jeudi 13 octobre 2011

Deux sociaux-démocrates.

Le dernier débat des primaires citoyennes a été très différent des trois précédents, qui offraient une grande diversité, entre Valls le social-libéral, Montebourg le démondialisateur, Baylet le radical-socialiste, Royal la moderniste rénovatrice et les deux tenants de la social-démocratie, Aubry et Hollande. Ne restant plus que ces deux-là en lice, les échanges évoluaient dans un même cadre idéologique, qui me réjouit puisque c'est intellectuellement le mien, mais qui n'offre aucune alternative vraiment tranchée. A la limite, si j'en restais à l'émission d'hier soir, je pourrais tout aussi bien voter Aubry qu'Hollande dimanche prochain, tellement ils se différencient assez peu. Mais je n'en reste heureusement pas là.

Certes, les tempéraments ne sont pas les mêmes. Mais vote-t-on pour des psychologies ? Martine s'en est pris à François, mais dans les détails, pour regretter son "flou", lui demander d'être "précis" : les mots trahissaient une critique non frontale, pas fondamentale, d'ordre plus technique que politique. Par certains côtés, j'avais l'impression hier de regarder deux bons gestionnaires de gauche en rivalité, pas franchement en opposition, en concurrence ou en adversité.

Il y a bien sûr de quoi se réjouir : le débat était sérieux, de haute tenue, sans démagogie. Mais il y manquait la passion qui n'existe que dans les grands affrontements. Le plus étonnant (mais là encore j'en suis satisfait), c'est que les idées d'Arnaud Montebourg, médiatiquement promues depuis trois jours, n'ont pas du tout été au coeur des échanges. Normal : ces deux sociaux-démocrates que sont Hollande et Aubry peuvent les écouter, en reprendre quelques éléments en les atténuant, ils ne peuvent aucunement assumer leur radicalité.

Sur le fond, la culture sociale-démocrate de François Hollande et Martine Aubry, en opposition avec l'anticapitalisme d'Arnaud Montebourg, se traduit par trois forts accords entre eux : une économie ouverte hostile à tout protectionnisme, le recours à la négociation et au contrat plutôt qu'à la loi, un Etat stratège mais pas dirigiste.

Le vrai débat qui aurait eu un sens politique profond, c'est entre la social-démocratie et le socialisme traditionnel, dont Montebourg défend une version modernisée. Ce débat-là aurait été structurant et clivant, comme il l'a toujours été dans l'histoire du socialisme, entre les réformistes et les révolutionnaires, comme nous disions il n'y a encore pas si longtemps. Mais la social-démocratie étant devenue hégémonique au sein du parti, l'aile gauche n'a plus d'influence et d'impact qu'à la marge, même si l'héritage est toujours présent et fructueux.

Alors, on vote pour qui dimanche ? En ce qui me concerne, je n'ai pas changé, c'est toujours Hollande, social-démocrate conséquent, alors que Martine Aubry est une social-démocrate complexée. Et puis, on juge aussi un candidat par son entourage : celui d'Hollande est idéologiquement cohérent, celui d'Aubry est baroque, de certains strauss-kahniens autour de Cambadélis à l'aile gauche d'Hamon, Emmanuelli et Lienemann. Enfin, dans une procédure, les primaires, qui n'est pas une élection mais une désignation, il est essentiel de soutenir le mieux placé pour battre la droite, celui qui a été placé le premier, avec un écart non négligeable puisqu'il est de neuf points.

Mon vote Hollande de dimanche aura également une signification locale : manifester l'existence à Saint-Quentin d'un électorat de gauche modérée, qui ne se reconnaît pas dans la gauche dure (pour parler comme Martine !) alliée à la gauche extrême. D'autant que dans notre ville, l'écart entre Hollande et Aubry est beaucoup plus resserré (trois points), ce qui rend incertain et très intéressant le résultat de dimanche prochain.

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