vendredi 31 janvier 2014

Ciao Cavanna !



Cavanna, disparu avant-hier, c'était d'abord pour moi une gueule comme on n'en fait plus, un physique. Je l'avais croisé il y a quelques années chez Gibert, boulevard Saint-Michel à Paris, plus vrai que nature ! Une tête de personnage de BD ... J'aimais aussi sa voix, qui avait quelque chose d'envoûtant : à l'entendre parler, même quand je n'étais pas d'accord avec lui, il m'obligeait à le suivre, à partager ses idées, tant sa force de persuasion était grande.

Ses idées, justement, c'est ce que j'appréciais par dessus tout chez lui (pas tellement ses dessins, ni ses autobiographies à succès). Je lisais sa chronique dans Charlie, ma préférée de tout le journal. Je ne le suivais pas toujours dans ses réflexions, loin de là ; mais il me faisait toujours réfléchir. Bien sûr, j'appréciais son côté militant laïque, républicain fervent ; un peu moins le libre penseur ou le bouffeur de curé qui me paraissaient parfois d'un autre âge. Il y avait du Charlie-hebdo (ça m'allait) et du Hara-Kiri (pas trop mon truc) en lui. Je crois que c'était un anarchiste joyeux, ce qui est tout de même plus intéressant qu'un socialiste triste.

Je me souviens que mon prof de philo, en 1979, recommandait aux élèves la lecture de François Cavanna, parce que cet iconoclaste, ce rebelle, cet insoumis avait le respect absolu des règles ... de la langue française, dont il était un grand amoureux, lui dont les origines étaient italiennes. Il y avait aussi une dimension fort méconnue de son personnage qui m'intéressait vivement, qui est aujourd'hui à peu près complètement oubliée : ce sont ses méditations sur l'immortalité humaine, dans son ouvrage "Stop-Crève".

Non pas que Cavanna craignait cette mort dans laquelle il vient d'entrer, mais il trouvait très dommage d'avoir à mourir (et je suis d'accord avec lui !). Du coup, il estimait que l'objectif qui devait mobiliser la société, la science et l'Etat, c'était la recherche de l'immortalité ! Rien de mystique ou de surnaturel dans sa préoccupation, qu'il essayait de rendre la plus rationnelle possible. Au fil du temps, il me semble qu'il avait abandonné ce projet. Aujourd'hui, c'est trop tard : Cavanna restera immortel, seulement dans nos coeurs. Ce qui n'est déjà pas si mal. Ciao l'ami !

jeudi 30 janvier 2014

L'Aisne toute nouvelle



Un journal qui change de peau, c'est un événement pour la ville. Samir Heddar, rédacteur en chef de L'Aisne nouvelle, justifie ce matin, dans son éditorial, le changement de formule, par quatre arguments principaux : faciliter le cheminement à travers les différentes rubriques, rendre complémentaires les supports de lecture (papier, ordinateur, smartphone, tablette), donner davantage la parole aux lecteurs et internautes, préserver l'actualité d'hyper-proximité.

Pas de gros scoop au milieu de l'actualité ordinaire du jour, mais un petit, tout de même, pour la route : Jérôme Lavrilleux, qui essuie les plâtres dans une grande interview, annonce qu'il sera candidat à sa propre succession ... aux prochaines élections cantonales, l'an prochain. Il y a quelques jours, le conseiller général de Saint-Quentin nord suggérait la candidature de Pascale Gruny aux sénatoriales, en remplacement de Pierre André. Toujours très organisée et soudée, la droite saint-quentinoise !

Etant bon public, c'est-à-dire passionné de presse locale, je ne suis pas un juge objectif et impartial. Je lis tout (sauf les pages sportives) et j'aime tout. Simplement, cette nouvelle formule me plaît et je continuerai à lire chaque édition de L'Aisne nouvelle, comme je le fais avec les autres journaux. Ce changement n'est d'ailleurs pas un bouleversement, plutôt un rafraîchissement. Le titre inverse les couleurs : de rouge sur blanc, il devient blanc sur rouge, à la façon du Courrier picard, avec un L' assombri.

Je me demande même si la nouvelle Aisne nouvelle ne se courrier-picardise pas un peu ? A première vue, non, mais si vous prenez les dernières pages, oui, c'est flagrant. Les rubriques télévision, programme, cinéma, magazine ont une même maquette dans les deux journaux. Le Courrier picard, dans son numéro d'aujourd'hui, lance un "clin d'oeil amical" à son concurrent et à sa nouvelle formule, qu'il juge malicieusement ... "plus Courrier picard !", tout en prenant garde de préciser que "les deux journaux se différencient sur l'essentiel : le contenu". Il n'empêche qu'il est légitime de se demander si le Courrier picard ne va pas fusionner à terme avec sa filiale Aisne nouvelle.

J'ai vu disparaître La Voix de l'Aisne et L'Union délaisser Saint-Quentin. Dans beaucoup de villes moyennes, il n'y a plus qu'un seul organe de presse. Ce qui est bien sûr dommageable en termes de pluralisme et de vitalité démocratique. Mais les impératifs économiques sont là aussi. Il est urgent de re-populariser la presse locale, d'étendre sa lecture, de revaloriser son indispensable fonction, de relancer ses ventes. L'école peut jouer un rôle, ainsi que les hommes politiques, qui ne montrent pas toujours l'exemple en dénigrant trop facilement la presse, à défaut de l'instrumentaliser.

mercredi 29 janvier 2014

Objectif emploi



A la suite de la publication des derniers chiffres du chômage, la droite a parlé d'échec de la politique gouvernementale, certains de ses représentants ont même demandé la démission du ministre du Travail ou du Premier ministre. Non, il n'y a pas échec : le résultat d'une politique se mesure dans la durée. Un revers ponctuel n'est pas une défaite généralisée.

Mais François Hollande n'avait-il pas promis l'inversion de la courbe du chômage à cette date ? Je n'aime pas le terme de promesse, qui relève du registre moral, qui ne veut pas dire grand chose en politique. Ce qui est vrai, c'est que le chef de l'Etat s'est engagé à tout faire pour que le chômage commence, en ce début d'année, à décélérer, ce qui ne s'est pas exactement confirmé. Mais l'objectif demeure et le gouvernement travaille dans cette direction : l'essentiel est là, le reste est vaine polémique.

A la place de promesse (terme qui alimente le discours démagogique et extrémiste sur les soi-disant "promesses non tenues", à droite comme à gauche), je préfère le mot d'objectif ou d'orientation, qui sont beaucoup plus justes. Ce n'est pas du pinaillage ou de la rhétorique : il faut que la parole publique soit exacte et précise, sinon on va vers le n'importe quoi. L'inversion de la courbe du chômage est un objectif à tenir, coûte que coûte, au milieu des déconvenues, afin de mobiliser l'économie, rendre confiance à la société, redessiner un possible avenir. C'est pourquoi cette direction est pertinente et qu'il faut la maintenir.

Mais cet objectif est-il réaliste ? Hollande n'a t-il pas péché par optimisme ou excès de bonne volonté ? Non, pas du tout. Quand Nicolas Sarkozy s'était engagé, au début de son quinquennat, à rétablir le plein emploi en cinq ans (c'est-à-dire un taux de chômage résiduel, de quelques points seulement, comme dans les années 60), oui, la mesure était irréaliste et les faits se sont chargés de le confirmer. Mais le gouvernement actuel a posé un objectif basique, élémentaire, incontournable : si l'on veut commencer à voir se réduire le chômage, si l'on veut impulser une dynamique de création d'emplois, le premier signe, c'est le retournement de tendance, même minime. L'objectif de François Hollande est donc parfaitement raisonnable, et même indispensable, à partir du moment où l'emploi est la priorité.

Donner un chiffre précis, dire qu'on va réduire par exemple de moitié le nombre des demandeurs d'emplois, là l'objectif serait irréaliste, et même absurde. Hollande s'en est bien gardé : il s'est concentré sur le seul indicateur viable et prometteur, l'inversion de la courbe. Ne pas vérifier la tendance résultats après résultats, ce ne serait pas responsable. Que les derniers résultats ne soient pas bons, ce n'est pas désespérant, et ce n'est surtout pas le signe qu'il faudrait changer de politique, mais au contraire poursuivre dans ce qui se fait, se construit progressivement. Car la tendance est à la stabilisation, qui n'est pas une fin en soi, qui n'est même pas un objet de satisfaction, mais qui est une donnée qui confirme le tracé, à prolonger. Si l'évolution à venir contredisait l'objectif gouvernemental, ce sont les électeurs qui en tireraient par leur vote toutes les conséquences ; mais pas aujourd'hui, par ses appels à la démission, l'opposition de droite.

En s'engageant à inverser la courbe du chômage, François Hollande fixe le cap d'une politique, qui aurait pu se donner d'autres priorités : la relance du pouvoir d'achat, la réduction des inégalités, thèmes qui sont chers à la gauche. Dans l'opposition, on peut se permettre toutes les revendications (et encore, c'est à voir ...). Mais au pouvoir, il faut faire des choix, et s'en donner les moyens. Ceux de Nicolas Sarkozy étaient, pour le secteur marchand, le "travailler plus pour gagner plus" et pour le secteur public la non reconduction d'un fonctionnaire sur deux. La politique de François Hollande est en rupture avec la précédente (ce qu'on ne remarque ou qu'on ne souligne pas assez). Elle est même en rupture avec le socialisme traditionnel ! Hollande privilégie, dans son objectif de faire décroître le chômage de masse, la politique de l'offre et le compromis avec le patronat.

C'est une perspective originale à gauche, qui n'a jamais été tentée dans son histoire, seulement esquissée à certains moments. Ce n'est pas du "social-libéralisme" ou des "cadeaux au patronat", expressions polémiques qui cachent une vérité fondamentale : il y a deux doctrines, qui peuvent se croiser sur certains points, mais qui sont foncièrement différentes, le libéralisme économique et la social-démocratie. Regardez le programme que s'est donnée l'UMP ce week-end : c'est du libéralisme pur jus de chaussette, Alain Juppé, qui connaît son parti, le regrette. La différence d'avec la ligne social-démocrate de François Hollande et du PS est flagrante !

Le paradoxe et la difficulté de François Hollande, c'est qu'il a choisi de faire de la social-démocratie dans un pays, la France, qui n'a pas de culture social-démocrate (pas de syndicats puissants, pas d'esprit de compromis social) et à la tête d'un parti, le PS, qui n'est pas vraiment social-démocrate, qui fait de la social-démocratie sans oser le dire et l'assumer, avec une frange, l'aile gauche, carrément hostile. François Hollande a eu le mérite politique de lever ce complexe, de briser ce tabou, d'utiliser les mots justes. Mais il reste beaucoup d'efforts à faire. Ce n'est pas la droite que je crains : elle est dans son rôle d'opposition, fidèle à elle-même. C'est la gauche qui me préoccupe : ses résistances, ses préjugés, son tropisme historique. Je ne doute pas cependant que la clarification sera progressive, que le parti socialiste a déjà fait de grandes avancées en ce sens.

En tout cas, contrairement à ce qu'on entend parfois, je ne pense pas du tout que le quinquennat Hollande marquera par ses réformes sociétales, mariage pour tous, rythmes scolaires, fin de vie. Je suis persuadé que la droite, d'une façon ou d'une autre, s'y serait aussi engagée. En revanche, le choix social-démocrate, combinant la stimulation de l'offre, l'aide massive aux entreprises et l'objectif obsédant de l'emploi, est une martingale inédite, qui surprend à gauche et qui déstabilise à droite. Elle a tout mon soutien, enthousiaste.

mardi 28 janvier 2014

I'm a cow boy




Depuis l'enfance jusqu'à maintenant, j'ai toujours aimé la mythologie américaine : cow boys et indiens, conquête de l'Ouest, ruée vers l'or, etc. C'est pourquoi je suis allé, samedi après-midi, écouter Benjamin André (en vignette) nous faire une très belle et très érudite conférence sur le western dans la bande-dessinée. Pour une fois, ce n'est pas moi qui tenait le micro !

