dimanche 29 octobre 2017

Macron a-t-il une âme ?



Les Byzantins, assiégés par les Ottomans dans Constantinople, discutaient du sexe des anges. En Europe, les théologiens se demandaient si la femme avait une âme. Laurent Wauquiez, candidat à la présidence des Républicains, s'inscrit dans ce type de débat, très métaphysique. Dans le JDD d'aujourd'hui, il s'interroge sur "le désert de l'âme" du président de la République. Réponse catégorique : "C'est un vide". Bref, Emmanuel Macron n'a pas d'âme. La nouvelle est de taille et les répercussions politiques immenses.

Les animaux aussi n'ont pas d'âme (autre débat philosophique, très prisé au XVIIème siècle). Pourtant, ils existent et vivent. Sans âme non plus, Macron a une réalité, que Wauquiez analyse, en décrivant le chef de l'Etat en "enfant capricieux et adulte arrogant" (on s'y attendait : le coup de l'arrogance, comme d'autres font le coup de la panne ou le coup du lapin). Emmanuel Macron n'a qu'"un seul projet : lui-même". "Il s'aime". Mais difficile de s'aimer quand on n'a pas d'âme ... Et Wauquiez, quel est son projet, à part faire le portrait de Macron ? Et lui, ne s'aime-t-il donc pas ?

Dépourvu d'âme, Macron vu par Wauquiez est plein de haine (comme quoi l'amour de soi ne suffit pas). Et tenez-vous bien, pas n'importe quelle haine (celle de l'adversaire, par exemple) : non, "une haine de la province". On se demande où Wauquiez va chercher ça. Mais on voit bien son objectif, qui est celui d'une partie de la droite : soulever les ruraux contre les urbains, défendre la campagne contre la ville, soutenir la "périphérie" et les "territoires", comme on dit aujourd'hui, contre les grandes métropoles. Là, Wauquiez n'est pas si bête : il réactive toute une tradition conservatrice qui fait plus confiance au terroir qu'à la cité.

Et pour enfoncer le clou, Wauquiez lance contre Macron la plus grave accusation, l'injure suprême : parisien ! Salaud de parisien ! "Le plus parisien de tous les présidents", dans le texte. Comme on dit dans mon Berry : "Parigot tête de veau, parisien tête de chien !" Croit-il qu'il va se faire élire avec ça, dans les années qui viennent, le Wauquiez ? Dire que Paris nous est envié dans le monde entier, que la vie parisienne, intellectuelle et artistique, fait l'honneur et la renommée de notre pays ! Pour Wauquiez, non : parisien c'est pas bien, et provincial c'est génial, je suppose. Aurait-il oublié que Macron vient d'une famille picarde, qu'il est né et a vécu à Amiens ? Bon, tout ça ne répond pas à la première question : Macron a-t-il une âme ? Il va falloir tout de même vérifier.

jeudi 26 octobre 2017

Février en Octobre


Depuis quelques semaines, les ouvrages, magazines et documentaires sur le centenaire de la Révolution russe sont nombreux. S'il le faut, j'en conseille un seul : le hors-série de L'Humanité, très complet et très intéressant, puisqu'il nous conduit à cette question : que pense ce qui reste du communisme français de ce qui reste de la révolution d'Octobre ? Car c'est l'ambulance qui regarde passer le corbillard de l'Histoire.

Dans cet événement plein de propagande c'est-à-dire de mensonge ou d'oubli (mais c'est la même chose), l'erreur majeure est de croire que la Révolution, moment le plus formidable du XXème siècle après l'homme sur la Lune, ait eu lieue en octobre 1917. Non, c'est en février que tout a commencé et c'est en octobre que tout s'est terminé. Au début de cette incroyable année, le régime tsariste s'effondre presque sans résistance, alors que son chef exerçait le plus absolu des pouvoirs sur terre à cette époque. C'est un incompréhensible mystère : la défaite d'une autocratie séculaire en quelques jours seulement.

Double mystère : la Russie est archaïque, paysanne, orthodoxe. Elle n'a pas connu son siècle des Lumières et se montre pourtant plus révolutionnaire que l'industrielle Angleterre ou la républicaine France. En Février et pendant plusieurs mois, le plus vaste pays du monde va connaitre un happening permanent, un mai 1968 avant l'heure et sans Paris. Des comités populaires se créent partout, jusque dans l'armée. Le gouvernement est constitué de socialistes et de libéraux : la démocratie parlementaire se met en place. Lénine est inconnu, Kerenski est follement populaire. Mais il y a la guerre et il faut prendre des mesures d'autorité. C'est là que les choses se gâtent.

