dimanche 30 septembre 2012

Soleil à Merlieux









J'ai passé mon dimanche à la fête du livre de Merlieux, invité à dédicacer mon livre "Les Saint-Quentinois sont formidables" (vignette 1). En fin d'après-midi, j'étais chargé d'animer un débat sur l'enseignement de la philosophie, avec le sympathique Frédéric Pagès, journaliste au Canard Enchaîné, inventeur du fameux Botul qui a piégé BHL (vignette 4). Les anar avaient comme toujours leurs activités près de la bibliothèque sociale (vignette 2). Un stand appelait à pétitionner contre l'internement des pussy riots (vignette 3). Le plus bel invité de la journée, c'était le soleil !

samedi 29 septembre 2012

Dosière et André mettent le feu



Je ne sais pas s'ils aimeront l'un et l'autre, René Dosière et Pierre André, voir leurs deux noms associés. Mais c'est l'idée qui me vient quand je réfléchis à ce qui s'est passé samedi dernier à Chauny. Les sénateurs Yves Daudigny et Antoine Lefèvre avaient invité les maires de l'Aisne (ils sont 800) à venir discuter de l'avenir des collectivités territoriales. C'est, pour les élus, un sujet concret et fondamental. Résultat : 30 seulement se sont déplacés (dont Xavier Bertrand) ! J'avoue en avoir assez de cet absentéisme scandaleux que pratiquent certains dans l'exercice de leur mandat. On ne les a pas élus pour ça !

Pierre André, à l'étranger, ne pouvait être présent mais a envoyé un courrier. René Dosière n'est pas maire. Mais leurs ombres ont dû planer sur la petite assistance et la faire frissonner ... Pierre André d'abord : dans sa lettre, il propose rien moins que la disparition du département et la refonte des régions, au nombre réduit de moitié. Ce faisant, il rejoint les analyses déjà anciennes de la "deuxième gauche", qui allaient dans ce sens. Sur les régions, c'est évident : il faut qu'elles gagnent en puissance. Sur le département, je ne sais pas s'il faut sèchement tirer un trait dessus, mais le transformer, on ne peut pas y échapper.

René Dosière, de son côté, propose dans son dernier ouvrage de remplacer les conseils généraux par un conseil départemental des présidents d'intercommunalité. C'est une bonne réponse à la question soulevée par Pierre André, même si elle est moins radicale. Dosière va plus loin en s'en prenant aux dépenses des collectivités locales. Tant qu'il fouinait dans les comptes de l'Elysée occupé par Nicolas Sarkozy, mes camarades applaudissaient sans restriction. Mais là, le René fait trembler ... Qu'importe, voilà deux parlementaires, René Dosière et Pierre André, qui font leur boulot, qui posent des idées sur la table. Ils mettent le feu mais ça fait du bien.

vendredi 28 septembre 2012

Ed pop



Sympathique réunion ce soir au Conseil général de l'Aisne, qu'on peut aussi qualifier d'historique : les huit fédérations d'éducation populaire présentes dans le département se sont liguées pour rédiger une charte, dotée de 10 articles, précisant ce que sont les valeurs et démarches de cette éducation populaire (éd pop pour les intimes) qui nous rassemble. C'est un bel outil pédagogique, qui contient une fiche de présentation de chaque structure. Comme l'a dit le président Yves Daudigny, l'éducation populaire manque en visibilité, elle a tout intérêt à mieux se faire connaître. Dans l'Aisne où les besoins sont si grands, son rôle social est indispensable.

Quant à moi, j'ai rendu hommage à Michel Lefèvre, disparu en juin dernier, qui a tant oeuvré pour l'éducation populaire, et j'ai exposé les changements qui vont marquer dans les prochaines semaines la Ligue de l'enseignement de l'Aisne : notre départ de notre siège historique de Beauregard pour aménager à Presles et Bove, près de Vailly sur Aisne, nos séjours éducatifs et nos stages sportifs étant transférés sur le très beau site de Cap'Aisne, près du lac de l'Ailette.

Quel plaisir de revoir de vieux camarades ! Les deux Jean, Allard pour les CEMEA et Crossat pour les Centres sociaux (on est presque voisin rue Jean-Jaurès !), Mimi Debeusscher pour Léo Lagrange, Gilles Blondeau des MJC et et Henri Moreau des Foyers ruraux. Marie-Claire Vivès est la nouvelle présidente des Familles rurales. Gérard Pauget, des Francas, s'était fait excuser. Je ne cite que les protagonistes de la Charte, bien d'autres personnalités du monde associatif étant parmi le public. En tout cas, bravo au Conseil général pour son soutien sans faille à l'éducation populaire !

jeudi 27 septembre 2012

Racisme anti quoi ?



Les déclarations de Jean-François Copé sur le "racisme anti-blanc" ne sont pas une vaine polémique. La question de la xénophobie est sérieuse, grave, elle ne se prend pas à la légère. D'autre part, un homme politique, surtout à ce niveau, présidentiable de surcroît, est redevable de chaque mot qu'il prononce. Un "dérapage", comme on dit aujourd'hui, est toujours permis, mais là ce n'est pas le cas : il s'agit d'une formule dans un ouvrage, relue et volontairement choisie, pas anodine du tout. Mais que je n'approuve absolument pas.

D'abord, il n'y a pas plus à évoquer de racisme anti-blanc qu'anti-noir ou anti je ne sais quoi. Le racisme ne se découpe pas en rondelles. Il y a le racisme tout court, qui se passe d'adjectif (seul l'antisémitisme se distingue, par son histoire tragique). Le racisme est le rejet de quiconque à cause de ses origines et de la couleur de sa peau, point. Un antiraciste ne s'enferme pas dans des catégories, il dénonce le racisme en général, quelles qu'en soient les victimes, dont aucune n'est à privilégier à d'autres.

Et puis, l'expression "racisme anti-blanc" ne vient pas de nulle part, ne tombe pas de la Lune, ne se trouve pas dans les pages du Larousse mais dans le lexique du Front national et de l'extrême droite. Je comprends que Copé se veuille "décomplexé", "sans tabou", mais peut-il ignorer qu'on ne s'autorise pas à dire n'importe quoi, à se saisir de n'importe quelle formule ? Les "complexes" sont nécessaires au développement de l'individu (quelqu'un de totalement "décomplexé" serait un jean-foutre ou un monstre), une humanité "sans tabou" serait rapidement criminelle (toute civilisation est fondée sur des tabous à ne surtout pas transgresser). Utiliser les mots de l'adversaire (et je suis bien persuadé que le FN est pour Copé un adversaire), c'est s'avouer battu par lui. En politique, la première victoire, avant le pouvoir, est dans le langage, quand on réussit à imposer dans le débat public ses thèmes et leur vocabulaire.

En soi, "racisme anti-blanc" n'est ni vrai ni faux, ni bien ni mal : c'est simplement une formule qui renvoie à l'idéologie d'extrême droite, qui l'active dans la tête de celui qui l'entend. Tout le problème est là. De même, j'aime le travail, je respecte la famille et je défends ma patrie, mais jamais je ne me réclamerai du slogan "travail, famille, patrie", parce que je sais à quoi il fait référence, et que cette connotation est hautement condamnable. "Racisme anti-blanc", c'est pareil.

mercredi 26 septembre 2012

Duflot, l'anti-modèle



Le comportement de Cécile Duflot est pour moi un anti-modèle : elle représente tout ce que je n'aime pas dans politique. Elle n'est certes pas la seule, et au sein même de mon parti, le PS, certains comportements me sont insupportables. Mais voilà : l'actualité porte sur Cécile Duflot, je parle donc d'elle. Qu'est-ce que je lui reproche ? Son incohérence, son opportunisme.

Ca ne date pas d'aujourd'hui : pendant la présidentielle, elle a envoyé au casse-pipe Eva Joly, candidate inexpérimentée, alors que normalement c'est le chef d'un parti qui monte au combat. Pas elle, qui n'a pas pris ce risque. Et pendant qu'Eva se battait sur des lignes fortes, Cécile négociait avec le PS des places sûres et généreuses pour les législatives, acceptant d'infléchir son programme. En un sens, c'était bien joué : un parti qui recueille 2% des voix s'est retrouvé avec plein de députés.

Et puis il y a cette affaire du traité budgétaire européen, où Cécile Duflot a montré sa vraie nature : rester au gouvernement quoi qu'il en coûte, affichant son insupportable sourire, qui est presque un défi lancé à ses contradicteurs. Qu'il y ait des désaccords au sein d'un gouvernement, c'est normal et ce n'est pas bien grave, pourvu que ce soit sur des points qui ne remettent pas en cause la politique générale. Là, avec le traité, c'est toute la politique économique qui est impliquée : si Duflot et ses amis sont contre ce texte, ils ne peuvent pas, en toute logique, rester dans un gouvernement qui est pour. Alors elle se tait, fait sa maligne ... et sourit. C'est insupportable.

Celui qui a tout compris parce qu'il connaît bien EELV, c'est Daniel Cohn-Bendit, qui a préféré partir, dégoûté par un tel comportement. Normal : faire Mai 68 pour en arriver à ça ! C'est dramatique : l'écologie est une pensée neuve, forte, originale, elle traite de questions fondamentales pour l'avenir de l'humanité, elle pourrait avoir la prétention de succéder idéologiquement au libéralisme et à la social-démocratie : au lieu de ça, ses partisans les plus en vue adoptent des postures pour obtenir et conserver des places. Je répète qu'ils ne sont pas les seuls, mais ça ne les excuse pas, surtout eux qui prétendent faire de la politique autrement.

mardi 25 septembre 2012

Ambiance de rentrée



C'était hier à Saint-Quentin la rentrée des classes au conseil municipal. Avant que la séance ne commence, comme dans une cour de récréation, brouhaha et retrouvailles : on se salue, on se fait la bise, on fait le tour de la salle (Freddy avec ses grandes jambes va plus vite que tout le monde), on se met par deux pour causer. De quoi ? Mystère, mais sûrement pas des dossiers très sérieux et souvent austères qui vont être examinés dans quelques minutes, à voir les rires et les mines. C'est peut-être de leurs vacances dont il est question, à la façon des conversations d'écoliers.