Le cinéma a précédé le dessin dans l'exploitation de l'Ouest américain. Mais très vite, aux Etats-Unis, la BD s'y est mise, au début du XXe siècle, avec un premier gros succès d'édition, Red Ryder, qui donne le ton : le bon cow boy contre les méchants voleurs de bétail. Suivront King of the Royal Mountain et surtout The Lone Ranger, dans les années 30. A partir de là, les dessinateurs américains vont se détourner des cow boys pour s'intéresser aux super héros, genre Superman.

C'est alors la France et l'Europe qui adoptent l'univers du Far West, dans Tintin en Amérique par exemple (en 1931). Les auteurs reprennent des références continentales pour en quelque sorte "nationaliser" leurs héros : Tom-Mix est appelé le chevalier du Far West, Sitting Bull le Napoléon rouge ! Une évolution se fait jour, qui ira en s'amplifiant : le western humaniste, réaliste et sérieux, qui traite avec respect les indiens, non plus assimilés à des sauvages sanguinaires.

Une autre veine est exploitée après guerre : le western humoristique, avec le célèbre Lucky Luke, dont le meilleur ami est son cheval, et qui se traîne le chien le plus bête de l'Ouest, Rantanplan. Pour détrôner the poor lonesome cow boy, les Tuniques bleues sont lancées : elles parodient les histoires de cavalerie, dénoncent les horreurs de la guerre, tournent en dérision la hiérarchie militaire, adoptent le style gros nez (à la manière d'Achille Talon, Astérix ou Gaston Lagaffe).

Pourtant, malgré la charge burlesque, le western réaliste ne désarme pas : Jerry Spring est un événement dans le monde de la BD. Les années 60 et 70 inaugurent le western violent, où les héros, ou plutôt anti-héros, ont des trognes comme dans les films de Sergio Leone. On reconnait les gueules de Bronson, Eastwood ou Van Cleef. Blueberry, en 1963, perpétue la tradition de John Ford (mais avec une tête de Jean-Paul Belmondo, qui n'a pourtant jamais joué les cow boys !). Il introduit en 1973 la sensualité dans un genre resté très prude, grâce au personnage de Chihuahua Pearl, une sorte de cow girl, aventurière sexy, cigarillos à la Georges Sand aux lèvres.

Le western américain débouche même, chez nous, sur un western anti-américain : c'est la BD Loup noir, publiée dans Pif-Gadget, alors proche du PCF (la politique est décidément partout !). Les années 80 se tournent plutôt vers la science-fiction. Le western dessiné va être relancé avec le personnage de Bouncer, dans les années 90, un videur de saloon, macho, violent et un peu barré. Dans les années 2000, c'est le western humoristique qui fait un retour remarqué avec Gus, trentenaire célibataire, décalé, qui cherche surtout à coucher. Le western sérieux se maintient en grande forme : Texas Exil est un récit original et historique de deux Communards réfugiés dans l'Ouest américain.

Ces dernières années, la BD, qui était née sous l'inspiration du cinéma, s'est faite son inspiratrice, juste retour des choses: Vincent Cassel joue Blueberry, Jean Dujardin Lucky Luke et The Lone Ranger est adapté à l'écran. La boucle est bouclée.

Benjamin nous a gratifié d'une conférence pleine d'humour (obligé, dans le monde de la BD), égayée parfois d'onomatopées, mode d'expression cher au genre. J'ai particulièrement apprécié le bruitage de la charge de la cavalerie, avec sonnerie de trompettes et sabots de chevaux au galop, sur fond de cris d'indiens, le plat de la main frappant à répétitions sur la bouche. J'étais venu avec des questions à poser à notre conférencier : sur Le Cow Boy masqué, une BD que je lisais dans Le Berry républicain, en fin de journal et à la fin des années 60 (le cow boy en question, qui n'a rien à voir avec Zorro, accompagné de son fidèle indien Tonto, serait, d'après Benjamin, une reprise de Red Ryder) ; sur Teddy Ted, un héros, me semble-t-il, de Pif, un blond flanqué d'un brun, tout de noir vêtu et mal rasé, l'outlaw, que Benjamin en revanche ne connaissait pas.

Pour finir et pour prolonger ce billet, je vous invite à vous inscrire à la bibliothèque Guy-de-Maupassant, si ce n'est déjà fait, et à consulter la collection des bandes-dessinées, riche, variée et complète. Et si le coeur vous en dit, allez discuter avec Benjamin, sympathique, passionné et disert, qui sait (presque) tout sur la BD.

lundi 27 janvier 2014

Des voeux B2B



Les cérémonies des voeux s'étalent infatigablement tout au long du mois de janvier. Les Saint-Quentinois retiennent surtout le grand raout du maire au palais de Fervaques. Mais il y a d'autres rencontres qui sont assez courues, notamment les voeux de l'Office du Tourisme, parce que le secteur implique pas mal de monde, en particulier parmi les associations. Vendredi soir, le hall d'entrée, rue Victor Basch, était bondé : plusieurs élus, des jeunes UMP autour de Julien Dive, des responsables associatifs, Bernard Delaire, Jean-Pierre Semblat, Roland Lamy, François Gascoin, mais aussi Hervé Halle, Frédérique Macarez ou Jean-Claude Decroix.

En l'absence du président de l'Office, Bernard Lebrun, retenu par un décès, c'est le vice-président, Alain Bacot, qui a fait le discours d'ouverture. Une phrase a retenu mon attention : "Saint-Quentin ne sera jamais une destination touristique de masse". J'ai alors pensé à cette formule de Vincent Savelli, dans le Courrier picard, plus tard corrigée par lui : "Saint-Quentin ne sera jamais une ville universitaire". Il y a bien sûr une suite, chez l'un et chez l'autre : pour le tourisme, c'est le court et moyen séjour de publics ciblés qui est privilégié.

Audrey Labruyère, la très souriante directrice de l'Office, vendeuse dans l'âme, a tenu ensuite un discours commercialement très musclé, où le vocabulaire du merchandising a été omniprésent, un peu trop à mon goût. On y perdait du vue les finalités culturelles qui sont celles d'une politique du tourisme. Il a été notamment question d'un mystérieux "bitoubi" comme ligne directrice, qui s'écrit B to B ou, en plus tendance, B2B. Rien à voir avec un quelconque échange de bises, propre à cette période de bons voeux. Non, il s'agit de la contraction de business to business, qui désigne une offre touristique s'adressant à une clientèle d'entreprise, direction et encadrement. Remarquez qu'on n'est pas très loin de ce que j'ai moi-même proposé dans un récent billet, à propos du développement touristique du centre-ville, à destination d'un public extérieur et choisi. Les anglicismes en moins.

La dynamique directrice a présenté son équipe, des filles et un garçon souriants eux aussi, qui m'ont fait pensé un peu à des hôtesses de l'air accompagnées par un steward. Annette Poulet, à la retraite depuis peu, n'a sûrement plus reconnu l'Office du Tourisme de ses débuts ... Celui-ci est en place depuis 1997, dans des locaux qu'il partage avec l'administration municipale. Bientôt, c'en sera fini : l'Office s'installera quelques centaines de mètres plus loin, dans l'ancien Café français. Ce que je trouve un peu gênant dans cet emplacement, c'est le peu de visibilité : on est certes tout près de la place de l'Hôtel de Ville, mais au milieu de celle-ci, on ne verra rien. Et puis, l'entrée du parking souterrain barre l'accès. Un temps, il était question de rejoindre le parvis de la basilique, qui offre un bel espace bien dégagé et un environnement qui mériterait d'être réhabilité. Le passage des piétons et des voitures est très bon. Je ne sais plus ce qu'il en est de ce projet, qui me semblait meilleur que le choix actuel.

Xavier Bertrand a remis en perspective la politique touristique de la Ville, en soulignant les atouts de notre localisation géographique, la diversification des produits touristiques et la nécessité d'une augmentation du chiffre d'affaires. Par moments, il s'est étrangement comporté à la façon d'un membre de l'opposition qui s'en prendrait à sa propre politique, pour pointer ces manques. J'ai retenu cette phrase : "Saint-Quentin ne joue pas suffisamment la carte touristique". Autrefois, les communistes parlaient d'autocritique ! Même sentiment en lisant L'Aisne Nouvelle d'aujourd'hui, dans laquelle une pleine page est consacrée à la politique touristique : Bernard Lebrun y décrit joliment le musée des papillons sous les traits d'"un cimetière de papillons épinglés dans une boîte".

Le maire a défendu une politique de promotion reposant sur les réseaux sociaux, plutôt que sur de coûteuses campagnes d'affichage, taclant au passage le Département et son opération "L'Aisne it's open" dans le métro de Paris. Il a défendu également, avec ardeur, la télévision locale, MATELE, visant au passage ceux qui reprochent à ce média d'être trop coûteux et trop nombriliste (c'est pour Michel Garand) ou ceux qui veulent en faire un "journal politique" (c'est pour moi). Bref échange après le discours avec Xavier Bertrand : il conçoit la télé locale comme un magazine de promotion de la ville, je souhaiterais une ligne éditoriale plus journalistique, en partenariat avec la presse locale. Comme toujours en politique, personne n'a raison, personne n'a tort, ni lui ni moi : ce sont deux points de vue différents, sur lesquels seuls les électeurs sont amenés à trancher, dans le choix d'un programme plus général.

Quoi qu'il en soit, il se pourrait bien que la question du développement touristique soit un point important de la campagne des élections municipales, entre les forces en présence. Mais lesquelles exactement ? Le compte à rebours a commencé, la grande bataille est pour bientôt. Tic tac, tic tac, tic tac, comme l'écrit le Courrier picard d'aujourd'hui.

dimanche 26 janvier 2014

Une séparation



Certains lecteurs m'ont fait savoir leur étonnement, d'autres leurs reproches devant mon silence sur l'affaire dont tout le monde parle depuis quinze jours : la relation sentimentale attribuée à François Hollande et la comédienne Julie Gayet par le magazine Closer. Quelques-uns mettent ce mutisme sur le compte de mon embarras. Non, et je vais vous dire pourquoi : une affaire privée doit pour moi rester privée, même si tout le monde en parle. Je traite librement des sujets de mon choix, je ne suis soumis à personne, ni à aucune actualité. Aujourd'hui, j'en parle parce que François Hollande a décidé hier soir d'en parler et de clore cette affaire.

D'ailleurs, je continuerai de me taire sur l'affaire en elle-même, une liaison entre un homme et une femme, fussent-ils président et vedette, dont nous ne savons rien et qui ne nous regarde pas. En revanche, les commentaires qu'a suscités cette affaire durant les quinze derniers jours méritent l'analyse, tant ils sont révélateurs d'un abaissement moral de la société française, d'une dégradation de nos moeurs, d'une inintelligence de coeur et d'esprit. Pendant cette quinzaine, nous avons assisté, pour ma part stupéfait, à une déferlante d'indécence, d'obscénité, de voyeurisme et de racolage assez incroyable. La vague est passée, nous pouvons maintenant l'étudier plus sereinement. Elle a charrié tout un tas de sophismes, d'inepties, d'ignorance crasse, de fausses évidences, de vrais mensonges et de débats absurdes. Prenons-les les uns après les autres :

1- Le débat autour de la "première dame de France" : une pure folie, une simple fiction puisque ce statut n'a jamais existé dans notre pays ! C'est un abus de langage de parler de "premier dame", ça ne renvoie à rien, sinon à la First Lady aux Etats-Unis. Jusqu'à preuve du contraire, nous ne sommes pas américains et nous n'élisons pas un couple présidentiel.