Lénine revient d'exil, il ne jure que par la paix, ce qui fait les affaires de l'Allemagne ennemie. C'est un violent, un fanatique, un bolchévik, c'est-à-dire un minoritaire. Il s'en moque autant qu'il se moque du parlementarisme. En bon communiste, il ne croit qu'en ce que je déteste : les rapports de force. Octobre n'est une révolution que pour ceux qui aiment les légendes. La vérité historique, c'est que c'est un coup d'Etat, où les militants et les militaires (qui souvent se ressemblent) s'emparent du pouvoir, sans le peuple et contre l'assemblée légitimement élue. Trotski aide beaucoup : avec lui, le communisme se militarise et ne cessera pas de l'être tout au long du siècle. N'oublions pas la troisième personne de cette trinité pas sainte du tout : Staline, qui attend son heure. Les trois sont distincts mais inséparables, comme le Père, le Fils et le Saint Esprit dans le christianisme. Permettez-moi donc de fêter, en ce mois d'octobre, la vraie révolution russe, qui a eu lieue en février.

mercredi 25 octobre 2017

Marcheurs de la première heure



Laurence Biava est chroniqueuse sur le web, agent littéraire et collaboratrice parlementaire. C'est une Marcheuse de la première heure. Il y a environ un an, ayant remarqué mon blog, elle me propose de participer à un ouvrage collaboratif, racontant l'histoire de notre mouvement autour de cette question : "Pourquoi cette passion, cet emballement collectif qui a jailli d'un coup ? Ses causes ? Ses aspects ?". Je dis bien sûr oui sans hésiter. Parmi une quarantaine de Marcheurs, j'ai donc livré mes réflexions dans deux chapitres : "Adieu François" et "On va gagner".

Le livre est terminé, il va sortir dans quelques jours, à la fin de ce mois. Il s'intitule : "En Marche ! Une histoire française". Je vous recommande évidemment son achat et sa lecture. Il est publié aux éditions Ovadia, au prix de 20 euros (18 pour les adhérents de La République en Marche) et fait 229 pages. Les droits d'auteur seront reversés à LREM. Si l'ouvrage n'est pas présent chez votre libraire habituel, vous pouvez le commander auprès du distributeur : distribution@paradigmeconseil.com. J'oubliais : macroniens non fervents s'abstenir ...

mardi 24 octobre 2017

La culture de l'exclusion



Ce soir, les Républicains vont probablement exclure de leur parti ses membres qui ont rejoint le gouvernement, dont le plus illustre d'entre eux, le Premier ministre. Ce sera une erreur politique et une stupidité sans nom. D'abord, pourquoi avoir fait traîner cette affaire pendant six mois ? Si des têtes devaient tomber, c'était dès le début, sans attendre. La droite s'est laissée prendre dans un mauvais feuilleton qui ne peut que desservir son image. D'autant que les exclus deviendront des victimes, ce qui est bien porté par les temps qui courent.

La culture de l'exclusion est un vieux réflexe propre à tous les appareils politiques. Au Parti socialiste, j'ai failli par deux fois en faire les frais, ne menaçant pourtant personne, ne recherchant aucun pouvoir, ne rejoignant pas l'adversaire mais ouvrant simplement ma bouche. Un appareil n'existe que par ses statuts, appliqués dans leur formalisme le plus strict ; le reste, c'est du creux, même l'idéologie, malléable selon les circonstances. Pour cultiver l'entre soi, resserrer les rangs, se donner un semblant d'unité, exercer sa bien faible autorité, l'appareil utilise ce moyen, l'exclusion, qui n'est plus aujourd'hui supportée, dans une société d'individualisme et de liberté. Exclure, pour un parti politique, c'est procéder à un rituel d'exorcisme, pratiquer un sacrifice consolateur, sinon vengeur : rien de plus.

Qu'on ne me dise pas que l'exclusion force un individu à se mettre en conformité avec ses convictions ! Edouard Philippe et ses camarades n'ont jamais cessé d'être des hommes de droite, accueillis et respectés comme tels par Emmanuel Macron au sein du gouvernement. Ils n'ont aucunement renoncé à leur sensibilité politique. Le président de la République avait annoncé la couleur lors de sa campagne originale : ET de gauche, ET de droite. Il n'y a donc pas de contradiction à ce que des socialistes, des centristes et des libéraux le rejoignent.

C'est vraiment bête : si les Républicains n'en avaient pas parlé, n'avaient pas entamé ce faux procès, personne n'y aurait songé. Qu'est-ce que ça peut faire aux Français que Philippe ou Darmanin aient ou pas leur carte chez les Républicains ? En quoi cela peut-il déranger cette formation politique, qui aurait mieux fait de l'ignorer que de se faire ainsi une mauvaise publicité ? Exclus ou pas, ça ne changera rien sur le fond. Ce choix de l'exclusion, si elle est ce soir confirmée, sera un signe supplémentaire du déclin des appareils politiques, qui ne sont plus en phase avec la société. La discipline bête et méchante ne leur sert plus à rien.

lundi 23 octobre 2017

Macron 1968



L'annonce d'Emmanuel Macron de célébrer l'an prochain le cinquantenaire de mai 1968 en a surpris plus d'un. C'est la première fois qu'un chef de l'Etat souhaite commémorer cette révolte ... contre l'Etat et la société d'alors ! En 1978, l'événement était encore trop récent et Giscard au pouvoir. En 1988, Mitterrand vient juste d'être réélu et sa personnalité s'accorde mieux avec un autre anniversaire qu'il prépare assidûment : le bicentenaire de la Révolution française, l'année suivante. En 1998, l'ex-trotskyste Lionel Jospin aurait pu être sensible à une commémoration ; mais nous sommes en période de cohabitation et le chef de l'Etat, Jacques Chirac, n'est guère, lui, soixante-huitard. En 2008, le président Sarkozy est celui qui a le plus vertement dénoncé mai 68 durant sa campagne électorale : impossible pour lui de renouer avec cette histoire.

