samedi 26 octobre 2013

Le carpe diem de M. Ryo



Ce matin, en lisant L'Aisne Nouvelle, on pouvait croire assister à un grand événement politique : les deux pleines pages consacrées en début de journal à Monique Ryo, première adjointe de Xavier Bertrand à Saint-Quentin, laissaient pressentir une annonce, celle de sa candidature à la tête de liste aux élections municipales, le maire sortant étant frappé par la loi sur le non cumul des mandats, puisque député. Mais non, rien de tout ça. Monique Ryo commet même un lapsus, au détour d'une phrase : "Xavier Bertrand sera la tête de liste pour la droite républicaine". Jusqu'à présent, XB ne répondait pas à la question, préservant le suspense, quoique sa candidature était assez couru. Maintenant c'est fait, on le sait : ce sera bien lui le candidat de la droite et du centre.

Pourquoi Monique Ryo n'a-t-elle pas cette ambition basique en politique, qui consiste à vouloir être légitimement le premier, le chef, la tête ? Ce n'est pas pour contrarier son actuel patron, mais c'est parce qu'elle est philosophe, et que philosophie et politique ne vont guère ensemble, c'est bien connu. Ryo n'est pas philosophe contemporaine ou philosophe des Lumières : non, elle est philosophe de l'Antiquité, de l'école d'Epicure, adepte du carpe diem. A la question de savoir si elle pourrait, en cas de démission de Xavier Bertrand en cours de mandat, prendre sa place, elle répond : "Moi, je ne fais pas la course. Chaque chose en son temps (...) J'aime bien vivre le moment présent, alors je laisse le temps au temps, on verra bien ce qui se passera. Ce n'est pas mon style de courir après les choses. Restons ancrés dans le présent".

C'est de l'Epicure tout craché, je vous dis, foi de connaisseur ! Le philosophe du plaisir donnait cette recommandation à ses disciples : "Pour vivre heureux, vivons cachés". Monique Ryo, pourtant femme politique, donc exposée, applique à la lettre la sentence, en la reformulant à sa façon : "Je suis quelqu'un de discret. C'est vrai que je n'aime pas être en première ligne". Cependant, Monique n'est pas une épicurienne intégrale, elle ne rejette pas absolument la perspective de devenir un jour maire de Saint-Quentin. Epicure, à sa place, aurait dit catégoriquement non. Ah politique, quand tu nous tiens ...

Et puisqu'il faut revenir à la politique, celle de Monique Ryo est modérée, centriste, sans aucune animosité idéologique envers la gauche. Finalement, elle est de centre droit comme je suis de centre gauche, et ça me plaît bien. Par exemple, je note entre nous un point d'accord, sur la réforme du scrutin départemental et l'introduction de la parité : "Je me rends compte que c'est quand même bien d'avoir un peu forcé la main par la loi". Bravo !

Evidemment, il y a des désaccords entre nous, sinon elle ne serait pas à l'UDI et je ne serai pas au PS. Sur la réforme des rythmes scolaires : "On a rallongé le temps scolaire alors qu'on veut alléger la journée". Non madame, le temps scolaire n'a pas été rallongé, il est exactement le même, pas une heure de plus. Mais il a été mieux réparti dans la semaine, comme tout le monde, enseignants, parents, spécialistes, politiques, le demandait il n'y a pas si longtemps. La conséquence, appréciable, c'est que la journée de l'enfant est allégée. L'ancienne institutrice qu'est Monique Ryo devrait normalement approuver.

Autre point de désaccord entre elle et moi : son analyse du vote FN. "Le vote FN est un vote de désespérance. Ce n'est pas du tout un vote d'adhésion". Si madame, c'est un vote d'adhésion, et j'en suis aussi désolé que vous. La désespérance ne se mesure pas dans les urnes. Tout vote, FN, UMP, PS, PCF, extrême gauche, contient probablement sa part de désespérance. Je ne vois pas pourquoi ce serait le privilège du FN, pourquoi il faudrait lui faire cet honneur exorbitant de représenter les désespérés de France. D'autant que son électorat est aussi composé de couches sociales traditionnellement d'extrême droite, et pas particulièrement frappées par la désespérance.

Et puis, en démocratie, il faut partir du principe très simple, de bon sens, que voter c'est exprimer son adhésion à certaines idées. Si Monique Ryo est centriste, c'est qu'elle adhère à des idées de droite modérée ; si je suis social-démocrate, c'est que j'adhère à des idées de gauche modérée. Les électeurs du FN adhèrent eux aussi, à leur façon, à des idées, hélas vieilles comme le monde : la xénophobie, le nationalisme, l'autorité. Si c'était la désespérance qui les animait, ils pourraient tout aussi bien, et encore mieux voter extrême gauche. Ces électeurs-là ne le font pas, parce qu'en leur fond, ils sont xénophobes, au sens propre du terme : ils ont des appréhensions, des récriminations envers les étrangers. A nous, centristes, socialistes et tous les républicains, de les convaincre qu'ils font fausse route en votant Marine Le Pen. Mais ne les dédouanons pas de leurs responsabilités : un citoyen est responsable de son vote, la désespérance n'est pas une excuse, c'est un prétexte.

"Monique Ryo sort de l'ombre", titrait ce matin à la une L'Aisne Nouvelle. Mais on ne vit pas dans l'ombre quand on est n°2 d'une équipe municipale. Dans le clair obscur, à la limite. Monique Ryo est épicurienne et Fille de la Lumière.