2- Le débat autour des sommes allouées à la compagne du président de la République dans le cadre de ses activités : le cri des contribuables indignés est particulièrement mesquin et dérisoire. De fait, s'il n'y a pas en France de First Lady ou de "première dame", il y a bel et bien une conjointe du chef de l'Etat, dont les initiatives, généralement humanitaires, ont leur utilité et vont dans le sens de l'intérêt général. De même, que la sécurité de la compagne ou de l'épouse des présidents soit assurée au frais de la République, ça ne me choque pas, c'est dans l'ordre nécessaire des choses.

3- Le débat autour de l'irresponsabilité d'un chef d'Etat en scooter dans Paris, à la merci de n'importe quel flash de photographe, donc aussi d'une mitraillette de terroriste : c'est l'accusation la plus comique et la plus grotesque que j'ai entendue durant cette quinzaine délirante. En 1992, en plein Paris, sur les quais de Seine, j'ai croisé par hasard François Mitterrand à pieds, accompagné par quelques personnes, anonyme au milieu de la foule, qui ne le remarquait pas vraiment. Jamais il ne serait venu l'idée, à l'époque, que le chef de l'Etat était irresponsable d'effectuer ce genre de promenade dans la capitale. Au contraire, la meilleure façon de déjouer tout attentat, qui généralement ont lieu durant des déplacements officiels, c'est de circuler incognito dans des activités très ordinaires. Dans le cas de François Hollande, je me demande si le port du casque, sur lequel on a beaucoup et stupidement glosé, n'est pas pour quelque chose dans les réactions négatives : comme si le sommet de l'Etat ne méritait pas un tel couvre-chef (les Français se représentent le monarque avec une couronne, comme les anciens rois, ou bien un képi, à la façon du général de Gaulle).

4- La distinction nouvelle entre vie privée et vie intime, l'une étant nécessairement exposée, l'autre devant rester secrète, purement personnelle : cette substitution à la traditionnelle distinction vie publique et vie privée est particulièrement hypocrite et fallacieuse. Vie privée et vie intime, c'est exactement la même chose, et c'est très simple à circonscrire : les affaires de coeur, de sexe ou de famille, les goûts ou la moralité d'un homme politique appartiennent à sa vie privée, intime, et n'entrent pas en considération dans les jugements politiques qu'on porte sur lui. Sa vie publique concerne toutes ses actions en faveur du public, et en ce sens elles nous concernent.

5- J'ai entendu, durant l'odieuse quinzaine, cette équation perfide et erronée : "Un homme qui n'est pas fidèle à sa compagne n'est pas non plus fidèle à ses convictions ni à son pays". Même les puritains américains n'oseraient pas ce genre de connerie ! Ils comprennent, en bons moralistes qu'ils sont, que l'essentiel est d'entretenir une façade de respectabilité bourgeoise, derrière laquelle, bien caché, on fait ce qu'on veut, y compris les pires turpitudes (exemple spectaculaire : le queutard Kennedy et sa famille modèle). Oui, un homme fidèle à son épouse, bon avec ses enfants, son chien et ses voisins, peut néanmoins trahir sa patrie et se comporter en vrai salaud. Certains rois de France, pourtant très chrétiens et de droit divin, avaient des maîtresses comme jamais François Hollande n'en aura dans son existence : personne n'aurait songé à juger leur politique à l'aune de leur vie sentimentale et sexuelle. Arrêtons donc avec ça.

6- La remise en cause de la tradition républicaine française par Jean-François Copé, qui a jugé "désastreuse" l'image donnée de la France dans cette affaire. Heureusement, d'autres, à droite, n'ont pas réagi ainsi. Mais Copé est pour l'heure le chef de la droite, et le désastre, c'est plutôt sa prise de position : elle soumet la vie privée du chef de l'Etat (et de tout homme public ?) à des critères moraux, ce qui est une rupture avec toute notre histoire. Giscard, Mitterrand et Chirac, à ce qu'on en sait, avec de nombreuses aventures amoureuses, qui ne conduisaient pas à discréditer leur personnage ou leur action publics. Vous me direz peut-être que Copé ne fait que se conformer aux évolutions de la société et à son hyper-médiatisation : je vous répondrais qu'un homme d'Etat ne se soumet qu'à l'idée qu'il se fait de l'intérêt général, qu'il ne se détermine pas selon l'air du temps, les modes, les pressions, les influences de la société, qu'il peut même lui arriver de les dénoncer et de les combattre.

7- On reproche à François Hollande de se comporter comme Nicolas Sarkozy, alors qu'il avait promis d'être "exemplaire", à la différence de son prédécesseur : mais il EST exemplaire ! Les deux attitudes sont incomparables : Sarkozy a mis en scène sa relation avec Carla Bruni, Hollande n'a rien fait de tout cela ; victime de l'indiscrétion d'un magazine à sensations, il a très vite, au bout de quinze jours, réglé la situation. Il l'a fait dans la sobriété d'un coup de fil à l'AFP, en tant que citoyen et non que président. Rien à voir avec la romance assumée et exhibée de l'ancien président avec une chanteuse à succès.

8- Des commentaires plus positifs ont souligné le caractère romanesque de l'affaire, dévoilant un François Hollande séducteur : à la limite, les retombées ne pourraient que lui être bénéfiques, donnant de lui une image inattendue et valorisante. Mais non, je n'en crois rien. Ce qui arrive à notre président, une liaison qui entraîne une séparation, n'a rien de romanesque : c'est au contraire d'une banalité absolue. Dans une société où le concubinage est très répandu, où les couples se font et se défont, Hollande confirme être l'homme normal qu'il a promis durant sa campagne. Il aurait été follement romanesque s'il s'était converti secrètement à une religion, se faisant intérieurement moine ou devenant rigoureux stoïcien, comme quelques grands noms de la noblesse française rejoignaient au XVIIe siècle les rangs austères et spirituels de Port-Royal. Hollande n'en est pas encore là ...

9- Les derniers commentaires sur l'affaire, ceux d'hier et d'aujourd'hui, nous annoncent que celle-ci est terminée, après la mise au point du président. Non, ils se trompent, l'affaire ne fait que commencer, hélas, trois fois hélas : après les aventures du concubin infidèle, nous allons avoir droit dès demain aux aventures du président célibataire, dont vont se repaître les gazettes et l'opinion publique. C'est d'ailleurs humain : depuis que le monde est monde, on cherche à savoir qui couche avec qui. Mais cette curiosité naturelle et éternelle a des limites et ne doit surtout pas devenir ce qu'elle est pourtant devenue : tout un système économique et médiatique, à grands renforts d'explications psychologiques et de considérations moralisantes. Ce qui signifie que la quinzaine de l'indécence et de l'obscénité n'est pas terminée, qu'elle va continuer, et quand l'affaire Hollande sera épuisée, elle se tournera vers une autre affaire. Vous faites comme vous voulez, mais je ne mange pas de ce pain-là.

Je terminerais en rappelant que les hommes politiques sont autant victimes que responsables, dans cette dérive de notre société, que l'affaire Hollande met en lumière et confirme. Ils n'auraient jamais dû exposer leur vie personnelle et familiale dans les médias. Je serais même favorable à une loi qui interdise, quelles que soient les élections, toute référence à la situation matrimoniale ou familiale des candidats : annoncer qu'on est marié ou célibataire, concubin ou solitaire, avec ou sans enfant, tout cela n'apporte rien à la connaissance du candidat et de sa valeur politique. J'en reste fermement à ce qui n'aurait pas dû changer en France et dont la préservation m'aurait évité ce long billet dominical : un homme public doit être connu, apprécié et jugé uniquement sur ses capacités et activités publiques. C'est le principe sous-jacent inscrit au fronton de la République.

samedi 25 janvier 2014

Unitaire pour deux




Chaque année, je me rends aux voeux de la section de Saint-Quentin du parti communiste français. Etrange pour un social-démocrate ? Non, je me rends bien aux voeux de Xavier Bertrand ! Surtout, j'honore une amitié d'une quinzaine d'années et quelques combats partagés avec Corinne Bécourt, Jean-Luc Tournay et leurs camarades. Malgré les désaccords politiques importants, une forme de sympathie, et d'estime réciproque je crois, nous réunissent. Mais l'essentiel de ma présence est encore ailleurs : je sais d'où je viens et où j'habite ; mon pays, c'est la gauche, et rien de ce qui se passe à gauche dans notre ville ne me laisse indifférent.

A ce sujet, je sais que l'union entre socialistes et communistes, aussi tumultueuse, difficile et contestable soit-elle, reste constitutive de l'identité de la gauche. En revanche, l'extrême gauche trotskiste, lambertiste ou anarchiste ne fait pas partie de notre histoire électorale. Je sais dans quel pays j'habite, mais j'en connais aussi le passé et les frontières, les intérêts et l'avenir.

En la matière, j'ai trois principes, trois vérités supérieures gravées dans le marbre, intangibles, éternelles :

1- Les socialistes et les communistes sont concurrents, rivaux et opposés tant qu'on voudra, mais rien n'empêchera ni ne doit faire oublier qu'ils ont un adversaire commun, et un seul, la droite.

2- A Saint-Quentin sûrement plus que dans beaucoup d'autres villes, les socialistes et les communistes ne peuvent pas gagner séparément, ou les uns contre les autres.

3- Les divergences nationales ne doivent pas gommer les intérêts locaux réciproques.

Attention : je bannis toute forme d'électoralisme, d'arrangements politiciens en vue de se répartir des places. L'union entre socialistes et communistes, je ne la conçois pas comme un rabibochage à l'approche d'un scrutin, mais comme une ligne de fond et de force, qui devrait être pratiquée en permanence, dans le respect de nos différences. C'est ce que j'ai tenté de faire quand j'étais secrétaire de la section socialiste. Corinne Bécourt et Jean-Luc Tournay se souviennent que j'étais à leurs côtés, en son temps, dans la lutte contre les alliances régionales entre la droite et l'extrême droite. Il y a des choses qui ne s'oublient pas.

Aujourd'hui, les communistes saint-quentinois sont loin du PS. Et quand j'ai entendu hier soir Olivier Tournay, tête de liste communiste aux élections municipales, commencer son discours par une critique en règle de la politique gouvernementale, mes oreilles ont sifflé très fort. Mais j'ai connu l'époque, dans les années 70, où le PCF, sous la direction de Georges Marchais, était anti-socialiste et pro-soviétique. Alors, mes oreilles sont habituées ...

Et puisque j'évoque le passé, j'ai toujours gardé en tête cette formule mystérieuse de mon maître en politique, François Mitterrand, à propos de l'union entre socialistes et communistes : "Il faut être unitaire pour deux". C'est ce que j'ai toujours essayé de pratiquer, à mon niveau. A la différence de l'amour, où les deux partenaires doivent être consentants, la politique, qui est une activité bizarre, peut se passer de réciprocité. C'est la force des événements qui commande : il faut avoir le vent en poupe, une chance de l'emporter, des responsabilités à exercer en commun. Demandez-vous pourquoi, dans l'Aisne, les socialistes et les communistes sont divisés à Laon et à Saint-Quentin, et rassemblés à Soissons, et vous comprendrez ce que je veux dire.

De la présentation des voeux du PCF local, il fallait retenir la présence de leur premier secrétaire départemental, Benoît Roger. Les relations entre la section et la fédération ont souvent été aléatoires, tendues, parfois conflictuelles. Il y a incontestablement une normalisation, et un soutien fédéral, donc national, à une ligne politique locale pas toujours en phase avec sa direction ... nationale. En revanche, quelques personnalités saint-quentinoises du Front de gauche étaient absentes. Comme tout le monde en politique, je fais mes petits calculs : qui est là, qui n'est pas là ? Qui se risque à un affichage public, qui s'en abstient ?

Autre fait notable lors de cette soirée : le retour sur le devant de la scène de Michel Barbaux, président du comité de soutien à la liste municipale. Il a été maire-adjoint de Daniel Le Meur, chargé de la jeunesse et de la petite enfance, entre 1988 et 1995. Dans son intervention, il a souligné que son engagement était renforcé par la participation de nombreux jeunes sur la liste et dans la section.