Mais Emmanuel Macron est-il mieux disposé, plus en phase avec le soulèvement étudiant et ses suites politiques ? En apparence, non. Ses premières mesures politiques, son programme de campagne ne sont pas directement influencés par l'idéologie de mai. On pourrait même craindre le contresens, l'anachronisme. Je crois qu'il n'en est rien. Qui aujourd'hui peut se présenter l'héritier de mai 68 ? A mon avis, personne. Vous voyez Mélenchon sur les barricades ? Pourtant, si la lettre de l'événement n'est pas chez Macron (ni chez nul autre), je perçois l'esprit de mai en lui : il fait revivre, certes à sa façon, plusieurs thèmes soixante-huitards.

D'abord, l'exaltation de la jeunesse, l'opposition d'un monde nouveau contre le "vieux monde" des appareils politiques, des notables et des rentiers. Ensuite, Macron défend la liberté sous toutes ses formes : c'est pour lui la vertu cardinale. Enfin, l'ouverture au monde est sa préoccupation majeure, et son éloge de la mobilité fait penser à ces road movies ou road stories qui enchantaient les années 60 et 70. Macron, par sa vie, est un personnage iconoclaste, qui brise le moule social dans lequel il est né. Si on peut l'opposer à mai 68 sur certains points, on peut l'y rattacher par ceux-là.

Soyons plus précis, comme on dit aujourd'hui : mai 68 n'a pas été forcément ce qu'on croit ou ce qu'on a retenu. Ce mouvement était férocement anti-étatiste, antitotalitaire, anticommuniste. Il a donné naissance à de multiples courants, répugnant à tout monolithisme. La sensibilité "libéral-libertaire" est l'un d'eux, et c'est par elle qu'Emmanuel Macron se rattache à l'événement. Aucun autre de ses prédécesseurs n'a une aussi forte proximité avec mai 68, de quelque nature qu'elle soit. Il n'est donc pas surprenant que sa figure la plus emblématique, Daniel Cohn-Bendit, ait très rapidement soutenu le jeune leader d'En Marche ! Avec lui plus qu'avec aucun autre, l'imagination était au pouvoir. Alors oui, l'an prochain, tous ensemble, comme je l'avais fait il y a dix ans à Saint-Quentin et à Guise, nous fêterons mai 68, la richesse et la complexité de l'événement, y compris en interrogeant sa part sombre et ses adversaires résolus. Ne disait-on pas à l'époque : il est interdit d'interdire ?

dimanche 22 octobre 2017

Macron réélu président !



Le sondage paru aujourd'hui dans le JDD est apparemment stupéfiant : six mois après son élection, Emmanuel Macron serait aujourd'hui réélu, en améliorant nettement son résultat (+4 points). Le Pen ne bouge pas, Mélenchon baisse un peu, Hamon augmente un peu et Fillon recule de 5 points. A lire de nombreux sondages, à entendre de multiples commentateurs, le président ne devrait que baisser dans l'opinion : c'est tout le contraire !

Pourtant, rien de très étonnant : un sondage porte souvent sur un point particulier. Quand on vote, c'est sur une politique globale. On peut très bien désapprouver Macron sur telle mesure et adhérer à sa politique globale. Surtout, voter, c'est comparer et choisir. On peut critiquer Macron et pourtant le soutenir lorsqu'il est confronté à d'autres candidatures. Quoi qu'il en soit, ce sondage est rassurant et encourageant pour tous les macroniens : la base électorale du président de la République ne s'érode pas mais se renforce. La direction prise est donc la bonne. La contestation sociale ne mobilise pas et l'opposition manque de crédibilité : voilà qui est confirmé.

Bien sûr, tout sondage est relatif, éphémère et insuffisant. Qui pourrait aujourd'hui revoter pour Fillon, quand on sait maintenant son désastre électoral ? Mais la grande leçon, c'est que Macron élargit son audience à droite, Les Républicains n'ayant pour l'instant ni leader, ni projet. La grande leçon aussi, c'est que Macron ne perd pas à gauche : la radicalité de Mélenchon a atteint ses limites, même si elle demeure importante ; le PS ne se relève pas de son terrible échec.

Ce sondage prend aussi toute sa valeur lorsqu'on le compare à son équivalent, il y a cinq ans : après six mois, Hollande subissait une première importante baisse de popularité, jusqu'à voir Sarkozy l'emporter contre lui. On constate l'immense différence avec Macron. De quoi être satisfait, mais pas crier victoire : ce que je remarque le plus autour de moi, c'est que les gens, s'ils gardent leur confiance et leur espoir dans le président, sont en attente de résultats. C'est dans un an ou deux, quand on entrera dans le mi-mandat, que l'opinion se forgera une idée plus solide. Mais par les temps qui courent, un chef de l'Etat qui n'est pas impopulaire au bout de six mois alors qu'il a lancé plusieurs réformes et mesures controversées, il y a de quoi s'en réjouir.

samedi 21 octobre 2017

On ne se refait pas



Contrairement à beaucoup de Français (ce dont je ne me plaindrais pas), j'ai suivi jeudi soir l'émission consacrée à Marine Le Pen. "Oral de rattrapage", ont répété à l'envie les commentateurs, qui abusent souvent de métaphores. Je préfère l'écriture directe. Le Pen n'a rien "rattrapé" du tout. Elle a sans doute voulu effacer son débat raté des présidentielles. Mais si on peut corriger une erreur politique, on peut difficilement effacer une incompétence et un tempérament.

