vendredi 14 mars 2014

Débat en indirect



Je n'ai pas pu assister hier au grand débat entre les candidats à l'élection municipale de Saint-Quentin. C'est donc à partir d'informations indirectes et partielles, prises sur les sites internet et les pages Facebook, que je vais commenter cet important moment de la campagne électorale. Je ne crois pas que ce soit le débat en lui-même qui ait un impact : le public présent était convaincu d'avance, les candidats ont tenu des propos attendus. Ce qui va être déterminant, ce sont les gros titres de la presse locale de demain matin, dans la publication des échanges. C'est ce ressenti qui peut infléchir le cours de la campagne. Sites, blogs et Facebook ont une influence très limitée ; mais les journaux touchent de beaucoup plus près et beaucoup plus largement l'opinion publique.

Ce qui a fait le buzz toute la journée, c'est évidemment la "révélation" de Xavier Bertrand, prétendant que Michel Garand aurait souhaité être son premier adjoint. Ma réaction est simple : une conversation privée reste privée, il n'y a aucun témoin pour la confirmer, la saine politique repose sur des déclarations, des choix et des comportements publics. Il faut juger sur les faits, pas sur les confidences : est-ce que Michel Garand a déjà fait partie d'une liste de droite ? Est-ce qu'il a, à aucun moment de son parcours politique, exprimé le désir de rejoindre une liste de droite ? La réponse est doublement non. S'il l'avait voulu, il l'aurait fait depuis bien longtemps, comme d'autres avant lui, comme d'autres encore maintenant. Mais pas lui. C'est un homme fidèle à ses engagements, à ses convictions et à son parti. Il n'y a donc pas de soupçon à porter sur sa sincérité.

L'Aisne nouvelle présente Olivier Tournay comme "le grand vainqueur du débat", allant même jusqu'à s'interroger sur une "renaissance du PCF à Saint-Quentin". Grand vainqueur du débat, peut-être, je n'ai pas suivi tout le débat, mais la seule chose qui importe politiquement, c'est d'être le grand vainqueur de l'élection. Qu'Olivier fasse un bon score, c'est possible ; mais qu'il soit en situation de devenir maire de Saint-Quentin, c'est autre chose (c'est pourtant le seul objectif qui compte, quand on est de gauche). L'idée communiste n'a plus suffisamment le vent en poupe, même dans notre ville, pour espérer véritablement renaître à Saint-Quentin et retrouver son niveau électoral d'il y a 30 ans.

Quant à envisager une "quadrangulaire", comme le fait L'Aisne nouvelle, là encore le cas de figure n'est pas exclu, mais ce serait catastrophique pour la gauche : c'est pourquoi, au milieu de toutes les difficultés que cette stratégie représente, je suis depuis le début favorable à l'union des forces de gauche entre les deux tours et à la constitution d'une liste commune. Michel Garand n'est pas sur cette position ; je respecte son point de vue, qui a sa cohérence, et je m'y rangerai le moment venu, puisque c'est lui le candidat, pas moi. Mais s'il fallait pour l'instant émettre un souhait, ce serait de voir les lignes bouger sur ce point, et les uns se rapprocher des autres en vue de l'unité et de la victoire.

Je veux revenir sur la performance oratoire attribuée à Olivier Tournay : il faut être juste, et comparer ce qui est comparable. Olivier a bénéficié pendant six ans d'une formidable tribune, celle du Conseil municipal, qui lui a permis de faire ses preuves et d'être positivement médiatisé. D'autre part, en tant qu'élu, il a eu accès aux dossiers, il s'est familiarisé avec les questions municipales. Michel Garand n'a pas bénéficié de ces opportunités. La comparaison ne peut donc que lui être défavorable, mais injustement. Dans une élection, tous les candidats sont par principe sur la même ligne de départ. Ce qu'il est juste de comparer, ce ne sont pas les hommes, ce sont les programmes : projet contre projet, ça aussi, c'est mon idée depuis le début. Une élection ne se fait pas sur le passé, sur ce qu'on a été, mais sur l'avenir, sur ce qu'on fera. Garand/Tournay, si on tient à les comparer, c'est à cette aune-là.

L'Aisne nouvelle désigne Olivier Tournay comme "le véritable opposant" à Xavier Bertrand. Mais il n'y a qu'un seul véritable opposant : c'est celui qui battra le maire sortant. Dans les circonstances actuelles, en étant le plus rigoureux et le plus honnête possible, je ne vois que Michel Garand qui soit dans cette capacité, pas Olivier Tournay (et ce n'est pas parce que je suis socialiste que je le dis, mais parce que je le pense et que ça me semble être une évidence, quelle que soit la sympathie réelle que je puisse éprouver pour Olivier).

De ce que j'ai vu et lu de ce débat, je retiens aussi le petit coup médiatique qu'a voulu faire Michel Garand dans sa conclusion, utilisant ses 30 secondes de parole à ... ne rien dire, pour symboliser ce qu'il estime être le vide du bilan de Xavier Bertrand. L'effet est un peu forcé, je ne pense pas qu'on puisse dire que Xavier Bertrand n'ait rien fait, mais l'idée est astucieuse. Sa limite, en termes de communication, c'est qu'elle aurait été très efficace à la télévision, mais beaucoup moins dans un débat destiné à être publié sur papier. Ceci dit, Michel a eu raison de tenter cette originalité.

Il ne fallait pas attendre grand chose, électoralement, du débat d'hier. Mais c'était, au peu que j'ai pu en voir, un beau moment de démocratie, bien organisé, qu'il faudra, pour d'autres scrutins, rééditer. Les véritables retombées électorales, comme je l'ai précisé au début, auront lieu demain matin, à la lecture des compte-rendus dans les journaux, et les réactions qu'ils vont susciter. Après, il ne restera plus qu'une semaine pour confirmer, amplifier, infléchir ou renverser la tendance. Michel Garand organisera un grand meeting le 20 mars au Conservatoire : ce sera pour lui, pour nous, la dernière occasion de convaincre, d'entraîner.

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