de l'Hôtel de ville, et aussi le symbole politique de l'ascension de Xavier Bertrand. C'est pourquoi je veux toucher à ce symbole et à cette réalisation. Non pas pour supprimer la plage : j'ai toujours été favorable à cette idée. Mais pour la déplacer ! Son maintien deviendra impossible avec l'installation du Centre culturel d'art déco, il faudra donc la changer de place, en cohérence avec le projet de redorer le blason du coeur de ville, de lui restituer sa dimension culturelle, artistique et historique.

La plage d'été sera donc transportée dans le quartier Europe, qui plus qu'un autre a besoin lui aussi de redynamisation, d'autant que beaucoup d'usagers de la plage viennent d'Europe. Ce sera une grande fierté pour ce quartier de l'accueillir dans ses murs : l'endroit tout trouvé, suffisamment vaste, c'est le parking entre la galerie commerciale et le Centre social. Que cette plage perde son emplacement central ne gêne pas sa fréquentation : Saint-Quentin n'est pas à ce point immense ! Quant au Village de Noël, il aura pour lui la place Gaspard-de-Coligny. Le commerce d'Europe sera réactivé, celui du centre-ville bénéficiera d'un nouveau public dont le pouvoir d'achat sera plus en phase avec ses tarifs.

Ce ne sont que quelques idées, mais suffisamment fortes pour éveiller peut-être la campagne électorale, la tirer vers des projets nécessairement discutables, critiquables et amendables, mais que j'inscris dans un plan d'aménagement d'ensemble qui a sa cohérence et ses finalités. Au fond, je crois que tout dépend de l'état d'esprit : je veux une gauche qui ose, qui propose, qui prend des risques, qui se montre audacieuse, ambitieuse et imaginative.

mercredi 13 novembre 2013

Il est interdit d'interdire



Un gauchiste s'est infiltré au sein de la municipalité UMP de Saint-Quentin ! Il fait sa révolution jusqu'au 1er décembre, dans la Galerie Saint-Jacques. Son nom : François Bénard, artiste plasticien. Son mot d'ordre, repris d'un slogan de Mai 68 qui donne son titre à l'exposition : il est interdire d'interdire. Son objectif : contester la société de consommation ( objets futiles, interdictions idiotes made in Japan, tourisme de masse, gaspillage ...) Ce n'est pas méchant, pas violent, mais plutôt amusant, ironique, parodique.

Samedi dernier, c'était le vernissage, en présence d'artistes de chez nous bien connus, Krako, Luc Legrand, Pomme, Jean-Claude Langlet, Jean-Marie Chamblay et aussi quelques artistes de la politique qu'il est inutile de citer. L'art a beau être une activité pacifique, une oeuvre d'art a beau n'avoir jamais mordu personne, François Bénard a beau montrer un visage très doux et un tempérament très calme, les réactions à son travail ont été parfois violentes (quand vous irez visiter son exposition, ayez la curiosité de parcourir à l'entrée le livre d'or). Un couple bien mis, très propre sur lui, a rebroussé chemin dès les premiers mètres, le monsieur disant brutalement à la dame : "Allez, on s'en va !"

Vous, lecteurs et prochains visiteurs, venez, voyez et restez : vous ne serez pas déçus. L'expo commence par ... des sacs-poubelles (vignette 1, François Bénard au milieu), chacun pouvant en gonfler un et l'ajouter à l'amoncellement. Késako ? A vous de le dire ... Pour moi, c'est la pollution habituelle aux quatre coins de la planète. A Djibouti, sur plusieurs kilomètres, j'ai vu des arbres dépotoirs couverts de ces sachets bleus. Un ami m'a glissé à l'oreille : sous les sachets, la plage ! Bien vu.

Les pavés, eux, voient pousser dans leur pierre des tendeurs à vélo (vignette 3) : pour un lancer élastique ? Et cet euro géant planté de petits palmiers en plastique, comme on en met dans les cocktails pour touiller, que signifie-t-il ? Ca ne s'invente pas : à Dubaï, que je connais un peu, une île artificielle qui a pris la forme de l'arbre, une folie humaine, un déplacement monstrueux de sable, sur les pavés la plage ! (vignette 2) Enfin, regardez ces peaux de bêtes, fiers trophées de nos chasseurs : Bénard, gaucho-écolo, ne peut pas aimer. Mais regardez d'un peu plus près : les traces dans le poil, ce sont des marques, Nike, Puma, Adidas ! (vignette 4)

Il y a plein d'autres choses dans "Il est interdit d'interdire". Je vous les laisse découvrir, avec un regard et une interprétation qui seront peut-être différents des miens. En tout cas, le soixante-huitard n'aura pas fait trembler les murs de la Municipalité : après le vernissage, plusieurs participants se sont rendus à l'Hôtel de Ville, non loin de là, pour accueillir le défilé des Miss, sexy mais pas très soixante-huit. Qu'importe : Ce n'est qu'un début, continuons le combat !

