vendredi 12 avril 2013

Pépère Hollande



A la une du Point de cette semaine, François Hollande est appelé "pépère". Il paraît, d'après le Canard enchaîné, que c'est ainsi que ses collaborateurs le surnomment (derrière son dos, évidemment). Pépère, franchement je n'y aurais pas pensé. Hollande ne m'évoque pas l'image d'un grand-père ! Mais il y a quelque chose de logique dans ce sobriquet : le passage de "candidat normal" à "pépère" peut se comprendre.

Bien sûr, je n'ignore pas que le Point est un magazine classé plutôt à droite et que "pépère", même écrit avec des guillemets, n'est pas forcément un compliment : le terme renvoie à quelqu'un de tranquille, poussif, un peu plan-plan qui jure avec le tumulte que traverse la société française, depuis pas mal de temps déjà. Un président pépère est une figure quasiment grotesque, qui cherche à ridiculiser l'homme.

Je ne suis pas sûr que le magazine parvienne à ses fins et que sa formule fasse mouche. Car "pépère", ce n'est pas non plus une insulte, ce n'est pas franchement dégradant. Dans l'esprit des Français, le qualificatif est sympathique, attendrissant, familier (et familial). Son pire ennemi, on ne va pas l'appeler "pépère", mais son meilleur ami, il n'est pas interdit qu'on le nomme ainsi. Ce "pépère", je me sens prêt à l'assumer et même à l'utiliser à mon tour : vas-y pépère, tiens bon !

Je vais jusqu'à penser que la droite ferait une erreur tactique en affublant Hollande de ce surnom. Dans une société où les seniors deviennent de plus en plus nombreux, influencent les modes de vie, représentent un poids électoral décisif, il est maladroit de transformer en injure un terme qui désignait anciennement toute une catégorie de la population, les vieux (même quand ils n'étaient pas obligatoirement grand-père). François Hollande, roi des personnes âgées, seigneur des seniors, j'adhère, j'applaudis : vive pépère !

Il y aurait à faire une analyse des sobriquets que les Français ont attribué à leurs chefs d'Etat. De Gaulle, c'était "Charlot", qui comme "pépère" a un sens ambivalent, à la fois critique et flatteur. Mitterrand a eu droit à "Tonton", ce qui est assez plat (en fait, ce sont ses agents de sécurité qui l'utilisaient comme code). "Dieu" aussi a eu la faveur à un moment, mais là c'est complètement ridicule. Chirac s'est vu appeler parfois "Chichi", ce qui n'est pas beau, ce qui est assez pauvre. "Sarko" n'était pas mieux, avec en plus (et en pire) quelque chose de rocailleux, d'angulaire dans la prononciation, qui n'était pas au bénéfice du président d'alors. En général, les diminutifs, par manque d'originalité, ne brillent pas.

A tout prendre, et après comparaison, va pour "pépère" ! Staline avait le titre de "petit père des peuples", Hollande (qui n'a bien sûr rien à voir avec le tyran communiste) c'est le "pépère du peuple". Oui, cette consonance entre "peuple" et "pépère", ce renvoi de l'un à l'autre me convient tout à fait. Pépère Hollande, c'est la sagesse, le calme, la maîtrise de soi à l'Elysée, pour le bien de tous les Français. En vérité, notre classe politique manque de "pépères" : avec François Hollande, ce défaut est largement comblé. Longue vie à pépère !

Et puis, que la droite se méfie, car les pépères, il faut s'en méfier : rappelez-vous le coup du pépère François !

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