vendredi 2 septembre 2011

Excusez-moi de ne pas m'excuser.


Ces derniers jours, il y a eu une petite séquence amusante entre socialistes, autour de DSK : Arnaud Montebourg a d'abord demandé à celui-ci de s'excuser auprès des français et de son parti, puis Michel Rocard s'est excusé d'avoir parlé de "maladie mentale" à propos de Strauss, enfin le collectif "les jeunes avec DSK" a prié Martine Aubry de bien vouloir s'excuser pour sa phrase sur Strauss-Kahn et les femmes.

Cette obsession de l'excuse est devenue depuis quelques années une véritable manie nationale, que je trouve profondément ridicule. S'excuser, c'est ne pas assumer, c'est trop facilement se retourner. Demander qu'on s'excuse, c'est obliger autrui, lui mettre autour du cou la corde de la faute, c'est renoncer à débattre avec l'interlocuteur. La mode de l'excuse repose sur ce qui est très répandu aujourd'hui et que je déteste : la morale et la psychologie.

Qu'est-ce qui peut expliquer cette curieuse vogue ? Je crois que nous sommes tous des bâtards du christianisme, des héritiers infidèles et ignares de cette religion. L'excuse, c'est la version profane du pardon chrétien, complètement perverti. La foi liait le pardon au péché : celui-ci était effacé par celui-là. On ne demandait pas tant pardon qu'on pardonnait, geste beaucoup plus difficile et rare, qu'on ne voit plus guère, surtout en politique.

D'autres tics du langage relèvent de ce vocabulaire chrétien dénaturé, comme dans l'emploi fréquent des mots "compassion" ou "victime". Récemment, lors des dernières élections cantonales, une camarade m'a reproché, avec des airs de fausse bonne soeur, mon manque d' "humilité", autre vertu chrétienne qu'elle prononçait presque la bouche en croix. Tu parlotes, Charlotte !

L'excuse, pour en revenir à elle, n'est admissible que pour regretter ou faire accepter des gestes dérisoires et contrariants, par exemple lorsqu'on passe devant quelqu'un ou qu'on marche par hasard sur les pieds d'une personne. Sinon, il n'y a aucune raison valable et sérieuse de s'excuser. Cette parade est une vile bouffonnerie que je fais ravaler à ceux qui la pratiquent. Ne vous excusez pas devant moi, même lorsque vous m'écrasez les pieds, regardez plutôt où vous marchez ! Et ceux qui exigent de ma part des excuses m'encouragent au contraire à leur cracher à la figure la vérité qu'ils n'aiment pas entendre. Excusez-moi de ne pas m'excuser.

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