La rencontre a été l'occasion d'inaugurer le local de campagne, qui sera donc le siège du parti, où des permanences seront régulièrement organisées. Le programme municipal sera présenté le 8 février. Comme les albums d'Astérix se terminent par des chansons, les réunions des communistes saint-quentinois se concluent par l'Internationale, debout et poing levé, Corinne Bécourt, le "chef" comme l'appelle parfois Olivier, donnant le signal. Dans la ferveur militante, les moins convaincus pourraient presque se laisser aller à devenir communistes ...

Pour finir, à mon tour de présenter mes voeux à mes camarades communistes : qu'ils réalisent le meilleur score possible les 23 et 30 mars prochains. Car plus le PCF fera un score élevé, plus la gauche dans son ensemble aura des chances de gagner. Je souhaite à Olivier Tournay de redevenir conseiller municipal, parce qu'il le mérite (si la notion de mérite a un sens en politique ...), et pourquoi pas maire-adjoint, dans la perspective d'une victoire de la gauche. Ma plus grande tristesse, après celle d'une nouvelle défaite socialiste, ce serait de voir le FN entrer au Conseil municipal alors que le PCF n'y serait pas. Mais une cérémonie des voeux est là pour exorciser ce genre de cauchemar.


En vignette, de gauche à droite : Olivier Tournay, tête de liste, Aurélien Jan, membre du bureau, chargé de la communication, Jean-Luc Tournay, ancien conseiller régional, Corinne Bécourt, secrétaire de section, Benoît Roger, premier secrétaire fédéral.

vendredi 24 janvier 2014

Le FN la boucle



Le Courrier picard d'aujourd'hui nous apprend que le Front national, à Saint-Quentin, a "bouclé" sa liste pour les élections municipales. "Bouclé" : le mot sera en vogue dans les prochaines semaines, au sein des partis politiques. La liste PS est "bouclée" et sera bientôt connue. Celle de l'UMP l'est peut-être aussi, mais silence ... Le PCF est le seul à avoir non seulement "bouclé" la sienne, mais présentée publiquement.

"Bouclé" : c'est un drôle de terme. Pourtant, c'est celui qu'emploient à chaque fois, mécaniquement, les politiques. Je dirais plutôt "terminée" ou "complète". "Bouclé", ça fait presque magique, comme si c'était une opération délicate, dont on est heureux qu'elle soit conclue. "Bouclé", ça me fait également penser à l'injonction de se taire : boucle-la ! Comme si la liste imposait le silence, comme si elle avait le dernier mot : après elle, le déluge ou la victoire ...

Revenons au FN et à sa liste "bouclée". En fait, je ne jurerais de rien, je reste circonspect. Un facho est aussi un menteur : pas impossible qu'ils nous bourrent le mou ... De plus, l'annonce publique sera faite en mars. Pourquoi pas en avril ou en juin, pendant qu'ils y sont ! Si leur liste est "bouclée", qu'ils la publient tout de suite. Ces méchants foireux veulent peut-être entretenir le suspense ...

Passons à des choses plus sérieuses : la présence du FN peut-elle faire perdre Xavier Bertrand ? En 1995, le FN était présent, PS et PCF étaient divisés, la droite a gagné. Aux dernières législatives, le FN avait un candidat et voulait la mort politique de Xavier Bertrand : ça n'a pas empêché celui-ci de l'emporter. Les voix en plus pour le FN dans les milieux populaires, c'est des voix en moins pour le PS. La présence du Front national ne sert pas forcément la gauche.

Il y a pire : aux dernières cantonales, l'extrême droite a liquidé le parti socialiste dès le premier tour. Le risque d'un 21 avril à l'échelle locale n'est donc, hélas, jamais à exclure. En fait, je ne vois qu'un cas de figure où la présence du FN serait indirectement favorable à la gauche : si elle permettait un second tour (ce qui ne s'est produit ni en 2001, ni en 2008) où le PS, le FN et l'UMP seraient en concurrence. C'est le triangle de la mort, dans lequel la droite pourrait sombrer.

Bref, toutes ces conjectures sont aventureuses et incertaines. Une belle et vraie victoire se remporte sur des idées, ses idées, pas dans un calcul de billard à trois bandes. En mon fort intérieur, je souhaite que le FN soit absent, qu'il ne puisse pas constituer sa liste : quand je me promène dans la campagne, je n'aime pas les odeurs de fumier.

jeudi 23 janvier 2014

Je n'habite plus en France



Le sondage (Ipsos-Steria) paru dans Le Monde daté d'hier est stupéfiant. En le lisant, je me demande dans quel pays j'habite ! Commençons par la confiance envers les institutions : qu'est-ce qui vient en premier, à 84% ? Les PME et PMI ! Je n'ai rien contre ces entreprises petites et moyennes, mais il ne me viendrait pas à l'idée de les ranger parmi les institutions de notre pays (de même que les associations, qui, elles, ne figurent pas dans le sondage). Une institution, c'est un modèle national : l'Armée, la Police, l'Ecole, la Justice, l'Assemblée nationale, ... L'institution est unique et s'écrit avec une majuscule, pour marquer son importance.

Les PME et PMI ont incontestablement utiles et indispensables à la vie économique du pays, mais on ne peut pas correctement les qualifier d'institutions. Ce choix très majoritaire des Français, je l'interprète plutôt comme un rejet des institutions, au bénéfice d'une activité économique qui n'est pas d'ordre institutionnel. Et pourquoi les petites et moyennes entreprises, et pas les grandes ? C'est sans doute la clé de ce sondage et de ce qu'il traduit : les Français aiment ce qui est à leur image, petit et moyen, excluant tout projet ou tout rêve de grandeur.

L'enquête expose un véritable abaissement moral de l'esprit public. "C'était mieux avant", cette connerie est approuvée à 74%. Il faut avoir la mémoire très courte pour penser ça ! Le rapport à autrui est au fondement de la vie en société : 79% estiment qu'on n'est jamais assez prudent quand on a affaire aux autres. Bref, sous des mots choisis et atténués, il faut comprendre une trouille généralisée. Après la trouille, la schlague (les deux vont ensemble, comme la cause et l'effet) : 87% sont en demande d'ordre et d'autorité (c'est d'ailleurs contradictoire : d'un côté, les Français contestent les institutions, de l'autre, ils réclament le retour de l'autorité : qu'ils commencent donc par respecter les institutions, qui sont à la source de l'autorité !).

Sur la politique, les résultats ne sont pas tristes ! (c'est-à-dire qu'ils sont affligeants). 8% seulement ont confiance aux partis politiques. Affolant, quand on sait que les partis sont les piliers de la démocratie ! Mais la démocratie elle-même fait les frais de ce grand rejet de tout et de n'importe quoi : 78% pensent que la démocratie fonctionne mal en France. Aberrant, quand on sait que certains pays viennent chercher chez nous des leçons de démocratie pour pouvoir construire la leur !

Les hommes politiques ? C'est pire ! 65% affirment que la plupart des hommes politiques sont corrompus et 84% qu'ils n'agissent principalement que pour leurs intérêts personnels. On se demande alors pourquoi les Français continuent d'aller voter ! Il y a certes des reproches à faire à notre classe politique, personne n'échappant à la critique : mais les accusations graves de corruption et d'intéressement nient la fonction même de l'homme politique, normalement porté à la justice et au dévouement. Ce sont donc des jugements consternants.

Sur l'immigration, 66% estiment qu'il y a trop d'étrangers en France. Cette perception n'a rien d'objectif : à partir de quelle quantité y a-t-il trop d'étrangers dans notre pays ? Pour ma part, je pense qu'il faut maîtriser, réguler et rationaliser l'immigration, mais je ne trouve pas qu'il y ait trop d'étrangers en France. Derrière cette formule a priori anodine, je sens la mauvaise haleine de la xénophobie. D'ailleurs, le parti qui la pratique, le Front national, est considéré comme utile par 47% de l'échantillon, alors que ce parti est, à mes yeux, profondément nuisible et qu'il n'apporte strictement rien à notre vie démocratique.

Sur l'Europe, 70% veulent limiter ses pouvoirs, alors que j'aimerais ... les augmenter. 45% seulement considèrent comme une bonne chose d'appartenir à l'Europe. Conséquence logique : 61% rejettent la mondialisation et 58% aspire au protectionnisme. Moi, c'est tout l'inverse : la mondialisation me semble positive et le protectionnisme délétère.

J'ai gardé le pire pour la fin : 85% jugent que la France est en déclin. Nous sommes la cinquième puissance économique au monde, nous disposons de l'arme nucléaire, notre culture rayonne à travers la planète, nous avons un passé prestigieux, l'avenir nous tend les bras pourvu que nous le voulions ... mais les Français pensent être sur la voie du déclin ! Le Monde parle de déprime. Je crois que les Français ne croient plus en leur pays parce qu'ils ne croient plus en rien du tout, pas même à eux-mêmes (qu'est-ce que la France, sinon l'ensemble des Français ?). Il est significatif que la religion n'apparaisse dans aucune question du sondage. Qu'on y adhère ou pas, c'est autre chose, mais il faut constater la religion a été pendant des millénaires une grande pourvoyeuse de croyances. Cette absence est un signe.

A l'issue de ce sondage, je suis un peu gêné : il est presque indécent, obscène de se dire optimiste, confiant et même heureux, de s'enthousiasmer pour la politique et l'Europe, de ne pas craindre les immigrés ni la mondialisation. Suis-je normal ? Faut-il que je me soigne ? Je suis tellement Français, mais j'ai l'impression de ne plus habiter en France.

mercredi 22 janvier 2014

Lavrilleux l'européen



Les élections européennes, qui auront lieu le 25 mai, font peu parler d'elles, pour le moment. Les élections municipales les éclipsent. C'est très dommage, parce que le scrutin européen est important. A Saint-Quentin, nous avons une candidate, socialiste, ex-députée, Anne Ferreira, mais avec peu de chances d'être élue, étant en 4e position sur la liste. Depuis hier soir, nous avons un deuxième Saint-Quentinois candidat, UMP, certain lui d'être élu : Jérôme Lavrilleux, tête de liste pour la circonscription Nord-Ouest. Ce résultat acquis d'avance aura des conséquences au-delà du scrutin européen : la droite locale, qui a déjà eu Pascal Gruny comme députée européenne, va y gagner. En politique, toute place est bonne à conquérir pour un parti. Et tout nouveau pouvoir renforce les positions du parti.

La droite saint-quentinoise est formidable : Xavier Bertrand et Jérôme Lavrilleux ne s'entendent pas, c'est de notoriété publique. Au niveau national, Lavrilleux soutient Copé et Bertrand soutient ... Bertrand. Mais localement, c'est l'entente cordiale, ils ont l'intelligence politique de s'arranger. Les voeux du maire le laissaient présager : sur la même scène, les deux rivaux étaient (presque) main dans la main, autour de Pierre André, qui avait pris soin de souligner le destin national de l'un et de l'autre. Nous y voilà : la France pour Xavier Bertrand, l'Europe pour Jérôme Lavrilleux.

Pourtant, Jérôme Lavrilleux a de sérieux adversaires. Localement, à gauche, depuis des années, au Conseil général de l'Aisne comme dans son canton, ses absences sont brocardées. Il travaille à Meaux, directeur de cabinet de Jean-François Copé, et à l'Assemblée nationale, auprès de son chef. Ces critiques ne l'affectent manifestement pas. L'animal a réussi à se faire réélire dans son canton aux dernières élections cantonales. N'y a-t-il pas que les résultats qui comptent en politique ?

