dimanche 19 février 2012

Discussion avec le Front de gauche.

Discussion hier avec une militante du Front de gauche, qui est contente d'avoir entendu François Hollande dans son discours du Bourget être "contre la finance". Je suis toujours content quand quelqu'un est content de ce que dit François. Mais je crains comme le feu l'illusion en politique, qui va de pair avec la déception. A cette militante qui souhaite "rompre avec le capitalisme", je précise que notre candidat n'est pas vraiment sur cette ligne-là, qu'une fois parvenu au pouvoir il ne sera pas "contre la finance" mais qu'il lui faudra composer avec elle, imposer des règles, prendre des mesures sociales sans pour autant "rompre avec le capitalisme".

Je lui rappelle aussi qu'un homme politique ne se juge pas à un slogan mais à un programme, qu'il faut s'intéresser beaucoup plus aux actes qu'aux paroles, qu'en la matière François Hollande est un parfait social-démocrate, que tout son parcours politique l'atteste. Je préfère la lucidité à l'illusion. Après, chacun se fait son opinion et choisit. Mais il ne faut pas qu'il y ait tromperie sur la marchandise, comme il a pu se produire quelquefois dans l'histoire de la gauche.

Ma militante Front de gauche me rétorque que Mélenchon faisant un bon score, le PS sera obligé de s'aligner sur une ligne plus radicale pour gagner au deuxième tour. Je souris de cette naïveté. Hollande l'a pourtant dit : dans une présidentielle, pas de négo entre les deux tours, chaque force politique se détermine par rapport aux candidats en lice. L'histoire récente du PCF prouve s'il le fallait que ce parti n'a jamais pu infléchir la ligne du PS plus à gauche.

Je connais mes socialistes : discours à gauche et politique social-démocrate. Pourquoi pas, l'habileté est aussi une vertu en politique, mais je préfère qu'on accorde les mots et les actes. Même en interne, dans le jeu des courants, le PS ne s'est jamais radicalisé. C'est pourquoi Chevènement est parti, c'est pourquoi Mélenchon est parti, c'est pourquoi Montebourg, malgré son score aux primaires, n'a pas pesé sur la ligne social-démocrate actuelle. L'aile gauche n'a d'influence qu'à l'extérieur, pas sur l'appareil (à l'exception des investitures aux élections, mais nous ne sommes plus alors dans le débat idéologique).

La militante du Front de gauche avec laquelle je discute en convient finalement : Hollande n'a-t-il pas dit cette semaine qu'il était "libéral" et qu'il n'y avait plus de communistes en France ? ce qui la rend évidemment furax. Je suis obligé de préciser, une fois de plus : oui, au sens anglo-saxon du terme (Hollande s'adressait à un journal anglais), il est "libéral" c'est-à-dire partisan de l'économie de marché, et pas favorable à sa collectivisation. Nicolas Sarkozy a joué là-dessus en laissant croire à une contradiction et à un mensonge. Mais non : le marché et le socialisme ne sont pas contradictoires (Rocard le disait déjà dans les années 70). Simplement, il faut bien s'entendre sur les mots et leur définition. Lucidité et clarté, sinon on dit ou on en pense n'importe quoi, n'importe comment.

Quant à la disparition des communistes français, soyons cette fois précis : à l'évidence il y a un parti et un électorat communistes, François Hollande ne le nie évidemment pas ! Mais il n'y a plus aujourd'hui, à l'élection présidentielle, de candidat précisément communiste, puisque Jean-Luc Mélenchon est un ex-socialiste à la tête d'une coalition. C'est un constat, ce n'est pas un jugement, encore moins une critique envers le PCF.

Je termine ma discussion avec la militante du Front de gauche en lui disant que la discipline républicaine nous conduira à nous rassembler, toutes familles de la gauche, au second tour des présidentielles et des législatives, qu'en attendant chacun doit choisir et agir dans la lucidité, la clarté et la précision, sans illusion, sans confusion, sans soupçon. Si nous tenons sur cette ligne, nous pourrons aller très loin. Sinon, ce sera la déception, la rancoeur et l'échec.

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