Les uns et les autres, élus de la majorité, sont à l'aise, détendus, ont l'air de bien se connaître, adoptent des comportements familiers. A la limite, on ne s'attend pas à une réunion politique mais à une rencontre amicale. Dix-sept ans qu'ils sont là, sans qu'aucune élection n'ait pu les déloger, c'est pour eux une vieille histoire ! Ils ont l'air ici chez eux, presque à la maison. Les plus pro d'entre eux vont saluer les journalistes à leur table, pendant que les techniciens règlent les caméras de vidéo. Le maire arrive, l'opposition est là, c'est parti.

Juste après l'appel, la politique entre dans le vif, avec l'intervention de Carole Berlemont (PS) qui dénonce les "dysfonctionnements du calendrier municipal", sa "gestion à la petite semaine". En effet, la moitié des élus de l'opposition n'ont pu être présents, ainsi que quelques-uns de la majorité. Xavier Bertrand préfère mettre en cause la "cohésion" de son opposition, en faisant remarquer que les "pouvoirs" n'ont pas été donnés. Michel Aurigny (POI) rejette ces "insinuations" et justifie les absences par des "réunions politiques et syndicales".

Partant du dossier Borgers, Anne Zanditenas (LO) essaie prudemment de mettre en difficulté Xavier Bertrand sur le chômage à Saint-Quentin. Le maire répond que la circonscription résiste plutôt bien, à l'instar de la Thiérache et contrairement, selon lui, aux autres bassins d'emplois de l'Aisne. Il souligne le problème de la formation (par exemple les concessionnaires automobiles qui ne parviennent pas à recruter).

Le grand débat politique de la séance, c'est la taxe annuelle sur les friches commerciales, qui s'est surtout focalisé sur la rue d'Isle et ses vitrines désertes. Explication de Xavier Bertrand : les propriétaires n'en ont rien à faire, ils n'habitent même pas à Saint-Quentin, ils louent à des prix prohibitifs. Solution : au bout de cinq ans, leur imposer une taxe, sauf justification professionnelle, qui les oblige à louer. Au passage, le maire analyse la désaffection de la rue d'Isle comme conséquence de l'entrée du parking souterrain rue Emile Zola et le flux de circulation venant de la sortie d'autoroute (!?). Selon lui, une entrée rue Croix Belle Porte n'aurait pas dévitalisé autant la rue d'Isle. Michel Aurigny s'est montré sceptique sur cette taxe, en s'interrogeant sur l'efficacité de la mesure, sur les effets de la clause restrictive et sur la capacité à faire baisser les prix des loyers, renvoyant le problème à la situation économique générale.

Le rapport d'activités de Sport Evènements a été critiqué par Olivier Tournay (PCF), qui a listé toutes les pièces manquantes, rappelant que les 500 000 euros versés chaque année à l'association présidée par Pascal Cordier exigeaient une plus grande rigueur. Il a aussi réaffirmé la position de fond de l'opposition, hostile à cette délégation de service public, lui préférant la gestion municipale directe. Tout en justifiant un dossier qui par nécessité ne peut jamais être complètement bouclé, Xavier Bertrand, ce sera la seule fois de la séance, a concédé à son opposition qu'il fallait que ses demandes "légitimes" soient satisfaites.

Olivier Tournay est revenu à la charge à propos du rapport sur l'eau, dont les tarifs sont élevés et les fuites trop importantes. A quoi le maire a répondu que des canalisations restent à refaire et que le prix de l'eau, quoique stabilisé, a toujours été "historiquement élevé" à Saint-Quentin.

Sur les promotions des agents de la Ville, je n'en dirai rien parce que je vous avoue humblement n'y avoir pas compris grand chose (coup de fatigue de fin de journée peut-être). Michel Aurigny a repris une information dans la presse (où ?) comme quoi toutes les promotions ne seraient pas assurées. Marie-Laurence Maître, à la fois motivée et très technique, a répondu que c'était le contraire, que toutes les promotions après réussite aux concours étaient satisfaites.

Sur le financement de l'école privée, le contentieux a été réglé. Michel Aurigny en a profité pour réaffirmer son opposition au financement public de cette école, alors que Carole Berlemont a reproché au maire de ne pas mettre sur un même pied d'égalité les enfants du privé et ceux du public. Anne Zanditenas, à propos du départ de la CGT de la bourse du travail, a demandé à Xavier Bertrand qu'il renonce aux frais d'astreinte infligés au syndicat. Il a renvoyé la question à la compétence de la justice. Je note que c'est la première fois que ce dossier est abordé en conseil municipal.

La séance s'est terminée par une longue série d'informations diverses, en dehors de l'ordre du jour (l'opposition a-t-elle alors la possibilité de reprendre la parole ?), dont j'ai retenu la prochaine prise de position du conseil municipal sur le projet de canal Seine-Nord. Xavier Bertrand est pour, les écolos sont contre et je ne sais pas très bien quelle est la position de mon parti (personnellement, je suis archi pour, voir un précédent billet "Un canal s'est perdu"). Avant de se quitter vraiment, les élus sont allés regarder ensemble un film. Non, pas bras dessus bras dessous en direction du cinéma, mais un film sur les incivilités : la politique, même un jour de rentrée, c'est du sérieux.

lundi 24 septembre 2012

Scène de crime



J'aurais dû me douter qu'il se passait quelque chose d'anormal, en voyant hier en début d'après-midi avenue Faidherbe ce journaliste pressé, qui m'a fait un simple signe alors que d'habitude il vient me saluer et discuter. Je revenais du cinéma quand, en bas de ma rue, Jean-Jaurès, j'ai vu la voiture rouge des pompiers, la police et la circulation bloquée par des cordons. Mais je ne suis pas allé voir, je n'aime pas ça, cette curiosité malsaine qui rapproche d'un lieu de drame. Accident, incendie, je me suis dit que ça devait être ça. Le quartier est tranquille. J'étais loin d'imaginer qu'il s'agissait d'un crime.

J'ai commencé à me poser des questions en fin d'après-midi, quand j'ai vu passer devant ma fenêtre un nombre inhabituel de promeneurs, et des voitures roulant lentement. Le stationnement interdit était rempli de véhicules garés, sur une bonne longueur de rue. Au bout, rien n'avait bougé, le dispositif était le même. Seule différence : une petite foule en train d'observer, de grandes bâches rouges cachant le trottoir. Un passant m'a expliqué : c'est un meurtre, on a tiré sur une personne près du Liberty. Le café où je vais chaque matin acheter mes journaux, y compris le dimanche, mais pas celui-ci ! Et la pizzeria d'à côté, que je fréquente aussi de temps en temps ! C'est ça qui est impressionnant : un environnement quotidien, banal, calme, où la circulation fréquente du boulevard Henri-Martin est un élément de sécurité, où il ne peut rien se passer de grave, mais qui est frappé par l'évènement le plus tragique qui soit, un crime ...

Je ne me suis pourtant pas déplacé pour observer, pris par une forme de décence. Mais j'ai été stupéfait de constater que la scène du crime était devenue la promenade du dimanche pour badauds désoeuvrés . C'est bien connu : un accident sur le bord de la route fait ralentir les automobilistes voyeurs, la grande échelle des pompiers attire son public avide de spectacles à sensations. Parmi cette foule, j'ai noté la présence de nombreux jeunes des quartiers, comme on dit aujourd'hui : peut-être retrouvent-ils ici en vrai ce que les séries télévisées et les chaînes d'information continue leur montrent sans cesse ? Ils en sont gavés ! "Police scientifique", les regards sont captés. C'est aussi la génération Scarface, dit-on. Mais les adultes et les familles ne sont pas en reste, venant faire un petit tour jusque tard en soirée.

Vers 22h00, la scène de crime, sous les éclairs d'un orage non loin, avait pris des allures de fin du monde. Les policiers étaient encore au travail. J'ai refermé ma fenêtre pour aller voir à la télé "Faites entrer l'accusé". Moi aussi je suis fasciné par le crime, mais publiquement je ne le montre pas. Au matin, quand je suis allé acheter la presse, la vie normale avait repris ses droits, avec une seule trace du drame, un ruban de la police laissé sur place, par terre. Dans les journaux, les précisions renforçaient le mystère et les clichés : la victime Jackie la manouche, une personne âgée criblée de balles, une Jaguar surgi de nulle part, un homme encagoulé, une probable kalachnikov. Hier, je revenais du cinéma, et à quelques dizaines de mètres de chez moi j'y retournais, sauf que c'était la réalité.

dimanche 23 septembre 2012

Décryptage



Dans son édition du dimanche, le Courrier picard nous gratifie d'une rubrique très intéressante : la reprise critique d'un article de la semaine, intitulée "Décryptage". Je me suis pris à mon tour au jeu, à partir d'un papier politique paru hier, une interview du député-maire Xavier Bertrand, accompagnée des réactions du chef de file de l'opposition municipale Jean-Pierre Lançon (voir vignette).

Ce qui est d'abord stupéfiant, ce qui saute au visage, c'est la photo prise par Guillaume Carré : un Xavier Bertrand énorme, qui mange les deux pages, cette photo prenant plus de place que le texte. Quand on sait que les lecteurs ne lisent pas toujours mais retiennent avant tout les photos d'un journal, celle-là est impressionnante. Je ne me souviens pas avoir vu, pour un évènement, une illustration aussi grande. Quand on est comme moi de gauche, la puissance politique du maire de Saint-Quentin s'impose à travers cette image qui s'étale, qui occupe l'espace, qui écrase, qui donne presque le sentiment que Xavier Bertrand a déjà gagné les prochaines élections !

Les premiers mots de l'entretien confirment ce sentiment : "Animé par une confiance inébranlable en lui, Xavier Bertrand ne doute de rien". Un guerrier est à table ! Celui qui l'interviewe, c'est le rédacteur en chef du journal, Nicolas Totet, auquel il s'était affronté il y a quelques années, lors d'un débat télévisé mémorable, qui avait eu un impact national. C'est peut-être la première fois, depuis, que les deux hommes se sont retrouvés face à face pour une longue durée (j'aurai bien voulu être petite souris pour voir ça !).