Elle a tenté, dans les apparences : les lunettes adoucissent le visage, le rire qui fait tant penser au père et fait si peu sérieux ne revient que rarement, quand elle s'oublie ; la couleur bleue est classique, là où les femmes politiques mettent généralement du rouge ou du blanc pour se faire remarquer. Sa parole est moins virulente. Bref, le côté facho s'estompe. Mais quand on voit derrière elle sa bande, Collard, Alliot et les autres, on se dit que la bête n'est pas morte.

Et puis, cette modération n'est pas qu'une tactique : c'est le signe d'une hésitation. Marine Le Pen avait l'air paumé, incertaine. Elle a gommé l'arrogance, pas son ignorance des dossiers. Face à Darmanin, très gentil petit garçon mais débatteur redoutable, c'était flagrant. Tout le monde a retenu, avec raison, son inconséquence sur l'Europe, où elle n'a pas changé depuis son naufrage devant Macron. Elle fait dépendre la sortie de l'Euro de multiples conditions, elle fait de la politique avec des "si", c'est-à-dire qu'elle ne fait pas de politique, car pour cela, il faut des convictions fermes (Philippot, sur ce point, est clair ; pas étonnant qu'il soit parti du FN ...). En tant que fervent européen, je m'en réjouis : les anti-européens sont si peu sûrs d'eux-mêmes qu'ils n'osent pas annoncer la couleur, ne vont pas jusqu'au bout de leur logique.

L'ISF, Le Pen est contre sa réforme, parce qu'elle taxe la richesse immobilière, pas le capital. Elle pense que si Macron supprime la taxe d'habitation, c'est qu'il veut transformer les Français en locataires nomades. Elle s'en prend à une "fiscalité du déracinement". Pour elle, les "racines", c'est l'investissement dans la pierre. Le capital est forcément mauvais, égoïste, cosmopolite. Elle fait plus confiance à la propriété qu'à l'entreprise. Le Pen se prétend pragmatique et elle nous sort tout un discours idéologique dans lequel on reconnaît facilement les caractéristiques de toujours de l'extrême droite. Sans compter l'aspect mensonger et délirant, puisque Macron n'a pas l'intention de s'en prendre à la propriété, ni de développer les locations ! Il veut simplement que la charge locative soit moins lourde et que le capital s'oriente vers la création d'emplois. Marine Le Pen a essayé jeudi soir de se refaire, mais on ne se refait pas. Et ce n'est pas moi qui lui reprocherai d'être fidèle à elle-même.

mardi 17 octobre 2017

La fin ne justifie pas les moyens



Le viol est un crime. La violence sexuelle est la pire des violences, parce qu'elle touche à l'intimité. Les injures ou propos à caractère sexiste doivent être lourdement réprimés. Notre société, sur ce sujet, a fait d'immenses progrès, quand on compare aujourd'hui à autrefois. D'immenses progrès restent à faire, parce que les mentalités ne changent pas si facilement. En matière de solution, il fait faire confiance en la justice : l'arsenal judiciaire est compétent et efficace. Mais là encore, il ne peut pas, à lui seul, changer la nature humaine.

Faut-il une loi supplémentaire ? C'est possible : aux parlementaires et aux experts d'en discuter. L'école doit jouer aussi son rôle dans la lutte contre les préjugés. Sans oublier l'éducation familiale, qui est décisive. De nombreuses associations travaillent à informer, défendre et aider les femmes, je pense en particulier au CIDFF : tournons-nous vers elles. L'Etat doit certainement mettre des moyens supplémentaires, matériels, financiers et humains pour cette juste cause.

Après ces rappels nécessaires, il faut déplorer le tapage médiatique qui secoue notre société depuis quelques jours et qui ne contribue en rien, sauf dans les apparences, à la cause des femmes. Le site "Toi aussi, balance ton porc" est une opération déplorable, dont je m'étonne qu'aucune autorité de notre pays ne songe à la condamner ou à l'interrompre. Les principes du droit sont bafoués (la présomption d'innocence), les détails salaces vont dans le sens du voyeurisme, la dénonciation publique contrevient à la règle élémentaire d'une société civilisée, des faits sans rapport et sans vérification sont allégrement mélangés.

