dimanche 31 août 2014

L'université antisocialiste



Je suis allé à de nombreuses reprises à l'université socialiste de La Rochelle. Mais c'est la première fois que j'ai assisté, stupéfait, à une université ... antisocialiste, organisée pourtant par mon parti. Je galèje ? Non, pas du tout, hélas. Venons-en aux faits, comme toujours, largement rapportés par les médias (plus besoin d'aller à La Rochelle, c'est La Rochelle qui vient à nous !) :

Commençons par Christiane Taubira, Garde des Sceaux venue en vélo (pourquoi pas en trottinette ou en pédalo : étonnez-vous après que les Français se moquent et ne respectent pas leur classe politique). Manuel Valls s'assure il y a quelques jours, solennellement, de son soutien et de sa fidélité au gouvernement, condition pour être reconduite dans son poste de ministre. Elle dit oui, et hier, en rejoignant une réunion des "frondeurs", elle s'en fiche. "Je ne vois vraiment pas où est le problème", nargue-t-elle hypocritement, à la façon de Montebourg offrant par dérision une bouteille de sa piquette, cuvée Frangy, à Hollande, il y a une semaine. Ces gens-là ne savent pas se tenir.

Continuons avec ces fameux "frondeurs" : qu'ont-ils trouvé de mieux à faire à La Rochelle ? Je vous le donne en mille : créer un courant, "Vive la gauche" ! Comme s'il n'y avait pas assez de courants au PS ! C'est très simple : chez les socialistes, quand on n'est pas d'accord, on crée son courant. C'est l'esprit boutiquier : on est tellement mieux entre soi. Moi, mon seul courant, c'est le parti socialiste !

Le pompon, c'est Pierre Laurent. Celui-là, je me demande bien qui a pu l'inviter ! Il a dû y avoir une erreur dans les envois. Qu'a dit le premier secrétaire du PCF ? Ce genre d'amabilités : "la voie du gouvernement de Manuel Valls nous mène dans le mur" ; "le contrat de 2012 vient d'être déchiré cette semaine devant les Français". Je n'en veux pas à Laurent, qui fait son job. Mais savez-vous comment les militants socialistes ont réagi ? Par un tonnerre ... d'applaudissements. Là, entre schizophrénie, masochisme et connerie, j'hésite dans l'explication.

Et puis, il y a eu la verte, Emmanuelle Cosse, qui s'en est prise à la politique "social-libéral" de Manuel Valls (chansonnette à la mode) et à ses dernières mesures en faveur du logement. Finalement, il ne manquait plus comme invités que Jean-Luc Mélenchon et Olivier Besancenot : plus on est d'antisocialistes, plus on rit. Pour finir en beauté, le discours de clôture du Premier ministre a été au début perturbé aux cris de "Vive la gauche", du nom du courant fraîchement émoulu. Ah les cons ! Et vous appelez ça des "socialistes" ? Moi non. En revanche, ils correspondent parfaitement à la définition de l'antisocialiste : personne qui critique sévèrement la direction du parti socialiste, les choix de ses adhérents, le chef de l'Etat et le gouvernement.

Il faut tout de même rappeler ce qu'est l'université d'été du parti socialiste : un lieu de formation et pas de confrontation, un moment de réflexion et pas une foire d'empoigne, des échanges avec des intellectuels, des syndicalistes, des associatifs et pas des querelles avec des concurrents, la rentrée médiatique du parti et pas l'étalage de nos divisions. La Rochelle, c'est un temps de rassemblement, pas d'affrontement. Mais les débats ? Oui, ils ont leur place, indispensable, dans une organisation démocratique : dans les sections et les fédérations, lors de nos réunions internes. Mais combien de sections et de fédérations les mettent en place, font vivre le parti ? Nous en reparlerons ...

L'université d'été du parti socialiste a été, cette année, gâchée, dénaturée en une ubuesque université antisocialiste. J'espère que cette première sera une dernière. Heureusement, le parti tient bon et le gouvernement maintient le cap. Trois voix se sont définitivement exprimés sur tout ça durant le week-end. Bernard Cazeneuve, dans le Journal du Dimanche, à propos des ministres : "soit on part, soit on se tait ! La politique n'est pas un théâtre d'ombres ou de boulevard. Il faut la fermer et redresser la France". François Hollande himself : J'ai besoin d'avoir un parti dans la majorité à l'unisson de ce que je propose (...) Etre social-démocrate, c'est être socialiste, et être socialiste, c'est être social-démocrate". Pour finir, Manuel Valls, dans son discours de La Rochelle : les socialistes doivent parler aux Français, pas à eux-mêmes. Tout est dit.

Le monde de Laurence



Je ne sais plus depuis combien de temps je connais Laurence. Depuis longtemps en tout cas, peut-être depuis toujours. Après Harly (voir billet d'hier), j'ai tenu à être présent au vernissage de ses pastels et aquarelles, dans la galerie du 115, rue d'Isle.

Laurence Clemer a dépassé son handicap et la dépression grâce à l'art, la peinture, encouragée notamment par Jean-Claude Langlet (en vignette 1, au moment des allocutions, en présence aussi du photographe Claude Renouvin et de l'adjointe à la Culture, Marie-Laurence Maître).

J'ai noté cette phrase de Laurence, qui résume toute sa démarche : "le dessin, ça m'évite de craquer, de pleurer, de tomber dans le noir". Le monde de Laurence est composé d'animaux (vignette 2), d'anciennes deudeuches (vignette 4) et de paysages saint-quentinois (vignette 3). Vous avez jusqu'au 4 septembre pour faire connaissance avec ce monde naïf, enfantin et joyeux.

samedi 30 août 2014

Tambour, carnaval et danse



- T'es pas à La Rochelle ? - Non, j'suis à Harly. C'était la réplique du jour, belle comme une strophe de "Vesoul" chantée par Brel. J'étais au centre Léo-Lagrange, pour la journée de lutte contre la discrimination des personnes handicapées. Est-ce que j'y ai perdu au change ? Jean-Jacques Boyer, sous-préfet, est passé dès l'ouverture, à 9h00 ce matin : juste reconnaissance de l'Etat pour tous ces bénévoles qui ont mis en place une manifestation une fois de plus très réussie.

Le carnaval, après un passage en ville, a rejoint le centre (vignette 1 : à droite, au tambour, la directrice des P'tits Loups, Christine Baudouin, organisatrice de la journée, en partenariat avec une trentaine de structures). De nombreuses animations se sont succédées ( un exemple, vignette 2). J'ai fait le tour des stands pour donner la parole aux responsables associatifs sur leurs activités (vignette 3, la Maison du Sophora, établissement pour traumatisés crâniens, à Gauchy). Un bal improvisé, sur l'air des "Lacs du Connemara", de Sardou, a endiablé le milieu d'après-midi (vignette 4). On rit, on chante, on mange, on danse, on cause : la discrimination ne passera pas !

vendredi 29 août 2014

Les pendules à l'heure du loup



Déjà un "couac" au sein du gouvernement, après les propos d'Emmanuel Macron sur les 35 heures ? Il faut arrêter avec cette onomatopée ridicule dont l'usage est aujourd'hui immodéré et inapproprié : il n'y a pas plus de couac que de crac boum hue ! (je suis très Dutronc, en ce moment). Il n'y a pas non plus, terme également très en vogue, de "polémique" autour d'une position "libérale" du nouveau ministre de l'Economie. Revenons-en à des remarques factuelles :

1- Macron s'est exprimé dans Le Point avant d'être ministre et de savoir qu'il allait le devenir. Ce n'est donc pas une position gouvernementale.

2- Macron était conseiller du président de la République. Quel est le travail d'un conseiller ? De conseiller ! De lancer des idées, pas de décider. Et toute idée argumentée et bienveillante mérite d'être examinée.

3- Macron n'a pas proposé la suppression des 35 heures, mais des dérogations dans des cas forcément particuliers, quand la situation de l'entreprise s'y prête, avec l'accord des syndicats et des salariés.

4- Cette possibilité existe déjà, pour les entreprises en difficulté. Emmanuel Macron n'a fait que suggérer son élargissement.

Au final, il reste quoi de cette affaire ? Un "couac", il n'y a pas ; une "polémique", non plus. Il ne reste rien, du vent. Si vous voulez une position libérale sur les 35 heures, écoutez Xavier Bertrand, qui veut supprimer la notion même de durée légale du temps de travail.

Et le Premier ministre qui est gratifié d'une standing ovation devant un parterre de patrons, à l'université d'été du MEDEF ? N'est-ce pas la preuve du libéralisme de ce gouvernement ? Idiots bien sûr ceux qui le pensent : Manuel Valls a déclaré "j'aime l'entreprise", les entrepreneurs n'allaient quand même pas lui faire la gueule ! Mais est-ce bien digne d'un socialiste que de prononcer une telle phrase ? Peut-être aurait-il dû dire "je déteste l'entreprise" ? Est-ce que nous aurions été plus avancés ? Est-ce que les Français s'en seraient mieux portés ? Arrêtons avec ça ! Le Premier ministre a émis une évidence, une banalité. Quand on lutte pour l'emploi, on ne peut qu'aimer et soutenir ce qui crée de l'emploi, les entreprises.

Sur les 35 heures, sur l'entreprise, sur le soutien au gouvernement, il est temps que le parti socialiste remette les pendules à l'heure, surtout pour ceux qui en sont encore à la montre à gousset. De ce point de vue, l'appel des 200 députés à soutenir le gouvernement est une excellente initiative, qui met les choses au clair. Il serait bon qu'elle soit étendue à l'ensemble des élus, des cadres et des adhérents du parti, pour faire sortir le loup du bois. Car "quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup", comme disait la grand-mère de Martine Aubry, et la mienne aussi, je crois bien.

jeudi 28 août 2014

Banquier, socialiste et philosophe



La nouveauté du gouvernement, c'est lui, dont tout le monde parle aujourd'hui. A ma grande honte, je ne connaissais pas son nom il y a deux jours. A star is born, c'est sûr. Jacques Attali le voit même en futur président de la République ! C'est Emmanuel Macron, ministre de l'économie et inspirateur, depuis le début du quinquennat, de la politique Hollande. Moi aussi, je suis emballé par le personnage, qui pourrait bien devenir le mentor, l'intello de la social-démocratie (ou du social-libéralisme, appelez ça comme vous voulez, je m'en moque).