Je reviens à la photo, qui est riche d'enseignements : elle est prise en contre-jour, plongeant Xavier Bertrand dans une légère pénombre. Sans cravate, le regard baissé, l'index sur la bouche comme pour dire chut (c'est son geste coutumier, qui marque en fait chez lui un temps de réflexion), ces éléments atténuent la majesté de l'image. En pleine lumière, les yeux dans nos yeux, la rencontre n'aurait pas été soutenable.

D'autres éléments apportent une touche d'étrangeté au tableau, dissipent un peu son impact, détournent légèrement notre attention. Il y a, dans le dos du maire, le décolleté de marbre d'une Marianne décapitée par le haut de la photo. Surtout, à côté, figure une étrange effigie, une sorte de Mickey (moi qui me voulais petite souris !) barré d'une écharpe tricolore, un sourire dans une image et un sujet austères. Si je laisse aller mon imagination, je vois de plus en plus Xavier Bertrand en Philippe Séguin, mais il lui manque les rides, le rire tonitruant et la grosse voix.

A côté, l'article consacré au représentant de l'opposition est forcément plus petit, avec une photo en timbre-poste. A l'inverse de Xavier Bertrand, la lumière vient de face mais s'arrête, nouvelle étrangeté, sur une plante bizarre, au premier plan, à laquelle semble parler Jean-Pierre Lançon. Je ne sais pas quel est ce végétal : sa corolle est rose mais ce n'est pas la rose socialiste. Une sorte de tuyau s'enroule à la base, c'est très curieux.

Dans le titre, il est question des "banderilles du socialiste". Drôle d'expression, comme si Jean-Pierre était un toréador (l'air de Bizet me revient à l'esprit) face à la bête. Est-ce l'influence du débat sur la tauromachie qui a agité cette semaine l'actualité (voir mon billet de vendredi) ? Mais les banderilles ne tuent pas, elles ne font qu'exciter le taureau. En garde, un oeil noir te regarde ! Et puis, il y a cette phrase révélatrice qui termine l'article : "Pour 2014 [les élections municipales], ma ligne est Anne Ferreira. Maintenant, s'il y a un autre choix, je suivrai". Jean-Pierre Lançon a le nez fin et prudent : je confirme, il y aura un autre choix.

samedi 22 septembre 2012

Une école est née









Les inaugurations à Saint-Quentin se suivent et se ressemblent, pas toujours très intéressantes parce qu'on n'y apprend pas grand chose et qu'on y voit les mêmes gens. Pas cet après-midi ! Il y avait foule et c'était passionnant : on peut dire qu'une école est née, bien qu'il s'agisse d'une rénovation, celle du groupe scolaire Jean Macé, dans le quartier Saint-Martin, derrière la cité des musiciens. Les locaux sont hyper-modernes, très loin de l'école d'autrefois, qui paraît à côté vieille de plusieurs siècles ! Le tableau numérique et les tablettes tactiles pour les enfants, c'est impressionnant (vignette 4). Mais il y a mieux : des équipements qui permettront d'accueillir des élèves mal-voyants et, assez rare en France, une présence du centre social Saint-Martin dans l'établissement, à travers un café des enfants (c'est le café philo qui essaime ! j'ai même entendu parler, dans la presse locale, d'un café tricot ...).

Tout ce que Saint-Quentin compte de personnalités civiles était évidemment présent. Ce genre de "mondanités" peuvent prêter à sourire, mais elles ont leur utilité : prendre des contacts directs et rapides. J'ai ainsi sollicité le directeur académique, Jean-Luc Strugarek, pour une rencontre à propos de la Ligue de l'enseignement (dans une école qui s'appelle Jean Macé, fondateur de notre mouvement, ça s'imposait !). Bien sûr, il y a les inévitables facéties, comme Xavier Bertrand, sur ma suggestion, essayant d'entrer dans une bulle géante créée par un cerceau d'enfant (vignette 3), sous le regard attentif du directeur d'école, Eric Saleille. Mais il n'y a pas d'école sans jeu et cour de récréation !

Le directeur a offert au maire les clés de l'ancienne école, celui-ci lui ayant remis les nouvelles. L'échange se fait alors que commence le discours de Jeannine Damour, présidente du centre social (vignette 1). Parmi le public, on reconnaît le sous-préfet Jacques Destouches, le président de la CAF de l'Aisne Guy Duval, plusieurs DDEN (délégués départementaux de l'éducation nationale), beaucoup d'élus municipaux (dont deux de l'opposition, Nora-Ahmed Ali et Olivier Tournay). L'inauguration s'est faite en musique et danse hip hop (vignette 2). Seule allusion politique de Xavier Bertrand dans son discours : à propos du débat sur la semaine scolaire de 4 jours ou 5 jours, il défend fortement le samedi matin vaqué. Mais l'heure est au rassemblement enthousiaste : une nouvelle école est née !

vendredi 21 septembre 2012

Olé !



Le Conseil constitutionnel n'a pas suivi les anti-corrida : cette pratique barbare ne sera pas interdite, aucune interprétation de la loi ne le permettant. Mais ce que la loi ne peut, la politique le doit : se battre pour proscrire de France et d'Europe un spectacle dégradant, que rien ne justifie. Pas de beauté dans la corrida, seulement de la violence et du sang. Pas de grandeur, de noblesse, de courage ou d'héroïsme : la bête est condamnée d'avance, son bourreau est un tueur en paillettes, aussi ridicule que cruel.

Ce qui me révulse dans la corrida, ce n'est pas tant la souffrance animale (le pêcheur avec ses hameçons fait souffrir les poissons, le chasseur blesse le gibier) que le spectacle prétentieux qui est donné. Que des enfants puissent assister à cette pornographie de la mort qu'est une corrida est un scandale : il faudrait au moins leur interdire l'entrée. Quant à l'argument de la tradition, il est d'une pauvreté intellectuelle affligeante, que je ne me rabaisserai même pas à réfuter.

Ce que la loi ne peut, la politique le doit : hélas, trois fois hélas, mon camarade Harlem Désir, qui aspire pourtant à être le chef du parti socialiste, n'a pas eu dans cette affaire une attitude de chef. Il a renvoyé la question de l'interdiction à l'appréciation des ... régions. Bin voyons ! Ce n'est pas ce que j'attends d'un leader de gauche. Car la corrida, personne sérieusement de gauche ne peut y être favorable : elle représente ce contre quoi nous luttons, la tradition imbécile, la nostalgie moyen-âgeuse, les chevaliers d'opérette, l'abrutissement de la foule ; elle s'oppose à nos valeurs, le progrès de l'humanité, le respect envers toutes les créatures, l'émancipation de l'esprit, la défense de la paix, le rejet de la brutalité. Une bête apeurée et torturée devant un public rendu fou par l'odeur du sang, non ce n'est pas possible. J'attends un Victor Hugo qui se dresse contre cette ignominie. Harlem, encore un effort, un peu de courage si tu veux devenir le chef !

jeudi 20 septembre 2012

Des choses et d'autres







Vendredi dernier, Nathalie Morini, de la Maison du Sophora à Gauchy, m'a demandé de faire "une belle introduction philosophique" au colloque organisé à la MCL sur le thème : Comment donner du sens à la vie avec une lésion cérébrale ? devant environ 200 personnes, patients, familles et professionnels. Lundi, c'était la séance de rentrée du ciné philo, avec un film à succès, "Camille redouble", suivi d'une réflexion sur l'homme et le temps, menée par Manuel Caré, dont je vous recommande la chronique de cinéphile à la fin de L'Aisne Nouvelle (vignette 1).

Ce soir, la bibliothèque municipale organisait le vernissage de l'exposition "Melting Poste", par Didier Lemarchand, en présence du directeur de la Poste de Saint-Quentin et de Stéphane Lepoudère (vignette 2) : des boîtes aux lettres comme motif artistique, c'est assez original ! J'ai fait connaissance avec Bernard Visse, nouveau directeur de la culture, qui est en train de lire "Les Saint-Quentinois sont formidables", et je me suis réconcilié avec Daniel Wargnier (jusqu'à la prochaine fâcherie !). Valérie d'Amico, directrice de la bibliothèque, m'a confirmé que mes conférences-débats reprendraient en octobre, une tous les deux mois, motivées par le succès de cet été. Quant au café philo, il retrouvera sa place initiale, dans un café, plus précisément une brasserie, celle du Théâtre : Laurent Plaquet, qui m'avait aimablement accueilli au Manoir, m'a sollicité pour son nouvel établissement.

Enfin, en soirée, j'ai repris le chemin de l'Epide pour l'animation du café philo mensuel, cette fois autour de la question : Que devons-nous faire de notre vie ? (vignette 3). Après Sophora, décidément je n'en sors pas ! Moi, j'ai à peu près trouvé la réponse, mais je ne suis sûr de rien ...

mercredi 19 septembre 2012

La République et la religion



En République, la liberté d'expression est sacrée. Sa seule limite, c'est le respect des lois. Pour le reste, aucun impératif moral, politique ou religieux ne saurait la restreindre, un tant soit peu, quelque raison qu'on invoque. C'est pourquoi Charlie hebdo a le droit absolu de montrer les fesses du prophète Mahomet si ça lui chante. De même, selon un principe identique, les musulmans de France ont le droit de manifester, comme bon leur semble, leur mécontentement et leur colère s'ils se sentent offensés. En tant que laïque, je n'ai pas à prendre parti pour les uns ou pour les autres, je dois simplement rappeler la loi de la République, liberté et égalité pour tous.

Depuis quelques années, la France a un problème avec l'islam, illustré par de récents incidents : la populaire comédienne Véronique Genest qui se prétend, scandaleusement, "islamophobe", la rumeur sans fondement d'un Jean-Claude Delarue qui serait devenu, et enterré, musulman (!). Le monde aussi a des problèmes avec l'islam : ce mauvais film vidéo sur la vie du prophète qui provoque des manifestations. Hier, au Louvre, le président de la République a trouvé les mots justes : l'islam est le produit d'une grande civilisation infiniment respectable, à ne pas confondre avec ses sous-produits fanatiques et violents.

