vendredi 24 mai 2013

Le discours de Leipzig



Un homme d'Etat dessine son projet politique au fil de ses discours. François Mitterrand savait très bien faire ça. L'action gouvernementale ne prend tout son sens que lorsqu'elle est mise en perspective. Sinon, les mesures succèdent aux mesures et l'ensemble manque de lisibilité. Ce sont par ses références historiques qu'un discours devient clair, qu'un projet est compris. De ce point de vue, le discours de François Hollande à Leipzig, à l'occasion des 150 ans du SPD (voir mon billet d'hier), fera date.

Le président de la République a fait l'éloge des réformes menées il y a dix ans par Gerhard Schröder et a clairement inscrit la politique du gouvernement français dans cette filiation. Les objectifs sont les mêmes : diminuer le chômage et rétablir l'équilibre des comptes sociaux. Les sociaux-démocrates y sont parvenus spectaculairement : le chômage a massivement baissé, les caisses de santé et des retraites sont désormais excédentaires. Au prix de sacrifices ? Oui, et alors ? Vous connaissez une politique qui réussit sans peine, sans choix, sans sacrifice ? Moi pas. La seule question, c'est de savoir ce qu'on veut, et le dire.

Par certains côtés, le discours de Leipzig, c'est l'anti-discours du Bourget, pendant la campagne de 2012. Mais comparaison n'est pas raison : au Bourget, le discours était électoral, avec ses figures de style imposées ; à Leipzig, le discours est gouvernemental, avec ses responsabilités à assumer. Rien à voir.

Il ne faut pas croire non plus que François Hollande est à la traîne des Allemands. Son discours de Leipzig n'est pas un point de départ mais un point d'arrivée. Pas la peine d'aller chercher maintenant outre-Rhin ce que le gouvernement français a mis en place dès les premiers mois de son mandat : le pacte de compétitivité et la réforme du marché du travail. A vrai dire, il ne s'est rien passé de surprenant et d'innovant à Leipzig. Mais la gauche française n'en finit pas de découvrir, admirative ou inquiète, qu'elle n'est plus ce qu'elle était, qu'elle est devenue ce qu'auparavant elle enviait ou détestait : social-démocrate. L'adversaire de droite, lui, est bien embarrassé : pour reconquérir ou conserver le pouvoir, c'est d'une gauche radicale, d'une gauche repoussoir dont il a besoin et dont il est actuellement privé.

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