C'est un charmant petit monstre, comme Mauriac le disait de Françoise Sagan (rien à voir, mais l'expression me plaît) : banquier, socialiste et philosophe, ne cherchez pas l'erreur, il n'y en a pas. Sauf pour Marie-Noëlle Lienemann, qui va tourner en bourrique avec cette nomination. Il y a quelques mois, l'égérie de l'aile gauche socialiste disait de Macron et de ses semblables : "Ils font tous leur passage par la banque Rothschild. Ces gens-là n'aiment pas la tradition française, ils n'aiment pas l'Etat". Macron, mauvais Français, faux socialiste, grande finance internationale, famille Rothschild ? C'est une sale petite musique, que celle-là.

Emmanuel Macron est un trentenaire, comme la nouvelle ministre de l'Education nationale, comme la nouvelle ministre de la Culture. C'est une génération qui ringardise Arnaud Montebourg et les fameux quinqua ou quadra. Question style, l'ancien maître de Bercy est has been : lyrisme ampoulé, gesticulations d'avocaillon, marinière ridicule, playboy des supermarchés chanté par Jacques Dutronc, antimondialisme décalées dans un gouvernement réformiste. Il va falloir nous habituer, avec Macron, à un nouveau style.

A la différence de Pierre Moscovici ou d'autres sociaux-démocrates, Emmanuel Macron n'est pas un sévère technocrate. Il y a une part romanesque en lui : tomber amoureux de sa prof de lettres, de 20 ans son aînée, et l'épouser, ce n'est pas banal. Et puis, Macron est de chez nous, un Picard d'Amiens, qui est entré par alliance dans l'emblématique famille Trogneux. Il a passé sa scolarité à La Providence, chez les Jésuites, là où nos bons bourgeois de Saint-Quentin envoient leurs gamins. Les Jèzes, ça forge un homme.

Mais j'en viens à ma partie, la philo. Banquier et philosophe, il y a quelque chose qui cloche ? Mais non, préjugé ! J'en appelle à mon maître, mon philosophe de chevet, Frédéric Nietzsche : "Un banquier qui a fait fortune a une partie du caractère requis pour faire des découvertes en philosophie, c'est-à-dire pour voir clair dans ce qui est". C'est dans son fameux ouvrage "Par-delà le bien et le mal" (partie 39). Mais cette formule est reprise à Stendhal. "Voir clair dans ce qui est" : quelle belle définition de la philosophie et de l'action politique ! Finance ou philosophie, dans les deux cas, c'est de la spéculation. Le réel, c'est le pouvoir et le fric : le reste, c'est du discours, de l'illusion, de la littérature.

Le parcours philosophique d'Emmanuel Macron mérite qu'on s'y arrête, pour en deviner le sens. Il a fait sa maîtrise sur Machiavel : on est en plein coeur du pouvoir, du politique et du réalisme ! Mais en même temps, le philosophe italien est un grand républicain, ce qui est assez rare au XVe siècle.

Ensuite, Macron a consacré sa thèse de DEA (Diplôme d'études approfondies)au "fait politique et la représentation de l'histoire chez Hegel". Politique et histoire vont ensemble, et ce sont les préoccupations intellectuelles de notre jeune ministre de l'économie. Il s'est choisi comme directeur de travail Etienne Balibar, que j'ai eu comme prof, en épistémologie, à la Sorbonne, et qui a été, dans les années 60, le jeune assistant à Ulm du philosophe marxiste pur et dur Louis Althusser. Macron, dans sa formation philosophique et ses rencontres intellectuelles, évolue à gauche.

Il deviendra lui-même assistant de Paul Ricoeur, une référence dans le métier, un penseur contemporain, chrétien, protestant (un christianisme qui, on le sait, à la différence du catholicisme, ne stigmatise pas l'argent et le profit). Il collaborera à son ouvrage "La Mémoire, l'oubli et l'histoire", où l'on retrouve donc le souci historique d'Emmanuel Macron.

Décidément, Macron, ce camarade qui m'était inconnu jusqu'à présent, a tout pour me plaîre. Jusqu'à son prénom, qui est le plus beau du monde ... Delors et Rocard sont à la retraite, DSK et Cahuzac ont été disqualifiés : allons-y donc pour Emmanuel Macron, nouvelle référence de la pensée social-démocrate ! Et puis, avec un philosophe, un sage, nous ne devrions pas avoir de mauvaises surprises, pulsion effrénée ou compte secret : il est normalement au-delà du sexe et de l'argent, comme Nietzsche se voulait "par-delà le bien et le mal".

Espaces verts



Je continue avec vous la visite des parcs, jardins et squares de Saint-Quentin entreprise cet été, que je livre à votre sagacité. Ces quatre-là, pas très connus ou pas énormément fréquentés, méritent plutôt le terme d'espaces verts, mais il est peu gratifiant, alors que les endroits où je vous conduis aujourd'hui ont leur charme et leur intérêt.

Chacun d'entre eux d'ailleurs a sa particularité. En vignette 1, c'est sûrement l'espace le plus vide de tous les jardins de la ville. En vignette 2, c'est le square le plus petit, avec quand même son banc, seul et unique, et un modeste jeu d'enfants. En vignette 3, ça ne se voit pas mais ça s'entend : c'est le jardin le plus bruyant, près d'une rue très fréquentée, tout à côté de feux tricolores. En vignette 4, c'est l'espace vert le plus ignoré, difficilement identifiable, avec tout de même ses bancs traditionnels (deux exactement), sa pelouse et ses arbres.

Il faut être piéton régulier, promeneur curieux ou Saint-Quentinois de longue date pour savoir quel est l'emplacement de ces espaces verts, qu'il vous prendra peut-être envie, comme moi, d'aller fréquenter, pour se reposer, lire ou méditer, et leur rendre ainsi justice. Et cette fois-ci, l'internet ne vous sera pas d'une grande aide pour répondre. Comme quoi il y a quand même une réalité qui échappe à la machine et à ses fichiers, et c'est heureux.

mercredi 27 août 2014

Paris insolite



Les images insolites dans la capitale ne manquent pas. Cette belle locomotive d'autrefois n'est pas un jouet d'enfant, mais une vraie, grandeur nature, et pas dans une gare parisienne, mais un lieu public, visible de tous (vignette 1). De même, ce dragon qui donne l'impression de plonger non pas dans l'océan mais le bitume (vignette 2), puis qui ondoie à travers le mur, sans qu'on voit jamais sa tête (vignette 3). Enfin, cette jeune asiatique au chapeau caractéristique pêche dans la Seine (vignette 4). Saurez-vous retrouver les endroits précis de ces scènes insolites ?

Trois ans pour gagner



La crise politique que nous avons traversée pendant 48 heures a pris fin avec la nomination, hier, du nouveau gouvernement. Pour les socialistes, ce n'est pas forcément le malheur qu'on croit, même s'il aurait mieux valu s'en passer. D'un mal peut surgir un bien, et je crois que c'est le cas, pour trois raisons :

1- L'autorité : c'est l'essence même du politique. Le président et son Premier ministre ont été rapides, nets et sans bavure : les protestataires virés, tous les ministres démissionnés, les entrants, anciens et nouveaux, s'engageant sans ambiguïté à être fidèles.

2- La ligne : elle est confortée, le gouvernement est désormais à 100% social-démocrate, il n'y a plus de débat possible ou d'autre politique imaginable. Les réformes en cours seront poursuivies jusqu'à leur terme, assumées et défendues devant les Français.

3- L'équipe : pas de surprise, et c'est tant mieux. Des surprises, il y en a eu assez ces dernières heures ! Le gouvernement est cohérent, compétent, technique. Fini, les savants dosages entre les courants, les alliés, la société civile : priorité à l'expérience.

Avec cette nouvelle donne, je crois aux chances de François Hollande. Les socialistes, ce soir, ont toutes les raisons d'espérer et d'être satisfaits. D'abord, parce que le PS est au pouvoir, et que c'est l'essentiel en politique. Arnaud Montebourg et Benoît Hamon n'ont plus que leurs yeux pour pleurer leur erreur : en dehors de l'appareil d'Etat, ils ne sont plus grand chose, des électrons libres, qui ne seront pas suivis. Ensuite, parce que François Hollande dispose de la durée, trois ans, ce qui n'est pas rien : beaucoup de choses, dans ce laps de temps, peuvent se passer, dont la plus importante à nos yeux, la réussite de la politique économique. Enfin, le président dispose d'une majorité à l'Assemblée nationale, avec ou sans les frondeurs, et c'est l'essentiel.

Reste maintenant à mettre le parti en ordre de marche. Jean-Christophe Cambadélis a commencé à s'y employer. Le remaniement gouvernemental doit avoir en quelque sorte son équivalent à tous les niveaux de l'appareil, en vue du prochain congrès, qui lui aussi devra être celui de la clarification. Chaque fédération, chaque section doivent se donner les hommes et les femmes qui n'ont qu'une chose à l'esprit : vouloir la réussite du gouvernement, pratiquer la pédagogie des réformes, multiplier les adhésions, s'engager dans le débat public. Il n'y aura pas de nouvelle chance, le sort en est jeté : nous avons trois ans pour gagner.

lundi 25 août 2014

Des ministres irresponsables



Arnaud Montebourg et Benoît Hamon sont des ministres irresponsables. Alors que la France traverse de grandes difficultés, alors que le président de la République chute dans les sondages, alors qu'une partie de la gauche conteste le gouvernement, ils ne trouvent pas mieux que d'adresser des critiques publiques à un exécutif dont il font partie. C'est ce qu'on appelle, précisément, être irresponsable.

Montebourg nous explique qu'il a contribué à lancer un débat au sein du gouvernement. Mais une équipe gouvernementale n'est pas un club de pensée, un cercle de réflexion, un lieu de débat. Un exécutif, comme son nom l'indique, est chargé d'exécuter, d'agir, d'appliquer une politique, pas d'en débattre, d'y réfléchir, encore moins de la contester. Il y a, dans le personnage qu'a joué hier Montebourg à Frangy, de la légèreté, de la désinvolture, de l'irresponsabilité. A voir ce triste spectacle, quand on est socialiste, c'est insupportable.