Vous me direz peut-être qu'il est légitime de répondre à la violence (physique) par la violence (verbale), qu'une violation de la loi en justifie une autre, que la vulgarité mérite la vulgarité ? Eh bien non : on ne lutte pas contre des actes criminels et des comportements odieux par des initiatives légalement et moralement contestables. J'ajoute que la nature humaine et les rapports entre hommes et femmes sont un sujet complexe, où il est difficile parfois d'y voir très clair. Il s'y mêle la pulsion, la séduction et souvent l'argent, au nom de quoi on est prêt à faire n'importe quoi. Veillons donc à ne pas tomber dans les clichés faciles, au risque de graves injustices : il n'y a pas d'un côté l'homme Prédateur et de l'autre la femme Victime, même et surtout quand l'un et l'autre ont la tête de l'emploi. Je suis effrayé par les raccourcis, les simplifications qui déferlent dans les médias. Non, la fin, sur laquelle nous sommes tous d'accord, ne justifie pas certains moyens.

lundi 16 octobre 2017

Macron, 4 ruptures



Belle intervention d'Emmanuel Macron hier soir à la télévision, en rupture sur quatre points avec ses prédécesseurs :

1- La parole rare. Le président de la République ne s'était pas exprimé devant des journalistes depuis cinq mois ! C'était donc la toute première fois depuis le début de son quinquennat. Du jamais vu depuis bien longtemps. Sarkozy et Hollande avaient la parole fréquente et bavarde, jusqu'à devenir les propres commentateurs de leur action, se pliant ainsi aux normes médiatiques du moment, qui fonctionnent à l'immédiateté. Macron rompt complètement avec ce type de communication, réactif et finalement délétère. En économisant son propos, il le valorise et le présidentialise. Bravo.

2- Le rejet des effets d'annonce. En matière de communication, une règle d'or prévalait : n'aller à la télé que si on a quelque chose de nouveau à dire. Macron, hier, n'a rien annoncé de neuf. Et tant mieux ! Il s'est concentré sur ce qu'il fait, rappelle ce qu'il a promis, met sa politique en perspective sur le long terme et fait la pédagogie de ses réformes, bref tout ce qui a manqué à Hollande et déjà à Jospin. Pas la peine n'innover à chaque fois, au risque de s'égarer, mais creuser son sillon. Quand Hollande, à la fin de son mandat, annonce une réforme du code du travail, c'est trop tard et ce n'était pas prévu au programme, aussi utile soit cette initiative qui ne pouvait donc qu'échouer.

3- L'argument de l'héritage abandonné. Chaque nouveau président se tourne vers l'ancien et son bilan pour le décrier et expliquer ainsi toutes les peines qu'il a à mener sa propre politique. Macron rompt avec cet argument trop facile. Il ne met pas en cause son prédécesseur pour justifier ses difficultés. Il ne reporte pas les torts sur les autres, en reste à son mandat, à la politique qu'il a inaugurée en arrivant au pouvoir. On ne va pas sans cesse revenir sur le passé !

4- La fin du mea culpa. Notre société est gangrénée par une mentalité insupportable, psycho-morale, qui oblige à faire attention aux mots qu'on emploie, à se soumettre à un langage politiquement correct, à pratiquer ce qu'on appelait autrefois la langue de bois, qui s'est transformée en langue de coton ou de velours. Macron s'en fiche et c'est excellent ! Illettrés, gens de rien, fainéants, bordel et j'en passe, il assume complètement, ne s'excuse pas. Parce qu'il dit ce qu'il pense, c'est-à-dire ce qu'il croit être vrai ; parce qu'il refuse la bien-pensance, le parler bourgeois, tout en pratiquant un français tout à fait correct. Quel bonheur que cette transgression !

Sur le fond, Macron a défendu son projet, qui n'est pas de gérer la société, mais de la transformer en profondeur. Pour aller vers quoi ? Une société du travail. Le PS s'est effondré parce que son candidat a défendu l'idée d'une fin du travail, pour finalement déserter après la bataille. La droite a échoué parce que son candidat, pourtant homme d'Etat doté d'un solide programme, s'est perdu dans le lamentable scandale du travail fictif de son épouse. Si Macron l'a emporté, c'est entre autre parce qu'il a restauré l'idée d'une société du travail, là précisément où les autres candidats ont péché.

samedi 14 octobre 2017

Ich bin nicht arrogant



"Je ne suis pas arrogant" : c'est l'étrange titre du magazine allemand Der Spiegel, venant de la bouche d'Emmanuel Macron. Une formule moins politique que psychologique, à la mode d'aujourd'hui. Elle est écrite bien sûr dans la langue de Goethe, sauf l'adjectif, en français. Comme si le mot et le vice étaient des spécialités nationales. Il faut dire que nos paroles en sont remplies : arrogant est devenu un reproche courant, souvent en doublette avec méprisant, jusqu'à placer au second rang des défauts autrefois beaucoup plus stigmatisant, comme menteur ou voleur. Mais, pour ces derniers, des preuves objectives sont exigées, alors qu'on peut taxer n'importe qui d'arrogance ou de mépris sans avoir à se justifier, tant l'attaque est subjective.

"Je ne suis pas arrogant", se défend notre président. A-t-il besoin ? Quand on voit, à la une du magazine, son visage doux et lisse, ses yeux bleus, quand on se souvient de son sourire, quand on sait qu'il met en avant la vertu de la bienveillance, on se dit qu'on peut sans doute imputer à cet homme de nombreux défauts, afficher de graves désaccords avec sa politique mais certainement pas le traiter d'arrogant. Si ses adversaires ne le sont pas, ils sont en revanche malhonnêtes en portant cette accusation. Ne me reprochez pas d'être subjectif dans le portrait que je fais de Macron : ses procureurs le sont autant dans leur réquisitoire. Je retourne l'arme contre celui qui vise.

