lundi 25 novembre 2013

Une question oubliée



Les questions de société interviennent régulièrement dans le débat politique, récemment le mariage homosexuel, prochainement (et déjà) le droit à l'euthanasie. Ce sont forcément des sujets très délicats, très lourds, propices à la controverse. Il y a pourtant une question ancienne qui n'est guère évoquée, dont l'intérêt est pourtant crucial : le don d'organes. Plus notre population vieillit, plus le besoin de transplantations augmente. Malgré tout, il y a aujourd'hui 17 500 personnes en attente, chiffre évidemment considérable. Le délai pour une transplantation est de 15 mois.

On se demande pourquoi notre société n'a pas réglée ce problème, qui semble éthiquement moins polémique que le mariage pour tous ou le droit à mourir dans la dignité. Mais c'est à voir, même si on en parle moins. Le corps garde une dimension sacrée, qui supporte mal qu'on l'ampute, en dépit des précautions qui y sont mises. Les réticences religieuses (le corps promis à la résurrection pour les chrétiens) n'ont pas disparu. Cependant, donner un organe, c'est transmettre la vie, c'est permettre à quelqu'un de revivre : il y a dans cette démarche quelque chose de très beau et de quasi mystique que les religions pourraient assumer.

En même temps, il ne sera jamais évident de sacrifier une partie de soi-même pour autrui. D'autant qu'un prélèvement n'est jamais complètement dénué de risques. Quant au receveur, il n'est pas non plus en situation facile : il se sent redevable de ce qu'il a de plus cher au monde, la vie. Paradoxe cruel, la baisse importante des accidents de la route a entraîné un recul des dons d'organes, comme si la vie l'emportait d'un côté et la mort prenait sa revanche de l'autre. Autre paradoxe : depuis trente ans, les incinérations ont fortement augmenté. On pourrait penser que celui qui livre son corps aux flammes va au préalable donner ses organes, puisque ceux-ci sont destinés de toute façon à devenir cendres. Eh bien non, il n'y a pas rapport de cause à conséquence, comme si celui qui part ne voulait rien laisser de lui sur cette terre, pas même un organe dans le corps d'un autre. On constate donc que la question éthique n'est pas absente.

Au plan législatif, toute personne décédée est un donneur potentiel, sauf opposition signifiée. C'est la notion de "consentement présumé". Mais la décision de prélever des organes est trop grave pour que la médecine en décide seule, sans l'autorisation de la famille. L'idéal serait de valider la carte de donneur, qui actuellement n'a aucune existence légale. C'est la demande des associations, qui mériterait d'être reprise par les partis et les candidats.

Ces réflexions sur le don d'organes, je vous les propose à la suite de notre ciné-débat de jeudi dernier, qui a reçu comme invité Henri Barbier, président régional de la FNAIR (Fédération nationale d'aide aux insuffisants rénaux), qui nous vient de Chauny, et Nathalie Joffrin, infirmière à l'hôpital de Saint-Quentin, coordinatrice pour les prélèvements d'organes et de tissus. Leur expérience et leur clarté nous ont singulièrement profité. Qu'ils en soient l'un et l'autre remerciés.

Vignette 1 : début de la soirée, Henri Barbier introduit.

Vignette 2 : fin de soirée, avec la directrice du cinéma, Michèle Zann.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Prévoyez de faire don de votre cerveau à MONNOYER pour sauver la VILLE !!

Emmanuel Mousset a dit…

Hors de question ! Il faut un esprit sain dans un corps sain.