Hamon ne vaut pas mieux. Il nous assure de sa loyauté, faux cul comme il n'est pas permis. Il se dit proche des frondeurs, ce qui est un comble quand on est ministre. Il prétend peser en interne sur la ligne du gouvernement : comme si c'était de la responsabilité d'un ministre ! Pour qui se prend-t-il ? Pour ce qu'il a été toute sa vie : un chefaillon de sous-courant qui négocie des bouts de ficelles dans les nuits fatiguées de congrès. La France, la gauche, le parti socialiste méritent mieux.

Etre responsable, c'est quoi ? Chacun d'entre nous le sait bien, dans sa vie privée comme professionnelle : c'est prendre sur soi, c'est jouer collectif, c'est respecter la hiérarchie et se faire respecter. Montebourg et Hamon ne prennent rien sur eux, se désolidarisent de ce qui ne leur convient pas, jouent perso, ne respectent ni le président de la République, ni le Premier ministre, ni les décisions de leur parti. Ils ont le sens du clan, de leur clan, pas du collectif. Ils n'appellent pas, dans l'exercice de leurs fonctions ministérielles, le respect.

Nous sommes en République, le parti socialiste est une organisation démocratique : chacun est donc libre de penser ce qu'il veut et de s'exprimer comme il l'entend. Ces principes nous sont à tous précieux. Mais la liberté n'exclue pas la responsabilité. Personne n'a obligé Montebourg et Hamon à devenir ministres et personne ne les force à le rester. Je peux comprendre qu'on soit en désaccord avec la ligne du gouvernement, y compris quand on est socialiste : mais alors, on ne prend pas de responsabilité, on n'accepte aucune charge, on ne devient pas élu, on reste militant de base.

A Saint-Quentin, en désaccord avec les orientations et les choix de mes camarades, c'est ce que j'ai choisi de faire. C'est évidemment pénible, tout militant politique a envie d'occuper un pouvoir, d'exercer des responsabilités. Mais quand on n'est plus en phase avec une équipe, on n'y reste pas, on reprend sa parole, qu'on peut alors exercer librement. Ce principe vaut à tous les niveaux politiques, de la simple section jusqu'au gouvernement.

Le Premier ministre, en annonçant ce matin la démission de son gouvernement, a parfaitement pris la mesure de l'irresponsabilité de ses deux ministres et de la crise dans laquelle ils entraînaient le gouvernement. Fermer les yeux et se boucher les oreilles, faire le dos rond, laisser passer, c'était la solution de facilité, et un encouragement donné à toutes les forces antigouvernementales à l'intérieur du parti, qui sapent son autorité et celle du gouvernement, qui n'attendent qu'un signal pour s'agiter encore plus et anticiper la succession de François Hollande. Pour l'opposition de droite, ç'aurait été pain béni. Non, un ministre est par définition quelqu'un de responsable : quand il cesse de l'être, par calcul ou par inconscience, il doit partir.

dimanche 24 août 2014

Toujours d'ATTAC



De quoi a-t-il été question, en politique, cette semaine ? Lundi, Morano met les voiles sur la plage ; mardi, Désir à sa suite enfile son slip de bain ; mercredi, Juppé se rêve en président de la République après un coup de bordeaux ; jeudi, Duflot met le feu à la baraque qu'elle a habitée pendant deux ans ; vendredi, Mélenchon nous fait son énième caca nerveux ; samedi, Montebourg tire dans le dos du gouvernement ; dimanche, Hamon joue au faux cul Monsieur Loyal. Voilà, en résumé, la semaine politique.

Pendant ce temps-là, dans l'ignorance médiatique la plus totale, un mouvement qui, il y a 15 ans, a eu droit à une gloire internationale, que toute la gauche a vénéré et courtisé, se réunissait à Paris : l'université européenne des mouvements sociaux, organisée par ATTAC. Ca vous dit quelque chose, ATTAC, la taxe Tobin ? A Saint-Quentin, l'association a eu une petite antenne, animée par Yvonne Bou et Michel Grévin, des noms qui vous disent peut-être aussi quelque chose. Tout ça a duré quelques mois, et puis pschitt, plus rien. Les caméras se sont éloignées, les lumières se sont éteintes, les militants ont fondu comme neige au soleil. Quand une idée est à la mode, tout le monde rentre dans le moule ; après, c'est fini. Décidément, l'être humain est un chien d'infidèle.

Heureusement, il y a les convaincus, les constants, ceux qui ne plient pas, n'oublient rien. Ils étaient là, hier après-midi, dans les locaux de l'université Paris VII, non loin de la grande bibliothèque François-Mitterrand, dans une ambiance de débat et de fête. Je ne partage pas toutes leurs idées, loin de là, mais je suis touché par leur fidélité à eux-mêmes, à leurs combats, à leurs convictions. Ce ne sont pas des hommes et des femmes qui vont se battre pour être présents à tout prix sur une liste, si possible aux meilleures places, ou qui vont faire des pieds et des mains pour obtenir une quelconque investiture à une élection. C'est pourquoi je les estime, et même les admire. Quoi de plus beau dans la vie que la constance, la fermeté dans ce qu'on croit, l'engagement gratuit ? Et si la vraie politique était de leur côté ?

Et puis, une gauche en mal de grandes idées mais agitée par de petites ambitions devrait se ressourcer, se revivifier en allant regarder chez ceux qui débattent, proposent, même si tout n'est pas forcément bon à prendre. Je n'aime pas l'expression idiote de "société civile" ; mais le "mouvement social", oui, a des choses à nous apprendre, en tout cas infiniment plus que bien des sections vides, glauques et opportunistes des partis politiques.

Il y avait plaisir à voir, hier près des quais de Seine, ce public où se mêlaient des cheveux blancs de Mai 68 et de jeunes frimousses qui étaient encore enfants au moment où ATTAC a été créé. J'aime aussi ce mélange des générations et des traditions. Je crois qu'on appelle ça la vie, avec ses excès, ses débordements (les socialistes n'y sont pas toujours à la fête, mais à tout prendre, je préfère un anti-socialiste de l'extérieur, honnête et sincère, qu'un anti-socialiste de l'intérieur, fourbe et calculateur).


Vignette 1 : Edwy Plenel, dans son discours de clôture de l'université.

Vignette 2 : un public nombreux et attentif, dans le cadre magnifiquement restauré des Grands Moulins de Paris.

Vignette 3 : des sit in, des discussions sur le vif, des représentations théâtrales.

Vignette 4 : les militants d'ATTAC sont facétieux ; ils ont rebaptisé certaines rues du quartier.

samedi 23 août 2014

Pour la bonne cause



Je vous invite à me retrouver, samedi prochain, au Centre culturel Léo Lagrange, à HARLY, où j'animerai à 15h00 un débat sur les discriminations qui frappent les personnes handicapées, dans le cadre de la journée de lutte et de revendication sur ce thème, intitulée "Une seule et même partition". Une trentaine d'associations locales contribueront à cette initiative, dont SQBB et les Stimulants. Tout au long, vous pourrez participer à de nombreuses activités, jeux, chansons, carnaval des enfants, etc. Le déjeuner sur place est possible. Venez faire un tour, ne serait-ce qu'un court instant : c'est pour la bonne cause !

vendredi 22 août 2014

L'échec d'une stratégie



Le départ de Jean-Luc Mélenchon de la direction du Front de gauche n'est pas à mettre sur le compte d'un tourment psychologique (stress, déception, lassitude), mais il signe l'échec d'une stratégie : celle de faire exister à la gauche du parti socialiste une alternative politique, une gauche de la gauche ou une gauche radicale, selon les termes habituels. La leçon à en tirer, c'est qu'il n'y a pas pour Mélenchon de vie possible à l'extérieur du PS, encore moins contre le PS, sauf à rejoindre l'extrême gauche pure et dure. 5 raisons peuvent être invoquées :

1- Le PCF, principal parti du Front de gauche, est lié électoralement au PS, aux réformistes, à ceux qu'on appelle aujourd'hui les sociaux-démocrates. On l'a vu aux dernières élections municipales, au grand dam de Jean-Luc Mélenchon, mais c'est de l'histoire ancienne : si le PCF était un parti révolutionnaire, voulant rompre avec le système, on l'aurait su et vu en 1945 et en 1968. A chacun de ces rendez-vous avec l'Histoire, le PCF n'a pas couru l'aventure révolutionnaire. Ce n'est pas avec Mélenchon qu'il s'y engagera en renonçant à son parlementarisme et à ses alliances électorales.

2- Les écologistes, malgré un discours parfois radical et un antisocialisme de façade (dernier épisode, le livre de Cécile Duflot, voir le billet d'hier), sont portés vers le pouvoir et vers le PS, même si ce sont des partenaires inconstants, pusillanimes, velléitaires. Les places à occuper, les responsabilités à prendre les ramènent au principe de réalité, qui veut en politique qu'en dehors du pouvoir, on ne fait rien et on n'est rien. Jean-Luc Mélenchon a toujours eu du mal à rallier les écologistes à sa cause.

3- L'aile gauche du PS, critique et turbulente, pouvait laisser espérer une implosion du parti, une fraction venant renforcer la gauche de la gauche. Mais là encore, c'est une illusion : l'aile gauche aboie mais elle ne mord pas, et le moment venu, elle retourne à la niche. C'est l'histoire du parti depuis toujours : jamais l'aile gauche n'a été en capacité d'influer sur sa ligne politique, sauf à la marge, dans les ajustements qui ne changent pas grand chose. L'aile gauche ne remporte que des victoires de congrès, lorsqu'il s'agit de se partager les postes ou d'obtenir les investitures. Pour le reste, c'est rien, seulement le gentil alibi au débat démocratique.

4- L'extrême gauche reste fondamentalement indépendante et hostile à la gauche parlementaire. A ses yeux, Jean-Luc Mélenchon, avec son long passé de socialiste, n'est qu'un électoraliste, un opportuniste, un réformiste comme les autres, pas très différent des "solfériniens" que Méluche pourtant dénonce. L'extrême gauche ne se lie à la gauche que pour des raisons tactiques, très ponctuelles et provisoires, à des fins d'instrumentalisation (on l'a vu, à un petit niveau local, à Saint-Quentin, lors de la précédent mandature municipale).