13 commentaires:

Anonyme a dit…

Cher Monsieur MOUSSET : permettez moi d'être quelque peu dubitatif sur votre interprétation du CARPE DIEM ( Expression tirée des vers d'Horace, un philosophe romain de l'Antiquité. Elle signifie "cueille le jour sans te soucier du lendemain". Son sens a traversé les siècles jusqu'à nos jours sans qu'il soit altéré. )
En effet si un ( e ) une politique ne se soucie pas du lendemain ; c'est un ( e ) inconscient ( e ) , je pense que votre billet est confus , vous parlez d'une dame très simple dans ses approches mais de ses préoccupations personnelles , de son destin politique ... Pas de ses actions et de son travail reconnu depuis des années et c'est de ce mélange que vient la confusion .... Votre attachement à trop vouloir " portraitiser" vos semblables n'est pas une entreprise de très bon goût ... Et certains vous renvoient la balle en pleine figure ... C'est le risque du métier ..
.

Emmanuel Mousset a dit…

Cher Monsieur,

Je ne vois pas en quoi l'exercice du portrait, auquel je m'astreins parfois, serait de mauvais goût. C'est une figure de style comme une autre, qui détient sa part de vérité. Et c'est ce qui m'intéresse.

Il n'y a pas confusion de ma part : je sais fort bien que l'insouciance du lendemain qu'affichent certains politiques est souvent une posture.

Quant aux balles qui risquent de m'atteindre, je vous remercie pour le soin que vous portez à ma vie. Mais ne vous faites pas de bile, je porte depuis longtemps un gilet pare-balle.

Bien à vous

Anonyme a dit…

Cher Monsieur MOUSSET , il faut raison garder ... Quand on dit la balle dans la figure c'est le foot, le hand mais pas MARSEILLE , vous avez grossi le trait ... En sur réagissant... Et laissez votre gilet pare - balle au vestiaire à moins que SAMIA GAHLI vous demande de diriger avec vos caméras la répression dans les quartiers NORD!!

Emmanuel Mousset a dit…

A moins que ce ne soit votre subconscient qui s'exprime, avec cette histoire de balle ...

Anonyme a dit…

Vous pourriez nous parler par exemple du dernier livre de FINKIELKRAUT ou de Pierre NORA parce que franchement les resucées de l'Aisne Nouvelle c'est un peu gonflant.

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne partage pas les idées de Finkielkraut et Nora n'est pas quelqu'un de très intéressant. En revanche, bien des articles de L'Aisne Nouvelle rapportent des faits locaux dont la lecture me fait réfléchir.

Anonyme a dit…

Je ne voudrais pas m'immiscer dans ce débat mais je viens de finir la lecture de "Recherches de la France" de Pierre Nora et j'ai la faiblesse de penser que cette lecture fait davantage réfléchir qu'un journal local dont je ne conteste pas, disons, l'utilité.

Par ailleurs Pierre Nora est un grand historien salué par la plupart des intellectuels de droite comme de gauche.
Puissent vos lecteurs se faire une idée par eux-mêmes.

Emmanuel Mousset a dit…

Je vous laisse à vos faiblesses. Quant à m'incliner devant quelqu'un parce qu'il est labellisé "grand historien" et salué par la plupart des intellectuels, non merci, ce n'est pas dans mes façons de faire. Je ne juge pas à la reconnaissance sociale mais au travail. Pour le dire autrement : je ne suis pas bourgeois. Mais comme vous ne voulez pas vous immiscer dans ce débat, je suis tranquille, vous n'y reviendrez pas.

Anonyme a dit…

ça y est MOUSSET , tu fais ta crise d'EGO ... Mais si les journalistes de la PRESSE locale te cirent les pompes c'est pas pour ton charisme ou ta pensée ; mais parce que tu les alimentes en potins locaux et que tu souffles le chaud et le froid sur des personnalités ou pseudo ; ce qui permet de faire de la ligne ... Mais on est loin de ZOLA et des affaires DERYFUS etc... C'est plus des chiens pas écrasés mais affamés de fonctions d'élus qu'autre chose .... dont se régale cette presse comme avec les dernières affaires de BOHAIN etc...

Emmanuel Mousset a dit…

Bref, vous n'aimez ni la presse locale, ni ma personne. J'espère au moins que vous vous aimez ...

Anonyme a dit…

Jésus-Christ a dit : « Je vous donne un commandement nouveau : Aimez-vous les uns les autres ; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres » (Jean 13 :34).

Alors quel est votre commandement ??
Êtes vous me nouveau MESSIE ??

Anonyme a dit…

Un petit rappel en passant , ça fait toujours sérieux de bien recadrer les électrons libres du mouvement électoral perpétuel ::


Lundi 4 mars
Mise au point

Mr Antonio Ribeiro de la Gauche Moderne et Républicaine et Stéphane Monnoyer (Modem) ont récemment laissé entendre dans la presse locale le soutien de CAP21 pour les prochaines élections municipales à Saint Quentin.

Je tiens à préciser que CAP21 ne s'associe ni de près ni de loin à cette initiative ainsi qu'au positionnement politique sinueux de Mr Ribeiro, frappé d'inéligibilité par le Conseil Constitutionnel pour non respect des règles relatives au financement des campagnes électorales.

Eric Delhaye

Président délégué de CAP21


c'est sur le net à disposition de TOUS et ça confirme les déclarations empressées sur l'entrisme forcené qui continue .... Dans toutes les directions possibles ....

.

Emmanuel Mousset a dit…

Ce ne sont pas des électrons mais des enzymes gloutons : si le PS les avale, c'est lui qui se fera bouffer !