dimanche 17 février 2013

Lettre à Mathilde



Le MJS (mouvement des jeunes socialistes) de l'Aisne a une nouvelle animatrice fédérale (c'est le titre donné au premier responsable départemental), Mathilde Goffart-Rigaud, à laquelle le Courrier picard a consacré hier un article. Elle est Saint-Quentinoise, a 17 ans et se retrouve à la tête d'une vingtaine d'adhérents. C'est dire le travail de recrutement qui l'attend ! Un parti sans jeunes militants, c'est un parti sans avenir, par définition. Je tiens à féliciter Mathilde pour sa désignation, lui souhaiter bon courage et lui donner quelques conseils.

"Nous sommes totalement indépendants", rappelle-t-elle. Oui, et que les jeunes socialistes le restent, qu'ils montrent l'exemple en matière d'unité et de dynamisme, car les adultes jouent trop souvent à front renversé, ne sont pas les modèles qu'ils devraient être. Son socialisme, Mathilde l'a "dans les gènes". Je comprends l'image, mais attention, à mon tour j'en utilise une : les neurones valent mieux que les gènes ! la politique n'est pas une affaire de famille, d'éducation ou d'hérédité mais de choix personnel, de volonté et de raison.

Que Mathilde ne soit pas oublieuse, qu'elle sache que la politique est aussi une affaire de mémoire : le MJS, c'est un héritage, une histoire, personne ne naît de la dernière pluie, elle a des prédécesseurs, dont elle n'a peut-être jamais entendu parler, qui pourtant avant elle ont fait ce qu'elle s'apprête à faire. En politique, ne jamais oublier, toujours s'appuyer sur l'expérience ! Quand Mathilde avait 4 ans, en 2 000, le MJS dans l'Aisne était inexistant. C'est la députée Odette Grzegrzulka et moi, secrétaire de section, qui l'avons réactivé. Son premier animateur fédéral, c'était Mourad Oujja, qui a beaucoup travaillé en direction des quartiers de Saint-Quentin, qui a organisé des réunions publiques lorsque les jeunes rencontraient des difficultés, notamment à Europe et dans le faubourg d'Isle.

Après, il y a eu Fatima Carvalho, de 2 002 à 2 005, qui représentait officiellement le MJS au sein du Conseil département de la jeunesse, une institution de la République installée par la DDJS (Direction départementale jeunesse et sport). Fatima avait organisé une manifestation en 2 003 contre Marine Le Pen, venue à Holnon. Puis c'est Bastien Hugues qui lui a succédé. Son mandat a été marqué par un mémorable débat public avec les jeunes de l'UMP, au restaurant Le Champs-Elysée. Enfin, le poste d'animateur fédéral a été occupé par Florentin Brocheton. A plusieurs reprises, des responsables nationaux du MJS se sont déplacés à Saint-Quentin.

Parmi les fondateurs historiques du MJS dans l'Aisne, il faut citer également David Piette, qui sera le suppléant d'Odette Grzegrzulka aux élections législatives de 2 007 et Guillaume Lafeuille, aujourd'hui secrétaire de section aux Lilas, près de Paris, et directeur de cabinet du maire ! Comme quoi Mathilde peut avoir un bel avenir ... Qu'elle sache cependant qu'on ne doit pas faire de politique par ambition personnelle mais collective : ce qui est beau, c'est la victoire de son parti, pas se faire élire quelque part ...

On ne fait pas de la politique pour soi mais pour les autres, en l'occurrence les Axonais, les Saint-Quentinois. A ce propos, qu'elle se méfie des titres, des flatteries, des places et des indemnités qui pourrissent l'esprit. Qu'elle fuit comme la peste la mentalité de l'entre-soi, de clan, de clocher ou de chapelle : la politique, c'est l'action publique, qui se dénature quand elle se transforme en préoccupations ou en activités privées. Faire de la politique, ce n'est pas rester entre copains, c'est aller vers les autres, vers tout le monde, vers ceux qui ne pensent pas comme vous.

Que Mathilde ne s'égare pas non plus dans ces réunions interminables où l'on bavasse sans décisions ni résultats. Il n'y a que la présence sur le terrain qui compte, c'est-à-dire l'action ; le reste, c'est frime et cacahuète. Qu'elle ait avec passion le sens de l'adversité, puisque la politique c'est la bagarre ! Mais qu'elle se batte avec respect, toujours au nom de ses convictions, avec violence s'il le faut (verbale bien sûr), mais sans jamais tomber dans le règlement de compte personnel, les crasses. Qu'elle aille jusqu'au bout d'elle-même : ce qui est beau, c'est de ne pas renoncer, c'est de demeurer fidèle à soi-même, à ses combats. Ce qui est laid en politique, c'est d'adopter des positionnements de circonstances, au gré des intérêts personnels et des opportunités, où l'on renie ce qu'on a défendu antérieurement, où l'on défend ultérieurement ce qu'on a renié. Sur ce point, j'ai envie de demander à Mathilde de rester jeune, de ne pas devenir une adulte !

