vendredi 23 mars 2012

Un mois avant.

A un mois du premier tour des élections présidentielles, où en sommes-nous ? Je crois que la tragédie qu'a vécue la France cette semaine n'aura absolument aucune influence sur les résultats. Pourquoi ? Parce que le terrible événement n'a rien de politique, il ne trace pas de lignes de clivage entre les candidats. Le seul effet, paradoxal, qu'il pourrait avoir, c'est de faire baisser le score de l'extrême droite : son langage anxiogène, ethniciste et xénophobe finit par faire peur, la folie de Mohamed Merah peut être mis sur le compte de ce climat délétère créé par le Front national.

La montée du Front de gauche, jusqu'à dépasser le FN, est une excellente nouvelle. Non pas que je me réjouisse de la progression de ses idées puisque je ne les partage pas, mais elle a le grand mérite de clarifier le choix à gauche pour le premier tour : d'un côté une ligne social-démocrate raisonnable incarnée par François Hollande, de l'autre un socialisme traditionnel lyrique représenté par Jean-Luc Mélenchon.

La gauche a trop souvent par le passé souffert d'une ambiguïté, d'une confusion entre un discours radical et une pratique réformiste. Enfin l'alternative est claire, les discours et les programmes concordent : vous ne trouverez rien de révolutionnaire chez Hollande et rien de réformiste chez Mélenchon. A chaque électeur de se définir honnêtement selon ses convictions, sans mélange des genres, sachant que la discipline républicaine jouera à plein au second tour pour rassembler tout le monde.

Le faible score de l'extrême gauche (2% en tout, NPA et LO !) nous évite ce vote de substitution, très artificiel, qui a tant nui à la gauche lors des précédentes présidentielles. Le trotskisme ne motivait pas alors le choix des électeurs mais simplement leur mécontentement à l'égard du PS, au risque d'avantager la droite. Nous en avons fini avec ce vote purement tactique, donc contestable. L'assèchement électoral de l'extrême gauche aura également des conséquences à Saint-Quentin aux prochaines élections municipales (permettez que je pense aussi à ma ville !), rendant difficilement tenable le renouvellement des alliances PS-POI-LO-NPA.

Quant à la droite, Nicolas Sarkozy se bat comme un beau diable. Son profil très à droite n'étonne que ceux qui ne connaissent pas la droite et l'imaginent autrement qu'elle n'est. De ce point de vue, les présidences du passé sont un peu trompeuses : Giscard était un centriste réformateur et Chirac un radical-valoisien, ni l'un ni l'autre véritables hommes de droite, du moins idéologiquement. Sarkozy, depuis 2007, a renoué avec une droite bien dans ses bottes, ancrée dans ses fondamentaux. Avant lui, je ne vois qu'un seul président authentiquement de droite : le général de Gaulle !

La légende ou plus simplement la perte de mémoire l'imaginent en dehors des clivages politiques, le confondant ainsi avec l'homme du 18 juin. Non, de Gaulle n'était pas ce Bayrou avant l'heure qu'on nous dépeint parfois, mais quelqu'un dont l'éducation, la culture, les réflexes et les choix l'inscrivaient pleinement dans la tradition de la droite conservatrice (relisez les réactions violentes de la gauche de l'époque, Mitterrand au premier chef, et vous comprendrez).

Je ne vois pour l'instant qu'une seule anomalie et une profonde injustice dans cette campagne : le très faible score des écologistes. Ils paient le prix de s'être donnés, contre toute attente, une mauvaise candidate, de surcroît peu représentative de leur sensibilité, alors qu'un excellent candidat leur tendait les bras, Nicolas Hulot, qu'ils auraient normalement dû investir les yeux fermés. Mais je reste persuadé que cette noble et passionnante activité qu'est la politique n'est pas non plus quelque chose de toujours très "normal".

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