vendredi 1 janvier 2016
2016 d'Hollande et Merkel
Les vœux des chefs d'Etat et responsables politiques sont un passage obligé, qui ne prête pas toujours à l'originalité, mais qui est un bon exercice pour évaluer nos personnages publics. Hier soir, j'ai retenu essentiellement les interventions de François Hollande et d'Angela Merkel, parce qu'elles étaient bonnes et fortes toutes les deux, quoique très différentes dans leur contenu. Si j'ai adhéré à ce qu'a dit le président de la République, j'ai admiré les propos de la chancelière, qui a donc eu ma préférence, tout Français que je suis, et hollandais fervent.
François Hollande a eu raison d'axer, dès le début de ses vœux, son allocution sur les attentats meurtriers dont notre pays a été victime en 2015. Il a bien fait de rappeler que la patrie est ce qui nous rapproche et nous permet de surmonter l'épreuve du terrorisme. En même temps, le rappel salutaire de la tragédie est un facteur anxiogène. Une bonne partie de l'opinion vit dans la peur, craint pour sa sécurité. L'utile référence à la patrie alimente aussi le repli sur soi, auprès d'un électorat séduit par le nationalisme, l'autorité et l'exclusion.
Si Merkel m'a épaté, c'est qu'elle a abordé LE sujet politique inédit de ces derniers mois, qui sera celui des prochaines années : l'afflux massif de populations étrangères sur le sol européen. Le terrorisme islamiste n'est pas un fait politique nouveau, même si sa violence a atteint sur notre territoire national un degré inconnu jusqu'ici. Je pense qu'il sera rapidement résorbé, et que ce n'est pas un problème politique majeur, à la différence des flux de migration. La réponse d'Angela Merkel est incroyablement optimiste et volontaire : intégrer à la société allemande des centaines de milliers de migrants, en faire un atout économique pour son pays, mépriser la peur et la xénophobie. C'est admirable chez cette femme de droite, cette conservatrice, qui a une vision de l'Europe et du monde remarquable.
Qu'on ne me dise pas que c'est facile pour elle, que l'Allemagne souffre beaucoup moins du chômage, que sa démographie est en baisse : non, Merkel a aussi à faire face à un mouvement xénophobe chez elle, a de fortes réticences dans son propre parti ; et un faible taux de natalité réveille plus les fantasmes d'invasion et de remplacement de la population qu'une démographie en hausse. Ne suivons pas les jugements médiocres qui détestent toute forme de grandeur et la ramènent à leur propre bas niveau. Ce que fait Angela Merkel a une tonalité historique.
Le malheur de la France, c'est que nous n'avons pas été assez à la hauteur dans cette histoire tragique des réfugiés, nous en avons accueilli un nombre dérisoire, nous n'avons pas tracé, à la différence du gouvernement allemand, des perspectives d'avenir, tétanisés que nous étions, collectivement, par les attentats terroristes. Résultat : alors que l'Allemagne se donne des ambitions en rapport avec les enjeux du siècle, la France débat de sécurité intérieure, de déchéance de nationalité et offre de gros scores à l'extrême droite. C'est une question de culture : la France d'aujourd'hui doute d'elle-même, l'Allemagne est beaucoup plus confiante.
Aux lectrices et lecteurs de ce blog, je souhaite à mon tour une bonne année, la dixième, pour ce qui me concerne, de présence sur le net à vous faire part de mes réflexions, puisque mon premier billet a été publié à l'automne 2006.