Le fond du problème, c'est la cohabition, au sein de la République, de l'art et de la religion, du créateur et du croyant. L'un dit avoir SA vérité, l'autre dit avoir LA vérité. Depuis toujours, ce sont deux personnages qui inquiètent : Platon voulait bannir les artistes de la cité, l'empire romain s'en est pris aux chrétiens. Quand on se prétend du côté de l'absolu, de la transcendance (c'est le cas de l'artiste et du croyant), il y a forcément des problèmes. Le pacte laïque et républicain apporte sa solution, en reconnaissant et en garantissant à l'artiste et au croyant leur place dans la société : l'artiste est libre de créer comme le croyant est libre de pratiquer. La religion a le droit d'expression, à condition qu'elle renonce à la violence et au pouvoir, à condition qu'elle accepte que d'autres ne pensent pas comme elle et lui soient hostiles.

La notion de blasphème a un sens, je comprends parfaitement que des croyants éprouvent une blessure et veuillent la manifester. Mais le sacrilège qu'ils ressentent ne peut pas être force de loi, s'inscrire dans notre droit : le pacte laïque et républicain l'interdit. Qui sont les pires blasphémateurs ? Les religieux ! Jésus a été condamné pour blasphème par les prêtres juifs, parce qu'il se prétendait Fils de Dieu. Au sens strict du terme, nos amis de Charlie ne blasphèment pas : ce sont pour la plupart des athées qui considèrent Mahomet comme un homme, pas comme un prophète. Le blasphème n'a de signification qu'entre religieux, il n'implique pas les non croyants.

Quant à l'art, il est blasphémateur par nature, puisque l'artiste, en tant que créateur, se veut en quelque sorte l'égal de Dieu, Créateur par excellence. Mais l'art qui blasphème, c'est l'art religieux ! Lisez ce numéro d'Arts sacrés, paru cet été (en vignette) : Caravage en est un exemple. Michel-Ange, commandité pourtant par le Vatican, a lui aussi commis des oeuvres forts osées et théologiquement contestables. Dès que l'artiste veut représenter le divin, il s'expose à la profanation. On se souvient, il y a quelques semaines, de l'anecdote caricaturale et comique de cette dame fort pieuse qui a involontairement défiguré le Christ en ravalant une fresque dans une église espagnole !

Quoi qu'il en soit, qu'on s'en félicite ou qu'on le déplore, la religion a un bel avenir devant elle, alors qu'on aurait pu penser à sa disparition. Musulmane, chrétienne ou bouddhiste, peu importe : il y a dans la nature humaine quelque chose qui pousse vers la croyance, même si certains, plus nombreux qu'autrefois, s'en passent très bien. La République n'a pas à craindre ni à combattre la religion et la religion doit croire et faire confiance en la République.

mardi 18 septembre 2012

Les immigrés, les vieux et les autres



Pas d'accord avec Manuel Valls, qui relègue désormais au second plan la promesse du droit de vote des immigrés non européens. Je ne sais pas si c'est une "revendication forte", il y a sûrement plus important à faire, en matière économique et sociale principalement. Mais c'est important et c'est une revendication ancienne de la gauche ! Ca me suffit pour vouloir qu'elle soit adoptée, et rapidement.

Manuel dit aussi que ce droit de vote élargi n'est pas un "élément puissant d'intégration". Il a sûrement raison là aussi : le boulot, l'habitat, l'éducation sont des modes d'intégration plus efficaces. Mais symboliquement, politiquement, le droit de vote est un élément réel d'intégration. Le gouvernement aurait tort de le négliger ou de le reporter. 70 députés ont signé un texte en sa faveur, je trouve que c'est bien peu : toute la majorité parlementaire socialiste devrait le soutenir !

D'accord en revanche avec Michel Sapin et Pierre Moscovivi, qui veulent taxer les retraités aisés. Dans le contexte économique qui est le nôtre, chacun étant convié à faire des efforts, à contribuer à la solidarité nationale, je ne vois pas pourquoi cette catégorie en serait exclue. Pas besoin d'ailleurs de monter très loin dans l'échelle sociale pour constater, autour de nous, toute une population de retraités pas forcément très âgés, disposant de confortables moyens, se cultivant, se divertissant, voyageant, ayant souvent suffisamment d'argent pour aider leurs enfants et leurs petits-enfants : une petite participation fiscale au redressement de notre économie ne devrait pas fondamentalement affecter leur train de vie. Vouloir redistribuer la richesse, rechercher une plus grande égalité entre tous, c'est ça être de gauche, non ?

lundi 17 septembre 2012

Monsieur le présidentiable



Depuis hier matin, Xavier Bertrand est passé de l'autre côté du miroir, il a rejoint le petit monde de ceux, très peu nombreux, qui ambitionnent d'être un jour président de la République, la crème du personnel politique, l'élite de l'élite. Quand on a cette volonté-là, gouverner la cinquième puissance planétaire, on n'est plus le même homme, on est entré dans une autre dimension. Ce n'est pas vraiment une surprise, c'est la suite logique d'un parcours fulgurant. Avec lui, Xavier Bertrand entraîne en quelque sorte sa ville, qui sera désormais, encore plus qu'elle ne l'était, sous l'oeil des médias : Saint-Quentin, la ville d'un possible futur président de la République ! L'opposition devra aussi avoir ça en tête, ne plus jouer petit bras, être à la hauteur de celui qu'elle est chargée d'affronter.

De son intervention d'hier, je retiens la grande détermination. Il en faut quand on vise cet objectif, le palais de l'Elysée. Le plus spectaculaire, c'est que Xavier Bertrand se désolidarise de Nicolas Sarkozy, dont il avait été le fidèle parmi les fidèles : même si celui-ci revient, celui-là sera candidat. On ne se présente pas à un tel niveau sous condition : c'est ce qui a perdu Rocard face à Mitterrand en 1980. Au contraire, Hollande face à DSK et Aubry avait fait preuve, comme Bertrand aujourd'hui, d'une détermination sans faille. A l'approche des cimes, pas d'hésitation : on est seul, il faut foncer, d'un élan qui vient de loin. Du coup, Bertrand n'a plus le droit de perdre les municipales de 2014, échec qui ferait tache dans sa perspective de carrière. Voilà qui devrait normalement stimuler la gauche locale à le battre, pourvu qu'elle en trouve l'énergie ...

Xavier Bertrand a-t-il eu raison de ne pas briguer la direction de l'UMP ? S'il a renoncé, c'est qu'il ne pouvait sans doute pas faire autrement : avoir les signatures pour la candidature est une chose, se faire élire en est une autre. Entre Fillon et Copé, Bertrand pouvait difficilement faire son trou et espérer gagner. En politique, mieux vaut passer son tour que se condamner à échouer. En même temps, celui qui tiendra le parti sera le mieux placé pour l'investiture de 2017, Sarkozy et Mitterrand en savent quelque chose. Mais le système des primaires change pas mal les règles, comme on l'a vu au PS, Hollande l'emportant sur Aubry. Pour Xavier Bertrand, Monsieur le président nous verrons bien demain, mais Monsieur le présidentiable c'est maintenant.

dimanche 16 septembre 2012

Au théâtre hier soir









Dans le cadre des journées du patrimoine, le théâtre amateur saint-quentinois s'est une fois de plus magnifiquement illustré, en revêtant cette année les costumes du XVIIIe siècle, tricentenaire de Jean-Jacques Rousseau oblige, en attendant les célébrations prochaines de Diderot et d'Alembert. Que les comédiens se sentent à l'aise au milieu des Lumières, ça n'étonnera pas ...

La soirée a commencé au Conservatoire de Musique, où les Tréteaux Errants nous ont conviés à une répétition originale de la pièce de Marivaux, "Les jeux de l'amour et du hasard" (vignette 1). La perruque blanche à catogan va si bien à Jean Triboulloy que je lui conseillerai volontiers de la garder pour ses séances de rigolothérapie ... A la bibliothèque municipale, c'est Jean-Pierre Leblanc, tout de noir vêtu, qui attendait le public, avec l'équipe du Manteau d'Arlequin, dans une présentation de l'homme et de la pensée Jean-Jacques Rousseau, sous ses multiples facettes, y compris les plus contradictoires, notamment un jeune Emile plus vrai que nature et son double baba cool, sans oublier l'ami Voltaire (vignette 2). Enfin, les Grim'Loup (vignette 3) ont mis les petits plats dans les grands en nous invitant, dans le musée Antoine Lécuyer, à une conversation de salon en présence des meilleurs esprits du siècle, un Jean-Jacques bougon (Patrice Ménard), un abbé Raynal séducteur (Jeff Prouveur). Bernard Delaire, accueillant à l'entrée en perruque cheveux longs, avait des allures de Louis XIV.

Bravo à tous les comédiens qui consacrent leur temps, leurs efforts et leur plaisir à notre plaisir ! A la fin, les trois compagnies se sont retrouvées pour saluer une assistance de 150 personnes environ (vignette 4). Je ne sais pas pour eux, mais pour moi, hier soir, le souvenir de Pierre Mondy, disparu dans la journée, n'a pas cessé de m'accompagner. Si j'aime le théâtre, c'est parce que la vie entière est un théâtre sans planches, plein de comédiens souvent beaucoup moins bons que ceux qui montent sur scène.

samedi 15 septembre 2012

Des nouvelles à la pelle



C'est vraiment la rentrée politique dans l'Aisne, les nouvelles se ramassent à la pelle, comme les feuilles mortes d'Yves Montand. Il y a d'abord Freddy Grzeziczak qui divorce d'avec Dupont-Aignan. C'est amusant : je voulais interpeller Freddy, dans un récent billet, sur la main tendue de son chef à Le Pen. Pas eu le temps, l'actualité m'a rattrapé. En tout cas bravo, pas d'alliance avec les fachos ! Ce matin, Freddy arpentait le marché de Saint-Quentin avec Ribeiro (pas le conseiller municipal) pour sans doute tester son effet. En quête d'un parti, j'aimerais qu'il revienne à ses premiers amours, le PS, certes pas très sexy chez nous, mais le fringant Freddy lui redonnerait des charmes !

