jeudi 1 décembre 2011

Des hommes et des places.

Ce 1er décembre, les socialistes choisissent leurs candidats aux élections législatives de 2012. Tout le parti vote, démocratiquement. Les urnes vont donc parler, et elles ont toujours quelque chose à dire, même quand il n'y a, c'est la plupart des cas, qu'un seul candidat. Taux de participation, nombre d'abstentions, un scrutin, quel qu'il soit, est toujours plein de surprises. C'est ça aussi la démocratie.

Ce n'est pas facile. Le parti et les médias bruissent de mécontentements et de protestations, authentiques ou infondés. Mais c'est normal : tant qu'il y aura des hommes et des places, et plus d'hommes qu'il n'y a de places, la vie politique sera faite de ces remous et résistances, qui finissent par passer, car tout finit par passer en politique, il suffit d'attendre. Dans l'idéal, seules les convictions devraient compter. Imaginez la politique sans places à prendre : tout serait autrement. Mais la réalité n'est pas l'idéal.

En politique, vouloir une place est parfaitement légitime. Sans elle, rien n'est possible. Autant rester chez soi faire du tricot. La boutade dit du parti socialiste que la moitié de ses adhérents sont des élus et que l'autre moitié cherchent à le devenir ! Une place ce n'est pas nécessairement le pouvoir mais c'est la reconnaissance : une grande partie des places sont de pure représentation. Une place mal placée, dans les derniers rangs, non éligible mais une place : voilà l'ambition de base, être candidat à quelque chose, obtenir un quelconque mandat, dont se moque celui qui ne fait pas de politique ou en ignore tout.

Forcément il y a des problèmes, c'est le système qui veut ça. Dans l'Aisne, on ne sait toujours pas si Jean-Pierre Balligand va se représenter. René Dosière a la main, mais Fawaz Karimet n'a pas renoncé. La circonscription de Chauny-Soissons est réservée a une femme mais il n'y a pas de femme. Sur Château-Thierry, le candidat Jacques Krabal ne fait pas l'unanimité. Il n'y a qu'à Saint-Quentin que règne le calme plat, étrangement, si anormalement que c'en est inquiétant.

Ailleurs, ce n'est pas mieux et c'est tant mieux : tant qu'il y a de la politique, il y a de la vie ! Faouzi Lamdaoui, chef de cabinet de François Hollande, n'a pas obtenu la 9ème circonscription des Français de l'étranger. C'est un drame ordinaire qui le pousse sur Twitter à philosopher, et moi avec lui : "A force de se créer des illusions, nous vivons dans un monde d'illusions" écrit-il joliment. Mais son tort est de s'en désoler : il y aura toujours en politique autant d'illusions qu'il y a de places. Si nous étions lucides et raisonnables, personne ne ferait de politique, cette grande fabrique d'illusions et de déceptions.

Mon camarade Lamdaoui a pondu aussi cet aphorisme : "Un vrai leader doit respecter ses engagements envers ses compagnons historiques". L'intention morale est louable mais c'est historiquement faux : la Révolution française a dévoré ses enfants, Staline a liquidé ses premiers compagnons, Hitler s'est débarrassé de Röhm et de ses SA qui lui étaient proches et je pourrais continuer la liste.

Du côté d'Amiens, quelle surprise ! Je retrouve Christophe Borgel, que j'ai quitté il y a treize ans, après avoir milité ensemble dans la section du XIXème arrondissement de Paris, avec la bande à Camba et Mao Peninou (le fils du grand journaliste). Christophe lui aussi a là-bas des problèmes de place. Je ne me fais pas trop de souci : c'est un politique habile, qui sait ne pas céder tout en étant ouvert au compromis.

Les hommes et les places, c'est l'éternel ballet de la politique, qu'on règle plus vite et plus facilement qu'on ne croit. La question fondamentale n'est pas celle-là mais plutôt : les hommes sont-ils à leur place ? En démocratie c'est le peuple qui en décide, par ses votes.

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