mardi 9 août 2011

Lendemain de marche.



A la suite de la marche blanche d'hier à Saint-Quentin, la presse locale a rapporté les propos de Ahn Dao Traxel, marraine du collectif à la mémoire d'Aurélie Martin. Je ne partage pas trois de ses points de vue :

D'abord la critique de la justice, accusée d'un manque de sévérité dans la peine infligée au compagnon d'Aurélie, condamné à trente mois de prison : par principe, il ne faut pas critiquer les décisions des tribunaux. La justice devait trancher sur l'origine du décès : attaque cérébrale simple ou provoquée par des coups ? Nous n'avons pas à nous substituer au procès, à l'enquête et à ses conclusions.

Il faut en rester à l'essentiel, qui est incontestable : la dénonciation des violences conjugales, sachant que les solutions ne sont pas fondamentalement judiciaires. Aurélie Martin était depuis longtemps victime de son conjoint, sans qu'elle en parle ou porte plainte. Un travail d'éducation doit être mené pour inciter les femmes à se manifester beaucoup plus tôt auprès des services sociaux, dès la première violence, physique ou verbale, y compris minime. C'est plus une question de mentalité que de législation.

Ensuite, Ahn Dao Traxel réclame le rétablissement partiel de la peine de mort, dans des cas précis, les victimes en situation de faiblesse. Elle demande un référendum sur ce sujet et un débat lors de la prochaine élection présidentielle. Non, il serait maladroit, inutile et dangereux de revenir sur un choix qui a été fait il y a trente ans (nous fêterons l'abolition de la peine de mort en France dans quelques semaines). La main du mari violent, alcoolique ou pathologique, ne sera pas arrêtée par la menace de mort. La peine capitale n'a en réalité qu'un seul effet : soulager la terrible douleur des proches de la victime. Je comprends, mais je n'approuve pas.

Et puis, la sélection des crimes méritant la mort serait nécessairement arbitraire. Nous entrerions dans une casuistique discutable. Qu'est-ce qu'une personne "faible" et "démunie", selon les termes de Ahn Dao Traxel ? Le vieillard, l'enfant, la femme ? Il y a quelque chose de moralement désobligeant à les considérer ainsi. Mais le SDF, le malade, le handicapé, n'en feraient-ils pas aussi partie ? La loi doit privilégier la simplicité : dans la logique de la peine de mort, le sang versé, peu importe l'auteur et la victime, appelle le sang versé. Vouloir établir des distinctions aboutirait à des discussions sans fin.

Quant à un référendum sur le sujet, il n'est pas constitutionnellement possible, et c'est tant mieux : c'est l'élection qui doit se prononcer sur ce type de question, pas la procédure référendaire, propice à toutes les facilités et démagogies. Et la campagne présidentielle aura sans doute mieux à faire qu'à exhumer une controverse datant des années 1970, sur laquelle aucun grand parti politique ou candidat ne souhaitent revenir.

Ahn Dao Traxel regrette enfin qu'aucun responsable politique n'ait été hier présent dans la marche blanche. Il est vrai que parmi les 150 manifestants, je n'ai pas vu d'élus de la majorité ou de l'opposition. Mais peut-on vraiment le leur reprocher ? La municipalité de Saint-Quentin a manifestement apporté son soutien en autorisant le rassemblement sur les marches de Fervaques et la mise à disposition de la salle de Verdun, pour le pot de clôture.

L'opposition aurait pu bien sûr se faire représenter ou soutenir et appeler à manifester par un communiqué de presse. Mais la période de vacances est à prendre en compte, sauf à vouloir appliquer et adapter le précepte élyséen à Saint-Quentin : pas d'éloignement des responsables politiques locaux au-delà du département de l'Aisne ou de la région Picardie !

Je veux rester positif et ne retenir que ça : une belle mobilisation pour une juste cause s'est tenue hier après-midi dans notre ville. Le mouvement est à poursuivre et à amplifier. J'ai notamment à l'esprit les rendez-vous traditionnels de novembre et mars, journée contre les violences conjugales et journée mondiale des femmes, qui pourraient prendre cette année, à Saint-Quentin, une dimension particulière, pour les associations concernées et les établissements scolaires.

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