mardi 6 septembre 2016
Le beau salaud
J'ai aimé Jérôme Cahuzac, je l'ai apprécié, admiré même, pour sa prestance, son intelligence, sa compétence. Je l'ai soutenu, défendu. Il représentait pour moi tout ce en quoi je crois : après Dominique Strauss-Kahn et avant Emmanuel Macron, dans la filiation de Michel Rocard, Cahuzac incarnait avec brio, talent et avenir cette social-démocratie à la française qui a tant de mal à faire son chemin dans la gauche de notre pays. Oui, Jérôme Cahuzac au gouvernement, en début de mandat, était un ministre formidable, séducteur et prometteur.
Je déteste Jérôme Cahuzac, je le méprise, je le hais même. Il a trahi l'espérance que j'avais mise en lui. C'est comme s'il m'avait trahi personnellement. C'est la honte du Parti socialiste et du gouvernement. Non pas parce qu'il avait un compte en Suisse, au Japon ou je-ne-sais-où : en soi, ça ne me choque pas, ni le fait d'être à la fois riche et socialiste. Mais ce qui me scandalise, c'est qu'il l'ait caché, qu'il ait menti devant le Parlement, qu'il ait ainsi porté un très mauvais coup à la classe politique, par les temps qui courent et qui ne lui sont pas très fastes. Je hais Cahuzac pour l'explication qu'il a donnée à son mensonge : sa "part d'ombre". Tu parles ! Une piètre excuse. Je ne vois que de la lumière en lui, évidente, aveuglante, assumée, celle d'un homme en recherche de fric et de pouvoir.
Je hais encore plus cet homme depuis hier. Il a de la merde sur les mains et, pour se disculper, pour atténuer son cas, il cherche à en éclabousser les autres. Cahuzac s'en prend à un mort récent, Michel Rocard, qui n'est évidemment plus là pour se défendre. Il lui faire dire et faire le contraire de ce que ce grand socialiste a dit et fait toute sa vie. C'est plus que malhonnête, c'est odieux, dégueulasse. Ca ne se fait pas, faire parler et agir les morts. C'est diabolique, c'est Cahuzac. Ce type n'a tué personne, il n'a pas de sang sur les mains, il n'est pas criminel, il est pire que ça : c'est un salaud, un salaud intégral. Ce visage que j'ai suivi, écouté, estimé, j'ai maintenant envie de lui cracher à la gueule, quand je le vois apparaître sur mon écran de télévision.
Qui saura jamais le mal qu'a pu faire Jérôme Cahuzac à la République française, dans l'opinion publique ? J'écoutais ce matin à la radio les commentaires sur l'affaire : c'était consternant ! Des animateurs, que je n'ose même pas appeler journalistes, s'amusaient au petit jeu du "et si c'était vrai ?", "et si le menteur disait cette fois la vérité ?" Voilà le travail : la merde éclabousse et rend merdeux tout ce qu'elle touche, sur le dos d'un mort.
Je n'ai pas l'esprit vengeur, je ne demande pas la mort du pécheur, je crois en la puissance de la rédemption : même au pire des hommes, il faut accorder une possibilité de rachat. Quand l'affaire Cahuzac avait éclaté, j'avais bien aimé la réaction d'un journaliste, un vrai celui-là, Alain Duhamel, disant qu'il ne restait plus qu'une solution au ministre, médecin de profession : aller dans un dispensaire en Afrique et y consacrer le reste de sa vie à soigner les déshérités. Oui, ce geste lui aurait rendu une noblesse perdue, il aurait effacé le mensonge, une vie misérable en quête d'argent et de pouvoir. Cahuzac, au lieu de tenter de sauver sa personne, essaie d'enfoncer les autres, y compris ceux qui sont irréprochables. Le coupable qui, à son profit, accuse l'innocent : voilà la définition exacte du beau salaud.
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8 commentaires:
Le ministre de la guerre britannique, John Profumo, éclaboussé dans une affaire de mœurs en Angleterre dans les années soixante, corsée par des risques pour la sécurité nationale (il avait un temps partagé une maîtresse avec l'adjoint militaire de l'ambassade soviétique), mais dont le vrai tort a été de mentir devant le Parlement en niant son implication, a démissionné et consacré sa vie au travail social dans les quartiers pauvres de Londres. Cela fait que chaque fois que "l'affaire Profumo" a été évoquée, était évoqué aussi cet engagement rédempteur. Cela a établi une sorte d'équilibre moral qui n'est guère probable de se reproduire dans le cas de Cahuzac.
Les gens qui mentent devant le parlement ça n'a rien d'exceptionnel, ça arrive tous les mardis...
Allons, Maxime ...
Je comprends votre d'indignation mais vous en faites trop.
Cependant Alain Duhamel, un journaliste ? D'abord un commentateur complaisant de notre classe dirigeante depuis 40 ans, "écrivain" polygraphe et multicarte. Un autre journaliste très complaisant mais de moindre envergure : Jean-Pierre Elkabbach.
En quoi mentir au parlement serait-il plus grave que mentir aux électeurs ?
Il me semble avoir compris que pour E.M. en politique on ne fait pas de morale.
Donc morale mise de côté J. Cahuzac ne ment peut être pas concernant le motif de l'ouverture du compte à une époque où Rocard rêvait sans doute de se présenter à l'élection présidentielle.
L'histoire est plausible ! Habituelle avant 1996 !
Attendons de savoir s'il peut le prouver ...
Il m'étonnerait que chèques et cartes bancaires aient été utilisées !
C'est pas gagné pour lui ...
La morale est une affaire personnelle ; la politique est une activité publique. Mais la politique n'est pas sans règles : celle de dire la vérité quand on est questionné par le Parlement en est une.
« Aux États-Unis, le crime de parjure peut valoir une sentence jusqu’à cinq années de prison et entraîner une procédure de destitution à l’encontre d’un élu ou d’un haut fonctionnaire (impeachment). » extrait des attendus d'une proposition de loi du 13 avril 2013 devant le Parlement français et qui bien évidemment n'a pas eu de suite.
Donc J. Cahuzac avait le droit de mentir et ses anciens amis qui avec lui entouraient Rocard en 1995 ont le droit actuellement de mentir … ce qu'ils font à coups de menton et droit dans les yeux !
Résumons !
Beau au sens figuré oui, Salvador Dali aurait dit "cosmique salaud"
Beau au sens propre : les avis des dames autour de moi sont loin d'être unanimes donc ... bof, (pour affiner il faudrait une cohorte représentative de 999 personnes de plus de 18 ans ....le fan club de E.M. devrait permettre l'étude)
salaud oui moralement et non politiquement
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