mardi 1 septembre 2015

La morale à l'école



L'une des innovations de cette rentrée scolaire, c'est l'introduction d'un enseignement moral et civique, de l'école au lycée. Je n'y suis pas très favorable, depuis longtemps et pour de multiples raisons. D'abord, c'est un débat ancien qui a déjà été réglé, croyait-on : il y a une quinzaine d'années, on en parlait, et l'ECJS (Education civique, juridique et sociale) a été instaurée, c'est-à-dire la bonne vieille instruction civique. Pourquoi ne pas en rester là ?

Il y manquait la morale ? Sans doute, mais celle-ci n'a pas à être transmise à l'école : elle relève de la sphère familiale, de l'éducation privée que reçoit tout un chacun. De plus, la nouvelle discipline s'est imposée sous le coup des événements : l'attentat terroriste contre Charlie hebdo. Je ne suis pas partisan de programmes scolaires qui seraient construits en fonction de l'actualité, aussi tragique soit-elle.

On se réfère à la notion de morale laïque, mais cette formule est contradictoire : la laïcité, c'est tout le contraire, c'est la neutralité dans les choix éthiques, qui relèvent de la liberté individuelle. Autant il existe une morale chrétienne, autant il n'y a pas de morale laïque. Toute morale implique une représentation du monde, une certaine conception du Bien et du Mal : ce sont des concepts lourds, discutables, idéologiques, que l'école publique ne peut pas se permettre d'imposer à ses élèves.

Mais, me direz-vous, et la morale des instituteurs d'autrefois, l'école de Jules Ferry, les sentences chaque matin inscrites au tableau noir ? La nostalgie et l'oubli sont de mauvais conseillers. On ne peut pas confondre quelques règles élémentaires et indispensables de savoir-vivre (au même titre que les prescriptions d'hygiène) avec la morale. D'ailleurs, tout enseignement secrète ses propres principes de vie collective (arriver à l'heure, obéir au maître, faire son travail, etc.). C'est quelque chose qui se vit, dans l'exercice du métier, du côté de l'enseignant comme du côté de l'élève ; ce n'est pas quelque chose qui s'enseigne, à la façon d'une matière intellectuelle.

Et puis, j'ai souvent remarqué que ceux qui font la morale aux autres se gardent bien de se l'appliquer à eux-mêmes. Parce que la morale, dont la politesse est le plus bas degré, c'est aussi un exercice d'hypocrisie sociale, sans doute inhérent à la vie en collectivité. Le gouvernement a choisi de surfer sur l'air du temps, fortement moralisateur : ça ne mange pas de pain, personne n'y trouve à redire. Je ne vais quand même pas le lui reprocher.

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