mercredi 6 février 2013

Le pire des régimes, etc



Le dernier Spielberg, "Lincoln", est d'une facture très classique, très académique, par moments un peu long, un peu "théâtre filmé", parfois ennuyeux. Mais c'est une formidable réflexion politique sur la démocratie, "le pire des régimes, à l'exception des autres", c'est bien connu. Au XIXe siècle, l'Amérique est un pays de voyous et de fanatiques religieux qui bricole un système démocratique. Aurait-on imaginé qu'il devienne en quelques décennies la première puissance au monde, exportant sur toute la planète ses produits et ses armées ? Lincoln, à l'époque, n'est surtout pas un grand homme. Et pourtant, c'est un génie politique.

Nous sommes en pleine guerre de Sécession, un conflit horrible, sans compromis possible, des morts et des blessés comme on n'en n'avait jamais vu, la volonté d'anéantir l'ennemi : Spielberg filme superbement Lincoln traversant à cheval un champ de bataille, véritable charnier. Il veut la paix, tout le monde, nord et sud, veut la paix. Mais Lincoln veut plus : l'abolition de l'esclavage, qui ne gêne pas trop alors la plus grande démocratie du monde. Son coup de génie, c'est de laisser croire (il faut savoir mentir en politique) que cette abolition entraînera la fin de la guerre, alors que les confédérés sont à genou, prêts à se rendre.

Pour parvenir à ses fins, c'est-à-dire obtenir un vote au Congrès, le grand Lincoln va se compromettre dans de petites manoeuvres : acheter les quelques voix qui feront basculer en faveur de l'abolition. Hier comme aujourd'hui, pour mettre un élu dans sa poche, il faut lui promettre une place, lui faire miroiter une indemnité. Et ça marche ! Les plus idéalistes (il y en a quand même) mettent de l'eau dans leur vin : ils renoncent à défendre l'égalité des races afin que l'abolition de l'esclavage, mesure moins radicale, puisse être adoptée. Qu'est-ce qui compte en politique, en démocratie ? Les résultats, peu importe les moyens. Lincoln terminera sa carrière plusieurs balles dans le corps. La démocratie est le pire des régimes, etc.

Sur la démocratie américaine et l'esclavage, allez voir aussi le dernier et époustouflant Tarantino : on coupait les couilles des Noirs, ils n'avaient pas le droit de monter à cheval, la religion servait à justifier leur oppression, ...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

le 3 eme est surement le plus authentique film qui aborde un aspect de la democratie americaine vient de quitter l'affiche à st quentin
c est l excellent :"les betes du sud sauvage"
Un magnifique film qui porte un regard sur la situation actuelle des exclus et marginaux aux etats unis.