Dans L'Union du 9 septembre, c'est Jérôme Lavrilleux qui fait parler. Jean-Michel Roustand, qui connaît un peu tout le monde, lui prédit une carrière de sénateur, à la suite et avec la bénédiction de Pierre André. Si ses absences lui ont malgré tout permis de conserver son siège de conseiller général aux dernières cantonales, c'est "grâce à la division maladive de la gauche locale", écrit Roustand qui a tout compris. Après le palais de l'Elysée auprès de Sarkozy, le palais du Luxembourg pour 2014 ? En tout cas, la droite saint-quentinoise garde de belles perspectives d'avenir ...

Je me demandais hier si Anne Ferreira suivrait Benoît Hamon au côté d'Harlem Désir ou resterait fidèle à l'aile gauche en soutenant Maurel-Lienemann-Filoche, en vue du congrès socialiste. Sur ce coup-là, j'ai devancé de peu l'actualité, la réponse étant dans L'Aisne Nouvelle d'aujourd'hui : ce sera Désir, comme tous les leaders socialistes axonais. Tous ensemble, tous ensemble, ouais, ouais, ouais ! Pour la gauche saint-quentinoise, je me réjouis (lire mon précédent billet), l'étau radical se desserre un peu. En toute logique, Arnaud Battefort, premier secrétaire fédéral annoncé, ne devrait avoir aucun concurrent sérieux contre lui après le ralliement d'Anne.

Claudine Doukhan, conseillère régionale PS, axonaise, prend du galon en devenant directrice de campagne, au niveau national, de Gaëtan Gorce, qui aura sa motion pour le congrès. Dans L'Union du 13 septembre, elle s'explique : "On va essayer de parler de choses plus intéressantes que le partage des postes (...), de donner la parole à ceux qui ne se contentent pas de suivre comme des moutons ..." Mais, ma chère Claudine, la politique c'est aussi une histoire de postes et de moutons, c'est ainsi depuis la nuit des temps, ce n'est pas indigne, ça n'empêche pas de se battre pour un idéal ! Toi-même, tu ne dois ton mandat régional que parce que des postes ont été partagés entre des moutons dont j'aimerais bien faire partie si je n'avais pas un petit côté loup.

Marie-Françoise Bechtel, collègue philosophe et députée de la 4e circonscription, déclare à Eric Leskiw dans L'Aisne Nouvelle que "Saint-Quentin a reçu un peu trop de choses ces dernières années". Très bien pour elle, qui défend son secteur, mais involontaire coup de pied de l'âne aux socialistes saint-quentinois, qui pourront difficilement dire après ça que le maire de Saint-Quentin n'obtient rien pour sa ville. L'opposition n'est vraiment pas aidée, c'est Yalta-sur-Aisne qui continue (voir mon billet du 7 septembre).

L'Union du 9 septembre annonce que "René Dosière se fait allumer". C'est Yves Daudigny qui met le feu, comme Johnny, après que le député s'en soit pris à sa réserve parlementaire. Yves remonte loin dans le passé pour démontrer que René a été nul en tant que président de la région picarde et maire de Laon. Franchement, deux parlementaires de gauche, sur un même territoire, qui s'écharpent par voie de presse, ça la fiche mal. Ce petit jeu-là, c'est un coup à perdre de prochaines élections. Ne me demandez pas qui a commencé ! La seule chose qui m'intéresse, c'est qui va terminer ...

vendredi 14 septembre 2012

Une possible évolution



L'évènement n'a pas été beaucoup commenté : dans le cadre de la préparation du congrès du parti socialiste, l'aile gauche s'est brisée en deux, d'un côté Benoît Hamon ralliant le courant majoritaire (la motion Ayrault-Aubry), de l'autre Marie-Noëlle Lienemann présentant son propre texte, rejoint par le plus à gauche des socialistes, Gérard Filoche, un Mélenchon qui n'aurait pas quitté le PS. La raison de cette scission : l'obligation morale pour tout membre du gouvernement de soutenir la motion proche du président de la République, solidarité on ne peut plus normale. Hamon a suivi.

Mais je ne pense pas non plus que son choix soit de pure discipline (Benoît aurait tout aussi bien pu s'abstenir) : il n'a pas voulu idéologiquement se dissocier de François Hollande. Ce n'est pas étonnant : à la différence de Lienemann, Hamon n'est pas un produit historique de l'aile gauche, ce n'est pas sa maison d'origine. Sa décision peut paraître anodine pour un observateur extérieur ; dans les jeux internes du parti, elle est lourde de conséquences : une partie de l'aile gauche rallie la social-démocratie.

A Saint-Quentin, où c'est l'aile gauche qui dirige la section, les effets seront intéressants à observer et peut-être prometteurs : où iront les socialistes ? Vers l'aile gauche historique ou bien suivront-ils Benoît Hamon ? Anne Ferreira a été son mandataire dans la phase des contributions, le secrétaire de section a soutenu Lienemann (sachant que dans cette première période du congrès, les signatures multiples sont autorisées). Anne peut être tentée de rejoindre maintenant Lienemann, venue en réunion publique à Saint-Quentin. D'autant que le premier signataire de la motion de l'aile gauche, Emmanuel Maurel, jeune intellectuel poperéniste, était son assistant parlementaire.

Mon souhait évidemment, c'est qu'Anne Ferreira, à l'instar de Benoît Hamon, s'aligne sur les positions d'Ayrault-Aubry, c'est-à-dire de la majorité avec François Hollande. Si c'était finalement le cas, cet évènement qui peut paraître minuscule aurait de grandes conséquences pour la suite : la section sortirait de la ligne la plus radicale, assumerait alors la social-démocratie en cours. Il ne resterait plus qu'à changer de secrétaire de section puis rompre avec l'extrême gauche pour achever le travail, normaliser en quelque sorte la situation, retrouver une orientation plus conforme à la politique nationale.

Je ne dis pas bien sûr que c'est fait, mais qu'une possibilité s'ouvre, que le contexte favorise la conclusion d'une séquence entamée lors des dernières élections municipales, dans laquelle le PS se condamnait à l'échec en liant son sort à l'extrême gauche. Avec l'accession aux responsabilités gouvernementales, ce n'est plus tenable.

jeudi 13 septembre 2012

Un Désir très ancien



C'est donc Harlem Désir qui dirigera le parti socialiste. Harlem ! Je l'ai connu quand il n'était pas encore connu, il y a un peu moins de trente ans. Il faut remonter à 1984 : je m'installe à l'automne à Paris et participe à une opération (à mobylette !) en faveur de la France multiculturelle (très à la mode à l'époque), avec un slogan du genre "pour que ça marche, il faut du mélange". A l'arrivée à Montparnasse, un badge se vend comme des petits pains, "Touche pas à mon pote", avec le dessin d'une main jaune, par une petite organisation inconnue, SOS racisme. C'est le début d'une grande aventure, en un temps où l'extrême droite était moins puissante qu'aujourd'hui.

J'adhère assez vite à SOS, j'essaie de monter un groupe à Pantin, où j'habite. Je participe aux réunions à la Mutualité, je suis les conférences de presse du mouvement qui gagne en ampleur, surtout médiatique. Harlem Désir n'est pas l'homme qu'on connaît aujourd'hui, responsable socialiste parmi d'autres ; c'est alors une formidable vedette, qui s'affiche en couverture des grands magazines, qui fait un carton quand il passe à la télé à l'émission "L'heure de vérité", qui mobilise des dizaines de milliers de personnes lors d'un concert géant à la Concorde (j'y étais !).

A l'époque, je suis pigiste (je crois que ce mot n'existe plus aujourd'hui, on dit semble-t-il correspondant). Je travaille pour deux journaux aujourd'hui disparus, Globe et Le Quotidien de Paris. A ce titre, j'interview Harlem désir (quel nom ! qu'on croit inventé alors qu'il est réel, qui fait rêver ...). Harlem est sympa, charismatique, il a mon âge, je partage complètement, et avec enthousiasme, son discours sur la France multiculturelle, son antiracisme d'un genre nouveau, convivial. Julien Dray est son bras droit, l'intello du groupe, derrière la tête d'affiche.

A la fin des années 80, une question se pose avec la montée du Front national et le reflux de la mode SOS : qu'est-ce qu'on fait politiquement ? Il y a une courte tentative d'orga indépendante dont j'ai oublié le nom (le mot égalité figurait dans le titre) et puis Harlem Désir a rejoint le PS, ce qui n'était pas son intention au départ, mais il fallait bien être réaliste. A partir de là, la vedette a joué dans le parti les rôles secondaires, s'est fait oublier, laissant la place à "Juju". Harlem s'est normalisé, banalisé, il est passé de leader antiraciste flamboyant à responsable socialiste ordinaire (apparatchik, disent certains, mais c'est un vilain mot). Depuis sept ou huit ans, il a resurgi en première ligne. Dans quelques semaines, il deviendra très probablement le numéro un du PS. Quand il est venu il y a quelques années à Saint-Quentin, je ne lui ai pas rappelé qu'on s'étaient connus et rencontrés il y a bien longtemps. Je n'aime pas revenir en arrière. Mais j'aimerais qu'à l'occasion de sa désignation à la tête du PS, nous retrouvions le jeune homme enthousiaste et populaire qu'il était alors.

mercredi 12 septembre 2012

Sainte et laïque alliance



Réunion ce soir à Laon avec la Ligue de Droits de l'Homme et le groupe de travail "Gens du voyage", où j'ai retrouvé Olivier Lazo, de la LDH, et Jean-Paul Vaillant, responsable du groupe. Surprise : deux prêtres et plusieurs chrétiens de gauche. Avec la Ligue de l'enseignement, l'UFAL, l'ARAC et quelques autres, c'est une étrange coalition qui se dessine, une sainte et laïque alliance pour défendre ceux que plus personne aujourd'hui ne veut défendre, les gens du voyage.

