samedi 21 avril 2012

Une campagne française.



Un samedi de silence et un dimanche où le peuple donnera de la voix. En attendant, que peut-on retenir de ces présidentielles 2012 ? Comme les précédentes, au-delà des affrontements partisans, la campagne aura été un puissant révélateur de la société française, de ses aspirations et de ses contradictions. Cet aspect-là d'une élection, autant que la dimension politique, m'intéresse beaucoup. Cette année, trois traits d'une campagne très française m'ont frappé :

D'abord ce que j'ai remarqué dès le début, dont j'ai parlé sur ce blog : la demande souvent excessive de précision dans les échanges entre candidats. Le chiffre est devenu roi, jusqu'à ne plus vouloir signifier grand chose. Nous avons certes eu une campagne d'une grande qualité, contrairement à ce que disent les grognons, mais très technique, ce qui n'est pas l'idéal en démocratie.

C'est le reflet de notre société : des statistiques, des courbes, des camemberts en veux-tu en voilà. D'où le succès de ce journaliste au crâne chauve, dont j'ai oublié le nom, et qui aura fait les beaux jours des débats à la télévision. Ce n'est pas l'économique qui me dérange, c'est la tyrannie du chiffre : même le pap des socialistes (voir mon précédent billet) se décline en nombre de portes ouvertes !

Ensuite, je retiendrais la vogue des meetings géants, qui semblaient pourtant venir d'un autre temps. Mais notre société hyper-individualiste, maudissant le populisme, est en mal de peuple. Le voici le voilà, de retour, représenté, incarné, rassemblée en plein air devant ses leaders. "Je pense donc je suis", disait Descartes. "Je me montre donc j'existe", dit le peuple, aidé par les politiques. N'est-ce pas l'étymologie de la démo-cratie ? J'aime ces manifestations et aussi je me méfie : un type acclamé par 100 000 types, vous trouvez ça normal docteur ?

Enfin, il y a la contestation de la loi, y compris au plus haut sommet de l'Etat, des 500 signatures dont on discute la légitimité jusqu'à l'heure de publication des résultats qu'on n'accepte pas (voir mon billet de jeudi). C'est totalement nouveau. Avant n'existait pas ce genre de polémiques autour de points juridiques.

Le phénomène est d'ailleurs paradoxal : notre société remet fréquemment en cause la loi et excelle dans le juridisme ! Ainsi on a vu ces derniers jours apparaître une préoccupation à propos de ce qui se passerait constitutionnellement en cas de décès d'un candidat à la présidentielle. Je n'ai jamais vu cette question se poser lors des précédents scrutins. Voilà donc où nous en sommes. Et en 2017, qu'en sera-t-il ? Sûrement de nouvelles obsessions, des innovations surprenantes, des engouements inédits, au rythme où nous allons, où nous changeons.

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