jeudi 23 août 2012

Le problème de Benoît



Benoît Hamon était ce matin l'invité du journal de France-Inter. A propos du traité européen, est-il pour ou contre ? D'un côté, il dit que François Hollande est allé au maximum de ce qu'il pouvait obtenir, dans le cadre des rapports de forces actuels. Ce qui conduirait plutôt Hamon, en toute logique, à souhaiter l'adoption du traité, selon le principe de réalité qui veut qu'on accepte ce qui ne peut pas être meilleur. Mais d'un autre côté, le ministre estime que le texte, en l'état, ne fait qu'ajouter de l'austérité à l'austérité, et là on ne voit pas comment il pourrait l'accepter.

Pour mieux comprendre, le journaliste lui demande quel serait son vote sur ce traité ? Benoît Hamon répond qu'il n'est pas parlementaire, qu'il laisse ses amis députés de l'aile gauche (ils sont une vingtaine) se prononcer. Bref, le ministre, tenu à la solidarité gouvernementale, ne se dévoile pas mais ce sont ses camarades qui le feront à sa place : ils voteront contre, c'est à peu près certain, au détriment de la discipline parlementaire de groupe. On est bien loin de l'époque où l'aile gauche, représentée par Jean-Pierre Chevènement, estimait qu'un ministre, "ça ferme sa gueule ou ça démissionne". Benoît parle à demi-mots, fait surtout parler les autres et évidemment ne démissionne pas.

Quant au congrès du PS et le dépôt éventuel d'une motion, Benoît Hamon est tout aussi balancé dans ses propos : "Je ne m'interdis pas de déposer une motion". Est-ce que ça veut dire qu'il va en déposer une ? Oui, puisqu'en politique, quand on dit qu'on ne "s'interdit pas" quelque chose, c'est qu'on va le faire mais qu'on n'ose pas encore le dire. Même ambivalence des mots quant à savoir si Hamon sera le premier signataire de sa motion (qui le poserait alors en candidat au poste de premier secrétaire) : "Je ne suis pas très enclin à être candidat au poste de premier secrétaire". Vous remarquerez, pour le traité comme pour le congrès, le style de l'homme politique, jamais affirmatif mais s'exprimant par dénégations.

Politiquement, s'opposer au traité européen comme déposer une motion au congrès socialiste n'est pas pour moi recevable, introduit d'inutiles divisions sur des points qui devraient faire l'unanimité. Sur la construction européenne, François Mitterrand a toujours tenu bon, jusqu'à menacer de remettre en jeu, dans les années 70, son mandat de premier secrétaire quand son soutien à l'Europe risquait d'être mis en minorité. Quant au congrès, il est absurde de déposer une motion (c'est-à-dire un texte qui propose une ligne politique alternative) lorsqu'on est au gouvernement et que la seule ligne politique est celle pour laquelle on gouverne.

Le plus comique, c'est la réponse de Hamon à la question sur les attaques de Mélenchon : "On a besoin de toi, Jean-Luc !" Le leader du Front de gauche soutient que le gouvernement n'a "presque rien" fait, que Ayrault vit dans un monde "tranquilou, à la papa, planplan" mais Hamon a besoin de cet homme-là ! Moi je m'en passe très bien, de celui qui nous mord la main plus fort que la droite et qui a choisi de rester en dehors du gouvernement. A vrai dire, c'est Mélenchon qui a besoin de Hamon, pour "peser" sur le PS, en bon praticien du rapport de forces, de façon d'ailleurs purement illusoire.

Le problème de Benoît Hamon et de l'aile gauche ne pourra aller qu'en s'accentuant au fil des mois, durant tout le quinquennat : comment soutenir et défendre une politique social-démocrate alors qu'on n'est pas soi-même social-démocrate ?

1 commentaire:

Lormont a dit…

Les démons de la division sont toujours opérationnels au P.S.Quel gâchis!