mardi 21 mai 2013

L'image d'une ville



La réunion organisée par Xavier Bertrand vendredi soir dans le buffet de la gare a rassemblé une centaine de personnes, ce qui est beaucoup pour un projet, le réaménagement du parvis de la gare, dont les grandes lignes et même les détails sont connus. Mais des questions ont été posées et des suggestions ont été faites. Cet intérêt pour un sujet d'embellissement de la ville me conduit à réfléchir sur le prochain débat (déjà commencé !) des élections municipales. Bien sûr il sera question d'emploi, d'impôts, de stationnement, de sécurité, que d'aucuns appellent les "vrais" sujets. Mais il sera aussi débattu de l'image de notre ville.

La préoccupation peut sembler superficielle, gratuite, secondaire : qu'est-ce que la beauté d'un parvis de gare à côté des souffrances quotidiennes, le chômage, le logement, la santé, l'éducation des enfants ? Et pourtant, je pense qu'il ne faut pas les opposer. L'homme ne vit pas que de pain. Surtout, les Saint-Quentinois savent bien que les questions économiques et sociales ne dépendent pas exclusivement de décisions locales mais de la politique nationale. En revanche, la réussite en matière d'aménagement (que je préfère appeler embellissement) de la ville relève entièrement de l'équipe municipale.

On aurait tort, à gauche, durant cette campagne municipale, d'ignorer ou de sous-estimer cette donnée : une ville a une identité aussi forte qu'un pays, à laquelle ses habitants sont attachés, pour laquelle ils éprouvent une sorte de fierté. Cette identité est visible par la beauté de la ville, par l'image qu'elle donne d'elle-même, à l'intérieur comme à l'extérieur. Ne croyons pas qu'il s'agisse d'un décor artificiel chargé de faire oublier tout le reste : non, une ville est aussi un miroir collectif dans lequel chacun aime à se regarder. L'une des raisons, depuis 18 ans, du succès de la droite à Saint-Quentin est qu'elle a compris et intégré ce facteur-là, que la gauche a minimisé et parfois moqué.

Quand je suis arrivé la première fois à Saint-Quentin, valises en mains, c'était au mois de juin 1994. En débarquant dans la gare, en jetant un coup d'oeil à l'extérieur, ma première impression a été la grisaille (le ciel n'a pas dû aider !) et je me suis dit alors (je m'en souviens comme si c'était hier) : on dirait une ville des années 50. Dans mon esprit, ce n'était pas forcément péjoratif, mais ça faisait vieux, un peu triste, sans couleurs. A l'approche de l'an 2000, la ville ne faisait pas très moderne. En discutant avec mes collègues de travail, quelques semaines plus tard, j'ai appris qu'il y avait, à une quarantaine de kilomètres, une ville très coquette où les Saint-Quentinois aimaient à se rendre les week-end, une ville en plus dont le nom m'était familier, alors que Saint-Quentin ne me disait rien du tout : Cambrai.

Vingt ans plus tard, l'Aisne a perdu pour moi bien de ses mystères, Saint-Quentin aussi, et je me rends régulièrement à Cambrai pour des conférences. Eh bien savez-vous ? Maintenant, ce sont les Cambrésiens qui viennent se divertir, s'instruire ou se promener dans Saint-Quentin. L'image que donne une ville, c'est très important, même si en finir avec l'installation du tout-à-l'égout est très important aussi. Mais l'une est visible de tous et l'autre ne réjouit que quelques-uns. Durant la campagne des municipales, il faudra débattre, comme vendredi au buffet de la gare, de ce qui peut rendre belle notre ville, de ce qui peut la rendre encore plus agréable à vivre. Il faudra, dans la sensibilité qui est la mienne, que la gauche explique quelles couleurs elle veut donner à Saint-Quentin.

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