dimanche 11 septembre 2011

Le sens d'une tragédie.

Après vous avoir relaté ce matin le contexte dans lequel j'avais vécu le 11 septembre 2001, je veux cet après-midi évoquer l'événement en lui-même, les réflexions qu'il a provoquées en moi. Le choc, c'est bien sûr celui des images : il me semble que pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, une tragédie de cette ampleur était regardée en direct, par le biais de la télévision, dans le monde entier.

Surtout, c'était aussi la première fois qu'un événement était reproduit en boucle sur nos écrans, avec une telle insistance, un effet de répétition et de miroir jusqu'au vertige (on a revu ça depuis, notamment lors de la récente affaire DSK). J'avoue mon malaise : la reprise obsessionnelle d'images identiques qui n'apportent absolument rien de nouveau à l'information du téléspectateur a quelque chose de pathologique, de névrotique. Inévitablement, à force d'être vues et revues, elles perdent de leur sens, de leur puissance, elles finissent par excéder et lasser.

Ce n'est pas l'image impressionnante de l'avion heurtant la tour qui m'a le plus impressionné, mais celles, atroces, des personnes se jetant dans le vide pour échapper aux flammes. On ne pouvait que s'identifier à ces pauvres gens livrés à la mort la plus cruelle, le saut dans le vide. Mais là aussi, quelle malaise de se reconnaître littéralement voyeurs d'une telle scène, la caméra suivant indécemment les corps dans leur chute. D'ailleurs, les autorités américaines ont compris que ces images étaient les plus taboues : aucun cadavre au sol n'a été montré.

Dernière image que je retiens, qui m'a marqué : à plusieurs milliers de kilomètres de la tragédie qui plongeait le monde entier dans l'horreur, des hommes et des femmes, dans certains pays arabes, se réjouissaient de ce qu'ils considéraient comme une défaite de leur pire ennemi, l'Amérique. Ce contraste entre la douleur des uns et la joie des autres était frappante, choquante, déroutante.

Choquant aussi, consternant, inexplicable, l'infecte rumeur partiellement née en France, amplifiée dans notre pays, selon laquelle le 11 septembre n'était qu'une manipulation, les attentats un montage, et les responsables pas ceux qu'on croyait. Ce négationnisme ahurissant est un symptôme mystérieuse de notre névrose nationale, s'exprimant par la fabulation, le fantasme.

Le 11 septembre a vraiment pris fin dix ans plus tard, à l'arrestation et à la mort de Ben Laden. Là aussi, qui aurait pu croire que la traque d'un terroriste par les services secrets les plus puissants au monde prendrait une décennie ? Dans les attentats de Manhattan et les réactions qu'ils ont suscitées, je crois que c'est toute notre époque qui se reflète, avec ses angoisses, ses contradictions et ses limites.

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