mercredi 28 décembre 2011

Des grilles qui divisent.

De quoi parle-t-on en ce moment à Saint-Amand-Montrond, chef-lieu berrichon de la France profonde et ma ville natale ? Encore de DSK ? Non, vous n'y êtes pas. Des prochaines présidentielles et de Marine Le Pen ? Oui un peu, mais ce n'est pas encore ça. Saint-Amand est divisé, depuis trois ans déjà, par une histoire de grilles qui met tout le monde en émoi, c'est à dire quelques personnes.

Mais quelles personnes ! Le prêtre de la paroisse, le maire UMP et un docteur en histoire de l'art. C'est donc du sérieux, du très lourd, une querelle de grilles comme il y a des querelles de clochers. De quoi s'agit-il exactement ? D'une belle grille en fer forgé qui a disparu de l'église du XIIè siècle : elle entourait le choeur, j'en sais quelque chose puisque j'ai servi en ce lieu la messe quand j'étais enfant (de choeur).

Généralement, quand un mur tombe, c'est la fête ( mur de Berlin, par exemple). Ici, une grille qu'on enlève et c'est la polémique. Pourquoi ? Pour des raisons à la fois juridique, esthétique, théologique et politique. Quand je vous disais que c'était du très lourd, aussi lourd que les grilles du scandale ! Bon, je vous explique :

Le conflit est d'abord juridique : le curé, Philippe Régnault de la Mothe, d'une vieille famille aristocratique berrichonne, avait-il le droit d'abattre les grilles de son église ? Il répond que oui, que le curé c'est lui ! Mais Julien Noblet, docteur en histoire de l'art, répond que non, que les monuments historiques, qui protègent selon lui l'église et la grille, n'ont pas donné l'autorisation.

Le conflit est ensuite esthétique : Noblet, dans le journal local "Le Berry républicain" accuse le pasteur de "vandalisme" et d' "agression contre le patrimoine". Le dit pasteur rétorque dans sa feuille paroissiale que "les églises ont été faites pour le culte divin et pour le peuple et non pour être des musées ou des salles de concert". C'est chaud bouillant, comme vous le constatez.

Le conflit est aussi théologique : là, c'est le curé qui passe à l'attaque, normal. Il affirme que le docteur est nul en droit canon et pastorale chrétienne, mésinterprétant l'usage des grilles, qui servent à la table de communion et pas à séparer fidèles et clergé, selon Régnault de la Mothe, s'appuyant sur le concile de Trente. Quant à l'enlèvement des grilles, c'est au concile de Vatican II qu'il fait référence : on a beau être aristo, les signes d'exclusion ne plaisent pas et c'est pourquoi les grilles ont été arrachées.

Le conflit est enfin politique : Noblet, qui n'est pas noble, accuse le maire UMP de collusion avec le curé et de se mettre "en dehors de la loi".

Voilà, vous savez tout, je vous laisse choisir votre camp. Ah si, une dernière chose : ce matin, je suis retourné dans un autre lieu de mon enfance, après l'église, le petit jardin public, que j'ai toujours connu entouré d'un simple muret. Devinez par quoi a-t-il été récemment surmonté ? Par des grilles ! La municipalité a sûrement voulu le sécuriser, comme on dit aujourd'hui. Grilles qu'on abat d'un côté, qu'on dresse de l'autre, qu'en penser ? Je serai à nouveau à Saint-Amand-Montrond à Pâques, je vous raconterai la suite ...

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Cher Monsieur,

les barrières de communion de l'église de St Amand Md ont été reposées : le maire et l'ancien curé "hors la loi" ont perdu ; le droit a vaincu et le patrimoine est préservé, ce qui est l'essentiel,

Bien à vous

Emmanuel Mousset a dit…

En effet, je l'ai appris, et je ne manquerai pas d'aller voir lors de mon prochain séjour dans ma ville natale.