vendredi 4 novembre 2011

Une combattante exceptionnelle.

J'ai été hier soir très impressionné par Nadia El Fani, réalisatrice de Laïcité inch'allah, de passage à Saint-Quentin pour une séance exceptionnelle du ciné philo. Menacée de mort, craignant de retourner dans son pays la Tunisie, frappée par un cancer, cette femme est d'une grande force, d'un calme souverain et d'un courage à toute épreuve. Elle pourrait être tourmentée par des sentiments de haine, de revanche ou d'abattement : mais non, elle se bat.

Je ne connais rien de plus beau que quelqu'un qui se bat pour ses convictions. Nous vivons ici en France dans une société tellement prompte aux accommodements, aux petites lâchetés, aux intérêts minables qu'il est réconfortant de rencontrer une combattante. Je ne force pas mes mots, car c'est Nadia El Fani qui le dit dans son film : "Entre les islamistes et moi, c'est la guerre". Imagine-t-on le risque qu'elle prend en tenant de tels propos ? Autour de nous, dans la paix et bien au chaud, combien de nos personnages publics tournent-ils de fois leur langue dans leur bouche pour finalement ne rien oser dire ? Ce n'est plus la langue de bois, c'est la langue filandreuse de coton !

Le documentaire Laïcité inch'allah est superbe. D'abord, on y apprend plein de choses, comme de voir ces restaurants aux vitres masquées, cachant une large consommation de nourriture et d'alcool en pleine journée du ramadan. L'hypocrisie est l'attitude la mieux partagée en Tunisie. Quelqu'un donne cette surprenante définition de la liberté : faire tout ce qu'on veut, mais discrètement. Bref, faire semblant. D'autres pratiquent la religion mais n'y croient pas : pour faire comme tout le monde. C'est affligeant.

Heureusement, dans ce pays en pleine révolution, où les nombreux slogans sur les murs font penser à Mai 1968, il y a des paroles de vérité et de justice qui sont proférées : par exemple ce jeune homme, dans un forum, expliquant que la laïcité sert l'islam, en le délivrant du pouvoir, en le débarrassant de la politique, en ne le réduisant plus à une tradition et pression sociale, mais en le ressourçant à ce qu'il n'aurait jamais dû cesser être, une spiritualité choisie, une mystique libre, une foi personnelle, au lieu d'une doctrine d'oppression. J'ose ce paradoxe : le laïque bien compris est le meilleur ami de la religion, en Tunisie comme ailleurs. Bravo à Nadia El Fani et à son combat exemplaire !

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