mardi 25 juin 2013

Avis aux amateurs



La politique est une guerre qui demande un chef. Ce n'est pas un duel d'aristocrates, où le vainqueur est désigné au premier sang versé. C'est une lutte à mort, où le ridicule, l'humiliation , l'ignorance tuent. Il faut être armé, déterminé et un peu fou. J'aurais aimé que tous les candidats qui rêvent de figurer sur une liste aux élections municipales assistent à la séance d'hier soir, à Saint-Quentin, pour voir ce qui les attend.

Beaucoup croient peut-être que devenir conseiller municipal est une sorte d'honneur, de reconnaissance, éventuellement un prestige. Non, c'est une misère, parce qu'il faut se battre ou mourir quand on est dans l'opposition, se taire ou partir quand on est dans la majorité. Rien à voir avec les débats politiques auxquels on assiste parfois à la télévision, qui sont généralement d'aimables échanges où chacun en ressort valorisé d'avoir combattu l'autre. Non, dans une séance de conseil municipal, l'affrontement n'est pas à armes égales : le maire, c'est le maître, et ses opposants ont un boulot de chien. Avis aux amateurs ! (il est d'ailleurs formellement déconseillé d'être un amateur, souliers vernis et gueule enfarinée ...)

Hier soir, la cruauté était parfois de règle. Le maire soumet ses opposants à la question, au sens de l'Inquisition (inversant par là les rôles). Michel Aurigny et Nora Ahmed-Ali en ont fait les frais. A ce moment-là, les rires sont des flèches qui sifflent de partout. Xavier Bertrand reprend les propos de Michel Garand dans L'Aisne Nouvelle pour rabaisser Jean-Pierre Lançon : rien à voir avec l'ordre du jour, c'est gratuit, c'est fait pour faire mal, pour disqualifier. Quel être humain normal accepterait d'entrer dans un jeu aussi retors, vicieux, pervers, méchant ? Les idées n'ont pas leur place. Ce qui compte, ce sont les coups qu'on va donner. Je ne sens aucune estime entre les adversaires. C'est un combat de rue au couteau, pas un match de boxe entre gentlemen. Ceci dit, ce n'est pas sans contenu : les 45 dossiers étaient sur la table, j'ai choisi d'en commenter quelques-uns :

Sur le nombre et la répartition des sièges à la communauté d'agglomération, Michel Aurigny a posé une question pour montrer que Xavier Bertrand ne savait pas la réponse ! En incorrigible lambertiste, il a pinaillé sur les chiffres, les calculs, les détails au lieu de dénoncer l'unique assemblée démocratique au monde qui fonctionne à la quasi unanimité, qui ne dispose d'aucune majorité ni opposition (le maire appelle ça le consensus et l'apaisement).

Sur le stationnement gratuit en centre ville, proposé par Michel Aurigny sous forme de zone bleue, Xavier Bertrand trouve la mesure démago : on finance comment ? Et qu'est-ce qu'on fait des voitures ventouses qui bloquent les places et chassent les véhicules des touristes ? Pourtant, je pense que la question de la gratuité est un vrai débat. La preuve : la carte Ma Saint-Quentinoise permet une heure gratuite de stationnement.

Les cours d'école et leurs équipements sportifs, faut-il les ouvrir à la population ? Bertrand dit oui, pour éviter que les gamins traînent dans les rues. Aurigny dit non, parce qu'il veut que cet espace demeure réservé à l'Education nationale ("sanctuarisation", c'est le mot). Olivier Tournay évoque une rumeur d'annualisation du temps de travail dans les centres sociaux, et s'en inquiète. Xavier Bertrand lui répond que la rumeur est infondée, et Marie-Laurence Maître renchérit en ce sens. Mais quand Agnès Potel intervient, elle parle ... d'annualisation. Du coup, Anne Zanditenas et Michel Aurigny soulignent la contradiction. Là, Xavier Bertrand est coincé. Mais quand on est le maître, on s'en sort toujours.

Pour finir, et pour ne pas changer, le maire s'en est pris au Conseil général de l'Aisne, qui ne finance plus les chantiers d'insertion selon lui : "un vrai scandale", dit-il, et de se préoccuper pour les finances du département. Pas de doute, Xavier Bertrand n'est pas un amateur en politique. Pour le moment, il n'a pas encore trouvé son homme. Pour le moment.

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