5- L'extrême droite et ses succès électoraux marquent l'échec le plus grave de la stratégie du Front de gauche, qui n'a pas réussi à arracher les milieux populaires, son électorat naturel, de l'influence du Front national. En matière identitaire, c'est une catastrophe : comment peut-on se réclamer du peuple en souffrance quand ce peuple vote Le Pen ?

Ce matin, rue des Glatiniers, je suis tombé sur cette belle affiche du PCF-Front de gauche, Jaurès tout en rouge, qui traduit bien les incertitudes idéologiques de sa stratégie. D'abord, Jaurès aurait été surpris de voir son nom associé au communisme, alors qu'il était fondamentalement réformiste, républicain, et pas révolutionnaire.

Ensuite, il y a le slogan du haut : "Quand on est de gauche ... on est du côté des salariés", qui sonne comme une évidence, qui ressemble à une tautologie : oui, et alors ? Le parti socialiste, le gouvernement sont du côté des salariés. Que le Front de gauche en reste au sous-entendu, sans effort de démonstration ni de preuve, est éloquent : on est implicite, allusif quand on est incapable d'argumenter, d'expliciter.

Enfin, cerise sur le gâteau, le slogan en bas de l'affiche : "Jaurès, réveille-toi, ils sont devenus fous". C'est qui, ce "ils" ? Décidément, le Front de gauche n'arrive pas à s'extraire de l'inconscient. Moi, ce qui m'intéresse, c'est la conscience politique et historique : cette formule est reprise du soulèvement de Prague, contre les chars soviétiques, "Lénine, réveille-t-on, ils sont devenus fous". Prague 1968, c'est l'impossibilité d'un "socialisme à visage humain" comme on disait à l'époque, c'est l'échec du communisme à vouloir émanciper les peuples. Cette affiche, en vignette, relève donc d'un magnifique lapsus, s'accusant elle-même. Voilà ce qui arrive lorsqu'on joue avec l'inconscient, qu'on se refuse à s'exprimer directement et explicitement.

André Malraux disait, dans les années 60, à propos des gaullistes dont il était : entre les communistes et nous, il n'y a rien. Aujourd'hui, un socialiste peut dire, à juste titre : entre l'extrême gauche et nous, il n'y a rien. En tout cas, il n'y a plus Jean-Luc Mélenchon. Entre la social-démocratie et la révolution, il y a des rêves, des illusions, des postures, mais pas d'alternative.

jeudi 21 août 2014

La soupe de Duflot



Je n'aime pas Cécile Duflot. Je n'ai jamais aimé Cécile Duflot. Je n'aimerai jamais Cécile Duflot. Mon mépris a le mérite de la constance. Quand je dis : "je n'aime pas Cécile Duflot", ce sentiment n'a rien de personnel : je ne connais pas cette dame en privé ; peut-être est-elle plus sympathique, plus généreuse, plus intelligente que moi ... Mon jugement n'est pas moral, ni psychologique : c'est la femme publique que je déteste, c'est son comportement politique que je réprouve absolument. Tous ceux qui agissent comme elle, et ils ne sont pas rares, y compris dans mon parti, je les condamne avec la même virulence.

Bien sûr, ce n'est pas l'écologiste qui suscite mon haut-le-coeur. J'adore les coups de gueule rafraîchissants de Daniel Cohn-Bendit, j'apprécie la personne et l'action de José Bové, j'ai de l'estime pour le travail intellectuel d'Alain Lipietz, j'éprouve de la considération pour le parcours de Noël Mamère, et je pourrai en citer d'autres. Surtout, le parti écologiste représente une contribution précieuse et essentielle au développement de la gauche, et il est l'allié naturel du PS. Non, ce qui fait que je n'aime pas Cécile Duflot ne réside pas dans ses idées, sa sensibilité, mais véritablement dans son comportement politique.

Le livre qu'elle va bientôt publier, et dont nous connaissons les bonnes pages (c'est-à-dire les plus infectes), illustre parfaitement ce détestable comportement, qu'on peut facilement décrire en quelques mots : agir non pas selon ses convictions mais selon les circonstances, se positionner de la meilleure façon possible pour obtenir une place ou un pouvoir quelque part. Vous me direz sans doute que c'est classique, que la politique a toujours connu, à tous les niveaux, ce comportement-là : oui, je sais, et c'est précisément pourquoi je le déteste ! L'habitude et la fréquence ne légitiment pas un comportement.

Qu'on critique violemment Hollande, Valls et le gouvernement, ça ne me choque nullement : la politique est faite de violence, aujourd'hui verbale, autrefois physique. Pour tout vous dire, ce côté-là ne me déplaît pas du tout, il m'arrive moi-même d'être quelquefois violent avec mes adversaires, et je crains que ça ne s'arrange pas avec l'âge. Non, ce qui me choque, ce qui me révulse, ce que je haïs, c'est cette façon de retourner sa veste et de cracher dans la soupe. Duflot, en entrant il y a deux ans au gouvernement, savait parfaitement qui étaient Hollande, Valls, les socialistes et leur ligne politique, qui n'a pas varié, qui n'a pas changé en deux ans. Alors, que vient-elle nous raconter aujourd'hui ? Elle nous fait croire qu'elle découvre la Lune ! J'ai plutôt l'impression que c'est elle qui était sur Mars ... Ses leçons de morale sur la sincérité et la fidélité me sortent par les yeux, parce qu'elles sont une montagne d'hypocrisie.

Il y a deux ans, François Hollande était populaire, Cécile Duflot le soutenait. Aujourd'hui, il est impopulaire, elle le lâche. Lâcher, lâcheté, voilà ce qui me débecte. Au contraire, parce que Hollande est impopulaire, parce qu'il est en difficulté, il faut plus que jamais le soutenir, le défendre, quand on a choisi depuis le début d'être à ses côtés. Duflot est une maligne, elle sent le vent : elle tape aujourd'hui sur le président comme hier elle lui servait la soupe. Avec elle, la politique, ce sera toujours une histoire de soupe. Je n'aime pas, je n'ai jamais aimé, je n'aimerai jamais Cécile Duflot.

mercredi 20 août 2014

La mer avec les mains



C'est aujourd'hui la rentrée "très difficile" du gouvernement. Et ce n'est pas l'annonce de la candidature d'Alain Juppé qui va changer grand chose. De fait, le président, son équipe et le parti vont devoir ramer, dans les prochaines semaines, mois et années. Mais c'est ça aussi la politique, un travail de galérien plus qu'une promenade d'agrément. Lors de la dure défaite du parti socialiste aux législatives de 1993 (une cinquantaine de députés seulement !), une formule de Julien Dray m'avait marqué : "On ne peut pas vider la mer avec ses mains". Il voulait signifier que toute la bonne volonté du monde n'empêchait pas une défaite inéluctable.

Nous en sommes là : il faut tenter de vider la mer avec nos mains, sans se poser trop de questions, en restant fidèles à nous-mêmes, en condamnant les comportements versatiles et intéressés, en se disant qu'en politique comme dans la vie, le pire n'est jamais certain. Mais en faisant quoi ? En défendant pied à pied, en bon militant, tous les acquis du gouvernement, aussi minimes soient-ils, sans se laisser impressionner par monsieur scrogneugneu ou la gauche ronchon. En cette rentrée, il y a trois points à mettre en valeur :

1- L'allocation de rentrée scolaire, dont bénéficient trois millions de familles modestes, a été revalorisée de 0,7%. C'est rien ? Si, c'est quelque chose ! Un peu de sous en plus, ce n'est jamais "rien", surtout pour ceux qui en ont besoin. Le gouvernement n'aurait rien fait, on le lui aurait reproché. Petit geste, coup de pouce : c'est toujours bon à prendre, à souligner, à faire connaître. Les gens veulent du concret ? En voilà ! Mais il y a autre chose : le gouvernement écoute. Les associations familiales demandaient à ce que cette allocation soit versée pour les lycéens sans attendre la rentrée et l'obligatoire certificat de scolarité : c'est fait, une simple attestation sur l'honneur permettra d'éviter le délai de paiement.

2- Les bourses aux étudiants, sur critères sociaux, sont revalorisées elles aussi de 0,7%, à la demande de l'UNEF. Là aussi, on pourrait geindre que ce n'est pas assez. Je vous rassure : aucune augmentation, en positif, de quoi que ce soit ne sera jamais suffisante ! Alors, arrêtons avec cet argument à la noix. La France fait avec ce qu'elle a, pas avec ce qu'elle n'a pas.

3- Les baisses d'impôts, et c'est la mesure la plus importante, touchent cette année 4,2 millions de ménages. C'est évidemment un effort énorme en faveur du pouvoir d'achat. Et qu'on ne me ressorte pas les pleurnicheries des soi-disant "classes moyennes" : le haut de ce papier de crabes est composé de tourteaux aisés qui ne voient même pas la crise passer. Et puis, un socialiste se préoccupe d'abord des classes modestes, populaires et ne rabâche pas l'expression giscardienne et insensée de "classes moyennes".

Voilà donc la feuille de route d'un militant socialiste en ce début de rentrée. Peu importe qu'elle donne l'impression de ramasser la mer à la main : l'essentiel est d'avoir du grain à moudre, pas comme ces socialistes ronchons qui rongent de dépit et d'impuissance leur os dans un coin.

mardi 19 août 2014

Harlem délire



J'écrivais hier que Nadine Morano était l'adversaire rêvé pour un militant de gauche, tant elle est la caricature de la femme de droite. C'était après sa saillie xénophobe d'hier sur son blog. J'avais tort : il y a au moins un socialiste en France qui "comprend" Morano, et non des moindres puisqu'il s'agit de l'ancien patron du parti, Harlem Désir. Celui-là n'en rate pas une. Pour le fondateur et leader historique de SOS Racisme, il faut quand même le faire !

J'ai connu Harlem dans son époque flamboyante, nous sommes de la même génération : je ne le reconnais plus, depuis quelques années déjà. Qu'est-ce qui lui est arrivé ? Je l'ai expliqué, sans savoir ce qui allait se produire aujourd'hui, dans mon billet de dimanche : la forte personnalité qu'il a été dans les années 80 a été usinée, limée, lissée, formatée par l'appareil politique, il est devenu un apparatchik incolore, inodore, sans saveur, avec des prudences de conseiller général et une soumission de secrétaire de section. Aujourd'hui, il contredit, à ma stupéfaction, trente ans de combat antiraciste.

