lundi 24 mars 2014

L'avenir, c'est maintenant



La défaite de Michel Garand est-elle due à Michel Garand ? Non, il ne faut pas surestimer le rôle des personnes en politique. Le candidat socialiste a fait le job, à sa façon, animé d'une foncière bonne volonté : on ne peut rien lui reprocher de ce côté-là. Pas assez offensif face à Xavier Bertrand ? Non, Michel Garand a simplement été lui-même : posé, calme, pondéré. Il n'aurait servi à rien de jouer à ce qu'il n'est pas, agressif. Et puis, il n'a pas l'expérience d'un élu s'opposant à Xavier Bertrand, à la différence d'Olivier Tournay. Enfin, Michel Garand n'est pas trop dans la communication, mais c'est bon nombre de socialistes qui, quasi culturellement, éprouvent des réticences, pour ne pas dire plus, à l'égard des médias, de la presse, des journalistes. Quant au dépassement par l'extrême droite, les dernières cantonales avaient déjà été un sévère avertissement : mais qui en a vraiment tenu compte ?

Les attaques contre le maire sortant ont-elles été trop personnelles ? Je ne me serais pas engagé là-dedans, mais c'est un choix tactique dont il est difficile de mesurer les effets ou les contre-effets. Les divisions avec les communistes n'ont rien arrangé, c'est évident. Il y a eu aussi les épiphénomènes fâcheux : l'épisode Monnoyer, le désaccord avec les Verts. On a beau tourner et retourner tout ça dans sa tête, je crois que les raisons de la défaite sont ailleurs, plus structurelles et surtout plus anciennes :

Il y a, à chaque scrutin, un manque certain d'anticipation et de préparation. Cette fois-ci, Michel Garand a fait connaître sa candidature 9 mois avant l'élection, alors que nos candidats devraient être choisis et lancés sur le terrain au moins trois ans auparavant. Depuis cinq ans, à intervalles réguliers dans la presse, Anne Ferreira laissait entendre qu'elle serait candidate, pour finalement renoncer. Ce n'est pas bon, l'électorat n'a plus de repère. Nous aurons, l'an prochain, des élections cantonales. Si nos candidats ne sont pas désignés et préparés dès maintenant, nous connaîtrons la même défaite. Pour ces municipales, j'avais suggéré de passer par des primaires citoyennes, au lieu d'un vote interne, d'une désignation par l'appareil. Dans l'avenir, il faudra songer à élargir notre audience, impliquer dans nos choix nos sympathisants et nos électeurs. Les socialistes ne peuvent plus rester entre eux, aussi peu nombreux.

Le parti socialiste est absent, depuis des années, de la vie locale, du débat public, du tissu associatif. Nos réseaux sont très affaiblis. Le fond de la défaite vient de là, Michel Garand ou pas. Quand on pense que la section n'a même plus de site internet, qu'aucun leader national, hors période de congrès, n'a été invité depuis bien longtemps, que très peu de réunions ouvertes à la population sont organisées hors période électorale ... C'est tout le parti socialiste à Saint-Quentin qui est à reconstruire. Face à l'extrême droite, qui nous a ravi la première place d'opposant, nous devons être beaucoup plus offensif, pédagogue : c'est un électorat populaire qu'il nous revient de reconquérir. Enfin, c'est avec toute la gauche que nous devons rouvrir le dialogue, en premier lieu nos camarades communistes, et mener des actions communes, quand c'est possible.

Dans cette analyse de la défaite, il serait trop facile d'en faire porter la responsabilité sur la politique nationale. Le scrutin municipal est d'abord local, les raisons de l'échec sont d'abord locales. Et puis, dans beaucoup d'endroits, les socialistes résistent bien, améliorent leurs scores ou conservent leurs mairies : c'est bien la preuve qu'on ne peut pas mettre totalement l'échec sur le dos du gouvernement ! En tout cas, cette réaction de défausse serait irresponsable : des socialistes doivent défendre leur gouvernement et sa politique, même si elle est impopulaire. L'arbre sera jugé à ses fruits, qui prennent du temps : en attendant, défendons dès maintenant les acquis, les avancées qui sont nombreux mais pas assez connus ni soutenus.

Je n'ai fait ici qu'évoquer brièvement quelques raisons d'une cruelle défaite, qui mériteraient d'être plus amplement développées, quand le moment viendra. Pour l'heure, le plus important me semble d'écarter tout découragement, toute désespérance. Pour cela, il va falloir très vite proposer une perspective d'avenir pour le parti socialiste et l'ensemble de la gauche locale. Comme je l'écrivais hier, l'avenir commence maintenant.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je reste persuadé qque le P.S. n'adopte pas de stratégie de communication,qui est un des fondements,en 2014,pour pouvoir exprimer cairement ses idées.D'autre part,les élections locales manquent de visibilité auprès des électeurs.Le P.S. ne peut faire l'économie d'un dialogue dans les lieux d'échanges plébiscités par son électorat.D'accord avec l'analyse d'E.M.

Anonyme a dit…

La défaite de la gauche est d’abord celle du président de la République en rupture profonde avec une part de son électorat. Même, dans le fief limousin de François Hollande, le PS est en recul. Jusqu’à Limoges, terre historiquement socialiste, où le FN fait une percée à 17%. Devant la réalité de la carte électorale, le chef de l’État se doit de réagir. D’expliquer au peuple de gauche qu’il a entendu son message, qu’il a compris le désarroi d’une part grandissante de la population, qu’il sait encore parler des difficultés du quotidien. Dire aussi clairement qu’il mesure le discrédit de son gouvernement. Mais la marge de manœuvre est étroite. Le cap économique fixé en début d’année a donné une cohérence à la politique gouvernementale. Et, dans l’attente de résultats, la ligne sociale-démocrate ne semble pas être amendable avant plusieurs mois. François Hollande doit donc trouver la mesure du changement en intégrant les contraintes budgétaires et européennes, sans modifier son agenda.

Au-delà des hommes qu’il choisira pour constituer sa prochaine équipe, il lui appartient de retrouver les mots, le discours de gauche qui lui avaient permis de remporter la présidentielle. Trouver aussi la gouvernance claire qui fait défaut depuis deux ans.