Dans son propre parti, on lui en veut beaucoup d'avoir oeuvré contre François Fillon lors du fameux psychodrame pour désigner le chef de l'UMP. C'est que Jérôme n'est pas un tendre et fragile jeune homme à la barbe toujours renaissante, mais un redoutable tacticien, un organisateur hors-pair, un de ces terribles lieutenants qui sont prêts à tout pour servir leur chef. En politique, il n'y a pas intérêt à les croiser, sauf à être pire qu'eux. Malgré l'hostilité qu'il suscite parmi les siens, le très contesté Jérôme Lavrilleux a réussi à se faire désigner tête de liste : chapeau !

Comme Xavier Bertrand, dix ans après lui, une carrière politique au plan national s'ouvre donc à Jérôme Lavrilleux. Son aîné a commencé simple conseiller municipal d'opposition, jusqu'au plus haut sommet de l'Etat, ministre, et chef de l'UMP. Lavrilleux s'est fait élire au département (je n'oublie pas qu'en 2004, aux cantonales, dans une triangulaire avec le FN, je n'étais pas très loin de le battre), et maintenant c'est le Parlement européen qui va l'accueillir. On a beau être de gauche, on ne peut pas s'empêcher d'admirer ces trajectoires ...

Sur Saint-Quentin, Lavrilleux, c'est d'abord un nom connu, une enseigne de garage. D'abord directeur de cabinet de Pierre André, je l'ai rencontré pour la première fois dans le bureau occupé aujourd'hui à la mairie par Xavier Bertrand ! J'avais été frappé par sa clarté, sa concision et son efficacité. De là à imaginer qu'un jour il conseillerait un président de la République et siégerait à Strasbourg ... Je me pose souvent cette question (comme bien d'autres questions) : qu'est-ce qui fait qu'on réussit en politique ? L'intelligence, l'expérience, les relations, les circonstances, le hasard ... Je ne sais pas, j'hésite. En revanche, à la question : qu'est-ce qui fait qu'on perd en politique ? je suis imbattable, j'ai des réponses sûres et précises.

mardi 21 janvier 2014

Salauds de chômeurs ?



Je vous parle rarement de ma vie professionnelle. Ce blog n'est pas le lieu. Il y a aussi une forme de devoir de réserve. Aujourd'hui, je veux évoquer ce qui s'est passé hier en classe, qui déborde très largement de la classe, qui concerne toute notre société. Avec les Secondes, donc des élèves qui ont autour de 15 ans, que j'initie un peu à ce qui les attend en Terminale, la philosophie, j'ai abordé une notion au programme : le travail. Comme bien souvent, surtout à cet âge, ils n'osent pas intervenir, prendre la parole, exposer leurs idées. Je les comprends, ce n'est pas facile de parler en public, devant tous leurs camarades. J'essaie de les encourager à se lancer. Mais hier, sur ce sujet pourtant concret, qui renvoie à leur expérience personnelle, la réflexion ne démarrait pas.

Pour susciter des réactions, je soulève le problème de la paresse, du refus du travail, de la valeur morale qu'il faut accorder ou pas à l'activité laborieuse. Une élève lève alors la main. Je me réjouis d'avance de cette intervention qui brise le silence général. Elle dit ceci, qui me tasse sur ma chaise : "Dans notre société, on peut vivre sans travailler, par exemple grâce au RSA" (sic). Son ton est réprobateur, elle fustige la paresse selon elle lucrative. J'en reste pantois, un peu déstabilisé, ne sachant trop quoi répondre. Autour, ses camarades acquiescent. Leur mutisme disparaît, plusieurs prennent la parole et vont dans le même sens. Ils sont gentils, pas fanatiques, mais ils portent des jugements terribles à l'égard des chômeurs. Eux-mêmes viennent pourtant, bien souvent, de milieux modestes, certainement confrontés, un jour ou l'autre, dans leurs familles ou chez leurs amis, à la question du chômage. Mais non, leur condamnation l'emporte, avec des images, des mots très vifs, s'en prenant à ceux "qui restent allongés sur leur canapé", qui font "15 enfants pour ne pas avoir à travailler" (sic).

Je suis très vite submergé par ce genre de remarques, bien peu philosophiques. J'ai le sentiment que la première élève qui a osé s'exprimer sur ce terrain a libéré une parole jusque-là refoulée. Car c'est bel et bien à une forme de petit défoulement collectif auquel je suis en train d'assister. Mais je le préfère encore à l'indifférence, au désintérêt. J'ai espéré que d'autres élèves défendent un point de vue opposé, pour m'en faire en quelque sorte des alliés, contrebalancer le camp des anti-chômeurs. Mais non, personne n'est venu à mon aide, je suis resté dans ma solitude. Ma seule consolation : j'ai échappé aux "immigrés qui prennent le travail des Français" !

C'est étrange : ces adolescents, lorsqu'il est question de ne pas travailler, ne songent pas une seule seconde au rentier qui vit de son argent placé, au riche à milliards qui se la coule douce sans rien faire. C'est le chômeur allocataire qu'ils fustigent, avec violence (du moins une grande réactivité, que je ne leur connais pas forcément sur d'autres sujets). J'ai réagi comment de mon côté ? En professionnel, nécessairement, puisque c'est mon métier : sans sur-réagir, en essayant de dépassionner le débat, d'y introduire un peu de raison. D'abord, sur le RSA, j'ai expliqué que la question n'était pas philosophique, qu'il fallait demander des éclaircissements aux professeurs compétents, d'économie : dans ma matière, on s'interroge sur le rapport existentiel au travail et à la paresse, pas à la dimension sociale et administrative contemporaine.

Comme ma mise au point ne suffisait pas et que le débat prenait, toujours dans un sens anti-chômeur, j'ai sorti mon arme de guerre, la logique implacable, la dialectique censée mettre un terme aux divagations de l'esprit, en leur disant : "Si l'on gagne mieux sa vie en ne faisant rien, alors ce soir je cesse de travailler, et vous aussi !" L'argument est un peu facile, mais à la guerre comme à la guerre ! La classe a alors senti que je mettais en doute ce qui est pour elle une évidence : le travail ne paie pas, les chômeurs sont des profiteurs ! Ils en ont été un peu offusqués, comme si je ne leur faisais pas confiance, comme si je ne respectais pas leur point de vue. Je suis tranquillement passé à autre chose, voyant que rien n'y faisait. Cinq minutes après, tout était oublié de la polémique, que je n'ai pas voulu transformer en point de focalisation.

Tout ça est terrible : ces enfants sont victimes de l'air du temps. 35 ans de chômage de masse, une dénonciation constante de l'assistanat, un emploi devenu l'obsession de tous les discours politiques : résultat, les chômeurs sont devenus suspects. Si tout va mal en France, ce serait à cause d'eux, qui ne travaillent pas, qui ne cherchent pas à travailler. Bien sûr, si je poursuivais la discussion avec mes élèves, je suis persuadé qu'ils feraient des distinctions et qu'ils auraient leurs bons chômeurs, comme tout antisémite a ses bons juifs. Mais le mal est fait dans les têtes, leur jugement premier envers les chômeurs en général est négatif. Quand je traverse la cour de l'établissement et ses groupes de collégiens remuants, je les entends parfois, cruels comme on peut l'être à cet âge, se traiter mutuellement de "clochard" ou "pédophile" : et "chômeur", c'est pour quand ? Peut-être déjà maintenant ... Je pense à la célèbre réplique de Jean Gabin dans "La Traversée de Paris" : salauds de pauvres ! Aujourd'hui, salauds de chômeurs ?

Combien de chômeurs ne s'inscrivent-ils pas à Pôle Emploi, combien d'ayant droits ne réclament-ils pas, à cause de la réprobation sociale qui frappe leur situation, à cause de cette fichue "valeur travail" qui fait désormais office de nouvelle morale ? Je le dis d'autant plus librement que je travaille beaucoup et que j'aime travailler. Mais je pense à tous ceux qui sont les victimes d'une économie désindustrialisée qui n'offre plus suffisamment d'emplois : on les a odieusement transformés en responsables, fainéants, fraudeurs. La honte de ne pas pouvoir travailler conduit parfois à laisser croire qu'on travaille, pour ne pas subir de dépréciation sociale. Tout ça est horrible, injuste. En soi, réduire quelqu'un à son activité professionnelle est barbare. C'est la fameuse question : vous faites quoi dans la vie ? On devrait, dans l'idéal, juger les personnes, s'intéresser à elles pour leurs qualités de coeur, pas pour leur foutu gagne-pain qui n'apprend rien sur ce que sont, au fond, les gens.

Tout ce que je vous dis là, je ne l'ai pas dit hier matin à mes élèves : mon travail, justement, dans une école publique, c'est de faire de la philosophie, pas de la politique. Mais dans les missions qui sont les miennes, je fais tout pour que les élèves apprennent à réfléchir par eux-mêmes et ne véhiculent plus les préjugés, les approximations, les fausses évidences péremptoires qui circulent lamentablement dans notre société.

lundi 20 janvier 2014

XB peut-il perdre ?



A bientôt deux mois du premier tour des élections municipales, le temps va maintenant passer très vite, les événements vont s'accélérer. A Saint-Quentin, la question que tout le monde se pose est évidemment celle-ci : Xavier Bertrand peut-il perdre la mairie ? Le Courrier picard d'aujourd'hui répond que non : "on voit mal Xavier Bertrand détrôné à Saint-Quentin". En revanche, le quotidien pointe "sept villes à surveiller" en Picardie, où l'alternance est possible : Amiens, Eu, Péronne, Creil, Noyon, Clermont, Soissons.

Je vais me faire l'avocat du diable (bien que Michel Garand, tête de liste socialiste, n'ait rien de satanique), je veux lister quelques arguments qui pourraient conduire à une défaite de Xavier Bertrand, sachant que la politique n'est pas une science exacte. Je vois neuf raisons à une possible victoire de la gauche :

1- L'image de l'actuel maire, moins populaire que son prédécesseur Pierre André, plus engagé dans la politique nationale, affichant sans complexes des ambitions présidentielles qui pourraient localement le desservir.

2- La lassitude d'une équipe qui est à la tête de la Municipalité depuis bientôt vingt ans, le désir d'alternance de la population, naturel dans une démocratie.

3- L'épuisement du projet municipal, qui a donné dans les mandats précédents le meilleur de lui-même, qui est arrivé en quelque sorte à échéance en matière de propositions inédites et surprenantes.

4- La prime à la nouveauté que représente Michel Garand, l'effet de curiosité que peut susciter sa candidature, son marquage politique assez faible, son profil de notable tranquille et sans risques.

5- La présence d'une liste Front national peut empêcher Xavier Bertrand de l'emporter au premier tour et lui faire perdre des voix au second.

6- Le bon score d'un PCF devenu autonome, plus clairement identifiable, dont les reports de voix pourraient profiter au PS, mieux qu'une liste d'union où les différences aboutissent à des soustractions plutôt qu'à des additions.

7- Une liste socialiste très ouverte, comportant des représentants connus de la société civile, du monde de l'entreprise, des syndicalistes et des responsables associatifs, allant jusqu'à rallier des personnalités de droite, le tout ayant un fort effet mobilisateur.

8- Un programme attractif, précis, chiffré, avec quelques mesures marquantes et originales, à condition d'être appuyé par une bonne communication (la réception par la presse de la conférence de la semaine dernière a été plutôt négative).

9- Une campagne officielle dynamique, des initiatives publiques (pas seulement le porte à porte, très bien mais souterrain), des réunions de quartier, le soutien visible et actif des élus du Département et de la Région, un grand meeting avec une vedette nationale.

A ces neuf conditions, qui sont chacune tout à fait réalisables, la victoire de la gauche à Saint-Quentin est envisageable. Bien sûr, je n'ignore pas que ces neuf arguments peuvent parfaitement, les uns après les autres, être retournés en faveur d'une victoire de Xavier Bertrand. Mais la politique est une volonté : elle se prouve en marchant, dans une dynamique parfois inattendue. Nous en verrons les signes, ou leur absence, très vite. Réponse dans les semaines à venir.

dimanche 19 janvier 2014

Bouge-toi ma Picardie !