Nous avons bien sûr reparlé de la polémique de cet été autour du rassemblement évangélique de Couvron, de l'attitude des élus et d'une partie de la population. Autre sujet très délicat : les résidents semi-sédentarisés du chemin d'Aulnois, qui vivent dans des conditions vraiment épouvantables. Rien n'est fait pour recevoir dignement les gens du voyage. Certaines familles vivent là depuis plusieurs décennies et ne sont toujours pas considérées comme des Laonnois à part entière. Mais qui s'en soucie ?

J'ai discuté avec David, qui fait partie de ces réprouvés. Avec sa famille, il partira dans quelques jours pour Reims, pour faire les vendanges. Je lui demande combien il est payé, il me répond que c'est au poids de raisins récoltés ! On croit rêver mais c'est un cauchemar : le Moyen Age au début du XXIe siècle. Tant d'injustices, tant de choses à changer ... J'ai invité David à venir témoigner à Saint-Quentin au ciné philo du 15 octobre prochain, qui passera le film "Gipsy Caravan", dans le cadre du festival "Les yeux ouverts sur l'immigration", proposé par la Ligue de l'enseignement de l'Oise. Et puis nous avons décidé, avec le groupe, d'organiser un évènement à Laon dans les prochains mois, afin de débattre de la place des gens du voyage dans la société française. La résistance continue.

lundi 10 septembre 2012

Enfin les impôts augmentent !



Je l'attendais depuis des années, seule la gauche pouvait le faire parce qu'elle a une tradition de redistribution fiscale : la hausse des impôts comme début de remède aux déficits des comptes sociaux et à la dette abyssale. Depuis une vingtaine d'années, à droite mais aussi à gauche, l'augmentation des impôts est le vrai sujet tabou, que personne n'ose aborder, comme si l'impôt était en soi un mécanisme mauvais, à proscrire, alors qu'il est une invention révolutionnaire (je parle bien sûr de l'impôt sur le revenu, au fondement de la République, pas des diverses taxes qui prospéraient déjà sous l'Ancien Régime). François Hollande, en parfait social-démocrate, a su lever ce complexe inoculé à la gauche par la droite. Bravo !

Pourquoi augmenter les impôts ? Parce que c'est la seule façon juste de faire entrer massivement de l'argent dans les caisses de l'Etat. L'autre solution, c'est la politique d'austérité : économiser à mort, couper dans les dépenses sociales, amputer la Fonction publique (c'est grosso modo les politiques de droite en Europe). Augmenter les impôts, c'est préserver le financement de notre protection sociale : santé, éducation, retraite, il ne faut pas toucher à ça quand on est de gauche. Mais augmenter les impôts, non ça ne me dérange pas, je trouve ça très bien, et courageux. C'est tellement facile, tellement démago de faire gueuler les gens parce que leurs mensualités ou leur tiers provisionnel vont augmenter !

Croire qu'il suffit seulement de "faire payer les riches", comme le proclament Mélenchon, les communistes et l'extrême gauche, c'est une illusion totale : les riches, les vrais, gagnent beaucoup mais ne sont pas beaucoup, donc ne rapportent pas énormément, c'est mathématique. Mais politiquement, il faut les frapper à la caisse, et Hollande a raison de leur imposer une taxe exceptionnelle de 75%, sans exemption, en précisant bien que la mesure est "symbolique". La masse des contribuables gagnent beaucoup moins mais sont beaucoup plus nombreux. On doit par conséquent les mettre aussi à contribution, par souci d'efficacité. Mais pas n'importe comment.

D'abord, il faut rappeler que la moitié des foyers ne paient pas d'impôts, parce qu'ils ne gagnent pas assez d'argent pour ça. Ce sont les classes populaires, que la gauche doit défendre en priorité. Ensuite, le gel du barème, qui entraînera certaines hausses d'impôts, ne concernera pas les deux premières tranches, les plus basses ; ce qui signifie que les classes moyennes inférieures, comme on les appelle, ne seront pas touchées. Voilà une authentique politique fiscale de gauche ! Ce qui la rendait impossible ces dernières années, c'est une imposture sociologique, une arnaque idéologique : la fameuse référence aux "classes moyennes", le plus énorme mensonge politique depuis plusieurs décennies, qui empoisonne tous les discours politiques. Car les "classes moyennes", ça n'existe pas, c'est un fourre-tout dans lequel se cachent plein de gros poissons. On flatte la vanité de chacun en laissant croire qu'il appartient à cet ectoplasme, les "classes moyennes", parce que presque plus personne, dans notre société petite-bourgeoise, n'ose dire qu'il appartient au populo. Même les ouvriers ont perdu la fierté d'être ouvriers depuis qu'ils ont en tête de faire de leurs enfants des profs, des médecins ou des avocats !

Prenez Saint-Quentin : un classement l'a situé en 18e position des villes les plus pauvres de France, mais un samedi du mois d'août où j'ai eu envie d'aller bouffer en ville, je n'ai pas trouvé de place au Crocodile, au Buffalo Grill et à Courtepaille, remplis à craquer ! Il y a des tas de gens qui, sans être riches, n'ont pas de gros soucis de fric, qui sont propriétaires de leur baraque, qui vont en vacances sans problème, qui se paient régulièrement des restau, qui ont parfois des résidences secondaires ou des studios en location, qui paient à leurs gamins des études longues et onéreuses : ce sont ces "classes moyennes" qu'il faut mettre à contribution parce qu'elles en ont les moyens. Si ce n'est pas ça être de gauche, je n'y comprends plus rien !

dimanche 9 septembre 2012

Hollande a été très bien



Je viens à l'instant de quitter François Hollande (devant ma télé) : je l'ai trouvé très bien, un peu tendu au début, puis offensif. Deux idées fortes : le patriotisme économique, qui oblige autant à la solidarité des plus riches par l'impôt qu'à la compétitivité des entreprises, et l'agenda du redressement sur deux ans, avec bilan en 2014 (il ne l'a pas dit mais j'y ai pensé très fort : ce sera l'année des élections municipales, qui seront gagnées par le parti socialiste si le changement est alors perceptible par la majorité des Français).

Deux pistes concrètes pour relancer l'économie et réduire la dette : la flexibilité de l'emploi (Moscovici a introduit un débat utile sur le coût du travail, que généralement à gauche on n'ose pas aborder) et le financement de la protection sociale autrement que par les cotisations du travail (là aussi, tout le monde à gauche n'est pas d'accord : Hollande met les pieds dans le plat, c'est très bien). Le président de la République fait preuve d'une belle audace social-démocrate qui me plaît. Le discours est sérieux, carré, prospectif.

Sur la taxation des hauts revenus à 75%, Hollande a été très clair : l'engagement sera intégralement tenu. Il n'y a que les faiseurs d'embrouille qui peuvent sur ce point lui chercher querelle. A ce propos, la polémique du week-end autour de Bernard Arnault a été surréaliste : cet homme souhaite acquérir, pour des raisons personnelles, la double nationalité franco-belge. C'est son droit, pas de quoi en faire un fromage ! Ce grand patron a dit et redit qu'il resterait fiscalement assujetti en France. Où est alors le problème ?

Il reste maintenant au parti socialiste à jouer la partition que le président a ce soir donnée, agenda et objectifs. Le simple antisarkozysme doit désormais être dépassé : ce sont des choix politiques qu'il faut assumer, devant les Français, et qu'il défendre face aux attaques de la droite, c'est une culture de majoritaires qu'il faut retrouver, après dix ans passés dans l'opposition. Pour ma part, c'est facile, je n'ai jamais été antisarkozyste : socialiste me suffit amplement, tout le reste en découle, y compris les critiques à l'égard du précédent pouvoir, mais sans la posture de l'anti.

vendredi 7 septembre 2012

Yalta-sur-Aisne



L'inauguration de la rentrée à Saint-Quentin, c'était ce matin rue de la Fère, le village des métiers d'antan et le musée Motobécane (voir mon billet du 16 août). Il y avait bien 150 personnes, de nombreuses figures locales, des responsables associatifs et plusieurs élus (sauf ceux de l'opposition, qui ont critiqué le projet). Roland Lamy, à l'origine du village et du musée, a rappelé, très ému, qu'une centaine de bénévoles de son association Loisirs et Traditions de France ont travaillé à la bonne réalisation du projet. Quatre salariés ont été embauchés, plus de 2 000 entrées ont été enregistrées cet été.

Le sous-préfet s'est félicité du partenariat public-privé et a souligné l'importance du bénévolat. Xavier Bertrand a révélé que Le Monde allait consacré un article au site, d'autres organes de presse nationaux s'y intéressant. Pendant le tour des expositions, il était parfois question, dans la foule, du bronzage des élus, certains étant remarquables (je veux parler des bronzages). Le sénateur et président de l'agglomération Pierre André était présent. Un seul élu de gauche, pour le conseil général de l'Aisne, qui est partie prenante : Jean-Claude Cappèle. En revanche, une absence faisait jaser, celle du président du conseil régional de Picardie, Claude Gewerc, pourtant puissance invitante et financeur du projet, non représenté au moment des discours.

J'ai depuis longtemps renoncé à expliquer pourquoi les sommités socialistes évitent depuis plusieurs années notre ville, pourquoi Anne Ferreira n'a reçu la visite d'aucune personnalité nationale d'envergure dans le cadre des élections législatives : quand on affronte Xavier Bertrand, c'est du soutien actif d'un poids lourd politique dont on devrait bénéficier. Je ne me pose pas la question parce que je redoute la réponse, que je pressens, au risque de me tromper : la gauche a fait une croix sur la conquête de Saint-Quentin, laissant le territoire à la droite pour récolter peut-être ailleurs un bénéfice compensatoire, dans une sorte de donnant-donnant. C'est un partage comme il y en a eu un autrefois à l'échelle du monde, Saint-Quentin c'est Yalta-sur-Aisne, dont la part tombe du mauvais côté quand on est de gauche. Du coup, les socialistes locaux sont des sortes de snipers désespérés, coupés de leur base, sans appui extérieur. C'est terrible. C'est sans doute l'accablement politique qui me fait penser ça, mais je crois qu'il y a quand même une part de vérité là-dedans.