Valérie Pécresse, UMP pourtant, a dit ce matin à la radio ce qu'il fallait dire, ce que Désir a été incapable de dire : chacun est libre de s'habiller comme il veut quand il se promène sur une plage. Nadine Morano n'a reçu qu'un seul soutien, les fachos du FN, en toute logique (ces salauds veulent carrément interdire les signes religieux dans tout l'espace public : et pourquoi pas dans l'espace privé, tant qu'ils y sont ? On appelle ça un régime totalitaire).

Il faut redire, à l'occasion, tout le mal qu'a pu faire la loi Chirac de 2004 interdisant les signes religieux à l'école. Jusqu'à cette date, l'initiative était laissée aux enseignants de réagir avec intelligence, bon sens et respect des enfants. Jamais les fondateurs de l'école publique, jamais nos grands ancêtres laïques n'avaient proposé ni même imaginé une telle loi, à mes yeux discriminatoire, même si elle ne l'est pas dans sa lettre. Très vite, tout ce que notre pays compte de racistes, xénophobes, intolérants et haineux se sont engouffrés dans la faille ouverte par la loi, en demandant son élargissement à tout l'espace public, en contradiction avec l'esprit de la République, qui garantit la liberté religieuse, inscrite dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Harlem Désir ne sera plus désormais pour moi qu'un beau et ancien souvenir.

lundi 18 août 2014

Nadine à la plage



Pour un homme de gauche, Nadine Morano est un morceau de choix, l'adversaire rêvé, la caricature de la femme de droite. Guy Bedos a récemment lancé à son encontre un retentissant "Quelle conne !", bien dans le style de l'humoriste. Comme je suis courtois avec les dames, je n'irai pas jusque-là. Mais je m'en vais aujourd'hui critiquer son billet de ce matin, sur sa page Facebook (qui justifie, une fois de plus, mes critiques à l'égard de ce réseau social).

Morano, comme beaucoup de Français, est en vacances. Et quand on est en vacances, on fait quoi ? On va sur la plage. Et quand on est sur le sable, on fait quoi ? On prend des photos, puisqu'il n'y a rien d'autre à faire. Mais Nadine Morano n'a pas pris n'importe quelle photo : une dame avec un foulard sur la tête, qui protège ses cheveux, comme en portent, par tradition, les femmes musulmanes. Bel exemple de violation de la vie privée, que de prendre les gens sans leur consentement, et dans un but politique. Le visage a beau ne pas être apparent, un tel comportement est détestable.

Mais plus détestable encore son usage. Les abonnés de Facebook adorent faire des montages, comme les enfants à l'école primaire se plaisent à faire des découpages et des collages. Nadine Morano a juxtaposé la photo de la dame au voile et celle de Brigitte Bardot en bikini, opposant l'une à l'autre, soutenant que le modèle à suivre en matière de liberté de la femme, c'est la chute de reins de BB, et pas le voile sur la chevelure. Qu'est-ce qui lui permet de dire ça ? En quoi est-on plus libre quand on est presque à poil ? En quoi le foulard sur la tête vous emprisonne-t-il ? Je crois que Morano, fidèle à son personnage, se fait une idée sommaire de la liberté, en l'identifiant au port d'une petite culotte.

Le plus rigolo, c'est qu'il y a 50 ans, le phénomène Bardot était fortement décrié par cette droite à laquelle appartient Nadine Morano : décadence des moeurs, comportement licencieux, mauvais exemple pour la jeunesse, et j'en passe. Qu'est-ce qui a changé depuis un demi-siècle ? Le mythe Bardot n'est plus d'époque et BB s'est ralliée à la droite la plus extrême (fâcheux paradoxe).

Sur Facebook, on écrit assez peu, on invective et on rigole beaucoup. Mais Nadine Morano a quand même voulu se fendre d'un petit texte explicatif, qui lui aussi vaut son pesant de cacahuètes. La dame au voile, bien tranquillement assise sur la plage, représente, selon Morano, une atteinte à notre culture, à la liberté de la femme, à l'égalité avec l'homme. Rien que ça !

Et moi, je lui réponds que la culture française et la tradition républicaine, c'est le droit de se vêtir comme on veut, où l'on veut, pourvu qu'on respecte la loi, ce qui, en l'espèce, est le cas (Morano, d'ailleurs, dans un éclair de lucidité ou un geste de prudence, en convient). Conclusion de Nadine Morano, aussi détestable que les prémisses de sa "réflexion" : que la dame aille "vivre ailleurs". Je crois n'avoir pas besoin d'ajouter plus de commentaires, sauf à risquer de m'énerver, comme Guy Bedos.

dimanche 17 août 2014

Les fortes personnalités



Parmi les nombreux facteurs qui permettent le succès en politique, il y a le fait de bénéficier de fortes personnalités à la tête d'un parti, comme candidats à une élection. A-t-on jamais vu une victoire durable remportée par une faible personnalité ? C'est presque une évidence. Pourtant, la notion de forte personnalité n'est pas facile à définir. Trop souvent, on la confond avec la grande gueule, qui, elle, n'est pas du tout une garantie de réussite, qui parfois même est une cause de défaite. Je dirais que la forte personnalité est un mélange d'esprit libre ayant des convictions marquées, un fond d'originalité et une grande volonté.

Le problème des partis politiques, c'est que bien souvent ils n'admettent pas les fortes personnalités, quoique, paradoxalement, ce sont elles qui les amènent à la victoire. François Mitterrand, forte personnalité s'il en était, n'aurait jamais pu s'imposer au sein de la vieille SFIO, modèle d'appareil complètement rétif aux fortes personnalités. Il n'a pu s'imposer que dans un parti créé par lui et pour lui, le nouveau parti socialiste, en 1971 à Epinay. Un appareil produit des hommes d'appareil, comme la machine à moudre le café : des individus formatés, castrés, obéissants, tous ressemblants, l'exact contraire de la forte personnalité.

François Hollande est-il une forte personnalité ? Non, je ne le pense pas. En tout cas, comparé à DSK, il n'y a pas photo (Strauss, trop forte personnalité, n'est-ce pas ?). Mais Hollande est en cas unique en son genre : il n'est pas une forte personnalité par choix, par tactique. C'est le fameux "candidat normal", qui lui a valu d'être élu président, par contraste avec un Nicolas Sarkozy, plus que forte personnalité, personnalité survolté, extravagante. Se revendiquer de la "normalité" quand on veut devenir chef de l'Etat, c'est renoncer à être une forte personnalité, celle-ci n'étant jamais quelqu'un de "normal", d'habituel, d'attendu. François Hollande, c'est, durant sa campagne présidentielle, la popularité de l'anti-héros, le Dustin Hoffman de la politique française. Le problème aujourd'hui, les sondages le révèlent, encore ce matin celui du Journal du Dimanche, c'est que les Français sont en quête de héros, y compris de héros idiots, odieux et dangereux, de mauvais Don Quichotte, de faux héros : je pense bien sûr à Marine Le Pen, au succès dramatiquement grandissant.

Je ne sais pas si nous sommes entrés dans l'après-Hollande : trois ans avant une présidentielle, il ne faut jurer de rien. Mais on sent bien que le redressement de l'image sera difficile (la forte personnalité, c'est une question d'image, pas de ligne politique, celle de François Hollande étant à mes yeux excellente). En tant que socialiste, je ne peux souhaiter qu'un socialiste succède à un socialiste. Avons-nous, au gouvernement, de fortes personnalités en stock ? Pas tellement, mais un petit stock quand même, et c'est mieux que rien, sachant que les fortes personnalités ne se trouvent pas sous les sabots d'un cheval. J'en vois trois, qui correspondent peu ou prou à ma définition : Manuel Valls, Arnaud Montebourg et Ségolène Royal. L'un imprime à droite, l'autre imprime à gauche et la dernière, comme Michel Jobert en son temps, imprime "ailleurs", hume l'air du temps. Voilà, selon moi, trois successeurs possibles, à condition que la succession soit ouverte, ce qui n'est pas le cas.

Dans l'Aisne aussi, nous avons nos fortes personnalités. A gauche, Jean-Pierre Balligand en est le prototype : plus de 30 ans de vie politique, pas une seule défaite dans les dents ! Pas manchot, le camarade ! Jean-Jacques Thomas, Jacques Krabal sont aussi de fortes personnalités (ce qui explique qu'il leur arrive de s'entendre mal : deux fortes personnalités, c'est une de trop !) : tous les deux ont conservé leur mairie aux dernières municipales, alors que la gauche recevait en pleine poire un tsunami électoral.

A Saint-Quentin, si la droite depuis bientôt 20 ans gagne à presque tous les coups, c'est qu'elle bénéficie des fortes personnalités de Pierre André et Xavier Bertrand, tandis qu'à gauche, ce sont les basses eaux. Un espoir : Michel Garand, dont on ne sait pas encore très bien ce qu'il va donner, quel leader il sera. Dans le doute, tout est possible. Contrairement aux légendes, la forte personnalité ne l'est pas au berceau, dans les langes, en sortant du ventre de sa mère : une personnalité se construit, c'est un travail de forgeron. Après tout, avant 1995, Pierre André n'était pas la forte personnalité qui s'est révélée par la suite. Alors, pourquoi pas, dans l'opposition, en chef de guerre comme je l'avais souhaité, Michel Garand ? A la rentrée, jusqu'en décembre, il y aura, c'est, de mémoire, assez exceptionnel, quatre séances du conseil municipal, quatre occasions pour les quatre élus socialistes de faire leurs preuves, de se distinguer, de nous étonner, de nous enthousiasmer : bref, de faire surgir, dans le feu de l'opposition à Xavier Bertrand, de fortes personnalités.

samedi 16 août 2014

C'est un petit jardin



A Saint-Quentin, il y a les grands parcs, Champs Elysées, parc d'Isle et quelques autres de moindre importante, que j'ai évoqués dans le billet de mercredi dernier. Et puis, il y a les petits jardins, qui sont moins prestigieux, qui ne figurent pas sur les brochures touristiques, dont on ignore parfois complètement l'existence, et qui ont cependant leur charme. Eux aussi ont leurs arbres, leurs pelouses, leurs bancs et leurs fleurs, mais en plus modeste. En vignette, c'est un de mes préférés, où il fait bon lire, se reposer ou discuter entre amis. Il n'est pratiquement pas visible de la rue, il est pourtant ouvert à tous et il mérite le détour. Où se situe-t-il ?

vendredi 15 août 2014

Rangement d'été



Je consacre une partie de l'été à des rangements, parmi mes tonnes de papiers stockés. Je garde tout, du brouillon insignifiant au courrier officiel, en passant bien sûr par les articles de presse. Depuis 1998, ça fait pas mal de cartons ! Inutile et dérisoire ? Non, fort précieux : j'oublie tout, c'est pourquoi je garde tout. Mais de temps en temps, il faut quand même trier, classer, jeter. Se replonger dans le passé est une épreuve, nécessaire mais redoutable.