Des amis de gauche m'invitent à signer la pétition Touche pas à ma Picardie ! qui vise à maintenir notre région en l'état. J'avais refusé il y a six ans, je n'ai pas changé d'avis, je suis même conforté par les nouvelles propositions de François Hollande : réduction du nombre de régions de 22 à 15, renforcement et clarification de leurs compétences, maintien des départements, incitation à des regroupements régionaux par des bonus financiers. Si j'avais le temps, je lancerais même ma propre pétition : Bouge-toi ma Picardie !

D'abord, le passage de 22 à 15 régions obligera forcément les petites régions, dont fait partie la Picardie, à en rejoindre de plus grandes. La question n'est donc plus de savoir s'il faut préserver la Picardie ou pas : notre région va changer de périmètre, c'est certain. La vraie question, le choix politique, c'est de décider de quelle région nous allons nous rapprocher, avec laquelle allons-nous lier notre destin, chaque département pouvant bien sûr défendre des positions différentes. Pour l'Aisne, trois possibilités s'offrent :

1- rejoindre le Nord-Pas de Calais, constituer un Grand Nord, incluant la Somme et éventuellement la Champagne-Ardennes (c'est ce qu'évoque Yves Daudigny, président du Conseil général de l'Aisne, dans L'Aisne Nouvelle d'hier, p.5). Ce pourrait être la préférence naturelle de Saint-Quentin, tournée vers l'axe Amiens-Lille, se sentant des affinités avec Cambrai et Valenciennes.

2- rejoindre exclusivement la Champagne-Ardennes, option que Jean-Pierre Balligand, ancien président du Conseil général de l'Aisne, a souvent préconisée. Le sud de l'Aisne s'y retrouverait assez bien, le nord un peu moins, mais Reims n'est pas non plus une métropole qui nous est étrangère.

3- rejoindre la région parisienne, l'Ile-de-France, en compagnie de nos voisins de l'Oise. Saint-Quentin est à 1h20 en train de Paris, 1h30 par l'autoroute : c'est la porte d'à côté. Château-Thierry et Villers-Cotteret sont des villes qu'on peut qualifier de parisiennes, même Soissons, sous certains aspects. Laon n'est pas non plus très loin de la capitale, par le rail. La Thiérache en revanche s'en éloigne. L'un dans l'autre, sachant que la perfection est inatteignable, cette solution aurait ma préférence.

Claude Gewerc, président du Conseil régional de Picardie, premier concerné par cette réforme, propose une "coopération interrégionale", écartant ainsi la fusion de la région avec une ou d'autres. Non, ce n'est pas une réponse à la hauteur de l'ambition du président Hollande : ce type de "coopération" existe déjà et ne constituerait pas une entité nouvelle. Xavier Bertrand suggère carrément de fusionner départements et régions, par le biais d'un référendum. La mesure laisse entendre que les départements ne serviraient à rien, ce qui n'est pas le cas ; et elle ne touche pas au nombre et au découpage des régions : dans sa radicalité, elle est aussi conservatrice.

Les partisans du statu quo crient à la disparition de la Picardie ! Mais non : son organisation politique et administrative en serait modifiée, mais sa réalité historique et culturelle inchangée. Les cultures locales existent par elles-même ; elles ne sont pas affectées, lorsqu'elles sont vivantes et fortes, par les évolutions de structures. Mon Berry natal n'existe plus, depuis longtemps, comme entité politique et administrative, mais le Berry, dans son patois, ses traditions, ses us et coutumes, est toujours présent. Il en sera de même pour notre Picardie. Et puis, quand on est de gauche, on ne se laisse pas prendre par ce genre d'argument : ce n'est pas le passé qui compte, c'est l'avenir. La Révolution française a supprimé les provinces et créé ex nihilo les départements : le projet de François Hollande ne va pas si loin !

Il y a bien sûr des arguments plus sérieux, moins réactionnaires. J'en vois deux principaux :

1- La puissance d'une région ne dépend pas de sa taille. Oui, j'en conviens, de même qu'un pays peut être petit et très développé, et une immense contrée très miséreuse. Mais la Picardie est-elle riche ? Non, son taux de chômage est parmi les plus importants, ses résultats scolaires sont parmi les derniers, la région ne dispose que d'une seule grande métropole, Amiens. La Picardie ne peut donc que gagner à s'ouvrir, à voir plus grand, à se désenclaver.

2- Les régions ne représentent que 2% des dépenses publiques, dit le socialiste Philippe Massein. J'entends bien, mais vous connaissez ma méfiance à l'égard des chiffres, et plus encore envers les pourcentages. D'abord, l'économie d'échelle serait réelle, en dehors de toute comparaison qui la relativise. Surtout, cette statistique purement factuelle ne dit absolument rien des gains en matière de développement que représenterait pour la Picardie l'entrée dans un ensemble régional plus vaste. L'argument n'est donc pas décisif.

Bouge-toi ma Picardie ! Oui, c'est le débat qu'il faudra avoir, principalement en vue des élections régionales et cantonales de l'an prochain.

samedi 18 janvier 2014

Public chéri



Quel est le critère de réussite d'une activité publique ? La qualité de la prestation ? La bonne organisation de la manifestation ? L'intention des organisateurs ? Non, le critère est toujours et partout le même, unique : la fréquentation du public. Pareil dans l'activité politique : le programme, les candidats, les initiatives, tout cela est louable mais secondaire ; in fine, la seule chose qui compte, c'est la présence du public, la mobilisation des électeurs, le résultat du vote.

Mercredi soir, à Hirson, il y avait du monde, pour le ciné-club consacré au film de Clio Barnard, Le Géant égoïste, que Claude Trévin, le responsable de la séance, m'avait demandé d'animer (vignette 1). J'ai introduit le débat par une formule prononcée par Di Caprio dans le dernier Scorsèse, Le Loup de Wall Street : "Il n'y a pas de noblesse à être pauvre" (et à être riche ?). Barnard est dans la veine de Ken Loach : le réalisme social, qui nous montre les milieux populaires frappés par la crise économique. Remarque : le cinéma filme plus facilement la bourgeoisie que le peuple. Le Géant égoïste est terrible, déprimant, dramatique. Mais à la fin, il y a quand même une petite lueur d'espoir, que nous avons abondamment commentée avec mon public chéri, au sortir de la salle, autour d'un verre de cidre (vignette 2).

Cet après-midi, c'est la jalousie qui a été l'objet de ma conférence-débat, à la bibliothèque de Saint-Quentin (vignette 3). Comme toujours, j'ai tenté d'être exhaustif sur le sujet, d'en faire le tour : de la jalousie prêtée aux animaux au Dieu jaloux de la Bible en passant par la jalousie amoureuse, le public a été servi. Personnellement, je ne suis pas trop jaloux. Sauf de voir une salle remplie par tout autre que moi ... Heureusement, la jalousie n'a jamais tué personne.

vendredi 17 janvier 2014

Debriefing



Dans un événement public, il y a le fond et la forme. A Saint-Quentin, l'événement politique de la semaine aura été, mardi soir, la conférence de presse de Michel Garand, tête de liste socialiste aux prochaines élections municipales. J'ai parlé du fond, l'essentiel, dans mon billet de mercredi, je veux aujourd'hui aborder la forme, l'anecdote.

La difficulté de l'exercice, pour Michel Garand, c'est qu'inévitablement on compare ses voeux avec ceux de Xavier Bertrand, le Vasco de Gama avec le palais de Fervaques. Or, c'est incomparable : le candidat socialiste n'est pas le maire, ses voeux aux Saint-Quentinois ne sont pas l'objet d'une cérémonie mais d'un point à la presse. Cependant, dans les deux cas, il y a une forme de solennité qui demeure, j'ai presque envie de dire de mise en scène, qui est à soigner dans ce genre d'intervention.

La perception de la presse, à travers ses articles, est plutôt mitigée. Le titre du Courrier picard n'est pas très encourageant : "Le PS se lance petitement". Je me suis demandé pourquoi les journalistes avaient eu cette impression un peu flottante. La forme y est sans doute pour beaucoup. En matière de disposition, Michel avait choisi la station assise, dos au mur, derrière une table, ses colistiers en rang d'oignons à ses côtés, immobiles, un peu tassés sur la banquette. La position debout, au centre de la pièce, son équipe légèrement en retrait, aurait donné une dimension plus dynamique et plus solennelle.

Et puis, je crois que Michel est fatalement touché par le syndrome de la strip-teaseuse, qui doit en montrer un peu, lentement, sans tout dévoiler d'un coup. Là, il ne s'agissait pas du corps du candidat, mais de son programme. Car la presse n'attend que ça : la liste et le programme. Or, ni l'une ni l'autre ne peuvent encore être rendus publics, le programme à cause du danger de "pillage" (j'ai alors imaginé Xavier Bertrand, un bandeau sur l'oeil, en pirate à l'abordage du vaisseau socialiste). Michel se retrouvait donc dans la situation délicate d'une effeuilleuse qui ne peut montrer qu'un bout de sein ou une moitié de fesse. Au début, la curiosité est excitée, mais très vite la frustration l'emporte. On veut en savoir plus, mais il faut se contenter de ce qu'on a.

Chaque article de presse se termine en titillant le candidat sur un point de ses propos. Le Courrier picard s'étonne que Michel Garand ne connaisse pas le nombre de caméras de vidéo-protection dans la ville, tandis que L'Aisne Nouvelle se montre sceptique sur son projet de véhicules mis à disposition pour les associations. La personnalité du candidat a retenu l'attention, mais le programme a semblé laisser les journalistes sceptiques. Problème de communication (donc de forme, pas de fond) : un début de programme ne va pas sans sa fin. Mais le menu complet, c'est pour bientôt, patience.

Sinon, mes camarades ont été parfaits dans leur silence, laissant à Michel la vedette, comme il se doit. Stéphane Andurand est malgré tout intervenu, en qualifiant de "verrue" le MacDo du quai Gayant (bon appétit !). A la question de savoir si elle serait sur la liste, Anne Ferreira a répondu, par un éclat de rire, que la liste n'était pas encore connue. Carole Berlemont s'était faite une tête d'Amélie Nothomb et Stéphane a sorti, à l'ancienne, sa cravate (le seul cravaté de l'équipe). Michel s'essaie à la blagounette (Xavier Bertrand, "futur ex-maire"), mais sans abuser du procédé, pour lequel Jean-Pierre Lançon reste imbattable. Parmi le public, un jeune restaurateur d'une excellente table de la ville se montrait tout guilleret : un sur la liste ? Mais chut, les journalistes écoutent ...

Le Vasco de Gama, nom du restaurant, lui aussi excellent, qui nous accueillait, est porteur d'une évidente symbolique : ce grand navigateur est le premier à avoir ouvert, au XVe siècle, la route des Indes par mer. Michel Garand est lui aussi un audacieux conquérant, à la recherche de la route qui conduit jusqu'à l'Hôtel de Ville de Saint-Quentin, à condition que les pirates ne lui barrent pas la route.

jeudi 16 janvier 2014

Moi, social-démocrate ...



Ayant choisi hier de privilégier la conférence de Michel Garand, j'en viens aujourd'hui à celle de François Hollande. Pour qui ne l'aurait pas compris, ou ne l'aurait jamais su, ou l'aurait encore oublié, il n'y a plus maintenant de doute possible : le président est SO-CIAL-DE-MO-CRA-TE ! Il aurait pu en faire l'une de ces belles anaphores dont il a le secret : moi, président social-démocrate ...

Social-démocrate, c'est l'évidence de la politique gouvernementale, ça remonte à loin dans l'histoire du parti socialiste (voir mon billet d'avant-hier), mais en politique comme en amour, il faut mettre des mots sur les choses, sinon il y a incertitude, ambiguïté, maldonne et, à terme, déception. Personnellement, je biche, je bois du petit lait (que je préfère au gros rouge) : moi, social-démocrate, ça fait une dizaine d'années que je revendique cette étiquette, pour sa clarté, qui a pourtant fait de moi le mal aimé d'une section locale classiquement socialiste, fricotant avec l'extrême gauche.