Emmanuel Macron a son explication : "Je ne suis pas arrogant vis-à-vis des Français, je suis déterminé". Ok, mais n'est-ce pas justement cette détermination qui passe, certes à tort, pour de l'arrogance ? Dans un pays qui ne croit plus à grand chose, un type, fût-il chef de l'Etat, "choque" parce qu'il ose afficher de fortes convictions (qu'on peut ne pas partager, c'est un autre débat). Dans une société où il est de bon ton de n'avoir aucune certitude, celui qui est sûr de lui semblera, par contraste, arrogant.

L'arrogance qu'on prête à autrui n'est que le reflet de notre faiblesse : dans un monde sans passion, quoi de plus irritant qu'un individu enthousiaste ? Pour tous ceux qui ne le sont pas, l'audacieux est soupçonné de témérité, le discret est accusé de timidité, l'économe passe pour avare et la vérité (celle du moins qu'on se fait et pour laquelle on se bat) est taxé d'arrogance. A Emmanuel Macron, je dis bien fort : continuez, monsieur le président, à être arrogant, contre tous les malhonnêtes qui vous font ce faux procès et qui n'ont en tête que de vous rabaisser pour mieux vous abattre. Ich bin arrogant !

mercredi 11 octobre 2017

E viva espana !



Je ne comprends rien à cette histoire de Catalogne qui veut devenir indépendante. C'est absurde, surréaliste. Rien ne justifie une telle aspiration. Est-ce que moi, Berrichon d'origine, je milite pour l'indépendance du Berry ? Non, je n'y pense pas, même dans mes rêves. Je sais bien : ce n'est pas la même chose. Et pourquoi donc ? Basques, Bretons, Corses et tous les autres peuvent à leur tour s'y mettre et réclamer leur indépendance. Mais pourquoi ? Non, tout ça m'échappe.

Ne me parlez pas de culture, d'histoire ou de tradition ? L'Etat national ne les interdit pas. L'Espagne est une démocratie dans laquelle les Catalans ont une part d'autonomie et leur propre gouvernement : ça ne leur suffit pas ? Les aspirations régionalistes ont leur légitimité sous des dictatures qui les oppriment : en République, il n'y a pas ce problème. Cette résurgence de l'esprit provincial (comment le qualifier autrement ?), alors que nous vivons en pleine et bienfaisante mondialisation, a quelque chose d'aberrant. En tout cas, le cosmopolite, l'internationaliste, le citoyen du monde que je suis ne s'y reconnaît pas.

D'un autre côté, il ne faut pas non plus s'affoler. D'abord parce que le régionalisme mine et fait éclater cette plaie qu'est le nationalisme, en même temps qu'il remet en cause le néfaste jacobinisme. De ce point de vue, c'est positif. Ma crainte, c'est que le remède soit pire que le mal : le régionalisme n'est-il pas un mini-nationalisme, la fragmentation du territoire en plus ? Heureusement, nous avons l'Europe : par elle, beaucoup plus que par l'Etat-nation, les régions peuvent se faire reconnaître et respecter dans leurs différences. Si la crise catalane pouvait renforcer l'Europe, ce serait bien.

Et puis, il y a la démocratie : rien ne peut se faire sans le soutien des peuples. Si les Catalans veulent leur indépendance, si ce choix résulte d'une élection, je ne vois pas comment les garder dans l'Etat espagnol (même si ce serait souhaitable). Il faut faire confiance à la sagesse des populations : l'indépendance de la Catalogne ferait sans doute plaisir à pas mal de Catalans, mais ce serait la catastrophe économique pour tous. Espérons donc ne pas avoir à en arriver là.

vendredi 6 octobre 2017

Perte d'identité ouvrière



Dans le prolongement du billet d'hier, je reviens sur la polémique du "bordel", abordant cette fois le fond, très intéressant. Qu'est-ce qui est en jeu ? Pas l'emploi (les salariés peuvent retrouver un travail), pas la formation (ils sont qualifiés), pas les rémunérations (elles ne sont pas mises en avant) : non, mais c'est la mobilité, le fait d'avoir à se déplacer loin de chez soi (même si cet éloignement est tout relatif), les inconvénients et les dépenses que cette situation occasionne. J'ai écrit hier qu'il fallait aller là où se trouvait le travail, et ne pas attendre qu'il vienne à nous. Je voudrais aborder aujourd'hui la question sous un autre angle : celui de la culture ouvrière.

Cette classe sociale n'a jamais été sédentaire, contrairement à la paysannerie. Les ouvriers ont constitué leur identité par rapport au travail, pas par rapport à la terre. Au contraire, le prolétariat est né, au XIXème siècle, de l'exil rural. La ville était jugée émancipatrice, à la différence de la campagne. La classe ouvrière a toujours été extrêmement mobile, elle a su s'adapter. On ne peut donc pas lui faire un procès en immobilisme. Où est alors le problème aujourd'hui, que la réaction de Macron a mis à vif, sans qu'il le veuille ? C'est qu'hélas la culture ouvrière a quasiment disparu, et les réflexes qui allaient avec.