Pourtant, la mise en perspective dans la durée est riche d'enseignement. Je prends un exemple : la presse, l'an dernier, avait fait remarquer que les socialistes étaient bien peu nombreux à se choisir leur candidat pour les élections municipales (42 votants, exactement). Mais, en 1999, combien étions-nous pour désigner un secrétaire de section ? 22 votants ! A une époque où la section avait à sa tête une députée et une conseillère générale ... On voit donc que la faiblesse militante du PS local est ancienne et même, toutes choses égales par ailleurs, pire il y a 15 ans. C'est le genre d'information qui relativise une situation politique.

Quand nous relisons tous ces documents qui décrivent une quinzaine d'années d'action politique, nous sommes surpris et navrés par une constante : l'urgence, l'immédiateté, l'improvisation président très souvent aux choix de la section, très largement imprévisibles. Des noms, des visages apparaissent, disparaissent, parfois réapparaissent, mais on a beaucoup de mal à discerner un fil conducteur, une continuité, une cohérence interne. On a le sentiment d'à-coups, d'influence prédominante des circonstances, parfois des hasards. Un exemple qui peut sembler anecdotique, mais qui est en même temps révélateur : l'hommage rendu à l'ancien maire socialiste de Saint-Quentin, Tricoteaux, est inconstant, rendu pendant quelques années, puis s'interrompant sans raisons évidentes, et reprenant comme si de rien n'était.

Dans mes rangements, je me suis particulièrement arrêté sur la comparaison entre les deux dernières campagnes municipales, 2014 et 2008, et leur perception dans la presse. C'est très intéressant. Les journaux locaux ont moins abordé l'élection cette année qu'il y a 8 ans. Petit exemple : les fois précédentes, le trombinoscope de tous les candidats d'une liste était présenté ; pas cette année. La campagne des socialistes a donné lieu à beaucoup moins d'articles par rapport à 2008, où la polémique autour de la tête de liste avait suscité l'attention durant plusieurs mois. Mais la nouveauté, appréciable, cette année a été le débat public entre les têtes de listes, absent dans les précédents scrutins municipaux.

Cette remontée dans le temps, si elle est une épreuve politique, est aussi une épreuve personnelle : je suis effrayé, le mot n'est pas trop fort, par toutes les activités que j'ai pu mener pendant ces 15 ans, qui n'ont pas abouti politiquement, c'est-à-dire à l'échelle collective. On pourrait se dire, sceptique : tout ça pour quoi ? Tout ça pour ça, toutes ces choses pour pas grand chose ... Mais, à l'échelle personnelle, j'ai au moins la satisfaction, et même la fierté de n'avoir renoncé à rien, d'avoir tenu bon, d'avoir maintenu une cohérence et une fidélité à soi, à des convictions, à une volonté, qui sont lisibles, repérables, manifestes tout au long de ces années. Même si tout le reste n'avait aucun sens, n'aboutissait à rien collectivement, il resterait cette satisfaction-là.

Et puis, j'ai cette confirmation : rien en politique ne peut se faire de sérieux, de durable, en dehors du pouvoir, de la responsabilité publique. L'opposition est vivable seulement quand elle est provisoire. A la longue, sans espoir de victoire, elle est génératrice de divisions, de conflits personnels et d'inconstance, parfois de choix absurdes ou désespérés. C'est la leçon principale que m'inspire la consultation de ces archives.

jeudi 14 août 2014

0+0 ne font pas 0



Zéro de croissance, des déficits qu'on ne réduit pas, une courbe du chômage qui ne s'inverse pas. Tous les compteurs sont dans le rouge. Michel Sapin nous fait le coup de la "panne", mais ce n'est pas pour rire et on n'y trouve aucun plaisir. En plus, l'été est pourri et il faut aller faire la guerre en Irak. Les Allemands, qui sont pourtant économiquement forts et que la droite française admire tant, ne font pas mieux, mais ça ne console pas plus. Y a-t-il, avec tout ça, de quoi entamer le moral du socialiste que je suis ?

Non, pas du tout. D'abord parce que c'est la vie, c'est ainsi : depuis longtemps, notre pays connaît des difficultés, et il n'en est pas encore sorti. Ce n'est pas une raison pour désespérer. Ensuite, c'est une question de principes : je suis fidèle à ce que je crois, cohérent avec mes engagements, je ne ferai jamais partie des lâcheurs et des lyncheurs.

J'entends dire que le gouvernement ne serait pas assez "compétent". Je me demande parfois l'inverse : trop de compétences et pas assez de politique ? Des compétents, des techniciens, des spécialistes, tous les partis en ont à revendre : ce sont les orientations politiques qui éventuellement se discutent. Alors, discutons-les : le gouvernement est-il assez à gauche, ne devrait-il pas pratiquer une "autre politique" ?

J'ai tordu le cou, dans mon billet de lundi, à ce méchant canard. François Hollande et Manuel Valls mènent une politique qui n'a pas été tentée en France par le passé : une ligne économique social-démocrate, qui consiste en un deal avec le patronat, au profit d'une relance des investissements, de la productivité et de l'emploi. Je crois en cette politique, c'est celle voulue et soutenue par mon parti, décidée par le président et le gouvernement. Il faut du temps, de la persévérance, de l'adversité. Et si ça ne marche pas ? Eh bien les Français voteront en 2017 pour Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy ou Xavier Bertrand : la démocratie, c'est aussi simple que ça.

Il y a un camarade que j'aime beaucoup, c'est mon préféré de l'équipe : Stéphane Le Foll, mâchoires carrées, des mains grosses comme mes deux mains rassemblées, le genre cowboy qui vous envoie un coup de poing dans la gueule quand vous lui marchez sur les pieds : voilà le type de socialiste dont le parti a besoin, à tous les niveaux de son organisation.

Ce matin, sur France-Inter, il a fait du rentre-dedans avec un auditeur menteur comme un arracheur de dents, et bien sûr anti-socialiste de première, mais du style hypocrite de gauche et donneur de leçons. Entre nous soit dit, téléphoner à France-Inter pour causer dans le poste un matin d'août, il faut vraiment n'avoir rien à foutre, un peu comme ceux qui échangent leurs humeurs et leurs vapeurs sur Facebook. Le Foll nous venge, remonte le moral des troupes : ça fait plaisir à voir et à entendre. Oui, tous les indicateurs économiques sont à zéro. Mais en politique, 0+0 ne font pas continuellement 0.

mercredi 13 août 2014

Jardins secrets



Rien ne ressemble plus à un jardin qu'un autre jardin : des arbres, des pelouses, des fleurs et des bancs. Mais vous distinguerez sûrement ces quatre jardins publics de Saint-Quentin. Nous avons tous nos jardins secrets, parait-il.

mardi 12 août 2014

Happy birthday mister president



Le président de la République a aujourd'hui 60 ans. Ca se fête ! Sauf si on est de droite, bien sûr ; ou bien de la gauche ronchon. Pour un anniversaire, il faut offrir des cadeaux, évidemment. Ce n'est pas toujours facile. Il y a quand même les classiques : les fleurs, le gâteau, le livre. J'ai fait mon choix, j'espère que ça lui plaira :

Les fleurs : un bouquet de roses, forcément. C'est le symbole du socialisme français, et puis aussi de l'amour. Il faut aimer la politique, et quand on est socialiste, aimer notre président, son gouvernement et son action (mais je ne force personne).

Le gâteau : j'ai pris un mille-feuilles, un peu bourratif, mais c'est un clin d'oeil à la réforme des collectivités territoriales, le gros morceau à avaler pour la rentrée. Il faudra de la force et de l'appétit. Pour certains camarades, ce n'est pas du gâteau, mais plutôt une couleuvre, sinon un boa. Et tant pis pour la ligne !

Le livre : j'ai pensé à un ouvrage à la hauteur de ce qu'on attend de moi, j'ai donc retenu les "Pensées", de Blaise Pascal. Comme je sais que notre président n'a pas beaucoup de temps, j'ai opté pour un recueil qui se picore plus qu'il ne se lit strictement du début à la fin. Surtout, François Hollande pourra y puiser de sages réflexions sur la vanité humaine, la bassesse des courtisans, l'ingratitude des proches, la fourberie des grands, le divertissement du peuple. Il y trouvera même matière à s'évader de la politique, activité à bien des égards misérable (au sens pascalien), et à se rapprocher de la spiritualité, plus élevée.

Bon anniversaire, bon courage, tous mes voeux de réussite, monsieur le président, mon camarade, cher François.

lundi 11 août 2014

Il n'y a pas d'autre politique



Mes camarades Marie-Noëlle Lienemann, Jérôme Guedj et Emmanuel Maurel ont envoyé samedi une "lettre ouverte" à Manuel Valls pour lui demander "une politique nouvelle". "C'est toute la stratégie économique et sociale du gouvernement qu'il faut aujourd'hui redéfinir", écrivent-ils. Rien que ça ! En faisant quoi ? La "suspension immédiate du pacte de responsabilité et sa remise à plat complète". C'est-à-dire que mes trois camarades proposent carrément de contester l'un des piliers de la politique en cours, sur lequel le Premier ministre et le président de la République se sont complètement engagés et de quoi ils font dépendre la réussite de leur action. Personne n'imagine un seul instant que Manuel Valls et François Hollande vont y renoncer ! A quoi jouent donc mes trois camarades, qui le savent aussi bien que quiconque ?

