vendredi 23 novembre 2012

La conscience et la loi



Sans le barouf à l'UMP, François Hollande aurait suscité un intéressant débat politico-philosophique à propos de la "liberté de conscience" dans l'application de la prochaine loi sur le "mariage pour tous". En dispensant dans un premier temps les maires d'aller contre leurs convictions intimes, il a soulevé un tollé. Certains ont même parlé de disposition "humiliante". Non, c'est un contresens : la notion de "liberté de conscience" est au coeur de la République, l'Eglise l'a d'ailleurs combattue au XIXème siècle, elle est par exemple mentionnée dans l'article 1 de la loi de séparation des églises et de l'Etat. C'est un concept parfaitement laïque et démocratique.

La loi autorisant le mariage homosexuel n'est pas banale, ordinaire, elle ne renvoie pas à un simple contrat, elle aménage une véritable institution, qui porte sur des domaines très intimes de l'être humain, l'amour, la vie commune, la sexualité, souvent la procréation. Ce sont des sujets délicats qu'il faut aborder avec beaucoup d'attention. La référence de François Hollande à la conscience de chacun et à sa liberté fondamentale est donc pleinement justifiée.

Certes, l'esprit et la lettre de la loi exigent son universalité ; une législation à la carte n'est pas acceptable. Mais ce n'est pas de cela dont il s'agit avec la liberté de conscience : le "mariage pour tous" sera un droit pour tous, absolu, sans aucune dérogation ou exception. Simplement, sur un sujet aussi sensible, il ne sert à rien de vouloir inutilement blesser les consciences. Un peu de bon sens et d'esprit tolérant font comprendre qu'un maire qui ne le souhaite vraiment pas, en son âme et conscience, peut déléguer à un adjoint la célébration du mariage. C'est ce qu'a suggéré le président de la République, ni plus ni moins.

En revanche, ce qui n'aurait pas été acceptable, c'est d'inscrire le terme et le principe de la "liberté de conscience" dans le texte de loi. Car alors, ce serait judiciariser un refus éventuel, contre lequel les conjoints n'auraient aucun recours, si d'aventure aucun autre élu n'accepte de procéder à l'union. Ce n'est pas une querelle de mot que je suis en train de soulever, c'est un point précis de droit.

Enfin, il faut rappeler dans quelles circonstances et selon quels principes François Hollande a avancé cette notion de "liberté de conscience" à propos du mariage homosexuel : devant l'assemblée des maires de France, qui font partie de ces "corps intermédiaires" par dessus lesquels Nicolas Sarkozy voulait passer pour réformer la société, alors que François Hollande a choisi une gouvernance nouvelle, faite d'écoute, de partenariat et de négociation, dans le respect des engagements pris pendant la campagne électorale.

De même, comment le président de la République, président de tous les Français et pas seulement de ceux qui ont voté pour lui, comment pourrait-il ignorer les manifestations importantes qui ont eu lieu samedi dernier contre le "mariage pour tous" ? Il ne s'agit pas de reculer, encore moins de renoncer : la loi se fera, le projet passera. Mais il s'agit, en homme politique responsable, en chef de l'Etat digne de ce rang, d'écouter, de respecter, d'expliquer et de rassurer.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Son choix de conscience il faut le faire avant de se présenter à l'élection municipale.
Si on accepte la charge de Maire, on se doit alors d'appliquer toute les obligations.
il sera humiliant pour un couple gay de voir le maire sortir au moment ou ils arriveront avec la famille et les amis, et le voir entrer tout sourire à la fin de la cérémonie pour accueillir le couple hétéro suivant.
Les maires seront heureux de se voir débarrasser des couples homos qui sachant à l avance la position du maire iront dans les mairies gayfriendly !
ainsi a st quentin il n y a aura aucun mariage gay ! et donc une evolution freinée des mentalités dans beaucoup de villes et villages.
cette mesure proposée par françois hollande dessert la lutte contre l'intolerance.




de gauche a dit…

il aurait suffi à F.Hollande de rappeler que les Maires peuvent déléguer( ce qu'ils font souvent pour les mariages) sans avoir à parler de" liberté de conscience" ;on aurait évité ainsi d'inutiles polémiques;on a l'impression quelquefois que l'équipe dirigeante en place a fait sienne ce précepte:pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué

Anonyme a dit…

Par ailleurs pourquoi dans ce cas la liberté de conscience ne s'appliquerait qu'au seul maire?
Et comment fait-on si aucun adjoint ne veut célébrer le mariage d'un couple homo?
On atteint vite les limites du débat.