dimanche 11 septembre 2016

Rien n'est jamais deux fois pareil



En politique, ne sont stables que les convictions. Pour le reste, tout change sans cesse. Il y a quelques années, j'étais un fervent partisan du système des primaires. A l'époque, au sein du Parti socialiste, les sceptiques et les adversaires de ce mode de désignation étaient nombreux. On me disait : il n'est pas normal que le candidat socialiste ne soit pas désigné par les adhérents socialistes. Et puis : cette primaire, ça ne marchera pas, les électeurs ne vont pas se déplacer deux fois, pour désigner leur candidat et ensuite pour voter pour lui, c'est absurde. Et encore : les résultats vont être faussés, plein de gens de droite vont s'en mêler, aller voter, choisir le candidat le plus faible ... Tout cela, je l'ai entendu, répété, et rien n'est advenu comme certains le craignaient. Les primaires socialistes de 2011 ont été, à ma grande satisfaction, un beau succès, à tel point que je me suis mis à en vouloir un peu partout, y compris à Saint-Quentin !

En politique, ne sont stables que les convictions. Pour le reste, tout change sans cesse. Sur ce dispositif que sont les primaires, je suis aujourd'hui très réservé, pour ne pas dire hostile. Le mode de désignation d'un candidat est, comme beaucoup de choses en politique, une question de circonstances. Pour 2017, je ne le sens pas. Pourtant, les primaires ont fait florès, le PS a été précurseur et visionnaire : octobre pour les écologistes, novembre pour la droite, décembre pour les socialistes. Le paradoxe, c'est que la gauche radicale, qui les réclamait il y a quelques mois, organisait des réunions en leur faveur, n'en fera sans doute pas. Jean-Luc Mélenchon a trusté ce créneau politique, il est parti tout seul sans attendre personne, et surtout pas la mise en place d'hypothétiques primaires.

La droite vient de se donner, hier soir, ses pré-candidats, huit ! C'est aberrant. Comment un parti politique, que rassemble normalement une unité de doctrine, peut-il se retrouver à devoir choisir entre huit candidats, censés représenter huit projets différents ? Ca ne va pas. Déjà, chez les socialistes, en 2011, six candidats, c'était beaucoup. Mais, historiquement, le PS est traversé par des sensibilités nettement différentes. A droite, il y a quoi ? Les libéraux, les gaullistes et les réacs. Remarquez qu'à gauche, trois sensibilités suffisent aussi à résumer le paysage : les sociaux-démocrates, les socialistes traditionnels et les écologistes. Le mal des primaires, c'est d'exacerber les rivalités purement personnelles, de créer de fausses différences et de vrais différends. Ce n'est pas bon, ça ne peut faire que le jeu de l'extrême droite, qui sera bien la seule force politique d'envergure à ne pas désigner son candidat par ce processus !

Au Parti socialiste, les primaires étaient une excellente chose la dernière fois, parce que c'était la première fois, parce que nous étions dans l'opposition, parce qu'aucun candidat naturel ne s'imposait, après la défection de Dominique Strauss-Kahn. La nouveauté a attisé la curiosité, suscité l'intérêt et mobilisé de nombreux Français. Je vous parie qu'il n'en sera pas de même cette fois-ci (hélas). Surtout, François Hollande est le candidat naturel, légitime et logique des socialistes, sauf pour les factieux qui se réunissent ce week-end à La Rochelle pour comploter contre lui. La seule force qui lui reste pour gagner, c'est l'aura présidentielle, associée à la défense de son bilan et la mise en perspective d'un projet. Mais, en décembre, quand il lui faudra concourir avec les seconds couteaux de l'aile gauche, il va déchoir de l'auguste fonction qui le protège encore.

Vous voyez le président de la République, qui traite de l'avenir de la planète avec Obama et Poutine, se mettre à discuter le bout de gras avec Filoche et Lienemann ? Moi pas. Si encore la primaire impliquait Macron et Montebourg, c'est-à-dire la voie sociale-libérale et la voie sociale-étatiste, le débat aurait de la hauteur et de l'utilité. Mais là, avec ce qui se profile, ce n'est plus la cour des grands, c'est la cour de récréation avec les chamailleries de préau. Bon, le pire n'est jamais certain, même en politique. Espérons donc qu'il en sera autrement. Ce qui est certain, c'est que l'Histoire ne se répète pas, Marx le disait déjà. Ou, pour citer un autre philosophe, Héraclite celui-là : "on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve". Les primaires de 2011 étaient une source de jouvence ; je crains que celles de 2016, à gauche comme à droite, ne soient qu'un bain d'eau sale, en espérant de tout cœur me tromper.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

D'accord avec vous , et aprés sans doute on va jeter le bébé avec l'eau du bain , on va jeter la démocratie ou ce qui l'en reste dans les mains des extrêmes ........

Philippe a dit…

"Rien n'est jamais deux fois pareil" mais souvent presque pareil !

http://www.hiram.be/blog/2016/09/11/de-soutane-burkini/

Pour lire l'arré il faut cliquer dessus ...
Un document de 1900 ... anti soutane ... toutes ces polémiques ont débouché sue la loi 1905
Si l'on veut apaiser notre société il faudra sans doute un équivalent de loi 1905 vis à vis de la religion musulmane avec la même exigence que vis à vis de la catho et il faudra réprimer des manifestations de rue identiques à celles organisées par les cathos de 1905...
A l'époque des manifestations de rue anti 1905 avaient lieu avec des chefs militaires à cheval en tête comme Pétain à Arras par exp ........
Aurons-nous le même courage politique que nos anciens ?

Philippe a dit…

Rectificatif
A Arras ce n'était pas Pétain ... qui n'était pas anti loi 1905

Le futur a dit…

Il aurait fallu attendre qu'Hollande prenne sa décision ou non avant d'organiser les primaires.
Si Hollande se présentait : pas de primaire, Hollande candidat naturel.
Si Hollande ne se présentait pas : une primaire.

F a dit…

Il aurait fallu...
Bien sûr qu'il aurait fallu beaucoup de choses...
Il aurait fallu que d'abord M Hollande ne fasse pas son discours du Bourget...
Il aurait fallu que les "grandes" réformes soient entamées dès le premier mois du quinquennat...
Il aurait fallu qu'ainsi M Hollande devienne le chef indiscuté du parti sans se lier les mains avec son improbable inversion de la courbe du chômage...
Il aurait fallu qu'il soit entouré dès le début par des ministres plus sûrs dont tous les candidats à la primaire ainsi que la précédente candidate de 2007...
Il aurait fallu que la règle d'organisation de primaires ne tienne que si le Président sortant décide de ne pas se représenter avec une date limite de décision bien déterminée...
Après, il aurait été possible de parler de traitres, de renégats, de factieux pour celles et ceux ne respectant pas leurs engagements vis à vis du Président.
A cause de tout cela, il est difficile de déterminer les manques de chacun.
Car tous les protagonistes ont des choses à se reprocher et s'ils ne le ressentent pas ainsi, les électeurs le leur feront savoir de toute manière en fin avril prochain (car il n'y aura pas de joli mois de mai pour ces messieurs et dames du PS, frondeurs d'opérette compris).

Emmanuel Mousset a dit…

On ne fait pas de politique avec des "il aurait fallu que ..."