lundi 13 février 2012

Un Conseil presque sans histoire.

Le Courrier Picard avait annoncé la présence de parents d'élèves en colère, mais nous étions au balcon entre habitués. L'Aisne Nouvelle avait prédit un Conseil municipal "relativement calme". C'est vrai que les deux interventions principales d'Olivier Tournay (opposition, PCF), sur la vidéo-surveillance et la carte scolaire, étaient des reprises sans surprise. Bref, un Conseil municipal à Saint-Quentin sans histoire ... s'il n'y avait eu la longue et stupéfiante déclaration préalable d'Antonio Ribeiro (majorité, Gauche moderne).

Il fera bientôt quinze ans que j'assiste régulièrement aux séances, c'est la première fois que je vois ça : presque une demi-heure de propos surréalistes et scandaleux, s'en prenant aux élus de l'opposition, à leur caractère, jouant de la dérision à travers une rhétorique souvent confuse. Ce n'était pas à l'honneur de son auteur ni de la démocratie locale que d'en arriver à une telle bassesse. Si ce n'était pas grave, je ferais le coup du mépris, comme Olivier Tournay. Mais ces paroles ne peuvent pas rester sans réaction. Je suis obligé de reprendre ce qui a été dit pour que chacun en mesure l'ignominie et parfois le ridicule.

Antonio Ribeiro a commencé par justifier son abstention (par pouvoir) lors du vote sur le budget en précisant que si c'était maintenant à refaire il voterait ... pour le budget, parce qu'il a eu depuis la réponse à la question qu'il se posait (on ne saura jamais laquelle, ça vaut d'ailleurs peut-être mieux). Burlesque, tout comme le principal reproche qu'il lance à l'opposition : ne pas poser les bonnes questions, ne pas être finalement une véritable opposition (hallucinant !). Pour un peu on aurait cru que l'opposition à la droite, que la gauche locale c'était lui et lui seul !

Ensuite a démarré une incroyable série d'attaques personnelles qui n'en finissaient pas, chaque élu d'opposition nommément cité en prenant pour son grade (sauf Carole Berlemont, on se demande bien pourquoi). Jean-Pierre Lançon ? "Il trompe son électorat", "n'est virulent que dans la voix". Frank Mousset ? "Doux, timide et muet". Michel Aurigny ? "Il parle pour ne rien dire", "n'est pas ouvrier" (référence à son appartenance au Parti ouvrier indépendant). Nora Ahmed-Ali (que Ribeiro appelle "Madame Nora" !) ? "Un papillon qui ne ferait pas de mal à une mouche", "une élue Verte qui a besoin de mûrir". Anne Zanditenas ? Ribeiro s'est moqué de son engagement auprès d'Arlette Laguiller. Olivier Tournay ? Il s'est vu accusé de connivence avec le Centre social Artois-Champagne où travaille sa camarade Corinne Bécourt. Céline Sené ? "La honte vivante de l'opposition saint-quentinoise" parce qu'"elle ne siège plus depuis trois ans" (ce qui est faux : elle est absente mais pas à ce point). Je passe sur les allusions obscures à la subvention sportive de Fresnoy-le-Grand pour laquelle Lançon et Tournay auraient selon le leader de la Gauche moderne des choses à se reprocher.

Ce discours était indigne, déplacé, inacceptable. Où est le respect ? Le plus stupéfiant c'est que l'opposition l'a écouté sans broncher, sans l'interrompre (trente minutes c'est long !) et une fois Ribeiro ayant évacué ses dernières gouttes de venin, elle n'a rien dit, rien rétorqué (sauf Anne Zanditenas, brièvement et sans l'indignation que méritait une telle intervention). J'en suis resté bouche bée. Tant de violence ... puis le silence, ce qui revient en politique à accepter. Non, chef de l'opposition, je n'aurais pas laisser passer.

D'abord, au bout de cinq minutes, je me serais levé en entraînant derrière moi tous les élus d'opposition, qui n'avaient pas à assister à leur propre humiliation. Ensuite, de retour, sans entrer dans le jeu vicieux d'Antonio Ribeiro, sans répondre à ses allégations qui n'appellent que l'indifférence, j'aurais rappelé à Monsieur le Maire, président de la séance, garant de la bonne tenue des débats, quelques principes sur lesquels tous les républicains peuvent s'accorder : pas d'attaques sur les personnes, pas de propos calomnieux, pas de sous-entendus litigieux.

On peut si l'on veut traiter l'incident de ce soir à la rigolade et Ribeiro de bouffon. Je ne le prends pas comme ça mais très au sérieux : nous avons assisté à une atteinte à la démocratie que tout le monde devrait condamner (je suis persuadé que bien des élus de la majorité, quoique ne portant pas l'opposition dans leur coeur, ont été ulcérés par ce qu'ils ont entendu). On peut penser ce qu'on veut des uns et des autres, donner son point de vue avec la passion qui est propre au combat politique, on n'a pas le droit de s'exprimer comme ça. J'espère vraiment que ça ne se reproduira pas.

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