vendredi 29 juillet 2016

Tragi-comique



C'est un fait étrange, souvent confirmé : le comique côtoie la tragédie, pour qui a l'œil et l'oreille. On pleure et on se surprend à rire en même temps, comme lors d'une cérémonie d'enterrement un détail cocasse peut déclencher un malencontreux fou rire. Dans la tragédie qui frappe la France, le comique n'est pas non plus absent. Quelques exemples :

- Cherchez la faille, et non plus "cherchez la femme" : c'est le petit jeu après chaque attentat. A la limite, le mal n'est plus dans ses auteurs, mais chez ceux qui n'ont pas pu empêcher l'attentat. Résultat : la remise en cause permanente des forces de l'ordre, qui font pourtant tout ce qu'elles peuvent, mais n'ont pas encore la capacité à réaliser des miracles. C'est drolatique.

- Le président et le cardinal, descendant l'allée centrale de Notre-Dame, sous les applaudissements et l'agitation d'un drapeau tricolore. Les catholiques ne savent plus se tenir : ont-ils oublié qu'on n'applaudit pas dans une église, qui n'est pas une salle de spectacle ou de meeting ? Quant au drapeau, même à la Libération de Paris, on ne se serait pas permis. Bon, je suis content pour mon Hollande, si impopulaire, et acclamé aujourd'hui par les cathos. Mais, au fait, qu'ont-ils exactement applaudi ?

- La mère du terroriste Petitjean a pris la défense de son fils, "doux", "calme", "bon Français", "pas impliqué". "Je n'ai pas enfanté un monstre", dit la dame. Non, pas un monstre, juste un égorgeur de prêtre. A la suite, un ami de Petitjean confirme : il était contre Daech, il condamnait l'attentat de Nice. On n'ose pas imaginer ce que le terroriste aurait fait s'il était favorable et avait approuvé ! Le responsable de sa mosquée y va aussi de son soutien : Petitjean était "modéré", son comportement était "exemplaire". Là, franchement, nous sommes pris d'un rire à décrocher les étoiles.

- Dalil Boubakeur, recteur de la Grande mosquée de Paris, déclare aujourd'hui à la presse régionale : "Le temps n'est plus à la prière". Je pensais pourtant que c'était la fonction essentielle d'un homme de foi. Les autorités musulmanes invitent leurs ouailles à assister dimanche à la messe, en hommage et en soutien. Je suis favorable à toute manifestation de fraternité, mais pas à la confusion des rites et des symboles (pourtant hélas la marque de notre époque). La divine liturgie est la participation active, par l'eucharistie, au sacrifice du Christ, qui n'a strictement aucun sens pour un musulman. N'y a-t-il pas d'autres moyens de s'associer à la peine des chrétiens que celui-là, qui fait perdre sa signification à la messe catholique ?

- Le FLNC a déclaré la guerre à Daech, pour la sauvegarde de la Corse. "Il faut terroriser les terroristes", disait Pasqua. Il n'avait pas pensé qu'il n'y a pas mieux que des terroristes pour terroriser d'autres terroristes, en l'occurrence les cagoulés, les mitrailleurs, les plastiqueurs du FLNC. L'Etat islamique doit trembler.

- A l'émission "C dans l'air" d'hier, l'animateur a fait une grotesque suggestion : après "Je suis Charlie", "Je suis Paris", "Je suis Nice", pourquoi pas un "Je suis catholique" ? Les sociologues, politologues et spécialistes des religions présents n'ont pas sourcillé. Au contraire, ils ont signalé un petit regain de la foi depuis les attentats. Mais que vaut un engagement spirituel dicté par la peur ou le réflexe identitaire ?

- Tous les hommes politiques sont d'accord : nous sommes en guerre. Mais la question militaire n'est jamais soulevée dans le débat public, où il n'est sujet que de sécurité intérieure et de police. Disons-le brutalement : les attentats cesseront du jour où Daech aura été militairement vaincu. L'Histoire nous l'apprend : avec un tel ennemi, aucune négociation n'est possible, aucune attitude purement défensive n'est concevable (c'est pourtant autour de celle-ci, la protection, que tournent les propositions politiques aujourd'hui). Tant que l'Etat islamique existera, nous serons sous la menace des cinglés qui chez nous s'inspirent de lui. Les médias et nos politiques devraient nous entretenir de la solution géostratégique : alliance avec Poutine, soutien au régime syrien, coalition arabo-occidentale, troupes au sol (jamais un ennemi n'est abattu par les seuls bombardements), tout cela devrait faire l'objet de commentaires, de prises de position. Mais non, rien. Mon avis ? Nous déclarons être en guerre, mais nous ne voulons pas la faire.

Oui, il y a du comique dans tous ces éléments tragiques. Le rire de base, c'est le type qui glisse sur une peau de banane et qui fait nous esclaffer, alors que le gars s'est fait mal. Je pense aussi à Chaplin, à son "Dictateur" : Hitler, grotesque, ridicule, comique dans ses mimiques, ses éructations et pourtant l'un des plus grands criminels du siècle dernier. Remarquez bien qu'il n'y a pas que les grands événements qui soient tragi-comiques, l'existence la plus ordinaire l'est aussi : nous sommes nés pour vivre ... et nous allons mourir. Si ça n'est pas tragique, si ça n'est pas comique !

1 commentaire:

C a dit…

Détrompez-vous, cher professeur, la messe catholique et romaine se décline en deux parties, la première pouvant inclure tout le monde jusqu'au "credo".
A partir de là, il faut être de la religion pour rester au reste du rappel du sacrifice du messie.
C'est ce que j'ai appris en mes jeunes années de catéchisme.