mercredi 18 juillet 2012

Fin de vie



François Hollande a eu raison hier, en visitant une maison médicale, de relancer le débat sur la fin de vie, qui équivaut aux débats sur l'avortement dans les années 60 ou sur la peine de mort dans les années 70 : des sujets d'autant plus douloureux qu'il est question de vie et de mort. Nous allons vivre plus longtemps, très vieux, confrontés à la souffrance et à la maladie de la fin de vie beaucoup plus qu'autrefois, où l'on mourait tôt et vite, sans grand espoir de guérison. Comme la mort est le dernier tabou, on ose moins en parler que de sexe, plus réjouissant. Nous rêvons de disparaître en assez bonne santé, surtout sans souffrir horriblement.

François Hollande a eu raison aussi de ne pas employer le mot d'euthanasie, qui bloque immédiatement le débat (or, le président de la République veut qu'il y ait débat). D'un côté il y a les pour, de l'autre les contre et rien n'avance, c'est la guerre stupide de tranchées. D'ailleurs, je remarque que le débat sur la fin de vie est pollué par tout un vocabulaire contestable et parfois détestable. Pour exemple :

- Euthanasie : on l'emploie aussi bien pour abréger les souffrances des hommes et des femmes que pour tuer les chiens et chats.

- Suicide médicalement assisté : un suicide est un acte de désespoir qui est contradictoire avec l'idée d'une quelconque assistance.

- Soins palliatifs : le soin est effectué pour guérir, pas pour pallier à une souffrance qui de toute façon n'a pas de remède.

- Acharnement thérapeutique : comme si une thérapie pouvait s'acharner à quoi que ce soit ...

- Mort dans la dignité : non, toute mort est scandaleuse et même dégueulasse, la dignité n'a rien à voir là-dedans, on ne peut pas assimiler un évènement tragique et une catégorie morale.

Bref, les mots sont pipés, faussement pudiques, abominablement techniques. Il faudrait s'en débarrasser pour correctement et librement penser. D'autant que le débat est plus délicat que les deux précédents : l'avortement opposait deux camps irréconciliables, dans un affrontement pas toujours très digne ; l'enjeu était l'extension du droit, la libre disposition de la femme à son corps. Pour la peine de mort, François Mitterrand avait déclaré son hostilité ; son sort dépendait de l'élection, sans discussion. L'euthanasie, employons tout de même le mot, c'est plus compliqué, il n'y a pas vraiment recoupement des clivages traditionnels : certes, les catholiques sont plutôt contre, les laïques plutôt pour, mais les analyses des uns et des autres sont souvent prudentes et nuancées, parfois accordées, mis à part évidemment les retranchements involontairement caricaturaux.

Généralement, je suis favorable à la discipline de vote des députés, qui font un travail collectif et pas individuel, qui exprime une tradition, une sensibilité, un parti, notamment en ce qui concerne les questions économiques et sociales. Mais la fin de vie est plus qu'un sujet politique, c'est une interrogation métaphysique : il faudrait donc que chaque parlementaire légifère en son âme et conscience, en toute indépendance, au vu des travaux de la commission installée à cet effet.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

ceux qui sont pour ne seront pas satisfait si la loi change.
La majorité de ces citoyens demande le droit à etre assister pour mourrir au moment qu ils ont choisi. ils parlEnt toujours de pouvoir mourrir avant de se voir dans un état de dépendance.
Ce ne sera pas accepté, seul les personnes reconnues dans de grandes souffrances morales dues à de forts handicapes physiques et sans espoir de guérison pourront esperer cette pratique.
Jamais cela ne sera autorisé sur les premiers symptomes de la maladie ou les conclusions d'un diagnostic révélant une maladie incurable.
Il faudra toujours souffrir et se voir diminuer et etre gravement atteint pour esperer une acceptation de sa demande.
Bref, la décision qui sera prise ne satisfera personne à l'exception de quelques rares cas chaque année.
On est encore très loin de la possibilité de partir à sa guise, il ne suffiera pas de savoir qu on a un cancer inccurable pour avoir le droit à un suicide assisté, en tout cas pas en France.

Anonyme a dit…

petite précision :on ne pallie pas à une souffrance mais on pallie une souffrance (faute grammaticale fréquente)

Emmanuel Mousset a dit…

Merci pour votre utile vigilance.