dimanche 5 juin 2011

Les Dany et les Cécile.

Congrès d'Europe Ecologie Les Verts (EELV) à La Rochelle ce week-end. Pour un parti, quel titre, quel sigle ! Il ne fallait sans doute pas mécontenter les uns ni les autres : au lieu de choisir ou d'inventer, on a additionné. C'est beaucoup plus simple et ça donne un nom compliqué. Je pense à ces textes politiques illisibles à force d'ajouts et de retraits. Mais tout le monde est satisfait parce que tout le monde a été pris en compte : n'est-ce pas finalement l'essentiel ?

Ce congrès écologiste (j'en reste à cette formule, la plus compréhensible) s'est très bien passé. A deux détails près : l'absence de Daniel Cohn-Bendit et la bourde de Nicolas Hulot. Les deux écolos pourtant les plus populaires de France n'étaient pas à la fête. Dany a été qualifié de "Schtroumpf grognon". Mais pourquoi ? Parce qu'il n'est pas tout à fait d'accord avec la ligne politique de son parti. Quand Rocard dans les années 70 n'était pas en phase avec Mitterrand, l'appelait-on "Schtroumpf grognon" ? Pourquoi un désaccord politique entraînerait-il aujourd'hui un qualificatif qui a pour but de psychologiser et de ridiculiser ?

Quant à Nicolas Hulot, il a avoué avoir eu un penchant politique pour Borloo. Ce n'est pas très nouveau, ce n'est guère étonnant, il a dit ce qui lui est passé un moment par la tête. Mais voilà : un congrès politique n'est pas un exercice de sincérité. Pan sur Hulot ! Rien de bien grave pourtant dans ses propos. Dany et lui, ce ne sont pas des "politiques" classiques ; ils détonnent donc, même dans ce parti peu classique qu'est EELV, mais qui le devient de plus en plus.

Cécile Duflot, elle, est la reine du congrès. De son côté, tout va bien, pas de problème : sa motion rafle 50% des voix et sa candidature pour un troisième mandat à la tête du parti est plébiscitée par 92% des votants. C'est assez extraordinaire, et cela doit nous faire réfléchir sur ce qu'est la politique : Daniel Cohn-Bendit est un personnage historique, un leader charismatique, une figure très populaire ; il a conduit aux dernières régionales les écologistes à un niveau électoral jamais atteint auparavant par eux ; il est l'inspirateur et le fondateur d'EELV ; et il se ramasse 26% dans le vote sur les motions !

Duflot n'est rien de tout cela. Elle a hérité d'un qualificatif, dont on ne sait s'il est flatteur ou ironique : BBB, brune banale de banlieue. A côté de Dany, c'est l'eau et le feu, la fadeur et l'exubérance. Et le gagnant n'est évidemment pas celui qu'on croit ou qu'on pourrait espérer. En habile politique, Duflot est d'accord avec tout le monde, Joly, Hulot et même Dany, pour être surtout en accord avec elle-même. Si elle renonce à la présidentielle, ce n'est pas pour renoncer au pouvoir mais au contraire pour mieux y accéder. Le seul pouvoir qui compte est celui qu'on peut prendre ou conserver, en l'occurrence la tête de l'appareil.

Cécile Duflot, c'est la froide ambition, la triste patience, la soumission tranquille. Elle a compris qu'on ne l'emporte en politique qu'en ressemblant à ceux qui peuvent vous faire roi en leur permettant de s'identifier à leur leader. Cohn-Bendit ne ressemble à personne d'autres qu'à lui. Les Cécile Duflot sont légion dans les partis. Ce sont ceux qu'on ne remarque pas, qui sont là au bout de la table à attendre leur heure, dans d'interminables réunions où il ne se passe rien. Ils ont compris que la réussite passait par le retrait, le silence et l'acquiescement.

Parmi les successeurs de Lénine, il y avait Trotsky et Staline, l'exubérant, le génial, l'inquiétant, et l'homme ordinaire, effacé, rassurant. C'est bien sûr le second qui l'a emporté. Les Dany ne gagnent que dans des circonstances exceptionnelles, parce que ce sont des personnalités exceptionnelles. Les Cécile leur sont préférées le reste du temps, dans le cours ordinaire des choses qui n'exige que des gens ordinaires.

Aucun commentaire: