dimanche 13 octobre 2013

Peuple de gauche




A l'intérieur du peuple de France, qui n'est pas homogène mais divers, il y a de multiples peuples : un peuple ouvrier, un peuple breton, tant d'autres encore, dont un peuple de droite et un peuple de gauche. Bien sûr, ces concepts sont relatifs, aux contours incertains. Mais qui pourrait nier qu'il existe une sensibilité, une culture, une sociologie de gauche (si l'emploi du mot peuple vous semble excessif) ? Des femmes, des hommes, des familles marqués par des valeurs, des repères, des personnages, une histoire commune. Il peut arriver, comme à Saint-Quentin, qu'une partie de ce peuple de gauche vote à droite aux élections locales, parce qu'il est séduit par des hommes comme Pierre André ou René Huel, qui vient de disparaître, au service de leur ville, dévoués, ouverts à tous et produisant des résultats. Il n'empêche qu'aux élections nationales, ce peuple de gauche se reconnaît dans les candidats de la gauche, socialistes, communistes, radicaux, républicains, écologistes, et il vote pour eux.

Hier soir, comme chaque année depuis bien longtemps, je me suis retrouvé parmi ce peuple de gauche, les 130 participants au traditionnel repas africain de l'ASTI, association de solidarité avec les travailleurs immigrés, dans le centre social Artois-Champagne. Tous ceux qui étaient là n'étaient pas forcément de gauche, mais l'ambiance, les rencontres, les préoccupations, les échanges appartenaient à ce que j'appelle le peuple de gauche. Je circule pas mal dans la ville et le département, je ne m'y trompe pas, je sais discerner entre un microclimat de gauche et un écosystème de droite, les deux faisant partie de la biodiversité politique de notre cité et de notre pays.

Ce peuple de gauche est étranger aux appareils, il ne s'intéresse pas nécessairement à la politique partisane, il est rarement encarté, comme on dit ; mais il vote à gauche, d'instinct, par tradition. Ce peuple-là ignore les conflits idéologiques ou les querelles de personnes. Qu'il soit socialiste, communiste, écologiste ou autre, il a une exigence, une volonté, une forme de bon sens : il s'attend à ce que la gauche, au-delà de ses différences légitimes, soit unie, car le peuple de gauche sait, avec certitude, par expérience, sans avoir besoin de grande analyse, que la division c'est l'échec assuré.

La dispersion des voix entre différentes listes de gauche aux élections municipales, c'est un luxe de riches : quand on est fort, on peut se le permettre, s'amuser à ce compter, jouer du biscoteau au nom du rapport de force ; de toute façon, au deuxième tour, ce sera le grand rassemblement et au bout la victoire. Mais quand on est faible, que l'adversaire est fort, inutile de chercher à ratisser large au premier tour en partant en ordre dispersé : il n'y a pas de deuxième tour, le râteau, on se le prend en pleine gueule dès le premier tour, et c'est le FN qui tient le manche. Voilà ce que sait instinctivement le peuple de gauche, et il a raison, parce que toute l'histoire de la gauche, à quelques rares exceptions près, lui donne raison.

Hier soir, dans l'assistance, il y avait des militants syndicalistes, des chrétiens progressistes, des prêtres ouvriers, des responsables associatifs, tout un tissu, tout un réseau que constitue ce peuple de gauche. Henri Bailleul a ouvert la tombola (vignette 1, avec Jimmy Fakourou derrière lui) ; Jocelyne Nardi, présidente de l'ASTI (vignette 2, au micro, au fond, Marcel Ouillon)), a présenté les dames qui ont préparé le repas africain. Claudette Lemire, à la tête de l'association pendant vingt ans, figure emblématique du mouvement, était bien sûr présente. Viviane Caron et Yvonne Bou, de l'association Autrement dire, avaient réservé toute une table.

