samedi 18 juin 2011

De Condorcet à de Gaulle.

Le boulevard Gambetta était barré cette fin d'après-midi par deux véhicules de police, gyrophares allumés, interdisant toute circulation. Non ce n'est pas Chicago et une scène de film policier américain : seulement la cérémonie de commémoration de l'appel du 18 juin à Saint-Quentin. Quand les enfants des écoles sont là, il y a du monde parce que les parents viennent regarder ou filmer. Le mauvais temps n'a dissuadé personne, pas même le ministre et maire de la ville.

Les élèves de Collery et Camille Desmoulins apportent de la jeunesse et des couleurs dans la foule âgée et blanchie. Ils ont interprété avec allant le Chant des partisans et la Marseillaise, un peu hésitants sur le deuxième couplet ("Amour sacré de la patrie, conduis, soutiens nos bras vengeurs ..."). Les haut-parleurs laissaient passer leurs rires. Les grands drapeaux des adultes d'un côté, les petits drapeaux des enfants de l'autre : voilà qui fait une belle cérémonie.

A la fin, la pluie s'est abattue, les parapluies ont concurrencé les bannières tricolores, les élus sont restés très dignes sous la bourrasque, saluant les militaires et les anciens combattants. La belle voix grave de Maxime Henocque a beau répéter chaque année le même texte de l'appel, je n'en suis pas lassé, j'y puise à chaque fois des réflexions pour notre présent, trois en particulier :

- La force des convictions : dans l'action politique, il n'y a que les idées qui comptent. De Gaulle n'a pas hésité, tergiversé, calculé : son amour de la patrie et sa défense de la République ont emporté la décision.

- Le refus des rapports de forces : si de Gaulle avait été strictement réaliste, il aurait rejoint Pétain, qui avait le bon sens pour lui. Après une telle défaite et un ennemi si puissant, une Europe occupée, des puissances américaines et soviétiques indifférentes, la raison conduisait au compromis, en attendant des jours meilleurs. Le rapport de forces, c'est toujours le triomphe des lâches. Pour rejoindre Londres, il fallait être un peu fou et très déraisonnable.

- Le sens de l'anticipation : de Gaulle n'avait pas le nez collé sur l'année 1940, il envisageait l'avenir, dans une sorte de prophétisme, prévoyant que l'URSS et les USA ne resteraient pas longtemps neutres, que l'Empire français était une solution de repli et de résistance.

Une journée qui commence par célébrer Condorcet et qui finit en commémorant de Gaulle est une belle journée, que la pluie rend encore plus belle.

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