Ils se sont saisis de l'occasion de l'invalidation par le conseil constitutionnel de l'allègement des cotisations sociales pour faire leur demande. Mais ce n'est pas le première (ni la dernière) fois. En vérité, dès le départ, mes trois camarades étaient en désaccord avec la politique du gouvernement, parce qu'ils ne sont pas, à l'inverse de la majorité du parti, des sociaux-démocrates. Je respecte bien sûr leur point de vue, qui a le droit d'exister, y compris au sein du parti socialiste (même si ce n'est pas évident pour eux d'être hostiles à la social-démocratie dans un parti devenu social-démocrate : mais je les laisse régler leurs propres contradictions). Ils font partie d'une organisation, ils appartiennent à une majorité, ils soutiennent un gouvernement qui se sont donnés une ligne politique et qui ne vont pas en changer tous les quatre matins, au gré des opinions ou des humeurs des uns et des autres.

Depuis que le parti socialiste a été fondé, il y a un peu plus d'un siècle, il a toujours connu une "aile gauche", parfois sincère, parfois opportuniste (dans la minorité, il est plus facile d'obtenir des places que dans la majorité, où la concurrence est plus grande). J'oublie les opportunistes méprisables, je ne retiens que les convaincus respectables : ils se sont toujours battus pour une "autre politique", Jules Guesde, Marceau-Pivert, Jean-Pierre Chevènement, Jean-Luc Mélenchon. Et comment cela s'est-il généralement terminé ? A l'extérieur du parti. Pourquoi ? Parce qu'à l'intérieur, il n'y a qu'une seule politique, celle que se choisissent le parti, ses candidats et les électeurs.

A la rentrée, le gouvernement aura fort à faire et le parti devra se mobiliser. Je ne souhaite vraiment pas que l'opposition au gouvernement, à défaut de se trouver dans une UMP livrée à elle-même et à ses problèmes internes, s'installe à l'intérieur du parti socialiste. L'"autre politique", elle est chez Mélenchon et à l'extrême gauche, en attendant que la droite se rétablisse et propose à son tour une alternative. Au PS et au gouvernement, je le redis, il n'y a qu'une seule politique. Quand viendra le temps de notre congrès, les socialistes de toute sensibilité feront leurs propositions, sur lesquelles les adhérents se prononceront. Mais en attendant, il n'y a pas d'autre politique.

dimanche 10 août 2014

A chacun sa manif



Il y avait hier deux manifs à Paris : celle de soutien aux Palestiniens bombardés par l'Etat d'Israël, celle de soutien aux Kurdes et aux Yazidis, bombardés par l'Etat islamique en Irak. La gauche participe volontiers au premier combat, à juste titre. Mais j'aimerais aussi qu'elle soit présente dans le second combat. Il ne doit pas y avoir deux poids deux mesures ; or, c'est hélas le cas.

Et je ne parle même pas des chrétiens d'Irak, qui sont trop souvent abandonnés à leur triste sort. Le gouvernement, cependant, a eu un comportement exemplaire. Mais la gauche militante ... ne milite pas assez en faveur des minorités sunnites, chrétiennes et yazidis persécutées en Irak, préférant se réserver pour la cause palestinienne, ce que je regrette.

Ce n'est pas que la manif d'hier en faveur des Kurdes d'Irak n'était pas sans poser de problème : elle était organisée principalement par le PKK, Parti des travailleurs du Kurdistan, dont les drapeaux rouges à faucilles et marteaux ne sont pas précisément ma tasse de thé. Mais peu importe avec qui on défile : l'important, c'est l'objectif.

Les frappes américaines pour freiner l'avancée des djihadistes sont évidement une bonne chose, mais aussi une honte pour l'Europe, incapable d'intervenir militairement dans un conflit quasiment à ses frontières. Il est tout de même malheureux de constater que c'est Washington qui décide de la guerre et de la paix au Proche Orient.

A quand et à l'initiative de qui, à Saint-Quentin, devant les grilles de la sous-préfecture, une manifestation de soutien aux chrétiens, aux Kurdes et aux Yazidis d'Irak ? Gauche, réveille-toi, même dans la torpeur du mois d'août !


Vignette 1 : la banderole de tête.

Vignette 2 : la foule nombreuse, brandissant des portraits d'Abdullah Ocalan, leader du PKK emprisonné en Turquie.

Vignette 3 : arrivée de la manifestation place Stalingrad.

samedi 9 août 2014

St-Quentin insolite



A New-York, vous trouvez des réservoirs d'eau, style far west, sur les immeubles. A Saint-Quentin, c'est une cabane ! Mais dans quelle rue ? (vignette 1)

Une voiture qui va dans le mur, c'est hélas fréquent. Mais qui y reste, c'est moins banal, sauf à Saint-Quentin. Devinez où ? (vignette 2)

vendredi 8 août 2014

Le philosophe triste



Depuis maintenant 12 ans, chaque été, en août, le philosophe Michel Onfray officie sur France-Culture, avec la diffusion de ses conférences annuelles devant l'Université populaire de Caen, qu'il a contribué à fonder. Vous pouvez l'écouter quotidiennement, le matin à 11h00 ou en début de soirée, à 19h00. Je ne rate aucune de ses interventions ... bien que je sois en total désaccord avec sa pensée.

Onfray, depuis une bonne vingtaine d'années, s'est acquis un public nombreux. C'est un philosophe à succès, dont les ouvrages se vendent. Mais quelle est sa pensée ? Une critique virulente, négative et parfois assez peu philosophique, outrancière, caricaturale, des philosophes d'aujourd'hui et du passé. Ce nietzchéen pratique ce que son maître pourtant dénonçait : l'esprit de ressentiment.

Avant-hier, il nous expliquait que Kant avait alimenté la pensée nazie (alors que c'est généralement ce qu'on reproche à Nietzsche, à tort là aussi : curieux retournement). Pour Michel Onfray, la philosophie d'après guerre n'a pas su "penser" le nazisme et s'est même laissée imprégner par lui. Il n'y a qu'Albert Camus et Hannah Arendt qui échappent à sa vindicte. On se souvient aussi quel traitement injuste et excessif Onfray avait fait subir à Sigmund Freud.

Je m'intéresse moins à la pensée d'Onfray, tant elle me semble indéfendable, qu'à l'audience qu'elle suscite. Vendredi dernier, au moment des questions de la salle, un intervenant a évoqué les camps de concentration "inventés par les Anglais" et les bombardements américains sur Dresde pendant la Seconde guerre mondiale, "pire que les bombardements allemands". Heureusement, Onfray, qui n'est pas philosophe pour rien, a repris son auditeur, dénonçant le révisionnisme larvé de son propos. Il n'empêche que le mal était fait. Le succès de Michel Onfray vient, à mon avis, de ce qu'il croise l'air du temps, qui porte à la contestation systématique d'un peu tout, des grands penseurs comme de l'interprétation des événements historiques, avec les graves dérives que l'on sait.

La séduction paradoxale d'Onfray, c'est qu'il est le contraire d'un séducteur : vêtu de sombre, peu souriant, visage triste et parole austère, sans lyrisme ni grandes idées à nous proposer. De ce point de vue, c'est l'anti-BHL. Les années 70-80, exaltées et combatives, étaient celle de Bernard-Henri Lévy ; les années 2000, sceptiques et critiques, sont celles de Michel Onfray. Je vous invite néanmoins à l'écouter : toute réflexion est intéressante, et vous pourrez vous faire votre propre idée.

mercredi 6 août 2014

Adieu, camarades



Très beau documentaire, hier soir sur Arte, "Adieu, camarades" consacré à la chute de l'Union soviétique (mais un peu long et tardif). Je comprends qu'on puisse être communiste avant le communisme, pendant le communisme, mais après, non, même en idée. Le documentaire a le mérite de nous rappeler des faits que j'avais complètement oubliés : les accords d'Helsinki, en 1975, valident les frontières pourtant indues de l'empire soviétique et de ses satellites, hérités de la dernière guerre mondiale, mais en même temps l'oblige à signer un volet sur les droits de l'homme. Victoire pour l'URSS, mais le ver démocratique est dans le fruit totalitaire. Ce qui donnera la Charte 77, véritable manifeste de la dissidence.

Deuxième mérite de ce documentaire sur le communisme réel, comme on l'appelait alors : il n'est pas anticommuniste ! Il s'en tient aux faits, qui sont têtus, comme disait Lénine. Les régimes communistes ont garanti l'emploi, la santé et l'éducation de leurs citoyens, ce qui n'est pas rien, quand on compare avec le système capitaliste. Mais ils ont porté atteinte à la liberté, à la circulation des idées et à la vie spirituelle, ce qui est extrêmement grave, ce qui condamne sans appel le communisme. Concrètement, c'est le Goulag pour les opposants, l'hôpital psychiatrique pour ceux qui pensent autrement, et c'est odieux.

Dernier mérite d' "Adieu, camarades", une tentative d'explication de cette énigme : un régime promis à vivre éternellement, que les Etats-Unis ni personne d'autres n'ont réussi à faire plier, s'est écroulé de lui-même, comme un château de cartes, à la fin des années 80, à la surprise générale. Deux facteurs déclenchant sont privilégiés, de nature comparable. D'abord, l'invasion de l'Afghanistan en 1979, qui a suscité le réveil de l'islamisme ; ensuite, l'élection d'un pape polonais, suivie du mouvement Solidarnosc dans ce même pays. Ironie de l'histoire, stupéfiant retournement, un système qui se voulait ouvrier et révolutionnaire a été contesté par des ouvriers agenouillés en prière à la porte des usines, devant les portraits de la Vierge Marie et de Jean-Paul II ! Pour le communisme, c'était le commencement de la fin.

Que nos jeunes amis, communistes saint-quentinois entre autres, puissent méditer cette histoire, en tirer les conclusions qui s'imposent. Car l'adieu au communisme n'est pas non plus la fin de tout espoir progressiste.

mardi 5 août 2014

L'éthique de dame GPA



France-Inter, ce matin, au journal de 8h00 : le crash du Mali s'éloigne dans le temps ; la guerre dans la bande de Gaza est lointaine dans l'espace, et puis c'est toujours la même chose depuis 50 ans, entre Israéliens et Palestiniens. Le vol de cocaïne au quai des Orfèvres fait du surplace. On parle alors de quoi ? J'ai noté deux "informations" parmi quelques autres du même tonneau : un lâcher de ballons dans le ciel de Reims est attaqué par des associations, qui craignent que les oiseaux ou les tortues ne consomment les baudruches et en meurent ; un vigile risque d'être renvoyé d'un grand magasin parce qu'il s'est servi d'un écran de vidéo-surveillance pour regarder un match de foot pendant le Mondial.