PS : pas de billet demain, je serai toute la journée à Liège, pour la réunion des Cercles Condorcet du Septentrion.






jeudi 6 septembre 2012

Je ne suis pas nord-coréen



Natif du Berry et Saint-Quentinois d'adoption, je tiens à dire que je ne suis pas nord-coréen. Pourquoi cette évidente précision ? Parce qu'il court le bruit, ces temps-ci, que mon parti serait comparable au régime de ce sinistre pays. Certains camarades le propagent, visant ainsi le mode de désignation du futur chef du PS. A côté, paraît-il, l'UMP et ses multiples candidatures pour la tête, ce serait la démocratie suisse ! Un peu fort de café : c'est quand même le PS qui a inventé en France le système des primaires ... Pas de leçon de démocratie, s'il vous plaît !

Je sais bien que ce qui est excessif est insignifiant et qu'il faudrait mieux laisser pisser le mérinos (encore lui ! Décidément, il a une vessie grosse comme une citerne !). Mais on dit aussi qu'à force de calomnier, il en reste toujours quelque chose. Autant alors riposter : la comparaison PS-Corée du Nord est forcément idiote, Aubry n'est pas Kim Il Sung et notre fonctionnement n'est pas dictatorial. Passons et venons-en à l'élection du premier secrétaire. La méthode a été adoptée à une très large majorité par l'ensemble des adhérents, dans le cadre de la rénovation du parti. A l'époque, tout le monde s'en félicitait. Plus maintenant ?

Avant, ça se passait comment ? On choisissait d'abord la ligne politique (en votant sur les motions) et ensuite seulement pour le premier secrétaire. Il y avait déconnection entre le projet et la personne, ce qui n'est jamais bon, ce qui laisse la porte ouverte aux manoeuvres et aux ambitions. Avec le nouveau système, les socialistes optent en même pour une ligne et pour une personne, le premier signataire de la motion. C'est beaucoup mieux, c'est politiquement plus clair, ça réduit considérablement les problèmes de personnes, qui sont le poison de la vie politique. Et ce nouveau mode de désignation n'est pas moins démocratique, pas plus nord-coréen que l'ancien !

Qu'est-ce qui coince aux yeux de certains ? Le fait que Ayrault et Aubry ayant choisi de s'allier, leur motion probablement ultra-majoritaire imposera immédiatement le nouveau patron du PS. Et alors ? Il est normal, il est même recommandé que des socialistes de même sensibilité, en l'occurrence social-démocrate, fassent alliance, surtout lorsqu'ils sont au pouvoir. Ca n'interdit pas à d'autres de se présenter, au titre d'autres motions, et de tenter leur chance.

Pour le moment, Harlem Désir et Cambadélis sont sur les rangs, et comme je l'ai déjà dit, ni l'un ni l'autre ne me font vraiment rêver : en période de gouvernement, il faut une personnalité forte et indépendante à la tête du parti. J'y verrais bien Ségolène : elle n'a plus rien à faire, elle s'ennuie, elle a surtout le charisme pour la fonction. Et puis, une fois qu'elle y sera, elle n'embêtera plus ses petits camarades. En politique, quand on veut se débarrasser de quelqu'un, on lui donne une place quelque part (sous l'empire romain, le poison était plus efficace, mais ce ne sont plus nos moeurs). Faute de Ségo, et puisque faire de la politique c'est choisir, je me rabats sur Camba, qui annonce aujourd'hui dans Le Monde son programme, qui me va. Et il n'est pas du tout nord-coréen lui non plus, quoique ancien lambertiste ...

mercredi 5 septembre 2012

La rentrée d'Anne Ferreira



Ce week-end a sonné la rentrée de la classe politique axonaise, à La Capelle pour l'inauguration de la foire aux fromages (voir mon billet de dimanche) mais aussi à Saint-Quentin pour les cérémonies de la Libération de la Ville. Dans ce genre de rencontre, les hommes politiques distillent savamment quelques bons mots à destination de la presse, qui seront repris dans le journal du lendemain. C'est tout un art, un métier, un savoir faire, du "off" qui a plus d'impact qu'une déclaration officielle bien bordée. Mais le "off" existe-t-il ? Non, je ne crois pas : une parole politique est toujours à finalité publique, même quand elle est prononcée sur le ton de la confidence.

Anne Ferreira, vice-présidente du conseil régional de Picardie, a choisi la cérémonie patriotique pour faire sa rentrée politique et médiatique, en livrant ses réactions à Alice Meunier, dans l'édition de lundi du Courrier picard. Son angle d'attaque : deux points protocolaires, le port de l'écharpe tricolore et l'ordre de succession dans le dépôt de gerbe.

Sur le premier point, à la suite d'une précédente cérémonie patriotique, celle du 8 mai, Gontran Lefebvre, délégué de circonscription UMP, avait envisagé de porter plainte contre Anne Ferreira pour port illégal de l'écharpe tricolore, une conseillère régionale n'étant pas autorisée selon lui à l'arborer. Qui dit vrai ? Je n'en sais foutrement rien et ça ne m'intéresse pas. Toujours est-il qu'Anne n'a pas remis dimanche dernier le tissu en litige, mais a riposté sur le même terrain que son attaquant, en contestant à son tour la même écharpe enfilée cette fois par les adjoints : "il me semble que seul le maire ou son représentant en son absence peut la porter". C'est la réponse du berger à la bergère ou, si vous préférez, l'effet boomerang. Le symbole national, les trois couleurs, ce n'est pas rien. De là à en faire l'objet d'une polémique, s'écharper pour une écharpe, j'hésite ...

Le deuxième point, l'ordre de succession dans le dépôt de gerbe, est inédit. La récrimination d'Anne Ferreira, c'est qu'elle a été en quelque sorte mise au rebut, en fin de file, la dernière à déposer sa gerbe, après tout le monde, et qu'elle l'a manifestement mal vécu, subi comme une injustice. Là aussi, que faut-il en penser ? Ce genre de protocole est strictement défini et la réponse précise existe. Ne comptez pas sur moi pour perdre mon temps à la rechercher, mais des lecteurs passionnés peuvent essayer et me la transmettre. Ce que je sais, c'est qu'à Saint-Quentin le grand maître des cérémonies, depuis très longtemps, est Jean-Claude Decroix, un type très scrupuleux et sans parti pris. Une erreur n'est jamais à exclure, mais c'est à voir ...

Laissons la dimension protocolaire pour aller à l'essentiel, la dimension politique. Visiblement, Anne Ferreira adopte une stratégie victimaire, assez payante dans la société telle qu'elle est : montrer qu'on est exclu attire forcément la sympathie sur soi. Mais la démarche a aussi ses limites, elle ne fonctionne pas à tous les coups. J'y vois plusieurs inconvénients : d'abord, elle laisse supposer qu'on n'a rien d'autres à dire, ce qui est embêtant. Ensuite, le reproche fait à la Municipalité est tout de même assez mineur, presque anecdotique, une histoire d'écharpe et de gerbe. Enfin, le protocole relevant d'une science compliquée, on peut facilement se prendre les pieds dans l'écharpe ou dans la gerbe et voir l'affaire se retourner contre soi.

Si j'étais le conseiller en communication d'Anne Ferreira, je ne l'aurais pas incitée à s'engager dans cette histoire. Quoi qu'on dise, en politique comme ailleurs, il vaut mieux faire envie que pitié. Quant à l'affront personnel, à la blessure narcissique, il faut laisser pisser le mérinos (tiens, c'est la deuxième fois de suite que j'emploie cette expression, déjà dans le billet d'hier ; elle doit me plaire, bien que je ne sache rien du système urinaire de ces animaux). Ce qui compte en politique, c'est ce qui se voit, c'est ce qui est public, par définition. Anne n'aurait rien dit à propos de l'écharpe et de la gerbe, personne n'en aurait rien su, rien vu et l'humiliation, si celle-ci est effective, serait passée à côté de son objectif. Voilà ce que j'en dis, mais j'ai peut-être tort ; ma situation politique personnelle n'est pas suffisamment brillante pour que je donne des leçons aux autres.

mardi 4 septembre 2012

Le mot le plus con



Vous vous souvenez du film à succès "Le dîner de con" ? On invite à table un con qui fera la joie de la soirée. De la même façon, il faudrait décerner chaque semaine, dans la vie politique, le titre de mot le plus con. Comme pour le fameux dîner, ce n'est pas si difficile à trouver. Prenez par exemple cette semaine : le pompon, incontestablement, est détenu par Luc Chatel, qui a accusé de "pétainisme" Vincent Peillon parce que le ministre de l'Education a parlé de "redressement moral". On ne fait pas plus con comme reproche, quand on sait que Peillon défendait l'enseignement de la "morale laïque", contre laquelle le régime de Vichy s'est particulièrement acharné, condamnant l'école de la République et interdisant les organisations laïques !

Saint-Quentin pas plus qu'une autre ville n'est protégée de la connerie. Le titre est à prendre, chez nous aussi. Je le donne volontiers à un médecin de l'hôpital, anonyme, qui dans le Courrier picard a son explication quant aux comportements dépressifs constatés cet été dans son établissement : c'est parce que "l'arrivée de la gauche au pouvoir n'a pas entraîné l'amélioration qu'attendaient les gens". Celle-là, toubib, il fallait oser la faire ! C'est du même registre que Peillon Pétain ... Peut-être que le doc a sa carte de l'UMP bien rangée dans son portefeuille bien rempli, comme certains de ses collègues, ce qui apporterait un début d'explication, sans cependant rien justifier.

Il faut être schizo pour croire que la vie change en trois mois. Notre médecin travaillerait-il dans le service psychiatrique ? Et puis, "l'amélioration qu'attendaient les gens", elle est quand même là, quoi qu'il prétende (que son existence à lui n'ait pas changé, ça je veux bien le croire) : la hausse de l'allocation de rentrée scolaire, la baisse du prix des carburants, la retraite à 60 ans pour ceux qui ont commencé tôt à travailler, la fin des suppressions systématiques de postes dans l'Education nationale et j'en oublie, le doc n'est sans doute pas d'accord mais il ne peut pas dire que c'est rien, que ça rend dépressif les gens !