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6 commentaires:
Il fut une époque où les "invasions" étaient considérés comme une menace, et la résistance une vertu. L'évolution des mentalités est formidable : aujourd'hui l'immigration massive ou non est considérée comme une chance, une force de progrès ; alors que la "résistance" est considérée comme la forme la plus réactionnaire et abjecte de fascisme et pire encore de XENOPHOBIE, le mot (maux) qui atteint le mieux les consciences pour les faire réagir face au péril que constitue le FN. La menace terroriste passe au second plan, quelle qu'en soit l'ampleur pour l'avenir, elle ne saurait entraver cette force de progrès et aussi ce devoir sacré d'aide aux victimes que constitue l'immigration. Je ne sais si c'est au nom des droits de l'homme, ou pour l'intérêt du capital ; mais en tout cas ces deux notions trouvent là un point de convergence, la question des migrants est la question fondamentale, qui éclipse celle de l'islamisme et aussi celle de l'ultralibéralisme, dans l'avancée vers le progrès dans le respect des droits de l'homme. Comme si dans un mouvement hégélien vers le progrès, la bonne volonté commune dépasserait ces deux fléaux contemporains prégnants que constituent l'islamisme et la vision la plus libérale de la mondialisation, deux faux problème qui s'atténueront grâce à la marche irrésistible de l'humanité vers le progrès dans le respect le plus inconditionnel voire fanatique des différence et de la diversité, qui constitue un des aspects les plus fondamentaux de l'idée la plus cruciale en république, celle des droits de l'homme ; et comme si toute entrave à cette marche forcée s'apparentait à un fantasme, de peur, de rejet, de haine, qui s'incarne dans la crainte notamment du remplacement, qui n'est que le reflet de la bassesse morale de celui qui a de tels fantasmes.
Et puis aussi comme si toute forme d'attachement à des valeurs du passé, voire même à des paysages était rétrograde, on se demande bien pourquoi l'auteur de ce blog est défavorable au transhumanisme, qui constitue la forme la plus aigue du progrès, la grande indifférenciation des types humains, dans le grand tout transcendant que pourrait constituer l'homme amélioré, enfin débarrassé de toutes ses spécificités culturelles, amélioré et indifférencié par la génétique et la technologie, un pied déjà dans le futur, sans dette envers le passé, la culture, l'effort et le travail et même le mérite cher à un ancien président, puisque des penseurs sérieux étudient sérieusement la question d'une possibilité de téléchargement de la culture éventuel, ou autre, car après tout la culture n'est qu'un luxe, un vernis posé sur la réalité et la complexité de la vie, un téléchargement donc sur les individus, comme on télécharge un ordinateur. Le transhumanisme est donc un messianisme, un nouvel humanisme, la vision la plus ultime de l'incarnation des droits de l'homme, puisqu'avant c'était par la contrainte que constituait la culture que l'homme accédait aux plus pures félicités de la vie, mais dans l'injustice de la discrimination sociale, alors que là l'homme y aura accès sans effort, par téléchargement, et aura même le choix de ne pas s'y intéresser ; autrement dit la culture et ses contraintes; efforts, discipline, et surtout sa foncière injustice attribuant à la richesse ou à la naissance ses bienfaits, constituait une entrave aux droits de l'homme.
Personnellement je ne crois pas en ce nouvel humanisme, car il n'y a rien de plus stupide qu'une machine comme un ordinateur, qui peut avoir des possibilités de calcul des milliards de fois plus développées qu'un être humain, il lui manquera toujours la conscience, fruit miraculeux de la vie et elle seule, et surtout de l'amour; je ne crois pas plus qu'au progrès, l'homme est et restera un cro-magnon 1.0 plein de cynisme, et de calculs, qu'il dissimule justement souvent sous le vernis de la culture. Dans ces conditions la résistance est selon moi une vertu ; reste à délimiter les limites morales de cette néo-réaction pour qu'elle ne se transforme pas effectivement en réaction de rejet, donc de xénophobie.
Autrement dit si comme l'auteur de ce blog, Emmanuel Mousset, on défend une certaine idée de la culture, on ne doit pas accepter inconditionnellement toutes les avancées du progrès, comme un changement trop radical de nos modes de vie, de nos coutumes, que pourrait apporter l'indifférenciation généralisé des types humains.
Bonne année Erwan ! Et des commentaires un peu moins longs en 2016, pour faciliter la lecture. Mais tu fais comme tu veux ...
Bonne année à toi aussi.
Bonne année cher Emmanuel ! Que 2016 puisse vous inspirer pour vos prochains articles ! Au plaisir de vous lire !
monsieur Blesbois,relisez Boileau:Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement - Et les mots pour le dire arrivent aisément.L'Art poétique (1674)
et vos tirades interminables en seront allégées( car on finit par se lasser dès la 10e ligne)
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