La droite a parlé, à l'issue de cette conférence de presse, d'un "tournant", d'une incohérence, voire d'une trahison. Non, il n'y a eu aucun "tournant" mardi après-midi : François Hollande a poursuivi dans la droite ligne de ses voeux télévisés et dans ce qui est sa politique depuis son arrivée à l'Elysée. Le pacte de responsabilité, qui consiste à échanger des baisses de charges sociales contre des créations d'emplois et des efforts de production, prolonge le pacte de compétitivité, qui prônait les mêmes objectifs, avec un moyen différent, le crédit d'impôt. On voit bien que l'inspiration est identique et les finalités également. A la limite, on peut parler d'accentuation, d'accélération, mais sûrement pas de "tournant", encore moins de revirement.

L'extrême gauche parle, elle, de "cadeaux au patronat". Cette expression est idiote. En politique, aucun pouvoir, de droite ou de gauche, ne fait de cadeaux à personne. Car pour quelle raison Hollande ferait-il des cadeaux au patronat ? Je ne vois pas. Les patrons ne font pas partie de la sociologie électorale du parti socialiste. Ce n'est pas grâce à eux que François Hollande a été élu président de la République, ce n'est pas grâce à eux qu'il sera réélu en 2017. En revanche, c'est grâce à eux que la croissance et l'emploi peuvent redémarrer. C'est pourquoi le gouvernement de gauche leur en donne les moyens, comme jamais aucun gouvernement avant lui n'avait osé le faire : c'est ça, la social-démocratie. Si l'on tient absolument à utiliser le mot de cadeaux, il faut le faire autrement : ce n'est pas Hollande qui fait des cadeaux au patronat, c'est le patronat qui doit en faire aux Français, puisque les entreprises n'existent que pour créer des richesses et de l'emploi (il n'y a que les marxistes basiques qui les réduisent au profit accapareur et qui les condamnent à ce titre).

La démarche social-démocrate repose sur le compromis, le donnant-donnant : l'argent contre l'emploi, pour le dire brutalement. La gauche classique raisonne autrement : en termes de luttes de classes, de rapports de forces, qui lui font dire qu'il faut écouter la rue et pas les patrons. Mais la rue généralement ne dit rien, et quand elle manifeste, le rapport de forces est rarement assez fort, sauf circonstances historiques exceptionnelles, 1936, 1968. S'il fallait attendre la mobilisation de la rue, le progrès social n'aurait guère avancé en France. Alors oui, ce sont les patrons qu'il faut écouter, avec lesquels il faut négocier et passer des compromis.

A gauche, certains s'inquiètent : Hollande est-il toujours de gauche ? Oui, sans hésiter. Je me demande même pourquoi on se pose la question, sinon par faiblesse, par fragilité. L'arbre est jugé à ses fruits, une politique à ses objectifs : que veut le gouvernement Hollande-Ayrault ? Sortir la France du chômage de masse et préserver nos systèmes sociaux, principalement de retraites et de santé. Voilà des objectifs de gauche ! L'inégalité à combattre aujourd'hui, ce n'est pas d'abord entre les riches et les pauvres, mais entre ceux qui ont un boulot et ceux qui n'en ont pas. Préserver notre protection sociale, c'est protéger les plus pauvres et les plus modestes (les riches et les milieux aisés n'attendent pas après les systèmes sociaux pour se soigner, s'éduquer et organiser leurs retraites : il leur suffit de se confier au secteur privé). La politique gouvernementale est donc bel et bien une politique de gauche : si elle s'adresse aux patrons, c'est en faveur des classes populaires, qui restent son électorat et son soutien naturels.

Le parti socialiste français d'aujourd'hui est beaucoup plus celui de Blair et Schroeder, pour le dire là aussi un peu brutalement, que celui de Blum et Jaurès. Et c'est normal, inévitable : nos grands ancêtres, et qui le demeurent, n'ont pas connu la mondialisation économique, le capitalisme financiarisé, ni l'éclatement de la classe ouvrière. On peut toujours faire brûler des cierges au pied de leurs statues, rien n'empêchera que la réalité que nous connaissons n'a plus rien à voir avec la leur. Les socialistes ne sont pas des gardiens de musée ou des abonnés perpétuels à l'opposition. Il leur faut agir dans leur époque et dans les conditions de l'exercice du pouvoir.

De toutes les mesures préconisées par François Hollande en matière d'économies, de réduction des dépenses, j'en vois une qui me semble primordiale, et qui est très courageuse de sa part : la réduction du nombre des régions et la simplification de notre organisation territoriale. J'en ai souvent parlé sur ce blog. S'il y a des économies à faire, et massives, c'est bien de ce côté-là. Prenez Saint-Quentin : trouvez-vous normal, cohérent, efficace, rationnel qu'Harly, Gauchy et Neuville-Saint-Amand, qui se confondent géographiquement avec notre ville, qui en sont en quelque sorte le prolongement, trouvez-normal qu'elles disposent de leur propre organisation politique et administrative ? La question mérite au moins d'être débattue. Et notre Picardie riquiqui, avec ses trois pauvres départements sans véritable cohérence historique, ne trouvez-vous pas normal qu'elle devrait regarder vers le nord ou vers l'est afin d'envisager un destin plus grandiose ?

Hollande est courageux sur ce coup-là, car il va se mettre à dos tous les élus concernés, c'est-à-dire la plupart de ses copains. En politique, on peut toucher à votre femme, éventuellement à votre argent, mais jamais à votre pouvoir : c'est sacré, c'est votre identité, c'est ce qui fait ce que vous êtes, un politique. Supprimer un mandat, c'est vécu comme une forme de castration. Et pourtant, il va bien falloir y passer. Xavier Bertrand a une bonne idée sur ce sujet : procéder à un référendum. Les élus ne céderont jamais à d'autres élus, y compris et surtout amis. Mais devant le peuple, ses représentants ne peuvent que trembler, comme les croyants devant le Dieu de la Bible. En République, il y a plus sacré que les mandats accordés par le peuple : c'est le peuple lui-même ! Ceci dit, si j'adhère à la méthode proposée par Xavier Bertrand, je ne crois pas qu'on se retrouvera sur le contenu du projet soumis à référendum. En tout cas, le débat sur cette nouvelle phase de la décentralisation et de la réorganisation territoriale a été lancé, et il sera fondamental.

mercredi 15 janvier 2014

Garand en bon maire



Xavier Bertrand, lors de ses voeux à la population, avait fait fort, en invitant à ses côtés, intervenant de concert, Pierre André. Michel Garand, qui a présenté hier soir lui aussi ses voeux lors d'une conférence de presse, a fait encore plus fort, puisqu'il était accompagné par ... François Hollande, également en conférence de presse, sur l'écran de télévision au fond de la salle (voir vignette).

D'emblée, la tête de liste socialiste aux élections municipales à Saint-Quentin a tenu à préciser que ses voeux s'adressaient à l'ensemble des Saint-Quentinois(e)s, et pas seulement à ses ami(e)s socialistes. Son dernier point presse remontait à octobre. Il était entouré de Carole Berlemont (n°2 sur la liste) et de Jacques Héry (n°3), ainsi qu'Anne Ferreira, vice-présidente du Conseil régional de Picardie. Parmi le public étaient présents Nora Ahmed-Ali (EELV) et Jean-Robert Boutreux (PRG).

Michel Garand a, dans un premier temps, défini ce que devait être, selon lui, un bon maire. D'abord, quelqu'un au service de tous, désintéressé, aimant les gens et au milieu d'eux. Il a ainsi justifié sa présence dans le hall d'entrée du palais de Fervaques, vendredi soir, lors des voeux de Xavier Bertrand (le maire sortant discourant au premier étage).

Un bon maire, c'est aussi un excellent gestionnaire, puisqu'il gère l'argent des contribuables. Sur ce point, Michel Garand a mis en avant son expérience personnelle à la tête des IME (Instituts médico-éducatifs) de l'Aisne : 40 millions d'euros de budget, 3 mois d'avance de trésorerie, une gestion saine. Un bon maire, c'est un véritable chef d'entreprise, qui sait utiliser les ressources humaines et qui a des capacités de prospective. Il est animé par des sentiments de probité et de dévouement, il est le maire de tous, des plus démunis aux mieux lotis.

Michel Garand a complété ce portrait, qu'il fait sien, en affirmant qu'il avait une mentalité de gagnant, qu'il écartait tout esprit de défaitisme. Enfin, il ne cache ni ne renie ses engagements personnels : il sera un maire socialiste. Mais sa campagne sera locale, et il ne l'inscrit dans aucun plan de carrière.

Dans un deuxième temps de la conférence de presse, quelques orientations du programme municipal ont été exposées, sachant que le projet complet et définitif sera rendu public d'ici la fin du mois. Ces orientations, je les résumerais en une formule : un déclic contre le déclin ! Ces grandes lignes, le candidat les a puisées lors de ses porte à porte, elles tiennent en trois points : développement économique, fiscalité, sécurité.

Sur le premier point, Michel Garand s'engage à travailler avec rigueur, en mettant en synergie toutes les forces et les compétences. Sur le volet fiscal, où il était très attendu, il affirme avec une absolue certitude qu'il n'y aura pas d'augmentation des impôts locaux, qu'une baisse serait même souhaitable dans l'idéal. Il ouvre une piste, du côté des économies à faire, principalement dans le budget de la communication. Sur la sécurité, sujet également sensible, Michel Garand prône une politique de la réparation pénale, sous toutes ses formes possibles. Quant à la vidéo-surveillance, il souhaite en rester à l'existant, en soulignant cependant, en des termes que ne renierait pas la tête de liste communiste Olivier Tournay, que les caméras ne règlent pas les délits les plus graves.

Michel Garand a terminé son intervention par quelques points plus particuliers : la couverture de la ville en fibre optique, qu'il veut accélérer ; les transports urbains gratuits pour les aînés, sans conditions de ressources ; pour les plus jeunes, la mise à disposition de véhicules aux associations, notamment pour les déplacements lors des manifestations sportives ; l'aménagement du temps de l'enfant (préféré à l'expression trop réductrice de réforme des rythmes scolaires) en maternelle et en primaire, en partenariat avec les associations, les enseignants et les parents (c'est la première initiative qu'il prendra en tant que maire).

Comment ai-je personnellement perçu l'intervention de celui qui occupe aujourd'hui la place que j'aurais aimé occuper ? Je crois que Michel Garand a su dépasser hier soir deux défauts de la gauche locale (mais qu'on retrouve aussi ailleurs). D'abord, l'incapacité à se donner un chef, je dirais même : le rejet de toute notion de leader, qui traîne malheureusement dans la culture de gauche, certes pour de légitimes raisons (l'idée d'égalité discréditant toute forme de supériorité). Garand a montré qu'il pouvait être un chef pour les socialistes (personne d'autre que lui n'a pris la parole hier soir, et c'est très bien comme ça) et un maire pour les Saint-Quentinois (il est entré dans les habits de la fonction).

Deuxième défaut que Michel Garand a su corriger : la propension à se déterminer en négatif, à cultiver l'esprit de protestation, à faire une fixette sur Xavier Bertrand. Le candidat a parlé de lui et de nous, il ne s'est pas commis en plaisanteries faciles sur son adversaire, c'est aussi très bien comme ça. Oublions la droite, ne pensons qu'à la gauche et à ses projets, c'est là-dessus que les Saint-Quentinois nous jugeront.