Le nerf du problème, c'est notre rapport au travail. Un ouvrier savait trois choses : 1- on travaille pour gagner sa vie. 2- on est fier de ce qu'on fait. 3- on est conscient de son utilité sociale. Ces trois sentiments ont disparu, parce que la culture ouvrière a disparu. Elle a été remplacée par la psychologie des classes moyennes, intellectuelles, dans le secteur tertiaire, la mentalité petite-bourgeoise. Désormais : 1- on travaille pour gagner de l'argent (on n'accepte plus de faire n'importe quoi). 2- la fierté du produit fini a disparu avec le travail manuel. 3- dans une société individualiste, l'utilité collective n'a plus guère de valeur ; seul compte l'épanouissement personnel, le bien-être dans et grâce au travail.

Un ouvrier pouvait se sentir terriblement exploité ; mais jamais il ne se serait senti "malade" de son travail, "en souffrance" ou en "burn out", pour reprendre les lieux communs de notre époque. En perdant la culture ouvrière, nous avons perdu le sentiment de dignité dans le travail. Et ce n'est pas dû aux changements dans son organisation, puisque l'exploitation des travailleurs étaient beaucoup plus grave, plus violente autrefois. Nous ne reviendrons pas en arrière. Pendant la campagne présidentielle, le candidat Benoit Hamon, héritier bâtard du socialisme, avait trouvé la grotesque solution : puisque nous sommes malades du travail, amputons-nous, supprimons-le ! De quoi rendre fous nos ancêtres ouvriers ...

jeudi 5 octobre 2017

Fouteurs de bordel



En matière de comportement moral, il est assez facile d'être sincère : il suffit de se laisser aller. Il est également aisé d'être généreux, car il y a un plaisir à offrir. Mais être honnête est sans doute la vertu la plus compliquée, celle qui nous demande le plus d'effort sur nous-mêmes. Face aux propos d'Emmanuel Macron sur "ceux qui foutent le bordel", quel jugement honnête peut-on porter ?

D'abord, il faut avoir l'honnêteté de reconnaître que ce sont des propos volés, non publics, dans un moment d'exaspération comme nous en connaissons tous, exprimée en des termes non choisis, spontanés. Non, il n'est pas honnête de rapporter ce genre de paroles prononcées à la va-vite, en petit comité, et de les faire tourner en boucle, comme pour rendre fou. Chacun d'entre nous se retrouverait rapidement et sévèrement condamné, si ses paroles privées étaient divulguées. Mais aujourd'hui, ce type de respect et de discernement ne sont hélas plus de mise.

"Bordel", dans la bouche d'un garçon aussi bien élevé que le chef de l'Etat, voilà ce qui "choque" : il y a un effet de contraste qui le dessert. Pourtant, notre société, via ses réseaux sociaux, ne cessent de promouvoir la transparence, la spontanéité. En sommes-nous à une contradiction près ? Honnêtement, le fond de la réaction présidentielle est ailleurs : des manifestants, où se mêlaient cégétistes et élus locaux, ont voulu perturber la visite du président de la République, se faire absolument inviter à sa table, bref lui forcer la main. Cette attitude porte un nom : foutre le bordel.

J'ai souvent manifesté, je n'ai jamais foutu le bordel. Macron ne s'en serait pas pris à l'expression légitime de salariés inquiets ou en colère. Mais hier, c'est la légalité qui a été transgressée et l'autorité bafouée. J'exagère ? Oui, sûrement, puisque depuis pas mal de temps, notre société a pris l'habitude de se moquer des lois, d'ignorer les règlements et de remettre systématiquement en cause les autorités. C'est tout le pays qui est devenu bordélique. Et je ne confonds pas le bordel avec la belle révolte (1968) ou la grande révolution (1789), comme je ne confonds pas Poujade et Lénine. Le gueulard n'est pas le révolutionnaire.

Quant au problème local, je ne le connais pas, mais encore une fois, c'est moins le fond que la forme qui a été hier fort justement critiquée par le président de la République. Mais pour ce que j'en ai entendu, il s'agit de salariés qui refusent de se déplacer à deux heures de chez eux pour retrouver un travail qui leur est pourtant assuré. Je ne veux pas discuter de ce que j'ignore, mais, à mon tour, entre nous, j'aimerais réagir spontanément : dans ma vie, je n'ai pas attendu que le travail vienne à moi, je suis allé là où il se trouvait, de mon Berry natal à Angers, puis à Paris, enfin à Saint-Quentin. Si mon poste était supprimé et qu'on me demandait d'aller ailleurs, j'irais, sans rechigner. Mais ce n'est qu'une réaction strictement personnelle, pas un jugement, encore moins un exemple. Accordez-moi au moins de n'avoir pas utiliser de gros mots pour l'exprimer.

mercredi 4 octobre 2017

Mélenchon a des apparitions



Jean-Luc Mélenchon ne supporte pas de voir le drapeau européen dans l'Assemblée nationale. Lui et ses Insoumis demandent à ce qu'il soit enlevé. C'est un choix politique, que je ne partage pas, puisqu'en bon macronien qui se respecte, je suis ultra-européen, et ce sont les Marcheurs qui ont brandi le drapeau bleu, en même temps que le tricolore, dans les meetings de la présidentielle. Mais que Mélenchon ne vienne pas se prétendre, malgré tout, européen : l'Europe, il est contre, totalement contre, et son drapeau lui sort par les yeux. Qu'il assume ce choix politique, et qu'il ne nous enfume pas avec une "autre Europe" qui n'existe que dans sa tête et qui est un déni de l'Europe réelle.