L'invité du journal était une dame venue parler d'une "question de société", la GPA. Rien qu'à décliner le sigle, gestation pour autrui, on n'est pas bien disposé à l'idée ! Les adversaires parlent de "femme-sac", d' "enfant-chose", de "marché des bébés" et d' "abandon sur ordonnance". Evidemment, tout ça n'est pas engageant. Non plus cette définition (critique) de la GPA : "on colle un embryon à la femme gestatrice, on laisse pousser un enfant dans son ventre et on revient le chercher après".

La dame qui défend la GPA n'emploie pas un vocabulaire ni des arguments plus avenants. Elle utilise abondamment le mot "éthique" pour justifier ses raisonnements. Les "mères porteuses" font le bien, puisqu'elles font un don, le "don d'engendrement", comme des hommes donnent leur sperme, compare-t-elle. Les parents qui en bénéficient sont pleins de "gratitude", paraît-il, envers la donneuse.

Bien sûr, parfois, ça ne se passe pas comme prévu : par exemple, ce couple d'Australiens récupérant le bébé et se retrouvant avec deux jumeaux sur les bras pour le prix d'un seul, dont un petit trisomique, qui a fait les frais du marché, qui ne correspondait pas à la commande et qui est passé par pertes et profits. C'est peut-être ce qu'on appelle jeter le bébé avec l'eau sale de la GPA ?

Le journaliste pose à son invitée LA question philosophique : est-ce qu'il faut nécessairement satisfaire le désir d'enfant des parents stériles ? Dame GPA répond qu'"il faut faire ce qui est bien", qu'il n'y a "que du bonheur" pour des parents à avoir des enfants que la nature ne leur permet pas d'avoir, que "ça ne fait de mal à personne". Seul petit bémol : "pas de marchandisation des ventres".

Voilà l'éthique de dame GPA, qui veut aussi que les bébés GPA aient le droit de savoir de quel ventre ils viennent : sinon, dit-elle, ce sont des "fantômes de la République". Décidément, cette dame dont j'ai oublié jusqu'au nom utilise un vocabulaire à gerber, aussi sale que l'eau sale de ses fameux bébés. Franchement, à l'entendre, on ne peut qu'être contre la GPA. Qu'est-ce que ce serait si j'écoutais un adversaire de cette technique "éthique" !

lundi 4 août 2014

Faites l'amour ...



Quand j'ai vu François Hollande, hier à la télévision, la tête contre l'épaule de Joachim Gauck, le président allemand, ça m'a d'abord fait rire, tellement on aurait dit deux amants tendrement enlacés, le Français, plus petit, se blottissant contre l'Allemand, l'Allemand consolant et protégeant le Français. J'ai pensé aussi à saint Jean, le disciple que Jésus préférait aux autres, tout contre la poitrine du Christ pendant la sainte Cène, selon les Evangiles et les nombreuses peintures. Mais notre président de la République n'est ni l'amant, ni le disciple de Gauck !

Il y a un fond d'ironie en chacun de nous, qui ne demande qu'à se manifester, surtout devant une scène touchante, émouvante. Déjà, lorsque François Mitterrand, en son temps, avait pris la main du chancelier Helmut Kohl, dans un contexte similaire, la scène faisait penser à des enfants qui vont ainsi se promener. La dissymétrie physique entre les deux personnages accentuait le comique de situation, avec un côté Laurel et Hardy. Et pourtant, dans l'un et l'autre cas, nous avons affaire à de très beaux moments, à la symbolique parfaite.

Hier, c'était une déclaration de guerre qu'il fallait commémorer : quoi de plus fort que de représenter, 100 ans après, une déclaration d'amour, à travers les deux chefs d'Etat dans les bras l'un de l'autre, non pas en une simple accolade officielle, mais une étreinte amoureuse de quelques secondes, qui nous rappelait un court instant cet ancien slogan : faites l'amour, pas la guerre ... C'était particulièrement bien choisi, puisqu'il était inconcevable de répéter purement et simplement le geste de Kohl-Mitterrand, qu'il fallait bien trouver autre chose d'une force émotionnelle et symbolique comparable. L'objectif a été réussi et l'image restera longtemps.

dimanche 3 août 2014

St-Quentin en peintures



Au gré des promenades dans Saint-Quentin, nous pouvons découvrir de très belles fresques ou peintures, visibles sur la voie publique. Je pense que vous trouverez assez facilement où l'on peut apprécier ce vieillard à béret et barbe blanche (vignette 1). Moins évidente à localiser, cette représentation des Simpson (vignette 2). Enfin, j'ai gardé le plus difficile pour la fin : sur ces volets d'un particulier, les personnages inattendus de Donald et Picsou, si je ne me trompe pas (vignette 3). Jusqu'à présent, pour ces petits jeux d'été qui apprennent à mieux connaître notre ville, les lecteurs ont toujours donné les bonnes réponses. Mais cette fois-ci ? Bon courage, et peut-être bonne promenade.

samedi 2 août 2014

Ce n'est pas bien



A entendre Barack Obama reconnaître que son pays a pratiqué la torture à la suite des attentats du 11 septembre 2001, on est partagé entre l'admiration et l'interrogation. Il est admirable que le chef de la plus grande démocratie du monde fasse l'aveu d'un acte aussi terrible, aussi barbare. On a alors envie d'applaudir à la sincérité, à la transparence, tout simplement à ce qu'on appelle le bien. Le président américain l'a dit : ce n'est pas bien, c'est contraire à nos valeurs.

En même temps, cet aveu me laisse interrogatif, sceptique. D'abord, il y a le ton avec lequel il est prononcé : doux, calme, sans colère ni indignation, mais plutôt dans le registre du constat. Et puis, Obama en reste à une parole : aucune décision politique ne suit, aucune sanction n'est prise, aucun responsable n'est désigné, on demeure dans la réprobation morale. On se dit tout aussi bien que la torture pourrait recommencer, comme ces gens qui affichent des regrets mais n'en poursuivent pas moins leurs méfaits.

Remarquez aussi que l'aveu n'a pas débouché sur un quelconque mea culpa ou demande de pardon pour les Etats-Unis, envers leurs victimes (sans parler de réparation). Pourtant, la repentance est un genre très prisé dans les démocraties modernes. D'autre part, le président américain pouvait fort bien prendre les mesures pour interdire désormais les agissements tortionnaires, sans cet étalage public qui laisse dubitatif. Tous les pays ont pratiqué la torture, y compris les démocraties, y compris la France, la plupart du temps dans des situations exceptionnelles de guerre. L'aveu d'Obama n'apprend rien de nouveau, et il aurait pu citer d'autres atrocités commises par l'armée américaine, par exemple au Vietnam. C'est sûrement cette façon qu'il a de découvrir la Lune, ou de nous le faire croire, qui retient et qui limite mon premier mouvement d'admiration.

Quant à sa sincérité, elle a été largement forcée par un rapport qui sera rendu prochainement public et qui fait état de ces actes de torture. Nous sommes plus dans l'anticipation habile que dans la franchise la main sur le coeur. Mais le plus intéressant dans cette intervention présidentielle, c'est son soubassement culturel. Les Etats-Unis d'Amérique ne se comprennent bien, dans leurs faits et gestes, que si on les rapporte à la culture protestante qui fait toute l'histoire et les institutions de ce pays. Dans cette religion chrétienne, à la différence du catholicisme, la confession personnelle et secrète, par l'intercession du prêtre, n'existe pas, mais l'aveu direct et public des fautes est largement pratiqué, comme si l'énonciation de la vérité, devant tous, lavait du péché (sa démonstration la plus triviale, c'est le cercle d'alcooliques abstinents, au sein duquel chacun raconte comment il est sorti de la perdition).

On se souvient de l'aveu comique et hypocrite de Bill Clinton, déclarant à la télévision qu'il n'avait pas eu de rapports sexuels avec une jeune stagiaire de la Maison Blanche, sa conscience morale ou sa rouerie politique distinguant fellation et pénétration. En plus tragique, et le mensonge en moins, nous sommes, avec Barack Obama, dans le même univers mental, qui d'ailleurs imprègne de plus en plus la France, pas du tout menacée par l'islam mais largement conquise par le protestantisme. La parole est rédemptrice par elle-même, faisant l'économie des actes. Pour ma part, je pense que les démocraties n'ont rien à gagner à dévoiler ainsi leur part d'ombre. Elles y perdent encore plus de crédit auprès de leurs opinions. Car se contenter de dire la torture ce n'est pas bien n'avance pas à grand chose tant qu'on ne se donne pas les moyens réels de la proscrire ou de la punir.

vendredi 1 août 2014

La fête à Europe



Avant hier, c'était la fête à Europe, devant l'ancien local de l'ADSEA, association départementale de sauvegarde des enfants et des adultes (vignette 1, l'heure du repas, une auberge espagnole). La dénomination administrative fait assez sévère, presque inquiétante, mais la réalité est plus gaie, plus vivante : derrière les difficultés sociales, il y a des gens, des histoires, des énergies.

La rue des Frères Lumière a été barrée à la circulation, la musique s'entend dans tout le quartier, il y a des jeux picards et beaucoup d'enfants, qui crient, qui s'amusent, qui courent un peu partout, des petits noirs joyeux, de bonnes odeurs de barbecue, le tout surveillé de haut et de loin par un groupe de mères africaines assises, en train de causer (vignette 3).

Christophe Genu se débrouille très bien au dessus des flammes, dans la cuisson des merguez, Geoffrey Louis à ses côtés (vignette 2). Non loin, Nicole Jullien s'occupe aussi. Ce sont les trois mousquetaires de l'ADSEA, depuis dix ans sur le terrain, qui viennent parfois nous rendre visite au ciné philo. Quel boulot ils font ! Prévention, protection de l'enfance, sortir les gamins du quartier, les ouvrir à ce qu'ils ne connaissent pas. Les 8-25 ans sont concernés. Jean-Philippe Daumont, des Eclaireurs de France, est lui aussi passé à la fête, en partenaire, pour saluer tout ce travail. Bon courage à eux. Et que les élus, les responsables politiques s'intéressent à ce qu'ils font, les soutiennent, parce que c'est fondamental. Sans eux, que deviendraient nos quartiers ?