Bien sûr, le chemin est encore long et, paradoxalement, la durée est courte, puisque les semaines vont passer très vite, l'élection municipale étant dans seulement un peu plus de deux mois. L'acquis de la gauche, que nous n'avions pas depuis la défaite et le départ d'Odette Grzegrzulka, c'est de disposer maintenant d'un possible maire. Reste encore à découvrir la liste, son ouverture à la société civile, et le programme, avec quelques propositions mobilisatrices. Le déclic contre le déclin viendra aussi de ces deux annonces et de leur perception par les Saint-Quentinois. En attendant, une réunion publique a été annoncée pour le 3 février, sur l'aménagement du temps de l'enfant, en présence d'une spécialiste de la question.

Au moment où Michel Garand terminait sa conférence de presse, François Hollande finissait la sienne, sur l'écran de télévision. Je me suis rendu compte, pendant tout ce temps, que l'un et l'autre utilisaient à peu près les mêmes mots, pour la France ou pour Saint-Quentin : développement, économies, entreprise, concertation, fiscalité, réforme, ... De la ville de Tulle au palais de l'Elysée, le chemin était long. Du restaurant Le Vasco de Gama, où Michel Garand a tenu hier soir sa conférence, à l'Hôtel de Ville de Saint-Quentin, le chemin est beaucoup plus court. Alors, pourquoi pas ?

mardi 14 janvier 2014

Les socialistes et l'entreprise



Des voeux présidentiels sont souvent un exercice conventionnel, sans véritable portée politique. Ceux de François Hollande, cette année, auront au contraire marqué et suscité de nombreux commentaires. A quelques heures de sa grande conférence de presse, il est utile d'y revenir et de rappeler le sens de la ligne politique gouvernementale, qu'on pourrait résumer en ces mots, forcément polémiques : le soutien de la gauche au monde de l'entreprise, alors que sa tradition la porte plutôt à être du côté des classes populaires.

Il faut s'expliquer, et remonter assez loin. A sa naissance, dans les années 70, le nouveau parti socialiste, en signant le Programme commun avec les communistes, est hostile au marché et critique envers l'entreprise. Au congrès d'Epinay, François Mitterrand dénonce le monde de l'argent et préconise la rupture. Lorsque Michel Rocard, à la fin des années 70, déclare qu'entre le marché et la planification (à la soviétique), il choisit, en bon social-démocrate, le marché, Laurent Fabius lui rétorque : "Michel, entre le plan et le marché, il y a le socialisme". Une mentalité va ainsi se créer, anti-marché, anti-entreprise, qui perdure jusqu'à nos jours, chez certains militants et dans une partie de l'électorat. Pourtant, et c'est sans doute le plus étrange, la réconciliation entre les socialistes et l'entreprise ne date pas d'aujourd'hui et de la présidence de François Hollande !

Dès 1982, Pierre Mauroy met fin à l'échelle mobile des salaires, puis en 1983, il adopte une politique de rigueur, en refusant de quitter le système monétaire européen, contre l'avis de Jean-Pierre Chevènement, qui représentait alors l'aile gauche du parti. En 1984, Fabius devient Premier ministre, oublie ses critiques contre le marché et se fait le défenseur de la France qui gagne, c'est-à-dire les entreprises performantes. En 1988, Michel Rocard, ouvertement social-démocrate, est nommé Premier ministre. Edith Cresson lui succède, sur une ligne offensive de soutien aux entreprises et à l'industrie. Elle est remplacée par Pierre Bérégovoy, qui mène une politique du franc fort. Quand Lionel Jospin se retrouve à Matignon, il a une formule qu'on lui a reprochée et pour laquelle je le félicite : "L'Etat ne peut pas tout", façon de reconnaître qu'il faut attendre beaucoup du marché et des entreprises, essentiellement en matière de création d'emplois.

Le soutien de François Hollande au monde de l'entreprise, par son pacte de compétitivité puis son pacte de responsabilité, n'est donc pas quelque chose de nouveau au parti socialiste. C'est une ligne ancienne, qui n'ose pas toujours dire son nom, mais qui s'appelle social-démocratie, c'est-à-dire un socialisme européen qui agit dans le cadre de l'économie de marché et qui se distingue nettement du socialisme traditionnel, national, ouvriériste, marxisant, qui n'a été vraiment influent dans les rangs du PS qu'à l'époque du Programme commun. Celui-ci avait du bon : la décentralisation, l'abolition de la peine de mort, l'extension des libertés publiques, l'augmentation des prestations sociales, la réduction du temps de travail, etc. Mais son volet économique, très étatiste, était intenable.

Je suis surpris qu'on s'étonne de la ligne politique et du discours de François Hollande en faveur de l'entreprise. Je comprends qu'on le conteste lorsqu'on n'est pas socialiste : par exemple le PCF ou l'extrême gauche. Mais qu'un militant, un sympathisant ou un électeur socialistes puissent en être déçus, c'est incompréhensible tellement la ligne social-démocrate est présente, affirmée et grandissante depuis une trentaine d'années. Bien sûr, lorsque le candidat Hollande lance, au Bourget : "Mon adversaire, c'est la finance", la formule a un petit goût de madeleine de Proust, un revival des années 70. Mais c'est l'arbre qui cache la forêt : n'importe quel électeur un peu honnête sait parfaitement que le programme présidentiel de François Hollande n'avait rien de révolutionnaire !

Social-démocratie : c'est le mot qui dit tout, qui éclaire tout mais qu'une partie de la gauche a encore du mal à prononcer, trente ans après qu'elle ait pourtant fait au gouvernement de la social-démocratie ! Du coup, certains utilisent un concept faux, incohérent et stigmatisant : social-libéral. Je ne sais pas ce que ce terme signifie, ni ce qu'il désigne. Une mesure libérale n'est pas sociale, et inversement. Si on vise par cette expression les politiques d'austérité qui ont lieu dans certains pays d'Europe (destruction de l'emploi public, baisse drastique des salaires, remise en cause du montant et de la durée des retraites), je ne vois pas en quoi la politique de François Hollande est concernée. Social-libéral est donc un terme de substitution, pour ne pas avoir à dire social-démocrate, pour critiquer la social-démocratie sans l'avouer.

Il est heureux que les socialistes soutiennent l'entreprise. C'est par elle que la croissance reviendra et que l'emploi sera créé. Ce soutien à l'entreprise et au marché n'empêche nullement que les socialistes conservent et cultivent des valeurs de gauche. Entre Nicolas Sarkozy et François Hollande, on voit bien que les lignes politiques sont différentes, sauf aux yeux des extrêmes, qui regardent de si loin qu'ils confondent tout.

lundi 13 janvier 2014

Trois idées



Demain soir, à 18h30, au restaurant le Vasco de Gama, boulevard Cordier, à Saint-Quentin, Michel Garand, tête de liste du parti socialiste pour les élections municipales, présentera ses voeux aux Saint-Quentinois(e)s, à travers une conférence de presse. Ce sera incontestablement un moment important de la campagne, quelques jours après les voeux du probable candidat de l'UMP, Xavier Bertrand. Quelques éléments du projet municipal de la gauche seront peut-être dévoilés, notamment pour corriger l'impression de "coquille vide", selon l'expression du Courrier picard de samedi dernier, qu'a donnée la publication de la "Charte nationale" (en réalité, un couac de communication, voir mon précédent billet de jeudi).

En attendant, je veux continuer à faire des propositions, ou plutôt revenir sur certaines mesures et les étayer. Le Courrier picard, dans sa page "Municipales 2014", a consacré un article à l'absentéisme et à l'inactivité de certains conseillers municipaux. Cette attitude des élus est évidemment scandaleuse : on méprise le suffrage universel, on tourne le dos à ses engagements, on met en difficulté son propre camp.

Dans la majorité, ces comportements passent presque inaperçus, le nombre d'élus les masquant, les présents et les actifs faisant oublier les autres. Dans l'opposition, où les représentants sont peu nombreux, cette irresponsabilité est beaucoup plus visible et problématique (et puis, je suis plus sévère avec mon propre camp, parce que je veux qu'il gagne). J'ai participé en spectateur à trois mandatures : à chaque fois, il y a eu des absences prolongées, définitives et coupables à gauche. Le pire, c'est que ces élus pouvaient fort bien démissionner : découvrir le dur métier de conseiller d'opposition et y renoncer, ça ne me choquerait pas ; mais ils ne l'ont pas fait, pour ne pas laisser la place au représentant d'un autre parti !

Pour remédier à cette faute, je propose une charte du candidat et de l'élu, amenant chaque personne sur la liste à prendre des engagements, en toute connaissance de cause : siéger en séance tout au long du mandat, remettre sa démission en cas d'empêchement, assurer son rôle de représentation dans les événements locaux. Je parle bien sûr de l'opposition : dans la majorité, les indemnités invitent, sinon obligent à plus d'esprit de responsabilité.

Dans un récent billet, j'ai traité de la gestion de la bibliothèque municipale. A sa suite, un excellent commentaire m'a fait remarquer que le problème, que je n'avais pas osé aborder, était surtout dans l'amplitude des heures d'ouverture, trop peu nombreuses. Mon interlocuteur soulignait judicieusement qu'une ville à prétention universitaire se devait de fournir un meilleur accueil à ses étudiants, notamment en matière de fréquentation de la bibliothèque.

Le hasard a voulu que dans la même semaine, une pétition soit lancée par l'ONG Bibliothèques Sans Frontières, qui va exactement dans ce sens et qui s'adresse aux candidats aux élections municipales. En moyenne, les bibliothèques dans les villes françaises (à l'exclusion des grandes villes) ont une ouverture moyenne de 30 heures hebdomadaires. A Saint-Quentin, nous sommes en dessous : 27,30. En Europe, les durées d'ouverture sont très supérieures, parfois le dimanche ou jusqu'à 22h00. Je ne demande pas qu'on aille jusque-là, mais une nette augmentation des périodes de fréquentation me paraît indispensable.

Dernière mesure en vue d'un programme municipal : le sort de MATELE, la télévision locale, sur laquelle Xavier Bertrand a beaucoup insisté lors de ses voeux. L'opposition l'a beaucoup critiquée, estimant que son financement aurait dû être affecté à autre chose, par exemple la réforme des rythmes scolaires. Michel Garand lui-même a tenu des propos similaires. D'autres reprochent à ce média d'être un instrument de propagande en faveur de Xavier Bertrand. Je ne partage aucun de ces points de vue, mais je ne pense pas non plus que cette chaîne puisse rester en l'état.

Le travail qu'y fait Bertrand Samimi est remarquable, mais la ligne éditoriale, qui consiste à positiver et optimiser les événements de la ville, aura ses limites : on aseptise l'actualité, on écarte ce qu'il y a de plus vif, de plus douloureux, on tombe inévitablement dans les redites. Je ne serai pas surpris qu'au bout d'un certain temps, MATELE ne finisse par lasser, nonobstant la qualité de ses reportages. On ne fait pas de bonne information, de bonne presse ou de bonne télé, uniquement avec l'actualité heureuse : c'est anti-professionnel. Ce qui mobilise et intéresse lecteurs et spectateurs, c'est l'actualité problématique, conflictuelle, parfois dramatique. On connait la célèbre formule sur les trains qui arrivent à l'heure ...

Je comprends que l'actuelle équipe municipale ne souhaite pas s'embêter avec une télévision qui diffuserait de véritables informations journalistes, évoquerait par exemple les conflits sociaux, organiserait des débats dans le cadre des élections municipales, susciterait des polémiques, etc. Mais je crois que la gauche doit oser le faire, parce que l'audimat en serait amélioré et surtout préservé pour l'avenir. Pourquoi ne pas envisager une collaboration avec des journalistes professionnels, des partenariats avec la presse locale ? L'idée serait plus séduisante qu'une pure et simple suppression de MATELE, une télévision à laquelle je tiens, à condition de revoir son cahier des charges.

Une charte qui responsabilise les élus, une bibliothèque beaucoup plus adaptée au public scolaire et universitaire, une télévision qui s'ouvre à toute l'actualité, voilà trois idées que je soumets aujourd'hui au débat.