samedi 17 mai 2014

Le coup du poulet



Dans la dernière ligne droite des élections européennes, les anti-européens mettent la gomme. Leur nouveau cheval de bataille, c'est un poulet. Nouveau ? Pas vraiment, ils nous avaient déjà fait le coup il y a quelques années. Il ressorte la volaille du placard, ou plutôt du poulailler. Les anti-européens jouent avec les peurs, les fantasmes, les médias et nos nerfs. En 2005, leur trouvaille, c'était le plombier polonais. Vous vous souvenez ? Avec la libre circulation des travailleurs, des milliers de Polonais sous-payés, sous-qualifiés devaient s'abattre sur nos villes et nos campagnes. Bien joué, le coup du plombier polonais ! Même les anti-européens de gauche, peu regardant quand il s'agit d'enfoncer l'Europe, avait trempé dans cette sauce xénophobe. Le plombier fait partie de notre mythologie nationale ; Pierre Perret l'a chanté, Fernand Raynaud l'a mis en sketch. Elle est où, la déferlante polonaise ? Nulle part : les anti-européens l'ont inventée !

Le coup du plombier étant dépassé, il fallait trouver un autre truc : c'est le coup du poulet à la javel ! Là encore, notre imagination est fortement sollicitée : une grosse cuve d'eau de javel, des poulets plongés dedans pour être bien lavés et refourgués sur le marché européen, voilà la nouvelle machine de guerre des anti-européens. Résultat : du chlore dans nos assiettes. Le produit qu'on réserve normalement à la désinfection des chiottes se retrouve dans les tuyaux de notre estomac. De quoi en effet vous dégoûter de l'Europe ! Les anti-européens font très fort. En visant le poulet, ils touchent une fois de plus à une fibre sensible : le poulet du dimanche est une tradition familiale qui remonte au bon roi Henry IV et sa fameuse poule au pot. Et puis, le poulet, c'est le coq gaulois, au sommet de nos clochers d'église ! Dissous dans la javel, on s'en prend à une gloire nationale, au cocorico qui nous est cher.

Déjà, au début des années 60, Jean Ferrat, dans sa Montagne, nous avait inquiétés avec son poulet aux hormones, dont nous n'avons jamais vu les plumes, pas plus que les salopettes de plombier polonais. Dans les années 2000, nouveau motif de trouille : le poulet OGM, gros comme un veau, avec trois pattes, quatre yeux et deux becs. Mais le monstre n'a pas été aperçu non plus dans nos campagnes. Nos poulets ont continué à être mangés et assaisonnés au citron, au curry, au maroille, poulet fermier, rôti, basquaise ... Aujourd'hui, l'Europe veut nous faire déguster, c'est le cas de le dire : sa nouvelle recette, le poulet à la javel !

Les anti-européens sont aussi des anti-américains et des anti-libéraux (des anti-tout, en réalité). Le poulet chloré vient des Etats-Unis, via les échanges avec l'Europe, affublés de sigles barbares, mystérieux, inquiétants : TTIP, TAFTA, GMT. Souvenez-vous : en 2005, les anti-européens se focalisaient sur le TCE, quasi équivalent dans la Bible du 666, le signe de la Bête. Pour eux, l'Europe est diabolique et maudite. Pourtant, ce grand marché transatlantique n'est qu'en négociations, et aucun poulet javellisé n'a encore débarqué sur nos côtes. Mais les anti-européens veulent marquer les esprits et des points aux élections !

Leur poulet à la javel, il n'y a pas de quoi en faire un fromage, et sûrement pas un scandale politico-économique. Ce n'est qu'une procédure d'hygiène, une solution antimicrobienne à base de chlore dilué, la moderne Amérique étant plus pointilleuse sur les questions de propreté que la vieille Europe. Est-ce qu'un Américain est mort d'avoir mangé du poulet ainsi désinfecté ? Non. Est-ce que certains sont tombés malades après l'avoir digéré ? Non plus, sinon la méthode aurait vite été stoppée. Les anti-européens dénoncent le poulet chloré : et pourquoi pas le lapin, qui n'est pas plus propre qu'un poulet, qui devrait donc lui aussi passer au bain d'eau de javel ? Non, le lapin, c'est moins évocateur, ça chatouille moins la symbolique française.

Et puis, quand nos anti-européens vont à la piscine, dans quoi trempent-ils leur corps, jusque dans ses parties les plus vulnérables, avalant au passage quelques gorgées de flotte ? Dans de l'eau chlorée ! Ils en survivent sans problème ... On comprend donc à quel niveau de désinformation et de manipulation en sont arrivés les anti-européens, dans leur haine de l'Europe. Ils frappent maintenant à ce que nous avons, nous autres Français, de plus sensibles : l'estomac, la bouffe !

Attention : je ne dis pas que la question technique du choix de traitement des viandes ne se pose pas. Il est évident que les moyens sanitaires et les traditions culturelles sont différentes des deux côtés de l'Atlantique. Les négociations autour du grand marché transatlantique doivent trancher sur ce point. Mais la façon dont les anti-européens s'en saisissent pour discréditer l'Europe et affoler les populations est condamnable et nous prépare, dans une semaine, à faire de l'extrême droite le parti en tête, ce qui serait une catastrophe nationale. A ces anti-européens qui font feu de tout bois, plombier polonais hier, volaille javellisée aujourd'hui, j'ai envie de leur demander : et mon cul, c'est du poulet ?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

je reproche aux pro européens de ne pas définir clairement leurs ambitions .
jusqu'ou veulent ils aller dans la construction de l Europe ?
Les candidats, veulent tous plus d Europe mais jamais ils ne précisent les pouvoirs qu ils sont prêt a déléguer aux élus européens. Tout est flou, il n y a pas de véritables engagements.
le candidats pro européens font campagne sur le thème, votez pour moi je défendrai les intérêts de la France.
Ce n est pas ca pour moi la construction européenne, je souhaite entendre, votez pour moi, j irai défendre l intérêt de l'Europe !