mercredi 2 octobre 2013

A la vie, à la mort



Lundi soir, juste après la fin du conseil municipal, je suis allé au multiplexe animer la séance du ciné philo. En entrant dans la salle, satisfaction : 75 spectateurs, qui sont à peu près tous restés pour le débat. Le film, Miele, de Valeria Golino, projeté toute la semaine, a attiré en moyenne 5 ou 6 personnes par séance. On voit à quel point, à part les blockbusters et les films avec vedettes, il est difficile de faire venir le public en nombre. On voit aussi que le débat et la présence d'un invité sont d'incontestables plus-valus.

Lundi, nous étions en partenariat avec l'ACAP. Martine Davion et Julie Bonnentien, les animatrices, s'étaient faites excuser, ne pouvant être présentes. Notre invité, Philippe Bataille, nous a éclairés avec compétence et pédagogie sur le thème fort délicat du film : l'euthanasie et le suicide assisté. Ce sociologue est directeur d'études dans la prestigieuse Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), , membre du Centre d'éthique de l'hôpital Cochin, auteur de l'ouvrage "A la vie, à la mort : euthanasie, le grand malentendu", Editions Autrement, 2012.

On peut dire que Philippe Bataille est en France l'un des meilleurs connaisseurs, au plan sociologique, du problème de la fin de vie. D'ailleurs, à ce titre, il a rencontré plusieurs fois Xavier Bertrand, alors ministre de la Santé, m'a-t-il dit. Ces douloureuses questions ne sont pas en effet exclusivement médicales ou juridiques, mais aussi sociologiques : c'est pourquoi il est bon de mettre ces questions de société sur la place publique, afin d'en débattre collectivement.

J'ai beaucoup apprécié la bonne tenue des interventions et échanges. Ma crainte était de voir le débat s'envenimer, verser dans la polémique, favoriser l'indignation, la provocation et la condamnation, toutes réactions détestables. Rien de cela : des prises de parole posées, interrogatives, réfléchies. Le ton de voix de Philippe Bataille n'était pas étranger à cette sérénité (il y a des timbres qui sonnent comme des cloches, qui excitent le public). Sur le fond, il s'est montré sceptique sur une prochaine évolution de la loi Léonetti, qui définit les conditions d'intervention dans la fin de vie. C'est pourtant un point au programme présidentiel de François Hollande.

Comme pour illustrer notre débat de lundi, j'ai entendu ce matin à la radio qu'en Belgique, une femme a voulu devenir homme, s'est faite opérer des seins et greffer un pénis, opération qui a échoué, qui a occasionné chez cette personne de terribles souffrances psychiques qui l'ont conduite à demander un acte d'euthanasie (autorisé en Belgique depuis dix ans). Cet exemple est bien sûr extrême, mais tous les cas d'euthanasie nous renvoient à des situations tragiques. Dans quel sens la société doit-elle légiférer ? Je me garderai bien de répondre, tant la question est complexe. Mais notre ciné philo aura peut-être fait avancer la réflexion.

Notre prochain rendez-vous aura lieu le lundi 14 octobre, à 20h00, avec le film La pirogue, réalisé par Moussa Toure. Nous serons en partenariat avec la Ligue de l'enseignement de l'Oise, dans le cadre de son festival Les Yeux ouverts. Le débat portera sur les phénomènes migratoires entre l'Afrique et l'Europe, autre sujet de société fondamental. Exceptionnellement, l'entrée sera gratuite.

Encore merci à Philippe Bataille d'avoir été des nôtres lundi soir, d'autant qu'il a dû renoncer, pour ce faire, à une importante réunion au ministère de la Santé, privilégiant l'engagement qu'il nous avait donné.


En vignette : à mes côtés, Philippe Bataille et Michèle Zann, directrice du cinéma.

2 commentaires:

L'éphémère. a dit…

Emmanuel, vous écrivez : "Sur le fond, il s'est montré sceptique sur une prochaine évolution de la loi Léonetti, qui définit les conditions d'intervention dans la fin de vie".

Je ne comprends pas bien cette phrase. Cela signifie-t-il :
1) qu'il pense que F. Hollande ne fera pas modifier la loi Léonetti, alors qu'il faudrait la modifier ?
2) qu'il pense que F. Hollande ne fera pas modifier la loi Léonetti, et que c'est très bien comme ça ?
3) qu'il ne souhaite pas que la loi Léonetti soit modifiée ?

Ou bien il y a une quatrième possibilité à laquelle je n'ai pas pensé ?

Bien à vous.

Emmanuel Mousset a dit…

Je pense que c'est l'hypothèse 1 qui est la bonne.