vendredi 18 novembre 2011

Guaino en ville.

Coup de fil hier matin de Guillaume Carré, du Courrier Picard, qui me demande si je compte aller écouter Henri Guaino ce soir au théâtre Jean-Vilar à Saint-Quentin. La question d'abord me surprend : un socialiste ne se rend généralement pas dans une réunion UMP, pas plus qu'un militant UMP ne fréquente les meetings socialistes. Mais ce n'est pas aussi simple que ça, et la question du journaliste est pertinente pour trois raisons :

- La réunion est publique, ouverte à tous et se tient dans un lieu dédié à la culture plutôt qu'à la politique. Elle ressemble donc plus à une conférence-débat qu'au meeting d'un parti.

- Qui sont les organisateurs ? N'ayant pas reçu d'invitation personnelle, je ne sais pas, et la presse ne l'indique pas. Dans L'Aisne Nouvelle d'hier (qui s'est rendue directement dans les bureaux de l'Elysée !), Eric Leskiw consacre un long article à Henri Guaino mais ne mentionne pas l'UMP.

- Surtout, il y a la personnalité d'Henri Guaino : ni ministre, ni élu, ni dirigeant du parti présidentiel, c'est la plume et la tête du chef de l'Etat, un intellectuel et écrivain, l'équivalent de Jacques Attali auprès de François Mitterrand. A ce titre, c'est quelqu'un d'intéressant, avec lequel il y a plaisir et intérêt à discuter.

Je suis curieux de tout, très ouvert et pas sectaire pour un sou. Tout ce qui est républicain mérite l'attention. Je ne m'interdis qu'une seule fréquentation, celle de l'extrême droite. Mais voilà : si la réunion de ce soir est en soutien à la politique gouvernementale, je ne peux pas décemment m'y rendre puisque je n'adhère pas à cette politique. Ou alors, il faudrait remettre au goût du jour une vieille tradition républicaine tombée complètement en désuétude : aller porter la contradiction en territoire adverse, chez l'opposant politique.

Là oui, interpeller Henri Guaino sur certaines idées qu'il défend et que je conteste, j'aimerais bien ! Pas pour embêter ou pour provoquer gratuitement, mais pour qu'il y ait du débat et un peu d'animation. Car les réunions politiques où l'on se congratule et remercie, entre soi, répétant ce qu'on sait déjà à un public entièrement acquis d'avance, c'est la barbe.

De toute façon, ce soir, je ne pourrai pas aller à Jean-Vilar, étant pris, comme souvent en soirée, par une animation philosophique, invité par le café philo de Tergnier, sur le thème "Qu'est-ce que je fais là ?" En l'occurrence, ça ne s'invente pas, et je vous promets que je ne l'ai pas fait exprès !

Du point du vue de l'UMP, faire venir Henri Guaino est une bonne initiative. Il faudrait que la gauche s'y mette, qu'elle aussi fasse venir ses intellectuels (elle n'en manque pas !) à Saint-Quentin. Remettre en perspective l'action politique dans une réflexion plus globale que les prises de position au jour le jour, c'est nécessaire, c'est revigorant pour les militants.

Il y a longtemps qu'un leader socialiste n'est pas venu à Saint-Quentin. Mais attention : la plus mauvaise période pour ce genre de rencontre, c'est la campagne électorale (nous en avons fait il y a dix ans la malheureuse expérience). Les gens ont alors l'impression qu'on vient les voir seulement pour leurs bulletins de vote et l'effet escompté ne se produit pas, peut même déclencher une réaction inverse. Le rôle d'un parti politique devrait aussi être d'éducation populaire, mouvement d'idées, promoteur d'une réflexion collective autre que les positionnements internes souvent artificiels des périodes de congrès.

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