samedi 14 décembre 2013

Héritiers et héritage




La politique n'est pas une démarche individuelle : c'est une affaire d'héritage, de fidélité, de mémoire. Le militant politique n'est presque rien par lui-même ; il s'inscrit dans une histoire, il reçoit en legs tout un passé, il n'est que le maillon d'une longue chaîne. La droite saint-quentinoise l'a bien compris, qui honore régulièrement les siens, comme ce matin, en souvenir de Jacques Braconnier, maire de la ville, et René Huel, adjoint.

Les siens ? Pas tout à fait. Un élu est désigné par une majorité, mais dans le cadre de ses fonctions, il est l'élu de tous, y compris de ceux qui n'ont pas voté pour lui. Ainsi le veut l'esprit républicain. C'est pourquoi, ce matin, j'étais présent, à l'une et à l'autre de ces commémorations, bien que ne partageant pas les idées politiques de Jacques Braconnier et de René Huel.

Il y a une autre raison à ma participation, plus liée cette fois à la politique qu'à la République. Une ville n'est pas un pays. Au niveau national, le clivage gauche-droite est très tranché. Au niveau local, c'est moins vrai. La gauche à la tête de la Municipalité ne peut pas prétendre défaire tout ce qu'à fait la droite. Il y a une forme de continuité à assurer. Jacques Braconnier a été, comme Pierre André, un grand maire de Saint-Quentin, qui a su faire évoluer la ville, marquer ses mandats par de grandes réalisations. René Huel aussi, dans sa tâche d'adjoint, a abattu un travail considérable. Si la gauche gagne en mars prochain, elle devra assumer une part de cet héritage, même si elle mettra en oeuvre son propre projet, pour lequel elle aura été élue. L'alternance n'est pas une page blanche, mais le nouveau chapitre d'un livre.

Qui dit héritiers et héritage dit aussi famille. De fait, un parti n'est pas un clan ou une bande, encore moins un gang, mais une famille, c'est-à-dire qu'à la différence du clan, de la bande et du gang, on n'en choisit pas les membres, mais on les reconnaît, on les admet. Ce n'est bien sûr pas le sang qui commande, contrairement à la famille biologique, mais ce sont les convictions. On peut aimer ou ne pas aimer les membres de sa famille politique, il faut les accepter tels qu'ils sont et pour ce qu'ils font. Je crois que la droite locale, à quelques exceptions près, a toujours agi de cette façon, et ce matin en était l'illustration.

Devant l'entrée du parc d'Isle, en hommage à Jacques Braconnier, il y avait surtout des militants et sympathisants UMP. Mais ce n'était pas une manifestation organisée par ce parti (sinon je n'y serai pas allé !). Une heure plus tard, au Centre Technique d'Agglomération, chemin d'Itancourt, en mémoire à René Huel, le public était beaucoup plus nombreux et plus diversifié : des chefs de service, des contremaîtres, des agents territoriaux, et des personnalités de gauche (Antoine Crestani, Viviane et Dominique Gayraud, Georges Varenne, Christian Vilport, entre autres), dont Xavier Bertrand a salué la présence, comme preuve du respect qu'inspirait le travail de René Huel, au-delà de son propre cercle politique.

Pierre André, qui se fait rare dans les manifestations publiques, était des deux événements, en grande forme, n'ayant rien perdu de son charisme, très écouté quand il a pris la parole pour saluer la mémoire de René Huel, rappeler combien celui-ci avait contribué, à travers le Centre Technique d'Agglomération qui porte désormais son nom (vignette 2), à la modernisation des conditions de travail des territoriaux (vignette 1, à ses côtés Frédéric, le fils de René Huel).

A la suite, Xavier Bertrand a donné des nouvelles rassurantes de Thierry Roux, qui est sorti du coma, après le terrible accident qui a coûté la vie à deux jeunes employés municipaux, Serge Duchesne et Olivier Painsec (vignette 3). Le maire de Saint-Quentin a cité la définition que René Huel aimait donner de l'homme politique et qu'il a tenu à appliquer dans sa vie d'élu : "la relation de ceux qui n'ont pas de relations", et qui de ce fait viennent le solliciter, à charge pour lui de les aider. Oui, je crois que c'est une belle définition. Et c'était une belle matinée.

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