jeudi 22 novembre 2012

Suicidaire division



Je ne comprends pas bien ce qui se passe à l'UMP. Jean-François Copé ne veut pas qu'on intègre dans les résultats du scrutin le vote de trois fédérations, ce qui est évidemment anormal. Mais François Fillon, qui fait cette demande, renonce à être président alors que la rectification le donnerait vainqueur ! Quant à une direction collégiale autour d'Alain Juppé, ce n'est pas une solution : on n'organise pas toute une consultation pour aboutir à ça.

Ce qui est terrible dans cette histoire, c'est que des hommes responsables, qui ont exercé au sommet de l'Etat, ont maintenant des comportements suicidaires. En même temps, c'est toute l'histoire de la politique, à gauche comme à droite, qui est marquée par des divisions de ce type, dramatiques et finalement incompréhensibles. A cause de quoi ? La quête du pouvoir, la rivalité des personnes, le choc des idées, il y a un peu de tout ça.

Mais c'est aussi la nature de la démocratie qui le veut : le débat, forcément, porte à se diviser, même le plus digne des débats. Et je préfère cette situation-là à un monde politique sans débat, sans division. La division, c'est aussi un révélateur, un moment de vérité : Fillon et Copé ont mené pendant la campagne de trop sages débats, où leurs divergences réelles étaient refoulées. Maintenant, c'est l'inévitable explosion.

Ce n'est pas la division en soi qui est à déplorer : elle fait partie de la vie et n'appartient pas qu'à l'univers politique. Non, ce qui compte, ce qui est précieux, ce sont les procédures qui permettent de surmonter les conflits, de les dénouer (et sûrement pas de les nier ou de les effacer). D'où viennent les facteurs de la division ? De l'imprécision des règles, de l'absence de leader, de l'éloignement du pouvoir.

Le pire, le plus triste, c'est quand un parti ne trouve pas mieux que de faire appel à la justice pour régler ses différends (c'est ce que n'exclut pas de son côté François Fillon). Quel échec de la démocratie interne ! Y aura-t-il scission, comme il en est question ? Non, je ne le crois pas. Dans l'histoire de la politique française, toutes les scissions, c'est-à-dire les départs collectifs, sont idéologiques : au PS, c'est Chevènement et Mélenchon ; à l'UMP, c'est Dupont-Aignan. Entre Copé et Fillon, il y a différences politiques certes, mais pas divergences idéologiques profondes.

Dès que je suis arrivé à Saint-Quentin, en 1998, j'ai eu très vite la tête pleine d'histoires de divisions, entre Wattiez, Vatin, Lefèvre. Je ne comprenais pas grand chose à cette culture endémique de la conflictualité et de l'éviction. J'ignorais surtout qu'un jour ce serait à mon tour d'être pris dans le tourbillon de la division, malgré moi ! A l'inverse, si la droite locale est forte et respectée, c'est surtout parce qu'elle est unie, qu'elle a su se donner un leader incontesté, faire taire publiquement ses divisions (qui existent inévitablement en privé), mettre chacun à sa place.

A Saint-Quentin ou ailleurs, à gauche ou à droite, la division politique est auto-destructrice, elle se nie elle-même. Ce qui me stupéfait, c'est qu'elle n'a aucune considération pour l'opinion publique, alors que l'action politique est supposée travailler pour elle. Elle n'a aucun égard pour l'image qu'elle donne auprès de son électorat. Plus stupéfiant encore, proprement suicidaire, elle en oublie ce pouvoir pour lequel pourtant elle combat ; elle ignore l'avenir, s'empêchant tout espoir de l'emporter quand la division ravage tout. Finalement, la division en politique est pour moi une énigme.

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