mardi 12 novembre 2013

Haine de la politique



Le chef de l'Etat hué deux fois dans la même journée, lors des cérémonies officielles du 11-novembre ; le maire UMP de Châteaurenard, Bernard Reynes, victime d'une agression au couteau, ainsi qu'une adjointe et une conseillère municipale : on peut si l'on veut minimiser, relativiser, en disant que dans un cas, il s'agit de l'agitation d'une poignée d'extrémistes, dans l'autre cas, de l'acte isolé d'un déséquilibré. Je ne veux ni minimiser, ni relativiser. Au contraire, je crois que ces deux incidents d'hier sont gravissimes et révélateurs d'un dramatique climat : d'abord parce qu'on a voulu tuer des élus de la République, parce qu'ils étaient élus de la République ; ensuite parce qu'on a porté atteinte au chef de l'Etat dans l'exercice de ses fonctions (non pas à l'homme ou au socialiste), alors qu'il déposait une gerbe aux héros et victimes de la Grande Guerre, sous l'Arc de Triomphe. Tentative de meurtre, sacrilège envers la République : c'est la haine de la politique qui se manifeste.

Ce n'est certes pas nouveau, mais le phénomène est grandissant et inquiétant : la désaffection d'une partie de l'opinion publique envers sa classe politique, qui provoque dans certaines têtes des comportements radicaux et fanatiques. Aujourd'hui, l'image du politique, de l'élu et même du militant s'est considérablement détériorée : vénal, corrompu, opportuniste, voilà comment l'homme politique est souvent dépeint par nos concitoyens dans les conversations ordinaires. Ce tableau est évidemment faux, mensonger, injuste, à décourager en tout cas les bonnes volontés à s'engager en politique. Les causes ne sont pas selon moi circonstancielles, mais profondes et anciennes. J'en vois principalement trois :

1- La perte d'autorité induite par la normalisation de la classe politique, en premier lieu du chef de l'Etat. Depuis une vingtaine d'années, nos hommes politiques veulent ressembler à tout le monde, être des citoyens comme les autres. Chirac, Sarkozy et Hollande ont épousé cette ligne, qui vient de l'air du temps, que jamais De Gaulle ou Mitterrand n'auraient acceptée. Le pouvoir ne se départit pas d'une certaine majesté, même si point trop n'en faut, la République n'étant pas non plus la monarchie. Mais il doit y avoir respect, élévation et exemplarité, ces trois vertus allant ensemble. A défaut, on en vient aux actes désespérés de la journée d'hier.

2- Il faut en finir avec l'idéologie (car c'en est une !) de l'écoute, peut-être utile en psychologie (et encore, car elle nourrit le narcissisme), mais pernicieuse en politique : écouter les gens, selon l'expression à la mode, ça n'a aucun sens, leur parole est forcément multiple, individuelle, contradictoire, il ne peut en ressortir aucune ligne politique claire. C'est aux citoyens d'écouter les politiques (et pas l'inverse), de se faire une idée et de voter en conséquence. Se mettre à l'écoute, c'est se condamner à vouloir faire plaisir à tous, ce qui est impossible. Faire de la politique, c'est faire des choix, donc des mécontents.

3- Le citoyen est aujourd'hui totalement déresponsabilisé. C'est sa parole à lui, non plus celle du politique, qui est d'or. Ca ne va pas du tout. Un citoyen responsable (pléonasme), c'est quoi ? C'est un citoyen qui assume ses choix. Ceux qui ont voté Hollande savaient très bien, en gros, ce qui les attendaient ; les autres ont le droit de protester, dans la légalité ; mais ses électeurs, non : il faut être cohérent avec soi-même. Quant aux déçus, qu'ils s'en prennent à leurs propres désirs illusoires, et pas à la réalité. On nous fait croire que toute protestation serait en soi légitime : non ! L'actuel président a passé un contrat avec la nation pour cinq ans : ce terme doit être respecté. A l'issue, chacun jugera, renouvellera ou pas son choix.

Si on veut faire taire la haine de la politique (et conséquemment de la démocratie, puisque dans ce régime seul, la politique est une activité reconnue et encouragée), il faut un nouvel état d'esprit public : rétablir l'autorité républicaine, restaurer le sens de l'intérêt général, réaffirmer la responsabilité individuelle et collective des citoyens. De son côté, la classe politique, à tout niveau, doit elle aussi faire des efforts : pratiquer un recrutement militant plus large et plus exigeant, s'abstenir des bons mots, des petites phrases et des attaques personnelles. Car ce qui vaut en politique, ce sont les convictions, les propositions et les actions. Alors, la haine irrationnelle de la politique se convertira peut-être en amour raisonnable de la politique.