Dans ce genre de repas, une question se pose toujours à chaque participant : avec qui s'installer et passer toute la soirée ? Il faut bien choisir, en profiter pour se mêler avec des personnes dont on ne partage pas nécessairement les idées (c'est mon principe, je n'aime pas l'entre soi). Mais peu importe, puisque c'est ici le peuple de gauche ! Je me suis trouvé des compagnons de table ma foi fort agréables, très sympathiques, des connaissances de vieille date, avec lesquelles j'ai longuement discuté (vignette 3, avec au fond Antonio Tejado). Nous avions tant de choses à nous dire.

1 commentaire:

Jacques a dit…

Séduit par l’idée d’une candidature DSK, j’ai découvert votre blog courant 2010. Après l’affaire du SOFITEL je me suis tourné vers François Hollande. J’ai soutenu sa candidature, sans enthousiasme excessif pour l’homme mais avec sérénité pour les idées. Et je vous ai suivi sur « J’ai tant de choses à vous dire » où je vous lis régulièrement sinon quotidiennement.
Je crois à l’économie de marché. Elle a fait ses preuves. Preuves de son efficacité à créer des richesses mais aussi preuves de son efficacité à creuser le fossé entre les plus riches et les plus pauvres. Le marché, en lui-même, n’est pas vertueux. Il faut des règles et organiser une juste répartition des richesses. En cela, je me sens appartenir au peuple de gauche.
Payer des impôts ne m’enchante pas mais je l’accepte. Parce que les impôts permettent une réponse collective et solidaire aux besoins de la collectivité. Ne pas payer d’impôts permettrait d’augmenter notre pouvoir d’achat mais chacun devrait ajouter à ses dépenses tout ce qu’il ne toucherait plus par la redistribution solidaire. Et seuls ceux qui en auraient les moyens pourraient se l’offrir. En économie, un besoin est un besoin solvable, ne l’oublions pas ! Le besoin de santé, d’un point de vue économique, n’existe que pour ceux qui peuvent se le payer… Pour autant, il faut que les dépenses soient contrôlées. Bien sûr ! Mais, aujourd’hui, qui nous l’explique ?
Il y avait la promesse de remettre à plat la fiscalité, pour plus d’efficacité et de justice. Or j’entends que les impôts rentrent mal, j’entends les gens se plaindre, les journaux exhibent les cas de familles devenues imposables et assujetties aux impôts locaux, perdant des prestations… Où est l’efficacité ? Où est la justice ? L’idée germe que l’impôt est un acte confiscatoire de la part de l’Etat. Et de chercher à qui profite le crime…
J’entends que 25% des électeurs sont prêts à voter FN et que 54% de ceux qui se sont déplacés à Brignoles l’ont fait… J’entends la déception, j’entends l’envie de tenter autre chose … comme ces migrants qui tentent la traversée, sans savoir où ils vont, parce qu’il faut faire quelque chose pour espérer… Même s’ils savent au fond d’eux-mêmes que ce n’est pas raisonnable.
La gauche et François Hollande en tête donnent l’impression d’une gestion au gré du vent, selon l’état de la mer, juste pour se maintenir à flots mais sans plus savoir quel port atteindre. Attendant seulement que le beau temps revienne… J’ai toujours reproché à la droite d’être uniquement gestionnaire, adepte du « libéralisons et tout ira bien », convaincue que le marché est d’autant plus vertueux qu’il est libre…Organiser les conditions d’une économie de marché efficiente et refonder les règles de la solidarité nationale, voila ce que j’attends (ou attendais ?) de la gauche. Je ne vois rien venir…
J’attends du capitaine qu’il nous dise le cap, pas qu’il nous détaille le réglage des voiles ou joue à monsieur météo. Le cap, et une perspective qui nous fasse regarder l’horizon avec confiance…
Cela vaut aussi pour les municipales. Bien sûr qu’il faut des alliances mais que veut-on faire ?
Quant aux Européennes… mon Dieu !