mercredi 17 août 2011

Bouddha superstar.



Lundi, jour de l'assomption, le dalaï lama, et pas la sainte vierge, était à Toulouse, attendu par des milliers de personnes. Cet engouement pour le bouddhisme est une énigme. La religion est délaissée et moquée, mais le chef spirituel des tibétains fait un tabac. Qu'on ne me dise pas qu'il s'agit d'une sagesse, et pas de religion ! Des moines, des temples, des cérémonies, c'est bel et bien de la religion.

Le pape des catholiques n'est que le représentant du Christ. Le dalaï lama, lui, est carrément, derrière ses lunettes et son sourire, un "dieu vivant" appelé à se réincarner. Comment notre culture rationaliste, scientifique et sceptique peut-elle adhérer à une telle croyance ? Un type en tongs, assis sur un trône en bois, entouré de milliers de fleurs, c'est tout de même énorme ...

C'est d'autant plus surprenant que le bouddhisme tibétain est fort superstitieux, très archaïque, plein de fables et de démons. A la rigueur, le bouddhisme zen, dépouillé, méditatif, personnel, s'accorde beaucoup mieux à la mentalité occidentale moderne, mais ce n'est pas celui-ci qui a la faveur des foules.

A Toulouse, l'intervention du dalaï lama a été précédée par celle de Stéphane Hessel, auteur d'un ouvrage à succès sur l'indignation. Je ne vois ici qu'une conjugaison de deux effets de mode. Car la réaction politique à laquelle invite Hessel est très éloignée de l'impassibilité aux mouvements du monde qu'enseigne le bouddhisme.

Surtout, la doctrine du Bouddha, dans ses principes fondamentaux, est entièrement contraire aux trois valeurs cardinales de la société contemporaine, l'individualisme, l'activité et le confort :

- L'originalité du bouddhisme, c'est qu'il nie l'existence de l'ego, de l'identité personnelle, à laquelle nous tenons tant, souvent à l'excès. Je vois mal que nous puissions y renoncer.

- La société occidentale valorise l'activité, sous toutes ses formes, professionnelle, sportive, ludique. "Bougez-vous !" décline-t-on de multiples façons. Le Bouddha conseille à l'inverse de se poser, de s'immobiliser, de faire silence.

- Le confort est l'aspiration première de la civilisation moderne, jusqu'à la facilité, la langueur, la mollesse. Or, le bouddhisme prône des pratiques ascétiques, difficiles, exigeantes, patientes, douloureuses.

Si Bouddha, via le dalaï lama, est devenu superstar au sein d'une culture radicalement opposée à son message, je me demande pourquoi : contestation spirituelle de l'occident ou bien occidentalisation d'une contestation spirituelle ?

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