La connerie n'épargne pas non plus mon entourage, qui devrait pourtant en être préservé à force de me fréquenter. Une amie, qui se dit de gauche et a voté Hollande, prend un malin plaisir à me faire remarquer que ses impôts ont augmenté de 400 euros, mais que ce n'est pas grave, que si c'était à refaire elle voterait encore Hollande. Vicieux, ce coup de pied de l'âne ! Et savez-vous quelle a été ma réaction (j'ai honte) ? Je me suis tu, je n'ai rien dit, j'ai laissé pisser le mérinos. La connerie m'accable tellement elle est lourde, jusqu'à me rendre à mon tour un peu con dans mes coupables silences.

Au fait, vous m'avez compris ? C'est que je crains de vous faire plus cons que vous n'êtes : les hausses d'impôts, Hollande n'y est strictement pour rien, la décision a été prise par Sarkozy.

lundi 3 septembre 2012

Les dieux doivent être tenus



En ce jour de rentrée des enseignants, une nouveauté : le projet de Vincent Peillon d'enseigner la "morale laïque" à l'école, qui me laisse sceptique. Car de quelle morale s'agit-il ? Faire aimer le travail, développer la vertu du courage, apprendre aux élèves le respect de l'autorité, les initier à la vie collective, montrer la valeur et la nécessité de la discipline, c'est ce que j'appelle la morale scolaire, que tout enseignant prodigue à ses classes dans l'exercice même de son métier.

Pas besoin non plus d'enseigner la morale civique, puisque cela se fait déjà dans les cours d'instruction civique, l'ECJS : les devoirs du citoyen, le vote, l'usage des droits, la soumission aux lois, le permis et le défendu, l'expression des opinions, l'obligation à s'informer, ... Quant aux notions morales de bien et de mal, la réflexion sur le sens de l'existence, évoquées ce matin par Vincent Peillon sur France-Inter, c'est au cours de philosophie que revient ce travail.

Bref, je vois mal ce que peut être cette "morale laïque", qui n'est pas sans risque. Car pas question, en République, d'imposer une morale personnelle aux élèves, chacun étant libre de vivre selon l'éthique de son choix. C'est aux individus et aux familles d'en décider. La "morale laïque" ne peut pas remplacer l'éducation. Il faut veiller aussi à ce qu'elle ne soit pas une sorte de morale athée, qui s'opposerait à la morale chrétienne. Laïque, l'école doit demeurer neutre et indépendante en matière de principes et de modes de vie.

Et puis, l'enseignement d'une "morale laïque" se heurte à des problèmes techniques : qui va se charger de ces cours ? Quels seront leurs contenus ? Comment seront-ils évalués ? Quelle place trouveront-ils dans les examens ? Dans le JDD d'hier, Vincent Peillon parlait de l'école comme d'un "pouvoir spirituel". Non, l'école laïque n'a rien à voir avec aucune spiritualité, au nom même de la séparation des églises et de l'Etat. Ou alors, c'est jouer avec les mots, en définissant la "spiritualité" comme étant le pouvoir de l'esprit, auquel cas toute l'école lui est en effet consacrée. Mais ce n'est pas ainsi qu'on comprend généralement le terme de "spirituel".

Je crois que notre ministre a révélé ce matin à la radio le fond de sa pensée, à travers un très joli lapsus : au lieu de dire, à propos de je ne sais plus quoi, "les deux doivent être tenus", il a laissé échapper un "les dieux doivent être tenus" ! Quelle belle définition de la laïcité ! Oui, il faut "tenir les dieux" en dehors de l'école, pas seulement ceux de la religion (qui séduisent de moins en moins de monde) mais surtout ceux de l'argent, du spectacle, du sport, de la technologie, bref toutes les idoles du monde moderne.

dimanche 2 septembre 2012

"In" et "off" à La Capelle





Au festival d'Avignon, il y a le "in", la scène officielle, et le "off", les petites troupes théâtrales en marge. A la foire aux fromages de La Capelle, c'est pareil : le "in" c'est l'inauguration des élus (vignette 1), le "off" c'est la protestation des anti-OGM (vignette 2). Tout élu qui a quelques ambitions départementales, intra ou extra, se doit d'être présent à cette rentrée de la classe politique axonaise. Gare aux absents ! Derrière le ruban tricolore, ils sont une bonne vingtaine, tous des hommes, en costume gris, qui deviennent des statues de pierre quand retentit la Marseillaise. Le coup de ciseaux était annoncé à 10h00, il faudra attendre 11h00. Juste après, les élus doivent subir la première dégustation d'une longue série, fromage et pinard. Je ne sais pas s'il faut les envier ou les plaindre ...

En tête de cortège, guindé parce que grand, il y a le préfet au nom de philosophe, Pierre Bayle, sérieux comme un pape malgré les vapeurs d'alcool et l'odeur enivrante du maroille. A côté, le "député" Jean-Pierre Balligand, toujours appelé ainsi par plusieurs visiteurs, bien que son successeur, Jean-Louis Bricout, fasse son possible pour assimiler le métier. Yves Daudigny est songeur ; peut-être se demande-t-il quel mandat il choisira, entre président du conseil général et sénateur, si une prochaine loi l'y oblige ? Jean-Jacques Thomas, premier vice-président, est songeur lui aussi ; peut-être se demande-t-il quel mandat il choisira, entre président du conseil général et maire, si la réponse à la question précédente l'y oblige ?

Claude Gewerc, président de région, et Christophe Coulon, dir cab à la municipalité de Laon, affichent, sous ce ciel gris, les deux plus beaux bronzages faciaux du moment, qui rappellent les vacances en cette veille de rentrée. Le député René Dosière et l'élu régional écolo Franck Delattre ont en commun le col ouvert et l'absence de cravate, qui leur donneraient presque des allures de rebelles au milieu de la bande. A chacun sa tactique : Antoine Lefèvre, maire de Laon, s'échappe du cortège pour faire plus tranquillement le tour des stands extérieurs. Dans ce groupe qui aligne les poignées de main, les bouchées de fromage et les verres de vin, on reconnaît aussi Frédéric Meura et Michel Collet, ainsi que quelques militaires en uniforme (?). En revanche, pas un seul visage saint-quentinois : vu de Thiérache, le Vermandois serait-il un lointain pays ?

Le "off" est évidemment moins fourni et beaucoup plus frugal : Dominique Lestrat est l'anarchiste historique du département, néanmoins porteur d'une barbe très marxiste ; Evangelia Ralli, responsable EELV, exhibe des fausses boîtes de camembert marquées "OGM". Leur ruban à eux, c'est une banderole, très remarquée.

Après le "in", après le "off", il y a tout simplement la foire et ses temps forts, ses moments de bravoure, nombreux : par exemple la tonte des moutons, la présentation au public de l'âne Fanfan, le concours de beauté des vaches, les animaux en plastique sur le stand de la FNSEA. Mais le rendez-vous de La Capelle, ce n'est pas seulement la bouffe et les bestiaux : il y a aussi la voiture qui tourne sur elle-même, les roues en l'air, pour tester peut-être la résistance de ses occupants au vomissement de maroille (je ne vois pas d'autres usages ...). Dans les rues, des démonstrateurs font la retape pour des objets ménagers invraisemblables : la serpillière qui ne mouille pas, le balai à nettoyer dans les coins, l'aspirateur qui ne fait pas de bruit, la machine à couper des carottes sans se couper les doigts, etc.

Je n'ai hélas pas pu rester jusqu'à la fin de l'après-midi, pour assister au concours du plus gros mangeur de maroille. Mais au retour, méditatif, je me suis mis à fantasmer les plus fortes corpulences de la République locale, des camarades qui me sont chers, Balligand, Dosière et Thomas, attablés devant d'énormes portions de l'auguste fromage et rivalisant entre eux pour qu'un des trois remporte le premier prix. Entre le "in" et le "off", je me sens "out" ...

samedi 1 septembre 2012

Un canal s'est perdu



Avec un ciel si bas qu'un canal s'est perdu
Avec un ciel si bas qu'il fait l'humilité
Avec un ciel si gris qu'un canal s'est pendu
Avec un ciel si gris qu'il faut lui pardonner

Jacques Brel, Le plat pays


Non, il ne s'est pas encore pendu, mais on a l'impression cette semaine qu'il est bel et bien perdu, le projet de canal Seine-Nord, autour duquel les atermoiements en disent long sur l'état politique et économique de la France. Bouygues a retiré ses billes, le ministre des Transports réfléchit prudemment et "les élus se rejettent la faute" (titre du Courrier picard d'hier). Politiquement, personne ne semble vouloir assumer la décision d'arrêter ou de poursuivre, cherchant à se défausser sur l'autre. Qu'est-ce que, pourtant, la responsabilité politique, sinon savoir trancher et justifier clairement ses choix ? Rien n'est clair dans cette histoire. Il y a un précédent, un rendez-vous manqué avec l'Histoire : le troisième aéroport international près de Chaulnes, même indécision, même enfumage, même ratage.

Ce qui est littéralement stupéfiant, c'est que ce projet de canal a été lancé il y a plusieurs décennies, que son utilité ne semble faire aucun doute, que des travaux ont commencé, que des formations ont été mises en place : mais la décision n'est toujours pas prise ! J'entendais déjà la députée socialiste de Saint-Quentin Odette Grzegrzulka en parler il y a quinze ans comme la grande affaire du moment. On n'a pas avancé depuis. La France de Louis XIV creusait des canaux, la France de Napoléon III aussi, et la cinquième puissance mondiale que nous sommes en serait aujourd'hui incapable ?

On a besoin de croissance, d'emplois, de développement durable, le canal Seine-Nord répond à toutes ces exigences, induit 45 000 postes de travail, développe une région, la Picardie, notamment le Saint-Quentinois, qui sont mal en point, remplace les camions par des péniches. Que veut-on de plus, qu'est-ce qui manque ? Bien entendu le fric (4,3 milliards d'euros), les caisses de l'Etat étant en difficulté, malgré le partenariat public-privé. Mais si la France ne trouve ni les moyens, ni la volonté de creuser un canal, de quoi peut-elle encore espérer être capable ? Notre pauvre Picardie va-t-elle désespérément rester un "plat pays", sans ambition ni développement ? Brel avait raison : c'est triste et gris à se pendre ...