vendredi 16 septembre 2011

Une leçon de démocratie.

Alors, ce débat des primaires, qu'est-ce que j'en ai pensé ? Que du bien ! Au départ, j'avais deux craintes, parfaitement opposées mais tout aussi redoutables : l'ennui soporifique ou la baston généralisée. Ni l'un ni l'autre, c'était passionnant et consensuel. Tant mieux. Le PS hier soir a marqué des points devant l'opinion, se montrant sous son meilleur jour : un parti de gouvernement constitué par de multiples talents. C'est ainsi que je l'aime, mon parti. Quel autre, à gauche, serait en capacité d'en faire autant ? Je n'en vois pas.

Évidemment, tout le monde se pose aujourd'hui la question : qui est sorti gagnant de cette belle leçon de démocratie ? Personne en particulier ! Je les ai trouvés tous très bon, chacun dans son registre, même Jean-François Baylet, assez baroque et surprenant dans sa très gauchiste revendication d'une légalisation du cannabis ... Tous très bon, mais tout de même de façon inégale. Les outsiders se sont particulièrement distingués, rivalisant de lyrisme et de sincérité, Arnaud Montebourg et Manuel Valls. Normal : quand on est minoritaire, qu'on n'a rien à perdre, on a intérêt à aller jusqu'au bout de ses convictions, d'affirmer sa singularité.

En revanche, Ségolène Royal m'a semblé en deçà d'elle-même, un peu en retrait par rapport à son personnage, presque effacée. Dommage : elle n'est jamais aussi bonne que lorsqu'elle joue à Ségolène Royal. Hier soir, il ne lui restait que son sourire, ce qui accentuait encore plus le décalage. Dès le début, elle s'est condamnée, en affirmant : "J'ai changé". Que n'a-t-elle suivi les leçons de François Mitterrand ? En politique, il ne faut jamais "changer", mais rester soi-même, creuser son sillon, demeurer tenace, tenir bon au milieu des critiques. Ségo telle qu'on l'aime aurait dû rester Ségo ! Dans ce premier débat, elle s'est volontairement banalisée, pour se faire accepter. Erreur ! Il ne faut surtout pas ...

Les deux challengers, Hollande et Aubry, jouaient gros dans l'affaire. L'un et l'autre ont tiré leur épingle du jeu, mais Martine a dévissé vers la fin, sans que la chute soit mortelle. Quand on veut être président, qu'on peut l'être, il faut se montrer présidentiel, rassembleur, au dessus de la mêlée. En s'en prenant à deux reprises à François Hollande, sur des sujets qui ont paru à l'opinion être des chicaillas, Martine Aubry est descendue de son piédestal, a montré qu'elle ne pouvait l'emporter qu'en cherchant à tout prix à se distinguer de François, au lieu d'affirmer tranquillement, souverainement son message.

Hollande, lui, n'a pas cédé sur la trajectoire qui est la sienne depuis plusieurs mois : l'homme déterminé, offensif à l'égard de Sarkozy, n'ayant nul besoin d'aller chercher des noises à ses petits camarades, le port de tête parfois impérial, avec juste ce qu'il faut de sourire et d'humour pour manifester sa distance à l'égard des événements et de lui-même. En un mot : mitterrandien, dans le geste, la voix, l'ironie et l'énergie.

Est-ce à dire que les résultats de la primaire seraient pliés ? Sûrement pas ! Ségolène peut se refaire, Aubry peut attaquer par sa gauche et Hollande commettre une bévue. Le premier tour, c'est dans trois semaines ; beaucoup de choses peuvent encore se passer. Et puis, personne n'est capable de dire qui et combien vont venir voter. Tout reste donc très ouvert. Ce que je souhaite, c'est qu'il n'y ait qu'un seul tour. Alors, notre candidat aura une forte légitimité et pas à entrer dans l'affrontement nécessairement lourd de conséquences d'un second tour, avec ses inévitables et contestables tractations en vue des reports de voix.

Je n'ai pas parlé du fond du débat, et pour cause : rien de nouveau, pas de différences fondamentales entre au moins cinq candidats, qui se retrouvent dans le projet socialiste, même le radical de gauche, quoi qu'il en dise. Il n'y a qu'Arnaud Montebourg qui ait laissé entendre une petite musique assez différente, celle de la gauche du parti. J'attends avec impatience le prochain débat, et des millions de français aussi, si j'en crois les scores d'audience.

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