mercredi 24 avril 2013

Marie-Lise Semblat



C'est de ma ville natale, Saint-Amand-Montrond, où je séjourne pour quelques jours, que j'ai appris le décès de Marie-Lise Semblat, dans un accident de la route, en Haïti. Marie-Lise est une personnalité du monde associatif local et régional, depuis fort longtemps, présidente de l'association Aster-International. Toute disparition est une souffrance, celle-là plus encore, tant elle est brutale et inattendue. C'est pour moi une grande tristesse, une grande peine. Je pense bien sûr à Jean-Pierre, son époux, conteur picard bien connu lui aussi, notamment chroniqueur à L'Aisne Nouvelle.

Marie-Lise, c'était d'abord, à mes yeux, une présence, un personnage avant même d'être une personnalité (les deux ne sont pas forcément synonymes), quelqu'un qui ne pouvait pas laisser indifférent. Sa voix, son physique et son message en imposaient. Ce qui l'animait, c'était la passion, et ce n'est pas si fréquent dans nos vies de routine. C'était une personne entière, n'hésitant jamais à dire ce qu'elle pensait, avec force et tonitruance, une femme engagée, impressionnante de convictions. Elle ne cachait pas ses idées de gauche, mais elle restait avant tout une femme libre, y compris de critiquer la gauche quand il le fallait !

Nous étions à la fois très proches et, par certains côtés, éloignés. La première proximité était professionnelle : elle était prof de philo, enseignante autrefois dans mon lycée, Henri-Martin. La philosophie, c'est une discipline qu'on ne quitte pas et qui influence tout ce qu'on dit et fait : pareil pour Marie-Lise, qui était philosophe en bien des occasions, parfois invisiblement. Mais pour comprendre Marie-Lise, il faut aller plus loin : son féminisme était pour elle très important, déterminant et omniprésent. C'était chez elle un militantisme de tous les instants, sur lequel elle ne cédait rien. Par exemple, elle m'avait gentiment reproché de ne pas faire suffisamment de place aux femmes dans mon livre "Les Saint-Quentinois sont formidables". Je me suis bien sûr défendu, elle n'a pas plié. Toute Marie-Lise Semblat est là : une combattante !

Ensemble, à travers nos associations respectives, nous nous retrouvions chaque année pour organiser à Saint-Quentin la journée internationale pour le droit des femmes, en mars, et la journée contre les violences conjugales, en novembre. La synergie de nos deux réseaux assurait à chaque fois le succès de ces manifestations. Le 8 mars dernier, elle n'a pas pu participer à notre ciné philo commun, étant partie à Rabat pour une animation évidemment féministe. Car c'était aussi une particularité forte de Marie-Lise : toujours par monts et par vaux, souvent entre deux avions ! C'est sans doute la dimension la plus originale et la plus précieuse de son action : l'international. L'Afrique était son continent de prédilection, une terre d'amour autant que de militantisme. Le droit des femmes, c'est à travers la planète, et dans les pays où elles sont les plus opprimées, qu'elle le défendait, avec un immense respect, une forte compréhension des cultures qu'elle approchait et qu'elle intégrait. Cette soixante-huitarde dans l'âme avait gardé de ces années-là l'attrait pour les différences culturelles, le refus de réduire le monde à la mentalité occidentale.

Marie-Lise Semblat est morte comme elle aura vécu, en militante, sur le terrain, dans un pays, pour une cause qui lui tenaient à coeur. Une femme de tête et une femme de coeur, oui c'est ce que je retiendrai d'elle.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Triste nouvelle, une grande militante de la cause des femmes nous quitte , paix à son âme !