lundi 8 juillet 2013

Une sérieuse concurrence



Le choix des communistes saint-quentinois de partir sans les socialistes et de se donner Olivier Tournay comme tête de liste municipale n'est pas une surprise pour moi : je l'avais annoncé sur ce blog, et devant mes camarades lors de l'assemblée générale de présentation des candidatures pour le premier des socialistes. Mine de rien, c'est un tournant historique : depuis les années 70 (avant, je ne sais pas), les communistes ont toujours fait alliance avec les socialistes, d'une façon ou d'une autre (en 1995, il n'y a pas eu d'alliance officielle, mais des socialistes figuraient sur leur liste). Pour la première fois depuis au moins un demi-siècle, les communistes se passent des socialistes.

Est-ce une bonne chose pour le PS ? En 2008, j'aurais répondu que oui sans hésiter, puisque j'avais souhaité alors des listes autonomes, mais à l'initiative des socialistes, pour que nous assumions notre différence. Aujourd'hui, c'est l'inverse, ce sont les communistes qui, sans discussion préalable, décide de nous lâcher et de faire cavalier seul. Surtout, depuis 2008, les communistes ont pleinement bénéficié des accords avec l'extrême gauche, qui leur a offert une tribune en or dont les socialistes n'ont hélas pas fini de payer les conséquences. Olivier Tournay est parvenu à s'imposer comme un des conseillers municipaux les plus pugnaces et les plus sérieux, avec Michel Aurigny (POI). Ses interventions sont remarquées, il a réussi à se médiatiser. Il peut espérer en tirer l'an prochain un bénéfice électoral.

Pour les socialistes, les communistes vont être de très sérieux concurrents, d'autant que le rapport de force militant est en leur faveur, du simple au double (90 votants pour l'investiture, contre 46 chez les socialistes). Le nom de Tournay renvoie à toute une tradition saint-quentinoise sur laquelle Olivier peut capitaliser des voix. Et puis, sa liste peut s'ouvrir, comme je le crois, à toute l'extrême gauche, POI en tête. Nous aboutirions à ce paradoxe que la liste communiste contiendrait plus d'élus locaux que la liste socialiste ! Mais en sommes-nous à un paradoxe près ? Je ne suis même pas certain que le Front de gauche ne finisse pas par les rejoindre. Certes, les amis de Mélenchon sont très critiqués par ceux de Bécourt et Tournay, mais quand je vois à quel point le Front de gauche critique la politique gouvernementale, je me dis qu'ils se retrouveront plus dans une liste radicale que dans une liste social-démocrate. Je me demande même si les écolos ne vont pas céder à la séduction.

Ceci dit, il faut relativiser le danger que peut représenter la concurrence communiste : d'abord parce que, en 2011, Olivier Tournay a fait un faible score aux élections cantonales ; ensuite parce que sa section, malgré ses intentions, n'a pas pu présenter de candidat aux dernières élections législatives. La position de dissidence à l'égard de la direction nationale du PCF les marginalise et fragilise. Je ne m'en réjouis pas : la gauche ne pourra gagner l'an prochain que si elle est forte dans toutes ses composantes et bien sûr rassemblée. Là, le rassemblement, je ne le sens pas très bien.

En fait, tout va dépendre de la campagne des socialistes : soit une dynamique est assez vite créée et la victoire deviendra possible, soit c'est la dispersion et l'échec. Pour créer cette dynamique, il faut mettre le paquet sur la communication et la présence sur le terrain. Un exemple : la Municipalité vient d'exposer sa saison culturelle, qui concerne des milieux très sensibles aux messages de la gauche. Les socialistes doivent donc faire entendre sur ce sujet, comme sur bien d'autres, leur petite musique.

Autre exemple : l'ouverture des plages, qui donne l'occasion de s'exprimer sur la politique des loisirs à Saint-Quentin. Les socialistes doivent se saisir de tout événement de façon à initier des débats, lancer des propositions. C'est de cette façon qu'ils pourront reconquérir le coeur des Saint-Quentinois. Il sera également indispensable, toujours par rapport à la liste conduite par Olivier Tournay, d'assumer sans réserve notre soutien au gouvernement et notre identité réformiste, social-démocrate.

Entre socialistes et communistes, dans cette situation inédite de concurrence électorale, je souhaite que cette concurrence soit saine, franche et loyale. Car la concurrence peut aussi avoir des vertus : elle incite chacun à donner le meilleur de lui-même, dans le respect de l'autre. Les socialistes doivent tout faire pour arriver largement en tête au soir du premier tour, mais tout faire aussi pour que le rassemblement de la gauche se fasse dans les meilleures conditions au second tour. Je n'irai pas jusqu'à dire : vive la concurrence ! parce qu'au fond de moi je la redoute un peu pour les socialistes, mais je me dis aussi qu'il faut savoir en tirer le meilleur parti.

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