vendredi 27 avril 2012

Gagnants et perdants.



Notre vie politique et médiatique est étrange : des victoires et des défaites passent à la trappe, sont oubliées. Dimanche soir, le grand vainqueur était incontestablement Jean-Luc Mélenchon, et encore plus le parti principal qui constitue son Front de gauche, le PCF. Celui-ci en cinq ans a multiplié par cinq son score, aucun autre parti n'a réussi une telle performance. Son candidat n'espérait pas au départ un résultat à deux chiffres, c'est fait. Non, ce qu'on retient, c'est le score du FN, certes très important mais qui n'a pas connu une nouvelle poussée d'envergure, Le Pen fille ne parvenant même pas à rééditer la qualification du père au second tour.

Jean-Luc Mélenchon est victime de lui-même et de ces médias qu'il vitupère pourtant avec force. Le score qu'on lui donnait, autour de 15% et pourquoi pas plus, était inévitablement exagéré. Une dynamique a été créée par sa bonne campagne, mais son amplification médiatique très largement artificielle. Mélenchon s'est laissé prendre à son propre lyrisme et à ces effets en trompe-l'oeil. Grisé, il a cru bon jouer la posture du troisième homme, allant jusqu'à espérer être le second, et là le bouchon était lancé trop loin. En se donnant pour objectif de dépasser le FN, il se condamnait à échouer dans la victoire, limitant sa portée, la transformant étrangement en défaite, lui donnant le goût amer de la déception. En demandant à être jugé là-dessus, ce politique pourtant avisé se piégeait lui-même. Je sais bien que l'idéal sert à faire bouger les lignes comme la foi déplace les montagnes, mais point trop n'en faut.

Le grand perdant, c'était dimanche soir Nicolas Sarkozy. Tout le monde a répété qu'un président sortant qui n'arrive pas en tête au premier tour ne s'était jamais vu. Bien sûr, mais ce perdant est tout de même retenu pour le second tour. Et puis, la situation étant ce qu'elle est, ce candidat aurait pu s'attendre à pire. Il peut encore espérer l'emporter "d'un cheveu", selon l'expression révélatrice de Xavier Bertrand (même si je ne crois pas en sa victoire).

Non, le grand perdant de ce scrutin, c'est Eva Joly, partie de 7% dans les intentions de vote et retombant à 2%. Une pareille chute est assez rare. On a oublié que la candidate écologiste avait il y a un an une bonne image, une forte notoriété, tout ça ayant été dilapidé dans une mauvaise campagne. C'est d'autant plus catastrophique que les Verts sont ces dernières années une force politique montante, que leurs idées imprègnent l'air du temps et que les accords électoraux avec le PS les avantagent grandement.

Bref, les gagnants et les perdants ne sont pas ceux qu'on croit et qu'on retient, sachant tout de même qu'en politique tous sont perdants sauf celui, l'unique, qui accède au pouvoir.

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