jeudi 21 février 2013

Affres du off



La polémique entre Jocelyne Nardi, présidente de l'ASTI, et Freddy Grzeziczak, adjoint aux affaires sociales (voir mon billet de lundi, "Ces gens-là"), est révélatrice du rôle de la presse dans la vie publique et des problèmes que pose la communication. Si Guillaume Carré, du Courrier picard, n'avait pas été présent à l'assemblée générale de l'association, si les propos de Jocelyne n'avait pas été rapportés dans le journal, personne n'en n'aurait rien su, la phrase aurait été noyée au milieu d'autres phrases, aucune polémique n'aurait surgi. C'est dire à quel point la presse locale est une caisse de résonance, une chambre d'échos, une scène publique qui crée à sa façon l'évènement politique.

Je pense pense même que les prochaines élections municipales à Saint-Quentin se joueront, pour beaucoup, dans la presse et sur le net. Prenez la polémique à rallonges, qui s'est déroulée sur plusieurs semaines, et pas encore terminée à l'heure qu'il est, au sujet de l'élection du secrétaire de la section socialiste (voir mon billet d'hier, "Ces primaires qui viennent") : tout est parti d'une brève dans L'Union, l'affaire n'a pas été franchement discutée entre socialistes, le débat a eu lieu quasi exclusivement à travers la presse, les déclarations des uns et des autres. C'est le travail d'investigation des journalistes qui a levé un certain nombre de lapins. Moi-même, j'ai été complètement dépassé par les évènements. Drôle d'impression d'une petite histoire locale qui nous échappe, qui se fait en dépit de ses principaux protagonistes et contre eux !

Je reviens au cas Jocelyne et Freddy, qui est aussi un cas d'école, où tous les deux finalement ont tort, en matière de communication. Jocelyne dit : "C'est mot à mot ce qu'il m'a dit, on ne peut pas inventer des choses pareilles". L'argument est puissant et je la crois volontiers. Mais qu'avait-elle à rapporter un entretien téléphonique d'avril 2 012 ? Je ne le fais jamais, je ne commente que les propos publics des hommes publics, c'est l'idée que je me fais de la politique.

Freddy dit : "Ce sont des propos sortis de leur contexte et mensongers". Je veux bien croire qu'il y a des façons de parler qui ne produisent pas le même effet, qui n'ont pas le même sens selon qu'on est au téléphone ou à une tribune. Mais je pense tout de même que Jocelyne a reproduit des mots approchant ceux de Freddy, qui s'est sans doute un peu lâché dans une conversation pour lui d'ordre privée (et nous sommes tous un peu comme ça, nous autorisant en privé des réactions que nous n'aurions pas en public : c'est humain).

Ce que je retiens de ce petit conflit qui sera vite oublié (mais qui confirme une fois de plus la méthode de la Municipalité : ne rien laisser passer, que les futurs candidats aux élections locales se le disent !), c'est qu'il ne doit plus y avoir de "off" en politique. Quand un adjoint au maire s'entretient, même au téléphone, même dans un registre qui peut sembler d'ordre privé, il doit contrôler sa parole et assumer complètement ses dires, quitte à les préciser ou à les rectifier ensuite.

C'est mon principe à l'égard de la presse : on m'appelle, on discute, quel que soit le sujet ou le lieu de nos échanges, je les assume entièrement, je ne retranche jamais rien de ce que les journalistes rapportent de moi (je n'ai d'ailleurs jamais eu l'occasion de le faire). Si j'ai quelque chose à cacher (et ça m'arrive, mais pas très souvent), je me tais, et j'explique aux journalistes pourquoi, sur tel point, je ne peux pas ou je choisis de ne rien dire. Et ils comprennent sans problème, ils font simplement leur métier, que beaucoup trop de responsables politiques ou associatifs, à Saint-Quentin, se laissent aller à caricaturer ou même parfois à mépriser (il y a des exemples célèbres !).

Xavier Bertrand, qui est forcément bien meilleur que moi en politique (quand on voit ce qu'il est et quand on compare avec ce que je suis !), n'est pas toujours très bon en communication personnelle et avec les journalistes locaux. A sa dernière réunion publique au Vermandois (rapportée par le Courrier picard de mardi), il n'invite pas les journalistes (c'est son droit), mais comme la rencontre est ouverte à tous ... les journalistes sont là, et le maire leur fait la leçon sur ce qu'ils doivent noter ou pas dans leur prochain article ! Pas bon, ça ...

Je trouve qu'à Saint-Quentin, gauche et droite n'ont pas un rapport satisfaisant et positif envers la la presse : soit elles sont dans le registre copains, se rapprochant du journaliste supposé favorable et censé leur faire un bon papier ; soit elles sont dans le verrouillage de l'information, où le journaliste n'a plus grand chose à se mettre sous la dent, sinon du pré-digéré. A mon petit niveau, je ne pratique ni le copinage, ni le verrouillage : je dis ce que j'ai à dire, et les journalistes en disent ce qu'ils veulent.

Liberté et respect, voilà mes deux principes dans les rapports avec la presse. Ce sont ceux que j'appliquerai scrupuleusement durant cette campagne électorale, dont j'ai souligné au début de ce billet toute l'importance qu'y prendront les médias. Et si les Saint-Quentinois me font l'honneur d'élire la liste que je conduirai, j'annonce tout de suite que les rapports à la presse seront très différents de ce qui se passe aujourd'hui. Saint-Quentin est une grande ville, la deuxième de Picardie ; les relations entre ses autorités publiques et la presse doivent être normales, apaisées et fructueuses. Car la presse locale concoure autant à l'image, à la vie et au développement de la cité que ses responsables politiques, économiques, sociaux et associatifs. Ce sont des interlocuteurs légitimes, parfois des partenaires, pas des ennemis en puissance ou des obligés, comme trop souvent le pensent, par crainte ou par ignorance, droite et gauche confondues. Là aussi, le changement à Saint-Quentin, ce sera pour 2 014.

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