Ce qui me fait aussi penser ça, c'est l'étrange réaction de Mélenchon à la vue de ce drapeau européen dans le Palais Bourbon : "C'est la République française ici, ce n'est pas la sainte Vierge !" Plaît-il ? Où Mélenchon a-t-il vu que le drapeau européen représentait la Vierge Marie ? Le fond bleu ? Ah ! bon : parce que tout ce qui porte cette couleur serait suspect d'accointance mariale ? Mais les 12 étoiles jaunes ? Ce chiffre n'est-il pas hautement biblique (les 12 apôtres du Christ, par exemple) ? Sauf que la Bible est bourrée de chiffres qu'on retrouve, eux aussi, un peu partout, sans qu'il y ait un quelconque rapport avec la religion.

Chez les fondateurs de l'Union européenne, il y avait, dans le bleu, le symbole de l'espoir, et dans les 12 étoiles, la volonté de marquer la diversité du rassemblement. Ni plus ni moins. Et pas d'allusions au christianisme (si cela était, ces allusions seraient pauvres et erronées ; les véritables symboles de la religion chrétienne ne sont pas ceux-là). Et si l'on me dit que l'Europe a été initiée par des démocrates-chrétiens, je réponds que l'argument est tout aussi faible. Ils n'ont pas été les seuls pères fondateurs, et la démocratie chrétienne, malgré son nom, n'a guère de lien puissant avec l'Eglise et sa doctrine.

Mélenchon a choisi pour logo de son parti la lettre grecque, le phi de philosophie, sans doute pour faire intelligent. Mais sur cette affaire de drapeau, il ne l'est pas, sa remarque est même très bête. Il me fait penser à ce médiocre écrivain, Dan Brown, auteur du Dan Vinci Code, qui croit voir des signes et des symboles un peu partout, à charge de leur donner des interprétations délirantes. Après tout, Mélenchon est peut-être un ancien enfant de chœur qui a, sur le tard, des apparitions, car il est bien le seul à voir la sainte Vierge quand on lui présente le drapeau européen ! Pourquoi n'y voit-il pas Hercule, le personnage de la mythologie gréco-romaine ? Les 12 étoiles correspondent à ses 12 travaux, et le fond bleu est de la couleur de la mer Méditerranée, là où a surgi cette mythologie. Mais non, Mélenchon en pince pour Marie, pas pour Hercule. Allez savoir pourquoi !

lundi 2 octobre 2017

Président du pouvoir d'achat



Emmanuel Macron est accusé d'être le "président des riches", parce qu'il réaménage l'ISF, en le faisant porter sur l'immobilier et non plus sur le capital. Le reproche est infondé. Est-ce que l'ISF initial a réduit les inégalités en France ? Non, sinon cela se saurait et se verrait. Est-ce qu'au moins cet impôt rapporte beaucoup à l'Etat ? Non plus. Sa seule justification, de l'avis de tous, est purement symbolique : assujettir les plus fortunés à l'effort de solidarité nationale. L'intention est louable, mais quand elle est inefficace, elle ne vaut pas grand-chose. On ne gouverne pas un pays avec des symboles.

L'argument du retour des riches, en faveur de l'ISF nouvelle version, ne m'est pas sensible (même s'il est peut-être pertinent). L'argent va à l'argent et rien ne peut le fixer quelque part (du moins dans un régime démocratique). En revanche, je crois beaucoup en cet ISF macronien, quand il se donne pour objectif de réorienter le capital vers l'investissement, car c'est la condition pour créer des emplois. Contre-argument : ce capital non taxé va profiter à la finance, non à l'entreprise. Je n'en sais rien, nous verrons bien. Mais l'honnêteté élémentaire est de reconnaître que l'objectif de Macron n'est pas celui-là : président de l'emploi, pas des riches.

Enfin, les mesures budgétaires récusent totalement le slogan polémique d'un "président des riches". La taxe d'habitation sera supprimée en 2020 pour 23 millions de Français. Les cotisations chômage et maladie seront supprimées en octobre 2018 pour tous les salariés du privé. La prime d'activité, que touchent les travailleurs les plus modestes, 2,5 millions de foyers, va être augmentée jusqu'à 80 euros en plus par mois. Les 83 000 familles monoparentales vont voir leur complément mode de garde augmenté de 30% dès octobre 2018. Le minimum vieillesse, qui concerne 550 000 personnes, va être augmenté de 100 euros par mois à partir de 2020. Le crédit d'impôts sur les services à la personne va être élargi à tous, y compris aux contribuables non imposables. L'allocation adulte handicapé va doubler en fin 2018. Et vous appelez ça un "président des riches" ? Pour moi, c'est le président du pouvoir d'achat.