Que notre animatrice fédéral ne se laisse pas impressionner pas les hommes et les femmes de pouvoir (qui n'ont d'impressionnant que l'apparence !), qu'elle ne cède surtout pas à ceux qui voudront l'impressionner : ça porte un très joli nom, ça s'appelle la liberté. Qu'elle soit forte, qu'elle n'hésite pas à claquer la porte, à renverser la table et à dire merde à ceux qui le méritent. L'insolence est le privilège de la jeunesse, qu'il lui faut précieusement cultiver. Que Mathilde se méfie des plus dangereux, non pas les adversaires d'en face mais les faux amis à ses côtés : si elle sent qu'on lui caresse le dos, qu'elle vérifie bien si ce n'est pas avec la lame d'un poignard ...

Il faut que Mathilde conserve son visage frais et son esprit enthousiaste, qu'elle ne rejoigne pas les chairs grises, les yeux bouffis et les traits ravagés par l'ennui à force d'attendre un pouvoir qui ne vient pas. Qu'elle renonce à la routine, à la mesquinerie, à la médiocrité qui finissent par s'installer quand passent les années et que se termine une vie de défaites successives.

Insolence oui, quand il le faut, mais aussi respect absolu des règles : Mathilde est dans une organisation qui n'existe que par ses statuts. Sans eux, chacun fait comme il veut, et c'est alors la mort du collectif. Que Mathilde respecte à la lettre les principes de la maison commune, sinon il n'y a plus de maison commune.

Hier, elle a eu sa photo dans le journal : c'est très bien. Mais ce qui importe en politique, ce n'est pas hier, c'est demain, dans un an, dans dix ans : si Mathilde a toujours alors sa photo dans le journal, oui elle aura gagné, oui elle aura réussi quelque chose qu'ils ne sont pas si nombreux à réussir. Ce que je souhaite par dessus tout à notre jeune socialiste, c'est qu'elle soit, dans 30 ou 40 ans, une vieille socialiste heureuse ! Et là, elle aura vraiment gagné, vraiment réussi !

Dans le travail qui l'attend et qui sera difficile puisque le département n'a pas de grandes villes universitaires, vivier traditionnel de recrutement pour le MJS, Mathilde devra imiter les Jeunes Pop de l'Aisne (copier l'adversaire pour le combattre, Mao a dit quelque chose comme ça) : pousser des candidatures de jeunes socialistes à toutes les élections, sur tous les territoires. Et puis, remettre en fonction le site internet du MJS 02, qui est figé depuis septembre 2 012, ce qui lui permettra de faire la nique à ses aînés qui sont électroniquement rouillés depuis juin de cette même année !

Pour terminer cette lettre à Mathilde, aussi longue qu'un testament ou que des adieux, je lui rappelle qu'il n'y a pas que la politique dans la vie, mais l'amour, le bonheur, la culture, l'art, la spiritualité, les voyages, les amis, pour certains la philosophie, bref la vie ! Qu'elle ne l'oublie pas ...

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Petite précision pour cette jeune novice, les statuts des Jeunes populaires stipulent que l'âge limite est de 30 ans et non 40 ans...

Emmanuel Mousset a dit…

A 25 ans, je ne me sentais déjà plus très jeune. A mon avis, pour ne pas sombrer dans le non-sens et le ridicule, les mouvements de jeunesse des partis politiques devraient s'en tenir aux lycéens
, apprentis et étudiants. On est jeune quand on est chez papa et maman. Quand on a un boulot, un appartement, un conjoint, un gamin, on est adulte.

Anonyme a dit…

La jeunesse est un état d'esprit pas une question d'état civil...il y a des vieux de 20 ans et des jeunes de 60 ans...

Anonyme a dit…

"La jeunesse n'est qu'un mot". Pierre Bourdieu

WERY Aurélien a dit…

tiens, on dirait que l'Anonyme qui commente est un certain J.D, président des Jeunes Pop de St Quentin, qui a sorti les mêmes commentaires mots pour mots sur Facebook...je me trompe ? :D

Aurel

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne sais pas, je ne vais jamais sur Facebook et je ne préjuge pas de qui écrit les commentaires. Dans l'idéal, j'aimerais qu'ils soient signés. Mais l'internet est devenu l'empire de l'anonymat !