dimanche 30 juin 2013

On est les champions



Comme le Christ est venu sur terre pour les pécheurs et pas pour les justes, l'enseignant de l'école publique vient en classe pour les mauvais élèves et pas pour les bons (qui n'ont pas besoin de lui). C'est pourquoi je suis assez réservé à l'égard des cérémonies de remise de prix aux bons élèves, qui n'existaient pas dans mon lycée quand j'y suis arrivé il y a bientôt vingt ans, mais qui sont de nouveau en vogue depuis quelque temps. En fonctionnaire discipliné, j'obtempère et je participe.

La cérémonie a eu lieu mardi dernier, dans la cour d'honneur, comme il se doit. Le public était nombreux, car mes réserves ne sont pas partagées par tout le monde et le succès de ce type de manifestation est flagrant (vignette 2). Normal : notre société, qui ne croit plus à grand chose, se raccroche à ce qu'elle peut, et la valeur du mérite en fait partie. Les parents sont tout contents que leurs enfants soient parmi les meilleurs et que l'institution le proclame publiquement. Ils se disent sûrement qu'ils y sont pour quelque chose. Les enseignants pensent de même, pour leur propre compte et le résultat de leur travail. Bref, c'est la satisfaction généralisée.

Monsieur le proviseur, Guy-Roger Meitinger (vignette 1), a tenu à ce que la distribution des prix dure une heure, pas plus. C'est que l'exercice est fastidieux, répétitif, sans surprise, un peu comme la cérémonie des Césars à la télévision. Les élèves sont appelés, ils reçoivent leur prix de la main de leurs enseignants et ils s'en vont sous les applaudissements. Mais, visiblement, personne ne se lasse et le ciel pluvieux ne pousse pas à partir. Les profs sont vêtus comme d'habitude, sauf mes collègues féminines d'EPS qui ont échangé leurs baskets pour des talons hauts (Stéphanie Holbach, pétillante, en vignette 3).

J'ai récompensé Mélissandre et Wadir, qui sont repartis avec Dostoïevski et Stendhal sous le bras (vignette 4). Je croiserai à la rentrée Mélissandre, qui ira en classe préparatoire à Henri-Martin, et j'ai un projet pour Wadir : qu'il anime une séance du prestigieux café philo des Phares à Paris, comme il a su si bien le faire à Saint-Quentin. Quand on fait partie des meilleurs, on n'a peur de rien.

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